Blanc
L'illusionniste ou la mégère
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Dans la vaste foire des vanités, ils se pressent tous pour réclamer nos suffrages, usent de tous les stratagèmes pour nous dire qu’ils nous aiment, jusqu’au moment où, bien en place, ils nous oublient pour servir leurs commanditaires et leurs intérêts. Il n’y a aucune exception à la règle ; non qu’ils soient tous mauvais mais parce que ce système corrompt par ses rouages économiques, ses ressorts stratégiques, ses compromissions et toutes les limites qui se dressent devant l’heureux élu. Les vrais pouvoirs sont ailleurs.
Il ne faut pas croire aux promesses : elles ne sont que dialectiques et tactiques ; postures déterminées dans des cabinets où la politique est comprise comme un vaste plan de bataille. Les conseillers sont des stratèges, sortis des écoles de communication. On vend un candidat comme une marque de lessive, pour qu’il lave plus blanc tandis que les électeurs feront des nœuds à leur mouchoir. Celui qui va sortir vainqueur a été choisi par les systèmes financiers et médiatiques ; c’est une illusion séduisante qui a embobiné les midinettes et les vieux barbons. Quel exploit !
Puis, le scrutin terminé, le rinçage sera douche froide et l’essorage purge effroyable. On mettra nos espoirs à sécher sous les rayons de lune ; les beaux draps dans lesquels nous aimions à vivre nos rêves se retrouveront passés, décolorés, laminés par le réel. C’est ainsi à chaque fois, et il en est encore qui se passionnent pour ce combat des ego qui n’a d’autre but que de faire sortir du chapeau le lapin aux plus longues oreilles ! Le plus menteur a toutes les chances …
À côté des candidats promis depuis longtemps à la qualification, la cohorte de leurs rivaux inutiles ne sert qu’à disperser l’électorat, à saupoudrer la campagne de quelques propos différents, de manière à maintenir l’illusion de la diversité. Le seul avantage de ce joyeux éparpillement est qu’il est désormais possible de gagner la partie avec moins d’un cinquième des suffrages possibles. Les grands partis explosent tandis que les autres tombent dans le panneau en essayant vainement de faire entendre leurs différences dans un tohu-bohu qui empêche toute réflexion de fond. Le fond se retire toujours devant la forme dans cette vaste comédie. Dans ce contexte, Macron, parti de nulle part, finira en haut de la plus haute marche, pour corroborer son slogan.
Le dés sont pipés, les cartes biseautées, les jeux sont faits. Les professions de foi ne servent à rien ; seule la tronche du postulant apparaît partout sur les panneaux et les affiches. L’argument unique est la trogne du récipiendaire. Pas étonnant alors que les discours sonnent creux, que les tribuns véritables aient déserté la scène politique. Il ne s’agit pas d’avoir des idées mais un physique agréable. À ce petit jeu, le plus jeune, le plus lisse, le mieux élevé se retrouve naturellement au-dessus du panier.
Madame de Fontenay devrait se pencher sérieusement sur la question. L’élection du Président ou celle de Miss France relève des mêmes ressorts, des mêmes principes. Les postulants doivent se mettre à nu, afficher leur plus beau sourire, séduire sans rien dire. C’est une foire agricole : on tâte la croupe, on flatte l’encolure et on se contente d’un avis, même pas tranché, à défaut d’opinion. Le second tour posera problème entre le sourire émail diamant du banquier et l’air revêche de la fille du légionnaire. L’injonction unanime de toute la classe politique à se ranger derrière le gentil banquier est, à ce titre, plus que suspecte.
L’opinion, d’ailleurs , est la grande perdante de cette furieuse sarabande des présidentielles qui désormais ne cesse jamais. Dès l’élection de Flamby premier, la course à l’échalote était engagée. Les primaires, qui ont brillé par leur totale vacuité, renforcent pourtant cette impression de campagne permanente durant laquelle les sondeurs pensent faire la pluie et le beau temps pour, à chaque fois, se planter lamentablement ; le vainqueur putatif étant, cette fois , désigné d'avance par la classe médiatique, sort magnifiquement en tête du premier chapeau..
Il n’y a plus d’espace pour le débat véritable, pour la réflexion, la constitution d’une pensée collective. Tout doit d’abord passer par le choix du porte-drapeau. C’est comme ça pour les Jeux Olympiques comme pour les élections. Seule la tête est essentielle : celle du chef ou plus rarement de la cheftaine. On ne doit en voir qu'une seule :celle du premier de la file, derrière lequel doivent se ranger tous les autres . La loyauté suppose alors l’absence de contradiction, le muselage des désaccords, le vote bloqué et la discipline de parti. Si bien qu’il n’est personne de plus sot qu’un militant politique ou un élu, contraint de penser selon la ligne de son camp.
Et c’est ce qu’on nous demande de valider en glissant un bulletin dans l’urne après ce premier tour qui a fait la grande lessive ? J’ai mal à mon esprit d’analyse. En choisissant la trombine sympathique, je devrais valider l’ensemble des idées venant de cet être infaillible ? Les expériences précédentes prouvent que l’infaillibilité n’est pas le fort des candidats et que la discipline aveugle de leurs vassaux, fussent-ils nouveaux venus dans le sérail, conduit toujours à la catastrophe.
En repoussant l’hydre fascisante je devrais encore faire étalage de mon sens républicain, de ma capacité à abandonner toute conviction pour faire allégeance à ce pantin dérisoire qui est arrivé en tête. Je n’ai pas envie de choisir ni à éliminer la colère que symbolise ce vote qui ne sera jamais le mien. Le réduire, l’écraser par une victoire spectaculaire de son adversaire, c’est, une nouvelle fois, mettre du sel sur les plaies, attiser la fracture sociale. Entre la Bourse, la dictature libérale, l’Europe d’un côté et la haine, la peur, le mensonge, je ne me prononce pas.
Ce système est obsolète, caduc, inefficace, dépassé, contre-productif. C’est encore pour cette république bananière ou cette monarchie qui ne dit pas son nom, que nous allons nous étriper entre gens de bonne intelligence pour des gens qui en manquent singulièrement. Il est grand temps de mettre un terme à ce jeu de dupes. Le vote blanc s’impose parce que rien de bon ne peut sortir d’une constitution qui a conduit à cette mascarade pitoyable.
Silencieusement vôtre.