Ils ont donc tout perdu !
Ce quinquennat enfin terminé, les principaux partis du pays ne peuvent faire qu’un seul constat : ils ont tout perdu... ou presque !
C’est le constat que faisait Stéphane Le Foll, sur l’antenne de France Inter, interviewé par Patrick Cohen, le 15 mai dernier.
Le PS a en effet pratiquement tout perdu : sa présence au 2ème tour, et par conséquent la présidence de la république, mais aussi un grand nombre de municipalités, de départements, de régions, le Sénat, et fatalement un grand nombre d’adhérents. lien
En 10 ans, le Parti Socialiste a perdu les 2/3 de ses adhérents, et en date d’avril 2016, ils n’étaient plus que 100 000. lien
Les promesses non tenues de l’ex président n’y sont probablement pas étrangères.
Constat réaliste et cruel alors que Hollande n’a pas hésité à assurer « j’ai laissé un pays dans un état bien meilleur que celui que j’ai trouvé »... lien
Propos quasi surréaliste, quand on voit l’augmentation du nombre de chômeurs, près de 600 000 de plus, depuis le début de son mandat. lien
Arrivent maintenant les législatives, et le PS va finalement découvrir qu’en lâchant en rase campagne leur candidat, pourtant légitimement choisi, il s’est tiré une balle dans le pied, passant de justesse le seuil fatal des 5%...
Si, par malheur pour eux, lors des législatives, les socialistes ne passaient pas la barre des 20%, seuil nécessaire pour jouer le deuxième tour, ils se retrouveraient dans une impasse : soit donner leurs voix au président nouvellement élu, soit les donner aux insoumis, ces insoumis dont l’animateur a déclaré récemment qu’il ne voulait pas affaiblir le PS, mais seulement le remplacer. lien
Leur malheureux candidat, Benoit Hamon en l’occurrence, prétend ne pas baisser les bras, et annonce la formation d’un nouveau mouvement en juillet... délaissant manifestement son parti pour les législatives...anticipant peut-être un nouvel échec du PS.
Mais le temps des bilans ne concerne pas que le PS... les LR le font aussi, et ils ont bien compris que les législatives allaient faire des dégâts supplémentaires dans leurs rangs...
Ils ont déjà perdu leur principaux leaders, et ils sont déjà 25 à avoir rejoint le camp présidentiel où la soupe semble meilleure, et de NKM à Borloo, en passant par Le Maire et quelques autres, le siphonage est bel et bien en train de s’opérer d’autant qu’ils ont connu la défaite humiliante du candidat qu’ils s’étaient choisi lors de leur primaire, un certain François Fillon, obligé de quitter la tête basse la scène politique, et à renoncer à exercer des responsabilités.
Pire, en nommant dans son gouvernement un premier ministre de droite, Macron leur porte un coup supplémentaire...
Même si Juppé et quelques autres affirment vouloir soutenir encore les LR, on sent bien que le cœur n’y est plus... lien
Quant au parti d’extrême droite, c’est la grande désillusion : arrivé aux portes du pouvoir, et chuter lamentablement pour le dernier tour, ce n’était pas le scénario espéré.
Il faut dire que MLP avait été intelligemment piégée par le candidat d’EM, lequel avait glissé subrepticement auprès des médias qu’il quitterait le plateau si son adversaire était trop agressive.
C’est donc apparemment la stratégie que s’était donnée MLP, en passant les ¾ de son temps à tenter de déstabiliser agressivement le leader de EM... lequel, en continuant de garder son calme, et en déroulant son programme, a ringardisé cruellement la patronne du FN.
Philippot menace de quitter le parti, s’il recule sur la sortie de l’euro, et la petite nièce a déjà tourné la page. lien
La déception des électeurs qui avait choisi le FN, plutôt que EM, va-t-elle provoquer un recul du score frontiste lors des législatives ?
L’avenir nous le dira.
Quand au nouveau président, il aurait réussi son entrée, d’après l’ex ministre de l’agriculture, lequel n’ayant cessé de le flatter, s’étonne de ne pas avoir d’adversaires de REM face à lui, pour les législatives.
Pourtant cette investiture a été jugée pour certains plutôt insolite, surtout lorsque Emmanuel Macron, debout dans un véhicule militaire, saluait une foule fantôme.
Avec un peu de retard à l’allumage, il nous a donc proposé son premier ministre, un certain Edouard Philippe, maire du Havre, et député.
Ce notable n’est pas un inconnu pour les écologistes...
En effet, s’il faut en croire Stéphane Lhomme, l’animateur de l’Observatoire du Nucléaire, le nouveau premier ministre est impliqué dans le pillage de l’uranium du Niger par Areva.
C’est en octobre 2007 qu’il avait été nommé directeur de la communication et directeur des affaires publiques d’Areva, afin de s’assurer de la collaboration de parlementaires acquis au lobby de l’atome.
Alors qu’il était en poste pour l’entreprise nucléaire, un accord avait été signé entre Areva et le président nigérien, accord qui a été contesté par le mouvement des nigériens pour la justice, dénonçant un accord qui ne bénéficie en rien aux populations, d’autant que le pourcentage qui revient au Niger est plus que modeste, et que les Touaregs qui habitent à proximité du site nucléaire n’ont finalement que la pollution pour seule récompense. lien
Mais ce n’est pas tout...
Alors que le nouveau président a promis un gouvernement exemplaire, l’Observatoire du Nucléaire nous apprend que de 2007 à 2010, Édouard Philippe a cumulé sans état d’âme son poste chez Areva et son mandat d’adjoint au maire du Havre, à quoi s'ajoute un blâme de la HATVP (Haute Autorité pour la Transparence de la Vie Publique), qui lui a reproché d’avoir refusé de fournir des informations sur sa déclaration du patrimoine de 2014, alors que la loi l’exige. lien
Ajoutons pour faire bon poids que le nouveau 1er ministre pourrait aussi être impliqué dans l’affaire Uramin, qui a fait perdre 3 milliards à la France.
Il s’agit du scandale de 3 gisements fantômes d’uranium, et à cette époque, même s’il semble qu’il n’était pas en position de décision, et que son nom n’ait jamais apparu dans le dossier, il devait rendre compte de ses activités à Anne Lauvergeon, alors présidente du directoire d’Areva, ainsi que l’écrit Vincent Crouzet dans les colonnes de Médiapart. lien
Signalons au passage l’épisode foireux des 52 éoliennes off shore au large du Havre, (260 Mégawatts) voulue par Edouard Philippe, lequel s’est terminé provisoirement en eau de boudin. lien
Pour être tout à fait complet, Areva, qui portait ce projet, a cédé ses activités dans les énergies propres à Siemens, et tout n’est peut-être pas perdu. lien
À l’époque, Édouard Philippe avait rencontré justement Emmanuel Macron, comptant sur lui pour sauver le projet, et il attendait la réponse de Bercy pour septembre 2016... lien
Espérons toute fois que le nouveau chef du gouvernement sera plus actif à ce poste qu’il ne l’a été à l’Assemblée Nationale, car avec seulement une dizaine d’intervention en 5 ans, il figure parmi les moins bien classés d’après les données du site nosdéputés.fr. lien
On peut quand même s’étonner de l’hommage que Juppé a rendu à son collègue, affirmant qu’il connaissait parfaitement le fonctionnement des institutions. lien
Les quelques écolos qui ont voté par défaut pour Macron, vont peut-être commencer à douter de leur choix... choix se basant probablement sur l’illusion d’une victoire de l’épouvantail FN...
Quand on voit comment la promesse de fermer Fessenheim a du mal à être tenue, et le retard qu’accumule notre pays à se tourner vers la transition énergétique, avec un tel 1er ministre, il est probable que l’environnement sera le parent pauvre de ce gouvernement.
Chacun avait pu constater le peu de cas qu’avait fait le candidat Macron de l’environnement, ne serait-ce que lors du débat présidentiel final.
Lorsqu’il était ministre, la défense de l’environnement n’était apparemment pas sa préoccupation première, d’autant qu’il est un ardent défenseur du projet d’Hinkley Point pour lequel l’électricien national doit investir 16 milliards d’euros.
Pour mémoire, il n’a pas voté en faveur de la loi pour la transition énergétique. lien
Comme l’écrit Emilie Massemin, chez Reporterre : « de belles promesses, un lourd passif ». lien
Il est probable que le projet d’enfouissement à Bures va être réactivé, avec un tel 1er ministre si ouvertement pro nucléaire, et que dans la région de Nantes, les opposants au nouvel aéroport s’inquiéteront, d’autant que le nouveau président n’a jamais caché sa volonté de faire aboutir ce projet. lien
Mais avant de laisser la conclusion à mon vieil ami africain, il faut se remettre en mémoire la déclaration du nouveau 1er ministre, datant de janvier dernier au sujet du candidat d’EM, devenu depuis peu son « patron » : « tribun adepte d’un populisme désinvolte, (...) qui n’assume rien, mais promet tout, avec la fougue d’un conquérant juvénile et le cynisme d’un vieux routier ». lien
Aujourd’hui choisi par ce dernier, qui aura quelques doutes sur la qualité de la relation de ces deux politiques ?... Et le champion en éolienne semble avoir les qualités nécessaires pour faire tourner les girouettes, si pratiquées dans le petit monde politique.
Comme dit mon vieil ami africain : « Les paroles sont comme l’œuf, à peine écloses, elles s’envolent »...
Le dessin illustrant l’article est de Ysope
Merci aux internautes pour leur aide précieuse
Olivier Cabanel
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