Coca-Cola et le rêve mexicain
Ce vendredi, ce fera l'ouverture des Jeux olympiques d'hiver à Sotchi , sous la surveillance armée du super policier Poutine. Coca Cola sera, comme depuis 1928, le sponsor principal de ce grand cirque médiatique planétaire où le sport n'est plus que le prétexte pour permettre aux télévisions du monde entier et aux organisateurs de ces jeux, de vendre à cette multinationale du soda en particulier, du temps de milliards de cerveaux humains rendus disponibles grâce à des athlètes aux performances toujours dépassées.(1)
Coca Cola abreuve la terre entière avec sa boisson sucrée. Selon les chiffres de l’entreprise, chaque seconde on consomme 18.500 canettes ou bouteilles de Coca-Cola dans le monde entier. L’empire Coca-Cola, qui vend ses 500 marques dans plus de 200 pays, s'est mis aussi à observer le bonheur de la planète pour essayer de cacher ses méfaits en matière écologique, de santé publique et en matière des droits sociaux.
Avec une consommation de 487 bouteilles de Coca-Cola, soit l'équivalent de 25 kilos de sucre, par personne et par an, la plus élevée au monde, les Mexicains dépassent largement les Américains et leurs 436 bouteilles par personne. Presque la moitié (46 %) de tout le Coca-Cola vendu en Amérique latine est consommée au Mexique et sept rafraîchissements sur dix sont du Coca-Cola.( lien )
Pour satisfaire cette consommation addictive, la multinationale a réussi à assécher et à souiller la terre nourricière et à mettre à mal la santé de tout un peuple.
COMMENT COCA COLA ASSECHE LE MEXIQUE.
La marque qui veut « rafraîchir le monde » a besoin de beaucoup d’eau, d’énorme quantité d’eau : 10 000 litres par seconde, dont un peu moins de 40% sont utilisés pour la production des boissons. Les 60 % d’eau restants servent lors du processus de fabrication du soda : pour le rinçage, le chauffage ou la climatisation. Autrement dit, pour fabriquer 1 litre de boisson, l’entreprise utilise en moyenne 2,5 litres d’eau. Pour mettre en cannette ce soda maléfique, l'entreprise se moque de l'assèchement des ressources en eau qu'elle cause dans de nombreux pays. Au Mexique, la compagnie a privatisé de nombreuses sources aquifères, laissant les communautés locales sans accès à celles-ci et cela avec le soutien inconditionnel du gouvernement de Vicente Fox (2000-2006), ancien président de Coca-Cola Mexique. Cette utilisation privée de sources d’eau qui étaient auparavant propriété collective, diminue drastiquement l’accès à l’eau des populations autochtones.
Au Mexique, depuis 2000, Coca-Cola a négocié avec le gouvernement 27 concessions d´eau, 19 pour extraire de l´eau des nappes aquifères et de 15 rivières différentes, parmi lesquelles certaines appartiennent à des peuples indigènes . Huit concessions lui permettent de jeter ses déchets industriels dans les eaux publiques. Pour faciliter ce processus , le gouvernement du président Vicente Fox avec l´aide de la banque mondiale, a encouragé la privatisation de ressources collectives comme l´eau et la terre.( lien )
L'usine Coca-Cola de San Cristóbal (Chiapas ) a utilisé en 2004, plus de 107 millions de litres d´eau, soit l´équivalent de la consommation de 200 000 foyers. Afin de s´introduire dans les zones rurales, et notamment indigènes, les différents embouteilleurs de Coca-Cola au Mexique , ont créé la Fondation Coca-Cola. Cette institution philanthropique construit et équipe des écoles, de même qu´elle donne des bourses aux étudiants pour permettre aux embouteilleurs de s´installer sur des terres riches en réserves d´eau.Comme par hasard, dans des municipalités où la Fondation Coca-Cola a remis à neuf et partiellement équipé une école primaire, on trouve des sources d'eau que Coca-Cola souhaite acquérir. Elle en a profité, au passage, pour placer son logo, dans les écoles et à des endroits stratégiques. Par cette politique de séduction, la boisson poison a transformé les modes de consommation de beaucoup de populations urbaines ou rurales au Mexique."Pourquoi boire de l'eau quand on a les moyens de s'offrir des boissons qui donnent plus d'énergie ?" (Le Monde du 23/08/2013)
LA COCALISATION DU MEXIQUE NUIT GRAVEMENT A LA SANTE
A l'entrée des villages, les panneaux indicateurs sont rouge et blanc. Certains ont même la forme de la célèbre bouteille. "Dans l'Etat du Chiapas, qui compte la plus forte proportion d'Indiens, des affiches de Coca-Cola sont en langue maya", souligne Jaime Tomas Page, anthropologue à l'Université autonome du Mexique (Unam) (Le Monde du 23/08/2013). Dans les communautés indiennes les sodas y sont vendus 40 % moins cher qu'en milieu urbain, où leurs prix concurrencent déjà ceux des eaux en bouteille.La boisson gazeuse a réussi le tour de force de s'immiscer jusque dans les pratiques rituelles. Ainsi dans les cérémonies religieuses et croyances maya, roter permet d’ôter le mal, Coca-cola a remplacé les boissons fermentées autrefois utilisées.
Le résultat est que dans un pays devenu le premier consommateur de sodas de la planète avec 163 litres annuels par personne, sept Mexicains sur dix sont gros, voire obèses et plus de sept millions et demi de Mexicains souffrent aujourd'hui de diabète, qui est devenu la première cause de mortalité du pays avec également l'explosion des problèmes d'hypertension et des maladies cardio-vasculaires.
Publié en juillet, un rapport de l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) révèle que le taux d'obésité des Mexicains (32,8 %) dépasse désormais celui des Américains (31,8 %), même si, selon l'organisme onusien, la proportion d'obèses au Koweït (42,8 %) ou en Arabie saoudite (35,2 %) reste supérieure. "Mais si l'on ajoute les personnes en surpoids, le Mexique est sans doute numéro un mondial", s'alarme Abelardo Avila, chercheur à l'Institut mexicain de santé et de nutrition. (Le Monde du 23/08/2013)
Le 9 août 2013, à Mexico, Maureen Birmingham, représentante de l'Organisation panaméricaine de la santé (OPS), a lancé un appel à soutenir un projet de loi prévoyant une taxe spéciale sur les boissons sucrées. Le texte se heurte depuis six mois à un lobbying politique qui bloque toute avancée. Pour faire illusion, l'Etat mexicain a signé avec les industriels un accord national pour la santé alimentaire prévoyant notamment le retrait des aliments trop gras ou sucrés dans les écoles. Comble du comble, le loup se fait agneau. Depuis août 2013, Coca-Cola et Pepsi font partie intégrante de la commission nationale contre l'obésité !
Ainsi, inexorablement dans les communautés autochtones, la pauvreté et la malnutrition augmentent. Sans terre à cultiver par manque d'eau, avec des produits alimentaires de plus en plus inaccessibles, une personne peut dépenser alors jusqu’à 17,5% de son salaire minimum journalier en produits Coca-Cola pour tromper la faim compromettant dangereusement sa santé physique.
COCA-COLA SOUILLE LA TERRE
Hormis le manque d´eau prévisible que provoque Coca-Cola au Mexique, le problème de la pollution prend de l'ampleur. Il y a d'abord le problème des déchets plastiques. Les bouteilles plastiques représentent l´équivalent de 2 190 tonnes de déchets plastiques que Coca-Cola ne ramasse pas ni ne réutilise. Les bouteilles "PET", chacune composée de 50 grammes de plastique, ne sont pas biodégradables car elles sont pratiquement indestructibles, surtout lorsqu´elles finissent enfouies dans une décharge.
Il existe un autre problème environnemental incontrôlable, c´est celui des "boues toxiques", produites par les usines d´embouteillage. Les boues sont le résultat du processus de préparation des boissons et comportent en général de forts niveaux de déchets industriels toxiques tels que le plomb, le cadmium et le chrome (tous cancérigènes).
Cette histoire de conquête des temps modernes fait écho à l'histoire tragique de la première confrontation : "Au cours du mois de mars 1517 les ambassadeurs de Moctezuma, seigneur de Mexico-Tenochtitlan, accueillent le navire de Hernan Cortés en "mangeant la terre", selon le rituel de bienvenue réservé au dieu Quetzalcoatl, et cette rencontre initie l'une des plus terribles aventures du monde qui s'achève par l'abolition de la civilisation indienne du Mexique, de sa pensée, de sa foi, de son art, de son savoir, de ses lois" ( lien )
"Ainsi commence cette Histoire, par cette rencontre entre deux rêves : le rêve d'or des Espagnols, rêve dévorant, impitoyable, qui atteint parfois l'extrême de la cruauté ; rêve absolu, comme s'il s'agissait peut-être de tout autre chose que de posséder la richesse et la puissance, mais plutôt de se régénérer dans la violence et le sang, pour atteindre le mythe de l'Eldorado, où tout doit être éternellement nouveau. D'autre part, le rêve des Mexicains, rêve tant attendu, quand viennent de l'est, de l'autre côté de la mer, ces hommes barbus guidés par le Serpent à plumes Quetzacoatl, pour régner à nouveau sur eux. Alors, quand les deux rêves se rencontrent, et les deux peuples, tandis que l'un demande de l'or, les richesses, l'autre demande seulement un casque, afin de le montrer aux grands prêtres et au roi de Mexico, car, disent les Indiens, il ressemble à ceux que portaient leurs ancêtres, autrefois, avant de disparaître. Cortés donne le casque, mais il demande qu'on le lui rapporte plein d'or. [...] La tragédie de cet affrontement est tout entière dans ce déséquilibre. C'est l'extermination d'un rêve ancien par la fureur d'un rêve moderne, la destruction des mythes par un désir de puissance. L'or, les armes modernes et la pensée rationnelle contre la magie et les dieux : l'issue ne pouvait pas être autre." J.M.G. Le Clézio "Le rêve mexicain ou la pensée interrompue".
Depuis, cette tragédie n'a jamais cessé. Avec le traité de "Libre Commerce" de 1994, l'Alena,les multinationales d'Amérique du Nord et du reste du monde sont en train de parachever la conquête entreprise par les conquistadores il y a cinq siècles. Le 1er janvier 1994, a vu aussi le soulèvement sur les hauts plateaux ( los Altos) du Chiapas, de ces descendants des Mayas, ceux qui depuis la Conquista n'avaient plus de voix. Depuis, avec le subcomandante Marcos, ils essaient de maintenir dans les consciences la flamme de ce vieux rêve enfoui.
"OUVRE UN COCA OUVRE UN MALHEUR" (2)
Les pratiques prédatrices et dangereuses pour les populations de cette multinationale ne s'arrêtent pas aux frontières du Mexique. Partout dans le monde les mauvaises pratiques et les méfaits de cette entreprise de soda sont légions. Dans plusieurs Etats de l’Inde (Rajasthan, Uttar Pradesh, Kerala, Maharastra) des communautés sont sur le pied de guerre contre la multinationale qui épuise les ressources en eau. En Amérique latine on dénombre de nombreux cas d'intimidation ; En Colombie, depuis 1990, huit travailleurs de Coca-Cola ont été assassinés par des paramilitaires et 65 autres ont reçus des menaces de mort. Le syndicat colombien Sinaltrainal a dénoncé le fait que la multinationale se trouve derrière ces actes. En Espagne la compagnie vient d'annoncer le licenciement de 1250 travailleurs et le replacement de 500 autres alors que l’entreprise dégage d’énormes bénéfices, de plus ou moins 900 millions d’euros, et a un chiffre d’affaire de plus de 3 milliards d’euros.( lien )
Coca Cola n'aime pas que l'on dénonce ses pratiques ou les méfaits de son breuvage sur les populations. Après un documentaire à charge " Coca Cola la formule secrète" diffusé le 8 janvier 2013 par France 2, Coca-Cola, a écrit à Rémy Pfimlin pour se plaindre et annoncer qu'il mettait fin à son contrat publicitaire en 2013 sur les chaînes du groupe public. Selon le Canard Enchaîné, le montant de ce contrat était de « quelque 2 millions d'euros ».
Coca-cola est certainement la plus emblématique dans cette entreprise de spoliation des richesses d'un pays. A son dernier slogan publicitaire : " Merci de partager du bonheur" répondons que si nous voulons bien partager du bonheur ce sera sans Coca-Cola car "ouvrir un Coca c'est ouvrir du malheur".... (2).
Note : pour une information plus complète, lire l'article de Roblin : "Les mensonges de Coca-Cola " sur Agora Vox
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(1) Propos à rapprocher de ceux de P. Le Lay , PDG de TF1, recueillis en juillet 2004, par la société EIM dans « les dirigeants français et le changement » :
« Il y a beaucoup de façons de parler de la télévision. Mais dans une perspective 'business', soyons réaliste : à la base, le métier de TF1, c'est d'aider Coca-Cola, par exemple, à vendre son produit. […] Or pour qu'un message publicitaire soit perçu, il faut que le cerveau du téléspectateur soit disponible. Nos émissions ont pour vocation de le rendre disponible : c'est-à-dire de le divertir, de le détendre pour le préparer entre deux messages. Ce que nous vendons à Coca-Cola, c'est du temps de cerveau humain disponible. »
"Selon le professeur Robert Lustig, boire deux cannettes de Coca revient à fumer deux paquets de clopes par jour. Le soda est aussi addictif que le tabac (comme lui, il dope la production de dopamine) et il réduit aussi l’espérance de vie d’environ vingt ans par le moyen d’attaques cardiaques, d’AVC, de diabète, de cancers, de démence (sans parler des rots et flatulences)."