ApocAlepse et autres événements en 2016. Un monde fasciste en marche
Un monde qu’on n’a pas connu serait arrivé en 2016 si l’on en croit quelques observateurs attentifs. On pense évidemment à la ville d’Alep mais ces atrocités commises au nom de la raison d’Etat n’ont rien d’inédit si l’on se rappelle le sort de la ville de Dresde en 1945. Il y en eu des morts à cette époque. Une étudiante en philosophie aurait dû devenir ma tante mais ne survécu pas à un bombardement allié sur la ville italienne d’Umbertide le 25 avril 1944. La comparaison entre les deux conflits n’a aucune valeur explicative. Les causes de la guerre de 39 sont bien distinctes de celles de la guerre en Syrie depuis 2011. Quelques rappels.
L’ordre géopolitique a connu plusieurs étapes. Au Moyen Age, cet ordre était adossé à un cosmos théologique puis, après la Renaissance et les Etats modernes, l’ordre des nations fut réglé par un cosmos juridique habilement désigné comme « Nomos de la terre » pour reprendre le titre d’un célèbre ouvrage de Carl Schmitt. Le droit est capable d’arbitrer les conflits entre nations. La guerre survient quand le droit ne suffit plus à contraindre les nations à régler diplomatiquement leurs différents. Mais le droit se déplace dans la guerre. Celle-ci fait l’objet d’une déclaration officielle et ensuite se déroule avec des règles fixées par les conventions de Genève, la première datant de 1864, c’est-à-dire avant le grand conflit de 1870 entre Prusse et France. La quatrième convention de Genève est actuellement en vigueur et a été promulguée en 1949, quelques années après la fin de la guerre de 39. Mais le mieux serait de ne pas se mettre dans une situation où cette convention est applicable, autrement dit, la guerre, c’est bien, surtout quand on ne s’en sert pas !
Il n’y a plus rien à faire pour sauver Alep dont le sort est celui de Dresde. Juste espérer qu’un camp aura chassé l’autre pour passer à une étape suivante et reconstruire. Cela ne dispense pas de comprendre pourquoi on en est arrivé à cette situation. Les Etats occidentaux ont joué sur une ambiguïté. Ils n’ont pas déclaré la guerre à Assad mais ont soutenu des rebelles et favorisé une guerre civile entre des factions hétéroclites et le pouvoir de Damas. Ces opérations n’avaient aucun cadre juridique, aucune résolution votée à l’ONU, juste une transposition d’un droit d’ingérence aux racines discutables, pour ne pas dire contestables. Les rebelles ont juste été soutenus par les principaux pays de l’Otan avec des financements provenant des monarchies du Golfe et des armes circulantes. Le droit d’ingérence tire ses racines dans l’idéologie fasciste, n’en déplaise à BHL et Kouchner !
L’un des traits du fascisme, c’est d’imposer un ordre moral ou politique de manière unilatérale. L’opposé du fascisme, c’est la société du droit, avec chaque partie qui fait valoir ses intentions et ensuite, une instance qui arbitre s’il y a lieu. Le monde est devenu fasciste, dans les actes et surtout dans les pensées. Les électeurs de Trump ou du Brexit ont pour certains un fond de pensée fasciste, comme du reste les complotistes, les « anti-système », les militants écolos, les ultralibéraux, les salafistes et les religieux orthodoxes de toutes confessions. Il y en en chaque homme un fasciste qui sommeille. Eteindre le fascisme est une œuvre de salut public et de civilisation. Le fascisme est de droite ou de gauche. Les saillies de Jean-Luc Mélenchon fleurent-elles le fascisme, avec les théories politiques de Frédéric Lordon ? Il faut du travail intellectuel pour répondre à ces questions. Le fascisme de gauche est tout aussi envisageable comme en d’autres temps la révolution intellectuelle conservatrice allemande a créé le terrain pour l’avènement du nazisme. Le communisme aussi est une forme de fascisme.
Pour les philosophes contemporains, une nécessité s’impose. Il faut penser le fascisme y compris lorsqu’il ne se traduit pas dans des actes mais s’insinue dans les recoins de l’âme de chaque citoyen. Il y a des tendances fortes interprétables comme une sorte de fascisme de l’âme mais il y a aussi des tendances puissantes pour la liberté et la responsabilité. La liberté est un combat à mener et qui peut donner une aura aux justes. Le fascisme ne donne aucune aura, il emprisonne les âmes dans le brouillard des….. eh bien je ne peux plus écrire et je n’ai plus d’inspiration…. Le monde fasciste a gagné provisoirement une partie mais pas le combat pour la civilisation.
J’essaie de fuir ce monde et d’aller vers les lumières. Les philosophies occidentales de l’Histoire ont échoué. Il n’y a pas de salut collectif et c’est une bonne nouvelle pour la liberté et pour la philosophie qui se fera en dehors du cloaque universitaire régnant et contaminant avec ses médiocrités virales le monde médiatique et hélas la société. Je n’arrive plus à écrire et ce n’est pas une bonne nouvelle car c’est aussi que vous ne savez plus lire. Si Apocalypse désigne une révélation, alors les sociétés en sont loin et les gens aussi.