mardi 23 janvier 2007 - par Theothea.com

Jane Birkin joue « Electre » au Théâtre des Amandiers de Nanterre

A ceux qui, sous l’influence de la critique en partie unanime, ( cf. Nota Bene ) penseraient qu’Electre a été assassinée par la mise en scène de Philippe Calvario dans un décor d’une banalité à pleurer, nous oserons opposer un démenti relatif aux intentions d’une création originale où le métissage culturel méditerranéen se joue de manière pertinente de l’orthodoxie du chef-d’oeuvre de Sophocle.

Point de palais royal effectivement mais une judicieuse façade blanche qui semble n’avoir été conçue que pour satisfaire de manière adéquate aux multiples implications d’une réalisation chorale.

Ainsi sur le parvis, les pleureuses, en faisant dos au public de manière récurrente, engagent de fait les spectateurs à être davantage partie prenante avec elles que simples témoins des enjeux vitaux dissimulés au regard extérieur.

Vaste terrasse, escalier central escamotable, fenêtres opaques participent notamment à l’agencement annoncé du matricide comme autant d’échappatoires virtuelles au flux de la loi du talion.

A ceux qui soutiendraient que l’exigence est absente tant le jeu des comédiens serait mal dirigé et pourrait friser le ridicule, nous conviendrons d’une chorégraphie musicale à suspense où les protagonistes cherchent dans le labyrinthe du mal-être les voies d’une délivrance improbable du malheur évalué au prorata du meurtre réitéré.

Effectivement ni la voix ni la présence diaphane de Jane Birkin ne sauraient trahir la tragédienne qu’elle n’est certes pas ; mais cette évidence est précisément ce qui emporte notre adhésion à son personnage passionné à l’égard de son père assassiné, ainsi que mélancolique envers son frère qu’elle croit perdu à jamais.

Face au talent dramaturgique de Florence Giorgetti, Clytemnestre sa mère, et celui de Sophie Tellier, Chrysothémis sa soeur, la candeur des sentiments de révolte désordonnée trouve ainsi une réelle démesure et néanmoins sa juste place dans le geste artistique inachevé de Jane Birkin.

En outre, cette troupe métissée avec un choeur arabo-mycénien emmené par la chanteuse algérienne Biyouna se devrait d’ignorer des polémiques éclectiques voire contradictoires où l’on irait jusqu’à lui reprocher la ressemblance de l’urne funéraire avec... une bouteille Thermos, puisque c’est précisément dans le faux-semblant de ce contenant que peut s’apprécier en clin d’oeil, la parodie de cendres fictives conservées bien au chaud en perspective du coup de théâtre stratégique imaginé par Oreste (Frédéric Andrau).

Cela en dit beaucoup sur l’humour distancié et tacite de la mise en scène, mais cela peut également être signifiant des éventuels malentendus liés à une perception légitimiste des lois du tragique avec son cortège de stigmates formels.

Aussi, en réelle dissonance avec l’expertise critique dénonçant une médiocrité rarement égalée dans le théâtre subventionné, nous admettrons que non seulement Philippe Calvario n’a pas assassiné Electre à la suite de Richard III mais que celle-ci, en la personne de Jane Birkin, contribue à exalter le spectacle vivant à l’instar de Philippe Torreton, la saison précédente déjà aux Amandiers de Nanterre.

Nota Bene :

A la suite de cette même chronique publiée à l’identique sur EN COULISSE Theothea.com est présentée une revue de liens vers plusieurs critiques concernant Electre réalisée par Philippe Calvario.

Photo © Alain Monot

JANE BIRKIN JOUE ELECTRE - ** Theothea.com - de Sophocle - mise en scène : Philippe Calvario - avec Jane Birkin, Sophie Tellier et ... - Théâtre des Amandiers de Nanterre -



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