mercredi 9 août 2017 - par William Kergroach

Après les militaires, les salafistes achèvent de détruire le Nigéria

Le pays le plus peuplé d'Afrique (167 millions d'habitants) est en train de se fracasser, miné par ses divisions ethniques et religieuses. Le pétrole n'a permis que l'enrichissement, et la corruption, des dirigeants. L'histoire du pays est faite de violence, allant d'un coup d'état militaire à l'autre. Depuis une dizaine d'années, le mouvement musulman salafiste, Boko Haram, mine la cohésion nationale par ses attentats incessants. Le Nigéria, connu depuis trop longtemps pour son instabilité, arrive peut-être à son terme.

Le général Muhammadu Buhari a été élu président en mars 2015. L'homme n'est pas un inconnu sur la scène politique nigériane : après avoir renversé le président démocratiquement élu Shehu Shagari, en 1983, Buhari a dirigé un régime militaire répressif, renversé lui-même, deux ans plus tard, par le général Ibrahim Babangida... M. Buhari jure maintenant s'être converti à la démocratie.

La presse nigériane reste très dynamique, chacun défendant son ethnie. Les journaux, les télés et les radios abondent, les jeunes nigérians éduqués surfent sur les réseaux sociaux. Mais le gouvernement d'Abuja garde ses vieilles habitudes et continue d'intimider les journalistes trop incisifs. Il n'est pas le seul. Boko Haram a posé des bombes dans les bureaux de plusieurs journaux à Abuja et à Kaduna, en avril 2012. La radicalisation de la composante musulmane du pays pèse sur l'avenir du Nigéria.

 

Les premiers grands royaumes africains (le Bénin méridional, les dynasties Borno et rois Oyo) se forment au 11e siècle ; les Portugais arrivent dans le pays en 1472. Le commerce d'esclaves prend son essor à partir du 16e siècle, les esclaves partent pour les Amériques.

Le califat musulman Sokoto est fondé, au nord du territoire, au début du 19e siècle. Les britanniques commencent par établir un comptoir autour de Lagos en 1850, le transformant peu à peu en protectorat, agrandi par l'ajout d'une partie de l'ancienne colonie allemande du Cameroun en 1922.

Le Nigéria obtient son indépendance en 1960, Sir Abubakar Tafawa Balewa dirige le premier gouvernement mais est tué au cours d'un coup d'état dirigé par le major-général Johnson Aguiyi-Ironsi (janvier 1966), lui-même tué par un autre coup d'état dirigé par le lieutenant-colonel Yakubu Gowon, en juillet de la même année 1966.

Le 30 mai 1967, le colonel Emeka Ojukwu, gouverneur militaire de la région orientale, déclare l'indépendance des trois provinces de l'est du pays, qui correspondent aux territoires du peuple Ibo. Il proclame la République du Biafra. Le Biafra est riche en pétrole. Ojukwu espère pouvoir en retirer les revenus permettant l'autonomie de son peuple. Mais le gouvernement de Lagos n'accepte pas de se priver de la manne pétrolière. Environ un million de civils biafrais sont réduits à la famine par le blocus organisé par le gouvernement militaire nigérian, avec le soutien de la Grande-Bretagne. L'ancienne puissance coloniale craint, qu'en cas de victoire du Biafra, les compagnies britanniques perdent leur privilège d'exploitation. Londres livre donc, avec Moscou qui augmente son influence dans la région, des armes et des conseillers au gouvernement nigérian du général Yakubu Gowon. Seule, la France, à travers la Côte d'Ivoire et le Gabon, aide timidement les Biafrais, trop heureuse d'affaiblir ce grand état anglophone en Afrique de l'ouest.

Mais les Biafrais s'effondrent bientôt, écrasés par la coalition militaire et affamés par le blocus. En janvier 1970, le Biafra capitule. Le colonel Ojukwu s'enfuit chez ses alliés de Côte d'Ivoire. Un million de civils biafrais ont été tués par les combats et la famine.

 

Cinq ans après, le général Gowon est renversé par le brigadier Murtala Ramat Mohammed. Celui-ci décide, pour satisfaire les musulmans, le transfert de la capitale de Lagos, Yoruba et chrétienne, vers Abuja, située dans une région peu peuplée. Le parlement y est transféré en 1987, la ville ne devient capitale qu'en 1991. Mais la ville n'a aucun des attraits de Lagos et reste une capitale administrative.

Murtala Ramat Mohammed finit lui-même assassiné, en 1976, par son propre adjoint, le Lieutenant-Général Olusegun Obasanjo

Les élections générales de 1979 amènent Alhaji Shehu Shagari au pouvoir. Il est réélu en août 1983, par la fraude. Mais son deuxième mandat sera court. Il est renversé, en effet, quelques mois plus tard, en décembre, par le Major-Général Muhammad Buhari qui prend le pouvoir au cours d'un sanglant coup d'état. Buhari reste célèbre pour avoir mis en place la législation la plus répressive de l'histoire du pays contre la presse. On retient également de son régime les lois de moralisation de la société nigériane, connues sous l'acronyme WAI (War Against Indiscipline), dont on retient les coups de fouet dispensés aux citoyens « indisciplinés », les peines de plusieurs années de prison (jusqu'à 21 ans) contre les étudiants qui trichent aux examens, l'humiliation publique des fonctionnaires retardataires qui doivent parcourir une distance en sautant comme des grenouilles, etc. Au-delà du sourire, le régime de Buhari emprisonne plusieurs centaines d'hommes politiques, de fonctionnaires et d'hommes d'affaires, dont l'ancien candidat à la présidentielle, le chanteur et musicien Fela, qui ne doit sa libération, dix-huit mois plus tard, qu'au nouveau coup d'état, tout aussi sanglant, d'Ibrahim Babangida qui chasse Buhari.

En juin 1993, Moshood Abiola remporte les élections, mais le général Sani Abacha le renverse et prend le pouvoir dès novembre. Pendant le régime d'Abacha, les Ogoni, peuple de la région du delta (riche en pétrole) réclament leur autonomie. La répression est brutale, plusieurs personnes sont exécutées, dont l'écrivain et porte-parole ogoni, Ken Saro-Wiwa. Le dictateur Abacha meurt de maladie en juin 1998, à 54 ans. Il est remplacé par le général Abdulsalami Abubakar. Moshood Abiola, le vainqueur des élections de 1993, est maintenu en prison et meurt, en détention, un mois après son bourreau, Abacha.

En 1999, Olusegun Obasanjo est élu président, met en place une commission d'enquête sur les crimes commis pendant le régime du général Abacha. Malheureusement, la démocratie redécouverte s'accompagne, dès l'année 2000, par l'adoption de la charia, la loi islamique, dans plusieurs États du Nord du Nigéria. Les combats entre chrétiens et musulmans provoquent des centaines de morts. Ce drame s'accompagne d'une guerre tribale, l'année suivante, dans l'État de Benue, dans le centre du Nigéria. Plusieurs milliers de personnes fuient leurs villages. Les troupes gouvernementales, censées venues pacifier la région, tuent plus de 200 civils, en représailles du meurtre de 19 soldats. En février 2002, une centaine de personnes sont tuées à Lagos lors d'affrontements entre musulmans Hausas et Yorubas chrétiens. L'élection de Miss World, programmée à Kaduna en décembre 2002, provoque la colère des musulmans. Plusieurs centaines de personnes sont tuées au cours des émeutes, forçant les organisateurs à fuir en Grande-Bretagne.

Le Parti démocratique populaire du président Obasanjo est réélu le 12 avril 2003, toujours grâce à la fraude massive. L'état d'urgence est déclaré en 2004 dans l'État du plateau central, les affrontements entre musulmans et chétiens, y font des centaines de morts. Les troubles s'étendent dans tout le pays, dans la ville pétrolière de Port Harcourt notamment, et dans le Delta du Niger où les pipelines sont sabotés et les étrangers travaillant dans l'industrie du pétrole attaqués.

 

Le Parti démocratique du peuple remporte de nouveau les élections présidentielles d'avril 2007, toujours selon les même méthodes. Le successeur désigné d'Olusegun Obasanjo, Umaru Yar'Adua, est installé au pouvoir. Sa principale qualité est d'être le frère de Shehu Musa Yar'Ada, ancien général devenu millionnaire, ami du président Olusegun Obasanjo. Quand Umaru Yar'Adua meurt, de complications cardiaques, en 2010, l'intérim de la présidence est assuré par le vice-président Goodluck Jonathan, qui reprend la suite au fauteuil présidentiel mais perd les élections de 2015, devant l'omniprésent Muhammadu Buhari, l'auteur du coup d'état de 1983. Le pays est, depuis, en guerre contre Boko Haram.

Buhari, connu pour ses méthodes expéditives, semble avoir été en mesure de rassurer ses électeurs face à la stratégie de la terreur menée par les djihadistes de Boko Haram. Mais on peut s'interroger sur le futur d'un trop grand pays, dont les frontières héritées du passé colonial, ont cru pouvoir ignorer l'importance des questions ethniques et religieuses sur le continent noir.

 



20 réactions


  • microf 9 août 2017 12:16

    @ A l´auteur William Kergroach,

    Bonjour,

    C´est avec un intérêt que j´ai lu votre article, c´est très bien de s´intérèsser á l´histoire.
    Mais ce qui m´a beaucoup frappé, c´est que vous avez omis d´écrire la vraie histoire de certaines périodes de l´histoire de ce pays, le Nigéria.
    Vous l´avez fait soit parceque vous ne connaissez pas, soit parceque vous l´avez certainement oublié, il faut toujours donner le bénéficie du doute á l´autre, je le fais pour vous.
    Si c´était les cas que vous ne connaissez pas ou que vous auriez oublié, alors, je vous prierai de faire des recherches plus approfondies que vous trouverez facilement dans le net, et de réecrire certaines périodes de cette histoire comme elle s´est déroulée, et de republier cet article.

    Prenons la guerre du Biafra, cette guerre a été instiguée par la France á cause du pétrole, renseignez vous, vous le saurez.
    C´est la France du général de Gaule avec son sinistre Jacques Foccard les deux Grands Maitres de la Francafrique, qui en portent l´entière responsabilité des millions de morts de cette guerre horrible.
    Cette guerra a été perdue parceque le Cameroun qui á l´époque avait un Président visonnaire, qui avait refusé que les armes que la France envoyait au Biafra, transite par le Cameroun qui a une frontière avec cette zone du Biafra, et comme par hazard, vous ne mentionnez pas le Cameroun, qui a une frontière avec le Nigéria, mais le Gabon et la Côte d´Ivoire, soutiens inconditionnels jusqu´á aujourd´hui, et tête de pont de la France en Afrique, d´ailleurs, ce n´est pas par hazard que lorsque Ojukwu perd cette guerre, il ira non pas au Cameroun comme on se serait attendu, mais en Côte d´Ivoire en exil.
    Voila la réalité qui ne fallait pas ometre d´écrire, faites des recherches, vous verrez que ce que j´écris, est vrai.

    Pour ce qui est de la région du Delta oú les pipes lines sont sabotés, il fallait lá aussi faire des recherches. Les pipes lines sont sabotés parceque Les sociétés pétrolières Multinationales qui exploitent le pétrole, poluent cette région, car elles ne respectent pas les normes environnementales. Les habitants de ces régions vivent de la pêche et de l´agriculture, non seulement ne recoivent rien des revenus du pétrole, mais sont victimes de la pollution suite á l´extraction du pétrole par ces Multinationales qui ne respectent pas les normes environnementales, fait que leurs moyens de subsistances sont aujourd´hui nulles et ces populations vivent aujourd´hui dans un dénuement á la Germinal, même dans le net, vous trouverez les sujets á cette question.
    Je ne sais pas si vous avez été au Nigéria, moi j´y ait été plusieurs fois, et je connais.

    Pour ce qui est de Boko Haram, on retrouve encore la France, plus de 40% des armes saisies á Boko Haram, sont de fabrications Francaises, comment les armes Francaises arrivent lá bas ?, il faudra le demander á la France.
    Faites aussi des recherches á ce sujet, vous trouverez toutes les informations.

    Merci, bonnes recherches et bonne journée.


  • zak5 zak5 9 août 2017 12:53

    Le pays le plus peuplé d’Afrique (167 millions d’habitants)


    Selon les projetions, en 2050, il passera à 400 millions d’habitants, soit le troisième pays le plus peuplé du monde


    • zygzornifle zygzornifle 9 août 2017 14:09

      @zak5
       

      bah en 2050 il seront quelques dizaines de millions voire plus a migrer en Europe .....

    • microf 9 août 2017 15:24

      @zak5

      En 2050, il aura très peu d´Africains.
      L´espérance de vie aujourd´hui en Afrique est entre 60 ans pour les pays Africains les plus nantis et de 30 ans pour les pays comme la République Centrafricaine ou le Niger qui sont pourtant les pays les plus riches en matières premières de toutes sortes, Or, diamants, uranium, pétrole, bois précieux, etc,etc, etc...

      En 2050 á cause des difficultés, guerres, sècheresse et autres catastrophes telles la faim, cette espérance de vie des Africains sera divisée par deux, et ne sera plus que de 30 ans pour les pays les plus nantis d´Afrique et de 0 pour les pays comme la République Centrafricaine ou le Niger.
      Alors ne vous en faites il y aura de moins en moins d´Africains si l´actuel système mondial continue, car á peine nés, les Africains n´auront pas le temps de grandir, ils vont mourrir en très bas âge, car n´ayant rien á manger, et comme l´Europe entretemps aura mis des barbellés et fortifié son continent, ces Africains ne pourrons plus entrer, et aussi comme cet Europe ne va rien donner á manger á l´Afrique, les quelques ayant survécus, mourront comme des mouches.


    • zak5 zak5 9 août 2017 20:16
      @zygzorniflebah en 2050 il seront quelques dizaines de millions voire plus a migrer en Europe .....


      sans doute oui, mais parce que les européens ne font pas de gosses, on ne peut pas avoir le beurre et l’argent du beurre

  • zygzornifle zygzornifle 9 août 2017 14:08

    Ha bon ? il restait encore quelque chose a détruire après le passage des militaires ? ils perdent la main les bidasses .....


  • sls0 sls0 9 août 2017 14:46

    Un pays avec du pétrole, le chaos n’empêche pas l’extraction et permet de plus gros bénéfices.

    Pour d’autres pays avec du pétrole la démocratie made in USA amène aussi le chaos.

    • zygzornifle zygzornifle 9 août 2017 15:04

      @sls0
       c’est sur que les sites d’extraction seront hyper protégés et même la France sera capable d’y envoyer des hommes ....


  • baleti baleti 9 août 2017 16:31

    les méthodes de la France et de l’Angleterre, pour coloniser et surtout pour les conserver, étais différente.
    C’est surement cette différence, qui étais en réalité de la concurrence, qui a fait le plus de dégas

    sa me fait rire les leçons de moral de la France, au turk, au chinois, ect.......

    L’hypocrisie dans sa splendeur

    on oublie la colonisation monétaire par le franc cfa.


    • zak5 zak5 9 août 2017 20:14
      @baleti
      on oublie la colonisation monétaire par le franc cfa.

      allez dire ça aux sénégalais, surtout si vous êtes algérien, monnaie nationale mais monnaie de singe

    • zak5 zak5 9 août 2017 20:21
      @zak5
      j’ajouterais : je suis allé au sénégale, pas un seul sénégalais m’a proposé de changer mes devises au noir, je retirais mes F CFA dans les distributeurs de billet. En Algérie, des que vous sortez de l’aéroport, la première chose que vous demande ceux qui vous accueille (famille, copains...) c’est si vous voulez changer vos devise au noir

      ce genre de fierté nationale de façade, je vous la laisse

    • baleti baleti 10 août 2017 02:10

      @zak5

      Il y a plusieurs façon d’asservir une population

      pourquoi la France devrai avoir des billes dans l’économie sénégalaise et autre.
      Qu’elle dédomage ces millier de tirailleur, qui on combattue et sont mort et enterrer ou bruler en terre inconnue, en Allemagne, Indochine ...... pour des intérêt français.

      Arête de t’entêter a justifier, l’injustifiable, aucun argument preuve te donner raison.


    • zak5 zak5 10 août 2017 07:22

      @baleti
      Les tirailleurs sénégalais ont combattu le nazisme parce qu’ils étaient consternés, le nazisme considéraient les noirs comme des animaux et le Sénégal n’était pas a l’abri d’une occupation allemande . Arrêtes de parler pour les sénégalais, tu a l’air de dire qu’ils ont participé a la défaite de Hitler que parce qu’ils étaient forcés de le faire. Tu peux nous parler Mohammed Amine El-husein si tu veux.


    • zak5 zak5 10 août 2017 11:27

      @zak5
      parce qu’ils étaient concernés

      faut peut etre arrêter de dire que les africains étaient obligés d’aller se battre contre le nazisme. Ou alors il ne faut pas venir se prévaloir d’avoir participer a la défaite du nazisme. Quand on est obligé de faire quelque chose, on ne peur pas se glorifié de l’avoir fait. Quelque chose qui est fait contre la volonté n’est jamais une chose sincère
       


    • baleti baleti 10 août 2017 12:34

      @zak5

      T’a pas peur du ridicule

      Disons qu’ils y soient aller de leur plein gré, qu’on leur donne leur indemnisation d’ancien combattant .......
      Et pourquoi ceux qui on braver se parcourt administratif, n’aurai droit qu’a un tier de la somme verser au français ?

      Au faite et en Indochine, les africain étais concerner ?
      Par ce que la major partie on eu droit a un aller simple, et ceux qui sont revenue, sont mort sans avoir eu leur indemnité de blesser et autre.
      Le pire, c’est qu’une fois mort il et surtout leur famille n’ont plus droit a rien,c’est pas les même réglé pour les français


  • Pseudo 9 août 2017 21:37

    Les salafistes sont financés par l’arabie séoudite !


  • baleti baleti 10 août 2017 16:52

    la France et sa politique au Nigeria et en Afrique en général, a fait plus de 10 million de mort.
    On ne parlera pas des tortures, par se que les français en général, n’y croiront pas.

    les djihadiste son des guignole a coté

    Les français doivent connaitre leur histoire, mais surtout s"en rappeler, et arrêter de faire la moral a qui que se soit..


Réagir