jeudi 10 décembre 2015 - par Albert Ricchi

Le scandale de la vente des barrages hydroélectriques

La commission européenne a adressé récemment une mise en demeure à la France afin qu’elle lance, sans plus tarder, le processus de mise en concurrence des concessions hydroélectriques françaises, en gestation depuis 2008.

L’Europe, dans sa grande bienveillance, exige la privatisation de ces barrages, pour l'essentiel construits par nos aînés et financés par les impôts de nos parents et grands-parents… 

 

En juillet 2008, le ministre de l'Ecologie, Jean-Louis Borloo, signait le décret de mise en concurrence des concessions des barrages hydroélectriques français. EDF bénéficiait jusqu’à cette date d'un droit de préférence sur le renouvellement des concessions mais avec la transformation de l'électricien en société anonyme en 2004, et le vote en 2006 (à la demande de la Commission européenne) d'un amendement abrogeant ce droit de préférence, le renouvellement des concessions a été ouvert à la concurrence « libre et non faussée »…

Les premiers appels d'offres pour le renouvellement des concessions devaient être ouverts fin 2010 mais ce dossier est resté jusqu'ici bloqué par la France, au grand dam des commissaires européens.

La Commission européenne agit donc au titre de l'article 106 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE) : "En vertu de l'article 106 du TFUE, les Etats membres sont tenus de veiller, en ce qui concerne les entreprises publiques et les entreprises auxquelles ils accordent des droits spéciaux ou exclusifs, à n'édicter et à ne maintenir aucune mesure contraire aux règles des traités, et notamment aux règles de concurrence".

"L'envoi d'une lettre de mise en demeure ne préjuge pas de la conclusion finale de la procédure. Par contre, la procédure crée une structure claire pour que la Commission puisse à présent entamer un dialogue actif avec les autorités françaises à ce sujet", a indiqué le porte-parole de la Commission.

Prenant les devants, la ministre de l'Ecologie, Ségolène Royal, a précisé que les premiers appels d'offres pour sélectionner les actionnaires seront lancés dès 2016. La loi de transition énergétique d'août 2015 fixe en effet un nouveau dispositif d'ouverture des concessions et prévoit le regroupement des barrages par grandes vallées (barycentres) et la création de sociétés d'économie mixte, afin d'essayer de limiter la privatisation des ouvrages.

Vendre les barrages hydroélectriques, c’est se priver de la seule source d’électricité décarbonée

Le Conseil national de la Résistance (CNR), crée par Jean Moulin le 27 mai 1943 à Paris, réunissait dans le même combat de libération nationale les communistes et les gaullistes dans une volonté de recouvrer la souveraineté nationale et populaire. C'est dans ce cadre que les barrages hydrauliques furent construits.

Cette volonté a permis un essor économique sans précédent, la France se hissant au rang de 4ème puissance économique mondiale.

Aujourd’hui, EDF reste le premier producteur d’électricité d’origine hydraulique de l’Union européenne, avec plus de 20 000 MW de puissance installée en France. La France compte 399 barrages sous concession. Environ 80% d'entre eux sont exploités par EDF, 12% par Suez via ses filiales Société hydro électrique du midi (Shem) et Compagnie nationale du Rhône (CNR), le reste étant aux mains de petits exploitants.

L'hydraulique représente 12% de la production totale d'électricité française. Respectueuse de l'environnement, l'hydroélectricité ne participe pas à l'augmentation de l'effet de serre ni à la pollution de l'air, n'émettant ni CO2, ni gaz polluants. 

La première escroquerie est de transférer les gains d’une infrastructure, financée par les impôts des citoyens français, à des sociétés privées qui vont vite faire de la rapine légalisée, exactement comme c’est le cas pour les péages d’autoroutes.

La deuxième escroquerie évidente, c’est qu’au moment même où François Hollande, avec l’agenda de la COP 21, désire taxer fortement les émissions de carbone, la valeur de l’énergie « décarbonée » va finir par faire des bonds si on la laisse aux mains d’entreprises privées comme ce fut le cas en Californie avec l'entreprise Enron de sinistre mémoire...

Le mandat de Nicolas Sarkozy a servi à détruire une partie de ce que le CNR avait mis en place à la libération. On pouvait penser ensuite que François Hollande, "l'ennemi de la finance" aurait à cœur de revenir aux fondamentaux et de préserver ce patrimoine commun. Mais la trahison continue et la vente à la découpe de notre pays se poursuit conformément aux diktats de la commission européenne et des lobbys investisseurs…

 

 



21 réactions


  • Clark Kent M de Sourcessure 10 décembre 2015 08:40

    « Mais la trahison continue et la vente à la découpe de notre pays se poursuit conformément aux diktats de la commission européenne et des lobbys investisseurs… » qui ne sont élus ni les uns ni les autres, mais détiennent tous les leviers.


  • cathy cathy 10 décembre 2015 09:08

    A vendre tous les biens de la France aux pays musulmans pétroliers , vous imaginez la suite...


    • leypanou 10 décembre 2015 09:36

      @cathy
      « A vendre tous les biens de la France aux pays musulmans pétroliers  » : que des biens appartenant au peuple français soient vendus aux pays musulmans pétroliers ou aux grandes multinationales etats-uniennes, cela change quoi, vendu c’est vendu non  ?

      Encore une obsédée des musulmans !!!


    • cathy cathy 10 décembre 2015 12:35

      @leypanou
      ET bien avec avec les multinationales, il y aurait un scénario tout aussi catastrophique, mais avec les pays de la charia, il est aisé de savoir ce qu’il va se passer. Il y aura plus d’islam en Europe, et bien sûr les occidentaux vont se rebiffer, guerre civile. Ensuite il n’y aura plus qu’à atomiser les pays pétroliers et les multinationales récupéreront le pactole.


  • Daniel Roux Daniel Roux 10 décembre 2015 09:09

    L’auteur manque d’objectivité et de logique.

    Une concession est un bail d’exploitation à durée déterminée et non un transfert de propriété.

    Reprenons depuis le début.

    1) Jospin et Chirac signent, à Lisbonne, un traité prévoyant la privatisation des grandes entreprises publiques.
    2) Sarkozy privatise EDF et GDF.
    3) Ni le PS, ni l’UMP, après leur forfaiture sur le référendum de 2005, ne prévoient d’organiser de référendum sur la question de la nationalisation des réseaux stratégiques : Énergie, eau, télécoms.

    La première conclusion logique est que EDF et GDF ne sont plus des entreprises publiques et dans ce cadre, il est normal qu’elle se soumette à la concurrence lors du renouvellement des concession.

    3) En France, l’attribution des concessions est l’objet de contrats dont les termes sont trop souvent dictés par les groupes financiers privés, soit directement, soit indirectement, sous la pression de ceux qui nous gouvernent, élus grâce à l’appui de ces groupes financiers.

    La corruption généralisée est à l’origine du dévoiement du principe de libre concurrence, comme de nos institutions. C’est cette corruption des élites qui, in fine, a conduit notre pays à la ruine.

     


    • Clark Kent M de Sourcessure 10 décembre 2015 16:12

      @Daniel Roux

      Le principe de libre concurrence n’a jamais été qu’une fiction, un mythe justificateur de l’économie dite libérale qui ne cesse de dénoncer l’intervention de l’état pour le fonctionnement des services publics mais revendique cette intervention pour les subventions, les renflouements, et la mise à disposition des infrastructures publiques gratuitement quand les privés n’ont pas les capacités d’investissement mais les compétences pour les faire fonctionner et la légitimité qu’ils s’accordent eux-mêmes pour se faire rémunérer au maximum (services privés dans les hôpitaux, publics, utilisation des IRM, etc). 
      Il n’y a pas de dévoiement, puisque ce principe est une fable racontée aux naïfs.
      Par contre, il y a bien corruption de ce que vous appelez des « élites » mais qui ne sont que des mafieux qui ont fait main basse sur la ville depuis bien longtemps. Seuls ceux qui s’aveuglaient ne voulaient pas voir.
      Mais on voit de mieux en mieux.


  • leypanou 10 décembre 2015 09:40

    "La première escroquerie est de transférer les gains d’une infrastructure, financée par les impôts des citoyens français, à des sociétés privées qui vont vite faire de la rapine légalisée, exactement comme c’est le cas pour les péages d’autoroutes. " : de toute façon, F Hollande et sa clique ne vont pas s’arrêter tout seuls, il faut les chasser du pouvoir et ne pas remettre Sarkozy et sa clique.


  • CN46400 CN46400 10 décembre 2015 13:08

    Ouais 12% de la production française mais bien plus en terme de valeur, puisque cette électricité est essentiellement utilisée aux heures de pointe, quand sur le marché européen le prix du Kw est au taquet !


    Cette vente va, immanquablement, générer un hausse des tarifs EDF.

  • microf 10 décembre 2015 13:42

    Bienvenu au club Francais.

    Dans les années 70 en Afrique sur recommandation des pays Occidentaux parmi lesquels la France, tout a été privatisé.
    La France a achèté nombreuses de ces sociétés qui faisaient le bonheur et la fierté des Africains. Des travailleurs Africains en masse ont été mis á la porte, la misère s´est installée, et lorsque nous nous plaignions, il nous était répondu en Occident que c´était parceque nous ne savions pas gèrer, que les nouvelles sociétés qui allaient reprendre ces sociétés le feraient mieux, nous attendons encore jusqu´á aujourd´hui car ces sociétés privatisés et achêtées par les sociétés Occidentales se trouvent toujours entre leurs mains, sans que rien ne se soit amélioré pour nous les Africains.
    Je disais á un ami Francais á cette époque que ce que nous subissons aujourd´hui, vous allez le subir plus tard, non jamais me répondait-il, nous y sommes, car lorsque l´ogre a fini de manger les enfants des autres, il se met á manger ses propres enfants, encore une fois, bienvenu seulement au club.

     


  • Pyrathome Pyrathome 10 décembre 2015 15:08
    Le scandale de la vente des barrages hydroélectriques...

    .

    Bien sûr que c’est un scandale de plus....

    Toutefois, on peut faire contre mauvaise fortune bon cœur, je m’explique :

    On a jamais été aussi près que chaque particulier puisse produire sa propre énergie non polluante, abondante, à très bas coût et la redistribue en partage sur le réseau, ça va venir, soyez patient ! C’est dans l’ordre inéluctable des choses dans moins de 20 ans, les innovations arrivent, ce sera le coup de grâce aux mafias de l’énergie....

    Dès lors, les barrages hydrauliques, les centrales nucléaires ou à gaz/charbon/fioul deviendront obsolètes entre les mains des vampires ruinés, et à qui il ne restera plus qu’à démanteler leurs fantômes d’un autre age avant d’être eux-mêmes démantelés définitivement et à jamais...

    Et enfin la paix sur toute la planète.....


    • HELIOS HELIOS 10 décembre 2015 15:16

      @Pyrathome


      ... les démanteler ? mais qui va les démanteler ? ils seront hors d’usage par des règles financières et les concessions seront rendues, la démolition et la reconstruction se fera sur les deniers publics.

      Privatisation des bénéfices, mutualisation des pertes.

      quand je vois que les sondages pour les régionales se retournent, je pensent que les français méritent ce qui leur arrive et on est loin d’avoir touché le fond. 
      Personne n’aura plus le droit de se plaindre !

    • Jean Pierre 16 décembre 2015 18:10

      @Pyrathome
      Je crains très fort que cette production d’énergie non polluante, abondante et pas chère relève surtout du fantasme. Mais si vous avez des pistes sérieuses (autres que celle avancées par des complotistes plus ou moins délirants ou des allumés de la cafetière) n’hésitez pas à nous informer.


  • Le p’tit Charles 10 décembre 2015 16:39

    Histoire d’O....vont nous faire payer l’air bientôt...


  • Gaston Lanhard 10 décembre 2015 17:09

    Les barrages privatisés c’est la perte de la gestion de la force hydraulique depuis les retenues du Haut, jusqu’à celles du Bas auprès de la méditerranée.

    Une gestion responsable qui produit au moment opportun et retient quand cela n’est pas nécessaire. Depuis les barrages EDF jusqu’à ceux de la CdR c’est toutes une gestion intelligente et combinée. 
    Privatiser c’est produire au moment ou le cours du MWh est au plus haut, ce qui reviendra à dire que les barrages seront à sec dès juillet.
    Privatiser c’est s’interdire de réguler les centrales nucléaire en production base.
    Privatiser c’est s’interdire les STEP qui pourront lisser la production ENR.
    Encore une fois l’Europe Bureaucratique et technocratique fiche tout en l’air selon une idéologie libérale mortifère. Vite il faut en changer.

  • Gerard_menvusa oncle bin’s 10 décembre 2015 20:51

    C’est clair que nos dirigeants seraient bien inspirés de distinguer à qui ils doivent obéir : aux commissaires européens non élus et qui n’ont aucune légitimité ou bien au peuple français qui les ont élus ???

    Au 1er tour, le Gouvernement a eu le pistolet sur la tempe, va-t’il falloir appuyer sur la détente au second tour pour qu’ils comprennent qu’ils n’ont de comptes a rendre qu’aux citoyens français et à aucun autre ?

    DEHORS L’UE, DEHORS L’EUROPE DU CAPITAL : dimanche votez bien : votez UPR pour que le cauchemar cesse et que la France quitte cette prison et cette dictature qu’on appelle « Union Européenne » !


  • zozoter 10 décembre 2015 21:26

    La vraie solution (et la seule) est donc de retrouver un exécutif souverainiste pour sortir de l’UE et renationaliser pour le Franc symbolique (où la nouvelle monnaie souveraine) . Aucun parti dit souverainiste ne le propose.


  • molloy molloy 10 décembre 2015 22:22

    Après les autoroutes, l’aérospatiale, les barrages.

    Suite logique du démantèlement de l’état, de la Nation.

    Retour à la féodalité du moyen-âge, avec les redevances seigneuriales et autres taxes privatisées et libres d’augmenter selon le bon vouloir du « saigneur » local et paradoxalement globalisé.

    A gerber.


  • Gilbert Spagnolo dit P@py Gilbert Spagnolo dit P@py 12 décembre 2015 12:21

    Si les barrages hydrauliques en passant au privé, voient leur sécurité comme l’a été celle des chemin de fer anglais lorsqu’ils sont passés au privé,.... il y a du soucis à se faire !


    @+ p@py


  • jj 13 décembre 2015 14:06

    Oui, le pouvoir de l’argent est immense et casse le collectif et l’humain.

    Il y a une pétition à signer ici : http://www.petitionpublique.fr/PeticaoVer.aspx?pi=P2014N46821

    Citations :
    La liberté, dans une démocratie, n’est pas assurée si le peuple tolère que la puissance privée grandisse au point qu’elle devienne plus forte que l’État démocratique lui-même, ce qui est fondamentalement le fascisme. F.D Roosevelt

    « Quand le pouvoir de l’amour surpassera l’amour du pouvoir, le monde connaîtra la paix. »Jimi Hendrix


    Ils ne sont grands que parce que nous sommes à genoux Etienne de la Boétie


    • GiGoT 15 décembre 2015 19:43

      L’électricité ne se stockant pas, on peut imaginer qu’un de ces soirs de record de consommation, quand la production est plus que tendue, vers 19 heures, un producteur hydraulique « malin » dirait à RTE : "il va vous manquer 500Mw/h pendant 15 minutes pour passer le pic ? OK je peux vous les vendre mais mon prix sera le votre.

      Et RTE, sous peine de blackout et délestages, ne pourra pas refuser.

      C’est un peu pour ça qu’on a pu voir le Mw/h monter à 3000 (trois mille) euros parfois (alors qu’il est entre 50-70 la majeure partie du temps).

      Sur EpexSpot (la bourse de l’électricité) le prix peut maintenant osciller entre -9999 et + 9999 euros et se négocier jusqu’à seulement 30 minutes avant la « livraison ». https://www.epexspot.com/fr/produits/intradaycontinuous/france

       Donc 500 x 9999 : 4 (quart d’heure) = 1.250.000 euros
      Quelques bons coups comme ça dans l’année, un peu à la ENRON, et on se fait rapidement un bas de laine à bon prix.

      Les barrages sont STRATEGIQUES à plus d’un titre. c’est un peu comme l’éclairage de secours en cas de panne.

      Un grand merci aux anciens qui ont payé « nos » barrages.


    • Jean Pierre 16 décembre 2015 18:39

      @GiGoT

       Totalement d’accord sauf une nuance. En fait, sur le plan technique, un barrage, son stock d’eau et sa centrale hydroélectrique sont ni plus ni moins une batterie électrique que l’on peux faire débiter à la demande. Et c’est même la seule possibilité réaliste, économique et écologiste de stocker de l’électricité. Privatiser cela, c’est confier à la finance le seul stock modulable, c’est à dire le maillon stratégique de l’ensemble du système. Et le faire entrer par cette petite porte dans le système, c’est lui donner des possibilités illimitées de faire de l’extorsion de fonds sur l’intégralité du système.



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