mardi 21 octobre 2014 - par Eliane Jacquot

HONG KONG, Octobre 2014, un duel à la David contre Goliath ?

De jeunes militants pro-démocrates occupent, sur l’île de Hong Kong, le quartier d'affaires « Central » de ce pôle économique et financier mondial, avec pour seule arme des parapluies, devenus le symbole pacifique de cette protestation contre la République de Chine Populaire.

Ils dénoncent la main-mise de Pékin sur l'exécutif local, dix sept ans après la rétrocession de cette ex colonie britannique à la Chine sous la forme d'une région administrative spéciale( RAS).

Cet éveil de toute une génération à la politique au travers d'un mouvement pacifique dont l'avenir reste incertain, apparaît à mon sens comme une crise majeure, en raison d'un risque de propagation de ces revendications dans d'autres régions de la République chinoise.

Les enjeux politiques

C'est en 1984 que Margaret Thatcher, premier ministre britannique et son homologue chinois Zhao Ziyang signèrent la déclaration conjointe, prononçant le changement de souveraineté de Hong Kong le 30 Juin 1997.

C'est ainsi que la RAS est placée sous l'autorité du gouvernement central à Pékin, mais bénéficie d'un haut degré d'autonomie, sauf dans les domaines touchant aux affaires étrangères et de défense.

-La RAS est investie de pouvoirs exécutifs et législatifs, et d'un pouvoir judiciaire indépendant.

-Le gouvernement est composé d'habitants de Hong Kong, ainsi que le maintien de l'ordre public.

-Le système économique et social jusqu'alors en vigueur reste inchangé, les droits et les libertés étant protégés par la loi.

-La RAS garde son statut de port franc, et de centre financier international.

-La RAS peut établir des liens économiques et culturels avec d'autres pays.(...)

Ces règles devraient demeurer inchangées pendant cinquante ans.

Ce schéma qualifié « un pays, deux systèmes », imaginé par le dirigeant Deng Xiaoping, n'a pas résisté à l'épreuve du temps.En effet, dès 2004, le chef de l'exécutif n'est plus élu au suffrage universel ( mandat de 5 ans). Pour l'élection de 2017, les autorités chinoises veulent mettre en place un filtrage des candidats sous la forme « d'une personne qui aime le pays et Hong Kong... », seuls deux ou trois candidats sélectionnés par le Parti communiste chinois, auront le droit de se présenter, neutralisant ainsi tous les opposants potentiels.

On assiste alors dès le mois de Janvier 2013, à la structuration du mouvement démocratique sous la forme d' « Occupy Central », le chef de file étant un professeur de droit à l'université, Benny Tai. Depuis cet appel, la mobilisation des jeunes démocrates ne se dément pas. Face à Pékin qui durcit le ton, Benny Tai souhaite impulser « une ère de désobéissance civile », le 31 Août 2014, donnant l'impulsion à un mouvement lancé par des organisations étudiantes et des lycéens, trois jours avant la fête nationale chinoise du 1er Octobre.

Le pacifisme et la grande civilité observés chez ces jeunes manifestants face aux autorités de police viennent de la culture hongkongaise, et leurs aspirations à la démocratie, à la liberté et à la justice, symbolisés par un ruban jaune, et des parapluies, emblèmes de la résistance au plus fort, sont enracinées dans leur esprit.

Les enjeux économiques et stratégiques

L'ancienne concession britannique reste une plate forme majeure, de par son économie libérale et son régime fiscal très attractif pour attirer les capitaux étrangers vers la Chine, qui en 2014 est devenue la deuxième puissance économique mondiale.

C'est à Central, en front de mer de l'Ile de Hong Kong, que l'on trouve le quartier des affaires avec ses tours vertigineuses construites dans les années 1980, dont celles de la Bank of China, et sa voisine qui abrite le siège social de la banque HSBC.

Soulignons ici que, fiscalement, la grande souplesse de la constitution d'une société hongkongaise offre la possibilité de l'utiliser comme société offshore, sans y développer d'activité. D'autre part, en vertu du principe de territorialité, le taux d'imposition est de 0 % sur les bénéfices réalisés hors de Hong Kong,et de 17,5 % sur les bénéfices réalisés sur le territoire, un taux très en dessous de la moyenne mondiale.

Depuis toujours, le port franc est le véritable poumon économique du territoire. Mais la croissance économique spectaculaire de la Chine au cours des deux dernières décennies ont conduit Shanghai à devenir le premier port mondial de trafic en containers, devant Hong Kong et Shenzhen, ville sortie des marais, il y a seulement 30ans. La Chine est ainsi devenue le premier acteur portuaire au monde, affichant ses ambitions dans toute la Mer de Chine Méridionale.

De par le poids de ses échanges extérieurs, Hong Kong se classe en 2013 parmi les 10 premiers contributeurs au commerce mondial, sans commune mesure avec la taille de son économie, plus de la moitié de son transit se tournant vers la Chine.

Le chef de l'exécutif CY Leung a annoncé le lancement au cours de l'année 2014 de négociations pour un accord de libre-échange entre Hong Kong et les 10 pays membres de l'ASEAN ( 1)

 

Pékin table-t-il sur cette grande attractivité et ces considérables avantages compétitifs de Hong Kong(2) pour faire taire les aspirations démocratiques de la population ? Le porte parole du ministère chinois des Affaires étrangères Hong Lei a exhorté à plusieurs reprises au cours de la semaine dernière les pays étrangers, et le Royaume-Uni en particulier à ne pas intervenir dans les affaires de Hong Kong et à se garder de soutenir les activités d'Occupy Central. Dans la nuit de samedi à dimanche, des dizaines de policiers ont une fois encore chargé un groupe de protestataires à Mongkok, l'un des trois sites encore occupés par les étudiants.

(1) : Brunei, Cambodge, Indonésie, Laos, Malaisie, Myanmar, Philippines, Singapour, Thaïlande, Vietnam.

(2)HK : 7,3 Millions d'habitants, une croissance de 3 % par an et un PIB par hab de 40300$

CHINE : 1,3 Milliards d'habitants, une croissance de 7,5 % par an et un PIB par hab de 7572$



17 réactions


  • Jelena XCII 21 octobre 2014 10:48

    >> leurs aspirations à la démocratie
     
    Pas de problème, on leur envoi toute la clique UMPS par colis express.


  • Flip-flop Flip-flop 21 octobre 2014 10:51

    « la main-mise de Pékin sur l’exécutif local, » ?????????????
    Hong Kong territoire chinois, comparer Mayotte, territoire occupé selon la résolution de l’ONU 3385, Mayotte annexé illégalement par la France comme la Crimée. c’est condamnable.

    le mouvement d’étudiant à Hong Kong n’a que 20 milles personnes, représent que 0.5% de la population de Hong Kong. voila votre notion de démocratie.


  • howahkan Hotah 21 octobre 2014 10:52

    bon article neocons.............
    vive la liberté..mon jeune ami,fait moi confiance vote pour mous on s’occupe du reste ,tu aura tout à profusion,sans limites, tu es un dieu,tu le mérites...avec un peu de chance tu ne mourras jamais..alors évidemment ceux qui n’ont plus de cerveau se disent : c’est bon pour moi....moi, moi ,moi ,moi ....j’ai les mêmes à la maison ,je fais comme les chinois, je les ai maté,ferme mais compassionnel, ,et depuis ils vont bien dans leur têtes...si si..
    si ils continuent ils seront des humains...

    les chinois ont aussi leurs cohn bendit....

    y a pas de raisons.......qu’ils ne soient pas eux aussi dans la meme merde totale que nous...

    car il y a un pays à sauver de la ruine les us...........

    moi je vote contre mais bon ::


  • Renaud Delaporte Renaud Delaporte 21 octobre 2014 14:18

    Le pacifisme et la grande civilité observés chez ces jeunes manifestants face aux autorités de police viennent de la culture hongkongaise, et leurs aspirations à la démocratie, à la liberté et à la justice, symbolisés par un ruban jaune, et des parapluies, emblèmes de la résistance au plus fort, sont enracinées dans leur esprit.

    C’est bôôô comme la rosée fraiche dans le ciel diaphane des matins calmes. Si si. Je sens que je vais verser une grosse larme de crocodile.
    Parce que, par les temps qui courent, nul n’est mieux placé que le crocodile pour percevoir les effets favorables de la démocratie. En observant ce que sont devenus tous les pays touchés par ces soulèvements financiers organisés par Wall-Street, qui reconnait cyniquement en être l’auteur, seul notre cerveau reptilien, copieusement rassasié par la saturation de nos besoins physiologiques, peut encore s’accommoder de ce genre de propagande.

    Dans les esprits, c’est au contraire la mort de la démocratie, dont nous avons reçu le faire-part, qui étend son ombre mortifère.


  • Flip-flop Flip-flop 21 octobre 2014 17:59

    seule la dictature qui triomphe partout un jour, la démocratie est une hypocrisie de l’occident


  • sls0 sls0 21 octobre 2014 18:54

    Si je me base sur cet article malheureusement en anglais (mais google traduction est là)
    Les USA sont derrière, comme il y a les sources ou preuves qui vont avec les affirmations ça me plait.
    La NED en Ukraine, à Hong Kong et bien d’autre pays, c’est une sacré puissance de démocratie ou malignité (barrer la notion inutile) qu’ils ont.

    Nota : Le lien pour l’article est russe mais la plupart des contributeurs ne sont pas russes. Si 20 ans en arrière on m’aurait dit que la liberté de la presse était en Russie ça m’aurait fait rigoler. Maintenant je rigole plus, pour être entendu à l’ouest il faut passer par l’est.


  • filo... 21 octobre 2014 20:12

    @l’auteure
    Votre article c’est du délire !


  • Eliane Jacquot Eliane Jacquot 22 octobre 2014 14:47

    Bonjour à toutes et à tous :


    Très étonnée par la virulence des propos à mon encontre, je voudrais informer mes détracteurs des points ci-après qui me paraissent essentiels au niveau du débat démocratique :

    (1)/(2) :Hong Kong tout comme Singapour en Asie du Sud -Est est resté un paradis fiscal, faisant partie d’après le classement Forbes , du Top 10 des paradis fiscaux de par le monde  :

    En tant que centre financier asiatique, la zone franche séduit aussi bien les entreprises multinationales , que les entrepreneurs du monde entier, attirés par les opportunités économiques et le laxisme de la politique fiscale locale.La grande souplesse de la constitution d’une société hongkongaise offre la possibilité de l’utiliser comme société offshore , sans y développer d’activité. D’autre part, en vertu du principe de territorialité, le taux d’imposition est de 0 % sur les bénéfices réalisés hors de Hong Kong,et de 17,5 % sur les bénéfices réalisés sur le territoire, un taux très en dessous de la moyenne mondiale.Par ailleurs , la ville respecte le secret bancaire de manière stricte, ce qui permet à des entreprises de s’y maintenir en toute confidentialité.

    Enfin, l’OCDE a menacé de mettre Hong Kong sur la liste noire des pays non coopératifs en matière fiscale .On est pleinement ici dans le schéma qualifié « un pays, deux systèmes », imaginé par le dirigeant Deng Xiaoping .



    • Pere Plexe Pere Plexe 22 octobre 2014 18:45

      Quel(s) rapport(s) avec le sujet ?
      J’aurais aimér pouvoir lire quel étais précisément le projet électoral dénoncé par les manifestants.
      Je veux bien croire qu’il est anti démocratique,mais l’est il plus que le système archaique qui aux états unis sert à élire le Président ?


  • Eliane Jacquot Eliane Jacquot 22 octobre 2014 14:49

    (2)/(2)
    - Le point de vue de Barthélémy Courmont, chercheur associé à l’IRIS et rédacteur en chef de Monde chinois, nouvelle Asie :

    Nous sommes en 2014. La Chine est la deuxième puissance économique mondiale, sa population voyage – y-compris à Taiwan depuis 2008, et où les touristes chinois découvrent par millions la réalité d’une société démocratique, qui plus est dans leur langue ! – et c’est en Chine qu’on compte le plus grand nombre d’internautes. Certes le réseau est fortement surveillé (ce qui au passage montre bien à quel point la question est prise au sérieux par l’Etat-parti), en particulier à l’occasion de commémorations symboliques comme le 4 juin ou lors de mouvements comme celui des parapluies à Hong Kong ou des tournesols à Taiwan, mais l’information passe malgré tout dans des proportions infiniment supérieures à ce qui était possible il y a une génération, et génère bon nombre de débats. Les Chinois, les jeunes en particulier, s’interrogent sur la démocratie, sur la course au profit dans laquelle leur « système », pour reprendre ce critère, les emprisonne, et sur un exemple de démocratie chinoise qu’ils suivent de près : Taiwan. Sur cette base, et parce qu’il s’agit cette fois d’un territoire que Pékin contrôle vraiment, ce qui n’est pas le cas de Taiwan, il est hautement probable que le mouvement des parapluies de Hong-Kong aura des répercussions importantes en Chine, même s’il est encore impossible de savoir dans quelles proportions.

    http://www.affaires-strategiques.info/spip.php?article10086

    Je vous remercie de votre attention,


    • Pere Plexe Pere Plexe 22 octobre 2014 18:58

      " la course au profit dans laquelle leur « système », pour reprendre ce critère, les emprisonne« 
      Beaucoup font exactement le même reproche au »système" capitaliste tel qu’ils le vivent.
      Même si je ne doute pas que les excès coté chinois sont terrible,ils ne doivent pas faire oublier que d’autres pays aux politiques bien différentes connaissent les mêmes dérives...sans que l’on en impute la responsabilité à l’organisation politique.


  • Eliane Jacquot Eliane Jacquot 23 octobre 2014 15:31

    @Par Pere Plexe


    Bonjour,

    Je vais essayer de répondre à vos interrogations :

    « J’aurais aimé pouvoir lire quel étais précisément le projet électoral dénoncé par les manifestants »

    Le débat qui a donné lieu au mouvement « Occupy Central »engagé en Janvier 2013 est cristallisé par l’interprétation d’un article de la loi fondamentale au niveau de la nomination du nouveau chef de l’exécutif en 2017, devant être élu au suffrage universel. Or, la position de Pékin est actuellement la suivante : « Le chef de l’exécutif doit être une personne qui aime le pays et Hong Kong...C’est une exigence de base de la politique du « un pays , deux systèmes »( South China Morning Post , 10 Juin 2014).

    Vous pouvez aussi lire dans mon texte :

    « Pour l’élection de 2017, les autorités chinoises veulent mettre en place un filtrage des candidats sous la forme « d’une personne qui aime le pays et Hong Kong... »,seuls deux ou trois candidats sélectionnés par le Parti communiste chinois, auront le droit de se présenter, neutralisant ainsi tous les opposants potentiels. »

    Je vous remercie de m’avoir lue,


    • lsga lsga 23 octobre 2014 15:47

      Certes. Mais le vais message de toutes ces manifs au niveau mondial est : « Renversons les 1% ! »


    • Pere Plexe Pere Plexe 23 octobre 2014 17:51

      Je connaissais cette formule mais croyais que s’était une simplification journalistique.


    • lsga lsga 23 octobre 2014 19:04

      Karl Marx expliquait clairement dès le 19ème siècle que la seule revendication qui vaille pour un mouvement ouvrier est : « Renversement de la bourgeoisie ».


      Le mouvement des 99%, précisément car il n’a pas d’autre revendication, est authentiquement révolutionnaire. 

      Bien sûr, le mouvement de HK est plus soft, c’est parce que le Capitalisme de HK est moins avancé que celui des USA. Mais ça ne saurait tarder. 

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