lundi 24 octobre 2016 - par Clark Kent

Chronique d’un plouc sans dents

Le terme « plouc » est-il une apocope du nom en « plou » (paroisse en breton) de certaines communes bretonnes ou bien dérive-t-il de l’anglais « plough » (la charrue) que les Picards utilisaient pour se moquer des manières simples des laboureurs et en étendant par métonymie cette appellation à tous les paysans ? Les origines du mot sont incertaines, mais tout le monde s’accorde à penser qu’il est chargé d’une connotation péjorative.

C’est pourtant l’appellation affectueuse que Nicolas Sarkozy utilise pour parler de son électorat. Dans un article du Point, son ami Charles Consigny fait preuve d’un grand talent d’acrobate de la sémantique pour expliquer que ce sont les journalistes bobos qui ont déformé non pas les propos, mais la pensée noble de son gourou, incapables qu’ils sont de mesurer « l'effet dévastateur que peut entraîner la divulgation de ce type de propos, à une époque où l'on ne lit plus que les titres » (sic).

Donc, pour ce directeur de conscience, il conviendrait que les journalistes fissent preuve d’une « réelle » déontologie en ne rapportant que les propos homologués par la commission de contrôle attachée aux pas des gens qui font des déclarations aux journalistes, et qu’ils oubliassent les remarques et plaisanteries pertinentes de ces grands penseurs dont les véritables «  intentions » (dixit M. Consigny) échapperaient aux demeurés qui les interviewent.

Il serait utile d’étendre ces recommandations à l’entourage direct et aux favorites des locataires du palais de l’Elysée, passés, présents et futurs pour ne pas risquer de démoraliser un peuple qui découvre qu’il n’est rien d’autre qu’un troupeau de sans-dents ». Les journalistes et les commères ne se rendent pas compte du mal qu’ils font en répétant de fines plaisanteries, des « private jokes » de bon ton dont la saveur appréciée et savourée par les gens de bon goût est inaccessible au vulgaire.

L’entourage des chefs d’états-majors politiques ont bien raison de remettre à leur place ces baveux indécents et grotesques qui empoisonnent la belle sérénité des élus de la République.

Souvenez-vous de la bassesse et de la vilenie de ces pamphlétaires impénitents qui avaient trouvé intelligent de rapporter les propos pleins de bon sens et de raffinement de Georges Frêche : « Des gens intelligents, il y en a 5 à 6 % ; moi je fais campagne auprès des cons. » 

Sur ce plan, l’AFP a une position d’avant-garde et conforme aux souhaits des lieutenants politiques en ne voulant pas « faire de commentaires sur des propos tenus en "off", c'est-à-dire des propos censés être tenus secrets par les journalistes ». Nous voilà rassurés !

 



21 réactions


  • leypanou 24 octobre 2016 11:10

    l’AFP a une position d’avant-garde et conforme aux souhaits des lieutenants politiques .... Nous voilà rassurés ! : l’AFP a souvent tenu des positions d’avant-garde, comme par exemple lors du résumé sur le discours de feu président vénézuelien H Chavez. (5mn de vidéo).


  • Elliot Elliot 24 octobre 2016 11:17

    C’est tout de même incroyable : pour une fois que Sarkozy, grand adepte du faux-semblant et du discours à la carte, se met à parler vrai, tout le monde lui tombe dessus !


  • AmonBra QAmonBra 24 octobre 2016 11:24

    Merci @ Jeussey pour le partage.

    Je vous vois venir vous avec votre sémantique et l’imparfait du subjonctif, êtes vous entrain d’insinuer que tous ces cons nous prennent pour des cons ?


  • colere48 colere48 24 octobre 2016 11:40

    Oui je préfère être un « plouc » plutôt qu’un paltoquet d’une vulgarité sans limite !

    Ce type qui se voit « prince » n’est en réalité qu’un « butor » malappris .... 


  • Pyrathome Pyrathome 24 octobre 2016 12:49

    Bonjour,

    Billet rafraîchissant !
    On subodore que les « ploucs » et autres « péquenauds » ont été ravis d’apprendre cette amabilité !
    Dans le fond, il n’a pas tout à fait tort, il faut vraiment être un plouc pour veauter Bismuth et son engeance de pieds nickelés....
    Par ailleurs, pas en reste, la magistrature sont aussi des ploucs laissant encore en liberté un tel péquenaud avec un super cargo de casseroles au cul........


  • alain-aaae (---.---.124.242) 24 octobre 2016 14:27

    comme tous les chefs politiques ils peuvent aussi dire la méme chose fleche car leur électoral sont des fonctionnaires territauriaux et leur famille qui pratique une donné pour un rendu j ai fais avoir du travail a un membre de votre famille alors il faut voté pour moi c était le cas de mauroy aussi dans le nord


  • Rincevent Rincevent 24 octobre 2016 15:30

    des propos tenus en « off », c’est-à-dire des propos censés être tenus secrets par les journalistes » Ouais, il faudrait quand même que quelqu’un m’explique : à qui c’est vraiment destiné et dans quel but ? Parler comme ça à des journalistes, dont le métier (normalement) est de répercuter les infos dont ils disposent, est d’une faux-culterie tranquillement assumée.


    • Clark Kent Jeussey de Sourcesûre 24 octobre 2016 15:48

      @Rincevent

      Volontairement ou pas, l’AFP énonce là sa conception du travail des journalistes, à savoir :

      - non pas informer, c’est-à-dire faire savoir ce qui se passe, 

      - mais diffuser de la propagande, c’est-à-dire émettre des messages sélectionnés et éventuellement fabriqués (il semblerait que les fakes soient à la mode) pour formater l’opinion en fournissant à la population ce qu’on veut qu’elle véhicule.

      L’aboutissement de cette technique est vérifiable quand votre interlocuteur répète les phrases de Calvi, Pernaut et Pujadas en croyant livrer ses propres pensées. On peut d’ailleurs s’interroger dans ce cas sur la capacité du cerveau de l’intéressé à continuer à produire de la pansée.

    • Christian Labrune Christian Labrune 24 octobre 2016 18:12

      @Jeussey de Sourcesûre
      Je ne vois pas très bien où vous voulez en venir. Je n’ai jamais eu beaucoup d’admiration pour des gens capables d’accorder leurs suffrages à un Hollande, à son ancienne compagne, à Sarkozy ou à quelques autres que vous citez, et dont j’ai déjà oublié les noms. Je ne vois vraiment aucune espèce d’inconvénient à dire que ces gens-là seraient des« ploucs ». C’est bien comme ça que je les vois, et s’il fallait formuler le sentiment qu’ils m’inspirent, j’aurais recours, probablement, à de plus fortes expressions.
      Que les adulés des ploucs ne se prennent pas pour des demi-dieux, à l’imitation de quelques crétins rendus célèbres par la chansonnette, qu’ils ne croient nullement à l’espèce de légende personnelle imbécile qu’ils s’efforcent de construire, qu’ils ne se fassent pas plus d’illusions sur eux-mêmes que l’évêque d’Autun célébrant son espèce de messe à la Fête de la Fédération (’« surtout, ne me faites pas rire ! ») ou que Paul de Gondi durant la journée des dupes, ce serait au fond plutôt bien, et j’aurais tendance à y voir la survivance d’un certain cynisme, héritage de Machiavel, dans une époque éprise de transparence et de niaiserie sentimentale.


    • Rincevent Rincevent 24 octobre 2016 18:29

      @Jeussey de Sourcesûre

      …quand votre interlocuteur répète les phrases de Calvi… Exact, hélas. Je viens encore de le vérifier récemment en écoutant (subissant) une amie que je croyais munie d’un cerveau et de tout ce qui va avec. C’est décourageant.

      Quant à la « pansée », faute de frappe ou lapsus ?


    • Clark Kent Jeussey de Sourcesûre 24 octobre 2016 22:02

      @Rincevent

      sans doute les deux, mais je n’en suis pas mécontent : en me relisant (trop tard),, ça m’a rappelé la gidouille du père Ubu.
       

  • ddacoudre ddacoudre 25 octobre 2016 09:47

    bonjour jesuissourcesûre

    j’ai un excellent souvenir de ces propos tenu par Frêche, un personnage haut en couleur et compétant flirtant avec l’autocratie et la grossièreté.
    sur le fond une bonne observation de la vie des hommes à responsabilité publique, faire de l’humour est tendre une perche a ses opposant et a toutes les commères porteuses de rumeurs.
    cordialement. ddacoudre.over-blog.com.


  • siatom siatom 25 octobre 2016 10:11


    Bonjour Jeussay de Sourcesûre

    A la question angoissante que vous posez en préambule, à savoir l’origine du mot plouc , vous me permettrez de donner mon avis non autorisé

    Je penche pour l’origine bretonne qui signifie paroisse et que l’on trouve sous différentes déclinaisons selon les départements plou ; pleu ; ple .

    Il viendrait du mot latin plebs dont on a tiré en Français le vocable plébéien. Je ne suis pas un érudit latiniste mais je me flatte, allez savoir pourquoi, d’être un authentique plouc.
    Kenavo


    • Clark Kent Jeussey de Sourcesûre 25 octobre 2016 11:11

      @siatom

      Bonjour Siatom et merci pour cette contribution.

      Votre hypothèse se défend d’autant mieux que le succès du mot « plouc » semble dater de la fin du XIXème, époque d’un grand brassage des populations du à l’exode rural et à la conscription.

      Les états-majors se sont efforcés, sous le second empire et la troisième république, d’envoyer loin de chez eux les jeunes appelés pour éviter une trop grande fraternité avec les populations qu’ils étaient susceptibles de réprimer. La langue bretonne était non seulement encore vivante, mais elle était, dans les campagnes, la seule langue parlée d’une partie de la population, ce qui attirait sur les jeunes recrues les quolibets de leurs camarades.

      C’est là l’origine du mot « baragouiner ». Quand un Breton demandait qu’on lui passe le pin et le vin (rouge), il disait « bara, gwin’, ce qui faisait rire les autres qui répondaient : »tu peux pas parler français au lieu de baragouiner ?"

      La même ironie a sans doute été utilisée quand on leur demandait de quel coin ils venaient. 

    • Clark Kent Jeussey de Sourcesûre 25 octobre 2016 12:06

      @oncle archibald

      Tout est possible, vous savez !
      Nous vivons à une époque où les tilleuts mentent et les téléphones s’enfilent, alors pourquoi pas les bars à gouines.

      Il faudrait demander à Siatom !
      Peut-être rue de la soif, à Brest-même !

    • l'Ane Artiste l’Ane Artiste 25 octobre 2016 14:05

      @Jeussey de Sourcesûre
      Les états-majors se sont efforcés, sous le second empire et la troisième république, d’envoyer loin de chez eux les jeunes appelés pour éviter une trop grande fraternité avec les populations qu’ils étaient susceptibles de réprimer.
      Puisqu’on est dans l’époque il n’est peut-être pas inutile de rappeler le sens du mot frangin. Il vient de l’argot des canuts lyonnais : le frangin était l’ouvrier spécialisé dans la fabrication des franges (celles qu’on trouvent sur les drapeaux mais pas que), il y avaient bien entendu des frangines.
      Quant-à la répression qu’ils ont subit...


  • l'Ane Artiste l’Ane Artiste 25 octobre 2016 10:42

    Voilà un article, que dis-je, une chronique, caustique à souhaits, comme je les aime.
    Félicitations !
    De plus vous avez une belle plume et votre pseudo en dit long.


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