mardi 12 juillet 2011 - par Morad EL HATTAB

Grèce : jusqu’où vont nous mener les chants des Sirènes ?

Depuis mai 2010, la Grèce est "sauvée", l’eurozone a lancé un programme de 110 Milliards € dont 30 financés par le Fonds Monétaire International (deux fois plus que pour la Roumanie). Ensuite, les investisseurs, pleinement rassurés, devaient reprendre le droit chemin de l’acquisition de la Dette grecque

Or, un an après, de la dette grecque personne ne veut, un deuxième programme est à l’étude. Les études durent longtemps, les décisions auraient du être prises début juin 2011…

La vérité sort du puits où on l’avait caché : les investisseurs, qui sont surtout des gestionnaires de fonds d’assurance et de fonds de pension ne peuvent professionnellement pas prendre de risque puisque leur mission est, en effet, d’investir sans risques, ils ont donc l’obligation de la peur.

Les investisseurs n’achètent plus de dette grecque, portugaise ou irlandaise. Lorsque les obligations de ces Etats arrivent à échéance, leur "roll over" (renouvellement) est donc assuré par les fonds européens de sauvetage (aujourd’hui le Fonds Européen de Stabilité Financière, à partir de 2013 le Fonds de Stabilité Monétaire).

Ces fonds sont garantis par les pays notés AAA, surtout l’Allemagne et la France. Ces garanties deviendront donc des paiements naturellement aux frais des contribuables. Reste à savoir jusqu’où l’on va aller !

La dette de l’Etat grecque atteint au total 362 Milliards € (y ajouter 150 Milliards € de dette pour le Portugal et 160 Milliards € pour l’Irlande). Or, 172 Milliards € doivent être trouvés uniquement pour la Grèce d’ici 2014. A qui la Grèce doit de l’argent ? Selon Barclays Capital, aux banques européennes pour 162 Milliards €, à la BCE pour près de 60 Milliards €… mais cela laisse, selon le Deutsche Bank de Londres, un "trou" de 140 Milliards € financé par des fonds de pension et des fonds d’investissements divers.

Racheter au fur et à mesure la dette grecque revient donc à substituer les contribuables des pays notés AAA aux banques non seulement françaises ou allemandes mais aussi britanniques et à des fonds d’investissement surtout anglo-saxons.

Le sauvetage de la Grèce coûte déjà cher aux Grecs : une baisse des revenus de 30%, plus de 15% de chômeurs (ce chiffre atteint plus de 35% pour les moins de 25 ans).

Malgré tout, la Grèce a promis de vendre pour 50 Milliards € d’actifs : des ports (avec les dockers), un aéroport ouvert, un aéroport fermé transformé en réserve naturelle, des chemins de fer où les dépenses représentent dix fois les recettes, un marais salant abandonné, il faut y ajouter des terrains à bâtir mais le droit grec de la propriété est déficient. Reste à trouver les acheteurs !

Mais en fait est-ce le sauvetage de la Grèce ? L’Europe semble surtout racheter les créances que les prêteurs ne veulent pas renouveler c’est-à-dire que les contribuables vont payer non seulement pour les banques mais pour près de la moitié pour des fonds d’investissement surtout anglo-saxons.

Quand Angela Merkel devra présenter la note au Bundestag… « Qu’allait-elle faire dans cette galère ? »…elle pourra toujours avouer qu’elle y a été poussée par les Français dont le Président du Directoire de la BCE et le Directeur du FMI.

Comme aimait à dire François Mitterrand : « Les Français sont nombreux à la tête des organisations internationales, on ne mesurera jamais assez cet apport à l’influence de la France… »

Morad EL HATTAB & Irving SILVERSCHMIDT

Auteurs de La Vérité sur la crise (Ed. Léo Scheer)

P.S. : Extrait d’un article de Georges Ugeux (Executive Vice President International du New York Stock Exchange de 1996 a 2003) publié le 10 juillet 2011 et intitulé Agences de notation : la grande hypocrisie des Gouvernements : « Mais surtout, la crise actuelle était prévisible depuis fin 2009. Dès la mi-2010 nous descendions la pente qui mené à la crise. Rien que sur la Grèce, les rendements ont été multipliés par trois et la prime de risque a quadruplé. Tout cela est le résultat d’accords passés entre Nicolas Sarkozy et Angela Merkel sur une plage à Deauville. Ils entreront dans l’histoire comme les dirigeants les plus nocifs de l’histoire de l’Eurozone. »



6 réactions


  • Cug Cug 12 juillet 2011 10:22

    Il a fallu éponger les institutions financières des « subprime » pour sauver le système ...
    A présent, les mêmes institutions doivent êtres sauvées des dettes, obligations, nationales ...

    D’ici le 2 aout, les USA pourront réemprunter et je crois que leur déficit est de 780 M, en gros 70M par mois à financer sur les marchés.
    Les agences de notations ne font ’elles pas en sorte que les « investisseurs » se tournent vers la dette US ?

    Néanmoins le plus simple serait de laisser ces institutions financières faire faillite, elles ont trop prêté et crée de la dette odieuse ...


  • panpan 12 juillet 2011 11:54


    http://www.jovanovic.com/blog.htm

    Descendre au 6ème article (vidéo) : Interview de Claude Reichmann sur Blythe Masters.
    Vous saurez tout ce qui nous attend


  • mac 12 juillet 2011 12:09

    On a tout de même l’impression que nos élites françaises préfèrent sauver la finance internationale dominée par les anglo-saxons et certains de leurs amis plutôt que leur propre pays.
    Il arrive un moment où il faut dire stop à toutes ces grandes entreprises « too big to fail » ( expression qui n’est autre qu’une forme de chantage pour rançonner les contribuables) et qui ne créent pas plus d’emplois et de richesses que l’ensemble de nos PME et artisans. C’est d’ailleurs ces derniers qu’il faudrait protéger en premiers.
    On ne peut pas nous dire, d’un côté, que nos multinationales font la majorité de leur chiffre à l’étranger et que c’est pour cela qu’on ne le taxe pas et ensuite demander aux contribuables de financer des plans de relance pour sauver ces entreprises qui sont françaises que quand ça les arrangent.


  • ak47 12 juillet 2011 13:25

    Avertissement adressé à la Troïka, aux banques et aux investisseurs.

    Date de l’assemblée :

    dimanche 03/07/2011

    Face à l’oppression et au pillage de l’oligarchie financière, l’Assemblée populaire de la Place Syntagma invoque le devoir de résistance inscrit dans sa constitution, exerçant ainsi la pleine souveraineté du peuple alors les autorités légales ont capitulé. Voici le texte de la déclaration adoptée le 3 juillet à Athènes [1] :

    AVERTISSEMENT ADRESSÉ À LA TROÏKA, AUX BANQUES ET AUX SOI-DISANT INVESTISSEURS, LOCAUX OU ÉTRANGERS, QUI FANTASMENT SUR LES BIENS PUBLICS GRECS.

    Un gouvernement grec déchu et dictatorial qui n’est plus représentatif du peuple de ce pays, vient de voter des lois avec lesquelles il a l’intention de brader les biens publics et les territoires grecs, contre la volonté de la grande majorité du peuple grec.

    Nous informons tous ceux qui y distinguent une occasion d’investissement, que nous ne tarderons pas à renverser ce gouvernement, qui sera appelé rapidement à rendre compte de ses crimes devant le peuple et le pays. Les signatures et les lois sont nulles et non avenues. Elles ne sont pas validées par le peuple grec, qui ne les reconnait pas.

    Nous mettons en garde tout soi-disant investisseur, qu’il ne lui vienne pas même à l’esprit de s’approcher de quelque vente aux enchère de nos biens publics ou braderie de nos territoires, et encore moins de penser à les acheter. À part le fait qu’il perdra tout ce qu’il a acheté quand nous retrouverons la souveraineté de notre pays en tant que peuple, les sommes qu’il aura dépensées pour ces achats illégitimes ne lui seront pas remboursées.

    De même nous le prévenons que jusqu’à ce que nous recouvrions le contrôle du pays, dans le cadre de la défense de nos droits tels qu’ils découlent de la constitution grecque (2) mais aussi des droits des peuples et des personnes reconnus internationalement, nous ferons tout ce qui est nécessaire par le biais de notre auto-organisation pour annuler en fait et en acte et pour saboter tous les éventuels investissements de ce type.

    Que nul soi-disant investisseur n’ose faire ses courses dans les biens publics soldés et les territoires bradés en Grèce, sauf s’il se rend compte des hauts risques que courent ses investissements. Dans ce cas, ses investissements seront « bien reçus » dans notre pays, qui, quand son peuple se voit privé de liberté, sait donner naissance à des héros et se livrer à de haut-faits de résistance.(3)

    L’assemblée populaire de la Place Syntagma le 3-7-2011.

    Notes :

    [1] cf. le site des indignés grecs : real-democracy.gr.


    [2] La Constitution grecque adoptée en 1975 après la chute de la dictature des colonels, dispose clairement d’un droit de résistance (article 120) :
    3. L’usurpation, de quelque manière que ce soit, de la souveraineté populaire et des pouvoirs qui en découlent est poursuivie dès le rétablissement du pouvoir légitime, à partir duquel commence à courir la prescription de ce crime.
    4. L’observation de la Constitution est confiée au patriotisme des Hellènes, qui ont le droit et le devoir de résister par tous les moyens à quiconque entreprendrait son abolition par la violence.


    [3] Dans la déclaration originale, ce passage se réfère directement à l’Amiral Constantin Kanaris, héros de la Guerre d’Indépendance de 1821, et au sabotage par la Résistance du pont ferroviaire stratégique de Gorgopotamos durant l’occupation nazie.
     !!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!

  • Ruut Ruut 12 juillet 2011 13:27

    Lorsque la Belgique sera impactée, je retirerais mes billes des banques.


  • BA 12 juillet 2011 23:33
    Un répit était sensible mardi en milieu d’après-midi sur les marchés financiers, grâce aux interventions des autorités politiques et monétaires européennes, désireuses de calmer le jeu et d’éloigner les risques de contagion d’une crise grecque à l’Italie et l’Espagne.

    Après un lundi noir et une matinée très difficile, les marchés financiers se redressaient en milieu d’après-midi profitant de plusieurs interventions de responsables politiques et de celle, sur le terrain, de la Banque Centrale Européenne (BCE).

    Comme elle l’a déjà fait par le passé, l’institution de Francfort a acheté, selon des sources de marché, d’importantes quantités d’obligations espagnoles et italiennes pour pallier les ventes massives des investisseurs.



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