mardi 1er août 2017 - par C’est Nabum

L’île du perroquet

Retour aux sources.

Il est un lieu paradisiaque sur la Loire, un endroit où soudain plus rien n’existe que cette relation unique à la rivière, la nature et les lumières d’un ciel enchanteur. C’est là, au hasard d’une aventure fluviale, que j’ai croisé un homme heureux, un perroquet gris du Gabon sur l’épaule, son chien à ses côtés, un gentil molosse blanc.

J’ai eu scrupule à l’aborder, l’homme était en grande conversation avec son compagnon. Il sifflait, le perroquet lui répondait, il lui parlait, l’animal bavard reprenait à son tour quelques mots que je percevais alors difficilement. C’est je crois le perroquet qui s’aperçut le premier de ma présence et prévint celui avec qui il conversait. Le chien n’avait rien dit, trop occupé me sembla-t-il alors, à chasser les mouches.

L’homme vint à moi, flanqué de son interlocuteur. Ils me saluèrent tous les deux, lui d’une poignée de main virile et franche, l’oiseau de quelques notes aiguës et d’un « salut » réjouissant. Je lui expliquai alors que j’avais abordé sur son île, la pensant inhabitée. Il sourit, démontra ainsi qu’il ne sentait aucune agression dans cette intrusion singulière. Il me raconta alors son île.

Il avait été enfant du continent, cet ailleurs lointain qui se situe de chaque côté de son merveilleux refuge. Il avait fait de l’endroit son terrain de jeu, sa cachette, son domaine secret. Il y avait alors quelques habitants, deux ou trois fermes qui faisaient l’élevage bovin et caprin. Les fermiers savaient qu’il y avait toujours ce gamin qui traînait partout, sans jamais commettre de bêtises, ils l’acceptaient de bon cœur puisque les autres enfants des villages alentour ne venaient jamais avec lui.

Il avait une plate, une barque en bois munie de rames pour venir jouir pleinement de ce grand espace naturel. Il aimait par-dessus tout sa mangrove, cet endroit marécageux, propice aux rêves les plus fous, perdu dans les hautes herbes, les ronces, les roseaux et les bambous. Il était un aventurier affrontant des monstres terrifiants, avançant dans un territoire hostile à la recherche d’un trésor.

Son trésor, il l’avait trouvé, c’était son île qui perdit un à un tous ses habitants pour finir par n’être qu’à lui-même. Un propriétaire fortuné possède les cent cinquante hectares de l’endroit sans jamais vraiment y venir, faisant de notre homme le dépositaire de son île. L’île était pour ainsi dire déserte, les bâtisses prenaient doucement des allures de maisons hantées, battues par le vent et les courants d’air. L’homme avait vieilli, il y venait toujours aussi souvent, oubliant ses soucis, son travail harassant pour se réjouir du spectacle au petit matin ou à la tombée de la nuit.

C’est un jour qu’il baguenaudait parmi les frênes centenaires qu’il découvrit perché sur le vénérable et gigantesque noyer, un perroquet gris qui semblait égaré dans ce coin perdu du monde. Il ne chercha jamais à comprendre comment l’oiseau avait atterri là. Sa seule préoccupation fut de l’aborder, de gagner sa confiance, de le protéger, le nourrir et en faire son ami.

Au bout du compte, ils s’apprivoisèrent mutuellement. Le perroquet fut adopté tout autant par le maître que par son chien et un curieux trio se constitua. Pourtant, l’homme rencontra un petit souci, si son chien aimait à le suivre pour venir sur l’île, le perroquet quant à lui refusait obstinément de gagner le continent. Sur la barque désormais motorisée, il s’envolait pour regagner son noyer.

C’est lui qui gagna la partie, l’homme et le chien décidèrent d’investir une fermette qui tenait encore vaillamment debout. Il ne l’avait pas choisie au hasard, de ce qui lui tient lieu de cuisine sommaire, il aperçoit de chaque côté la Loire dans deux trouées au milieu des arbres. C’est là qu’il me conduisit pour me narrer son histoire avant que de me faire visiter son domaine.

Il vit désormais là parmi les poules et les moutons, les biches et les petits animaux sauvages. Le propriétaire a fini par lui confier la lourde responsabilité d’entretenir son domaine. Il a de quoi occuper toutes ses journées même s’il se réserve bien des pauses pour admirer ce spectacle, jamais identique, toujours mouvant et changeant. Il pêche, il travaille, il rêve, il garde les moutons, il explore encore, découvrant toujours des trésors comme ces ruches sauvages dans le tronc creux d’un frêne qu’il venait de mettre à jour.

Il voulut, la nuit tombée, m’inviter à le suivre sur sa barque afin de profiter de la quiétude d’une Loire qui était à son étale. La lune éclairait ce décor, l’île était devenue une masse sombre. Le perroquet n’avait plus peur, il était perché sur l’épaule de l’îlien et donnait à la scène une allure surnaturelle. Je dus retourner à la civilisation, emportant à jamais l’image de cet homme et de ces animaux dans un décor de rêve.

Continentalement sien.



20 réactions


  • baldis30 1er août 2017 09:29

    bonjour ! MERCI

    et une conclusion virgilienne ....


  • L'enfoiré L’enfoiré 1er août 2017 09:58

    Salut,
     Sur l’île de Ténérife, le dressage des perroquets est une attraction qui existe depuis de très nombreuses années.
     Les perroquets ont une intelligence insoupçonnée.


  • Aristide Aristide 1er août 2017 10:27
    L’espèce est protégée et déclarée interdite à la détention, l’importation ... Les démarches pour être propriétaire sont très complexe dans le cas ou l’animal est déjà en France.

    Peut être le vrai propriétaire de cet animal, obligatoirement déclaré en préfecture, recherche encore son perroquet gris du Gabon. Ces animaux dont l’importation est devenu interdite sont obligatoirement bagué ou pucé pour leur identification. On retrouve donc assez facilement leur vrai maître.

    Mais bon, cet aspect est assez ... terre à terre, pas celle de l’ile mais celle des gens qui se préoccupent de restituer à leur propriétaire l’animal égaré qui ne leur appartient pas ...

    Excusez moi de cette diversion citoyenne sur un sujet aussi ... écologiste consistant à restituer un animal qui n’a rien à faire en Loire.


    • baldis30 1er août 2017 14:24

      @Aristide
      bonjour,

      Il y a même un lion déguisé en puma (ou un puma déguisé en lion ) qui recherche son propriétaire entre la Mayenne, le Cotentin et la Bretagne ....


    • C'est Nabum C’est Nabum 1er août 2017 16:52

      @Aristide

      Je n’y suis pour rien

      Je me contente de raconter


  • juluch juluch 1er août 2017 13:22

    Jolie histoire...


    les perroquets échappé il y en a pas mal, à l’armée il y a quelques mois on en avait un de couleur vert au sommet d’un arbre, il est resté dans le camps bâtit tous le temps et doit toujours y être !

    Merci Nabum !

  • Bernie 2 Bernie 2 1er août 2017 22:17

    Zzzzzzz, je plains votre pauvre vie. C’est nada vous irait mieux, et se croit important en plus. Des perroquets à Orléans, wahou !!

    Vous trouvez vraiment un plaisir à mettre en ligne du rien puissance dix ?

    Comme je connais votre réponse, je suis un c.., vous avez raison. N’auriez vous pas envie d’arreter de racoler chaque jour pour 1€ la passe, pour devenir une sorte de pute de luxe.

    A 1€, y a que le militaire juluch pour être là. Au rugby, votre rôle, c’était ballon ?


  • Decouz 1er août 2017 22:47

    Histoire authentique.
    Il y a quelques années je faisais du jogging dans la forêt de Fontainebleau lorsque je vis à environ 100 m un animal noir, qui ressemblait à un chat de par sa forme et sa démarche mais qui était beaucoup plus gros. Cet animal avait plutôt l’air de vouloir faire profil bas, je le vis longer une clôture puis je le perdis de vue.
    Très intrigué je consultais des guides répertoriant les animaux de la forêt, mais aucun ne ressemblait à celui que j’avais vu.
    Peu de temps après les journaux faisaient des gros titres comme quoi une panthère noire avait été vue par des témoins dignes de foi ; le chien d"un de ces derniers en eut une frayeur terrible.
    Des pancartes d’avertissement furent apposées près des lieux où l’animal avait été vu.
    Je ne fis pas le rapprochement tout de suite, mais j’ai eu des doutes. Je n’avais pas prévenu la gendarmerie car le lieu de ma rencontre était un peu éloigné des autres lieux où l’animal avait été vu, ce qui ne signifiait rien car un tel animal pouvait bien faire des dizaines de kms et même traverser la Seine à la nage, et le le temps passant l’affaire fut oubliée.
    Je regarde internet aujourd’hui : l’affaire fut résolue plus tard, il s’agissait d’un puma :

    https://actu.fr/societe/foret-de-fontainebleau-le-mystere-du-felin-en-liberte-enfin-elucide_7011600.html


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