mardi 18 août 2009 - par Francesco Piccinini

Beigbeder, roman sans cocaïne

Un roman français : 280 pages, 60 000 exemplaires réimprimés et une polémique. Le nouvel opus de Frédéric Beigbeder (Grasset, 18 euros) sort aujourd’hui, mardi 18 août. Il a déjà fait parler de lui avant sa parution. Dans la première version reçue par 3000 critiques et libraires l’écrivain attaquait violemment Jean-Claude Marin, procureur de la République de Paris. Son éditeur lui a conseillé de retravailler les quatre pages contenant le passage litigieux. 
 
Frédéric Beigbeder n’aime pas le procureur de la République de Paris. Et il le dit. Ou plutôt il le disait : « Je n’ai pas le droit de dire tout le bien que je pense de Jean-Claude Marin..." écrit-il dans la nouvelle version de son Roman français que son éditeur, Olivier Nora, patron des éditions Grasset, lui a demandé de remanier.
 
Rappel des faits : le 29 janvier 2008 l’ancien fils de pub reconverti dans les lettres est appréhendé par la police sur un trottoir. Il sniffe un rail de coke sur le capot d’une voiture devant une boîte de nuit. S’ensuit un contrôle - positif - des urines et une garde à vue qui dure jusqu’à la journée suivante. L’intéressé ne nie pas les faits, mais reproche au procureur Marin de l’avoir laissé croupir au commissariat du 8ème arrondissement. On le transfert au dépôt à la Cité pour une seconde nuit car, affirme-t-il au Monde « Jean-Claude Marin souhaitait s’entretenir avec lui ». 
 
Or Jean-Claude Marin, selon un témoignage de Laurent Le Mesle, procureur général près la Cour d’appel de Paris, n’est pas responsable de cette garde à vue. Celle-ci d’ailleurs n’a pas été prolongée. « La garde à vue du romancier a en effet été levée au soir de sa première journée, mais, le juge devant lequel il devait être présenté étant absent à cette heure-là, il a dû passer la nuit au fameux "dépôt" de Paris, jusqu’au lendemain matin. D’où, sans doute, la confusion dans son esprit », précise M. Le Mesle.
 
Dans la première version de son roman Beigbeder répète 23 fois en l’espace de trois pages le nom du procureur. Et pas pour en dire du bien ! Exemples : « Jean-Claude Marin ressemble à Alban Ceray (l’acteur porno) mais sa vie est moins rigolote » ; « Jean-Claude Marin ne fait pas la différence entre la fiction et la réalité, entre un personnage de roman et son auteur. C’est pour ça qu’il est dangereux, Jicé. Ce n’est pas un littéraire, c’est un juriste ». Une chose est certaine. Ou deux : Beigbeder ne restera pas dans l’histoire littéraire comme un digne descendant de Bloy, Léon Daudet, Galtier-Boissière ou Jean-Edern Hallier.
 
Enfin Olivier Nora a préféré faire retravailler ces quelques lignes sans grâce ni allure à son poulain qui a les modifié de bonne grâce. "C’est en relisant à tête reposée le livre dans cette version que le caractère provocateur et grinçant de certains passages m’a sauté aux yeux », a expliqué le patron de Grasset sans toutefois préciser si ces passages ont d’abord sauté aux yeux de Jean Veil, son propre avocat, et celui du procureur de la république Jean-Claude Marin... 
 
Un vrai roman français.



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