Energie : un tournant type Concordia
[Cette image du titre vaut aussi en ce sens que cela entraine un cortège d’inconscients naïfs qui feront les frais du naufrage]
Le tournant dans le domaine énergétique que l’on nomme très improprement Transition énergétique, mais qui en fait se révèle être engagement dans une voie sans issue qui impliquerait un budget pharamineux bien loin des capacités de notre économie et surtout des moyens financiers des consommateurs, se matérialise dans un projet de Loi. Il faut rappeler qu’en matière d’énergie il y a des inerties très importantes qui font que les erreurs se paieront très cher au niveau de notre pays même. Les mesures anti nucléaires qui finalement remontent aux années 80 se traduisent déjà par un décrochage de la France au niveau international sur le marché du nucléaire en expansion, y compris dans la zone européenne.
L’Allemagne, pionnière en matière de sortie « légale » du nucléaire (mais qui dans la pratique n’en sort pas) est en train d’en faire le constat, ce qui ne profite nullement à nos idéologues à œillères. Tout cela s’accompagne de campagnes médiatiques et de manipulations comme sur les gaz de schistes où des documentaires qui font référence chez nous, Gasland et no Gazaran sa copie, sont des manipulations qui apparaissent grossières aux spécialistes, on citera par exemple l’Amicale de Foreurs, mais trompent la majorité des gens loin de cette question. L’essentiel est d’ailleurs là, tromper les gens peu formés à la compréhension du domaine, cela vaut aussi pour les questions relatives au Climat, submergés par un catastrophisme orchestré, et baignant dans un environnement général type Big Brother.
Mais déjà quand on apprend que nos responsables politique qui écartent même la seule prospection de gaz proches de celui que l’on consomme de plus en plus, le gaz naturel, s’apprêtent à acheter du gaz de schistes aux américains, il y a déjà de quoi se poser des questions.
Il faut bien être conscient qu’à cet instant du déclin de notre pays, c’est son avenir même en tant que grande nation qui est en jeu.
Où va-t-on en matière d’énergie ?
Ce que l’on sait du Projet de Loi sur la Transition énergétique et les commentaires que l’on peut en faire
Ségolène Royal présente mercredi le contour d'un texte qui est beaucoup moins radical et ambitieux que prévu. En disait le Figaro.
Cela situe bien d’entrée de jeu les limitations de ce projet et une des remarques que l’on peut faire d’emblée est que deux aspects fondamentaux : 1) la démographie et 2) le coût global des options qui sont inscrites dans la Loi, ne sont absolument pas traités.
1*) La démographie fait l’objet d’un black out permanent. Entre autres, alors que cette donnée majeure qu’est la démographie figurait dans les projections du Giec [groupe international climat] en janvier 2007 avec un poids conséquent, ce paramètre a disparu depuis.
2*) Quant au coût global d’un tournant énergétique ébauché en Allemagne, il reste inavouable dans un contexte politique de récession économique. Parce qu’il sera à la charge des consommateurs et contribuables principalement. Il en est de même pour le bilan de l’emploi relatif à ces orientations, où des formules générales remplacent l’analyse détaillée qui s’imposerait.
Parmi les autres éléments à prendre en compte il y a la balance du commerce extérieur. De même, il est primordial d’estimer si une option crée des emplois en France, où à l’étranger ce qui n’a évidemment pas du tout le même impact sur notre économie.
Compte tenu de la situation au Moyen orient et en Ukraine, l’énergie est un domaine qui ne peut se passer d’analyse géopolitique sérieuse. L’engagement de la France, mis en œuvre sans aucun mandat de la part des élus et encore moins du peuple français par Juppé d’abord, puis par le couple Hollande/Fabius, au Moyen Orient puis en Ukraine montre bien que cette aspect primordial, l’analyse géopolitique, n’a pas été du tout pris en compte par nos gouvernants notamment en ce qui concerne les retombées sur nos approvisionnements en combustibles fossiles.
Sans entrer dans des considérations politiques on peut mettre en avant des faits qui éclairent les points cruciaux à considérer :
a) Un élément de base soustrait à la connaissance des problèmes du Moyen Orient est constitué par le fait que la production pétrolière propre de l’Arabie saoudite est à saturation. Un pic pétrolier classique. Comme la puissance mondiale de ce pays est entièrement conditionnée par cela, on se doute que la Monarchie au pouvoir développe d’autres moyens pour conserver sa position dominante dans le monde. Devançant la levée des sanctions, la Chine commence déjà à remplacer le brut saoudien par du pétrole d’origine iranienne.
b) En conséquence les réserves pétrolières et gazières de l’Irak, de la Syrie, de l’Iran et même du Liban sur ses côtes, deviennent des objets de convoitise. Sans épiloguer, on dira que les conditions des rapports de forces du monde occidental vis-à-vis de l’Iran avec les difficultés absolument ignorées par Juppé par exemple, de l’offensive en Syrie qu’il faut bien attribuer à l’Otan puisque l’on avait en pointe la Turquie, la France et la Grande Bretagne [qui s’est depuis éclipsée diplomatiquement pour se consacrer à renouer des liens directs avec l’Iran, ce qui paraissait inenvisageables il y a peu] sous la houlette des USA et de son marathonien John Kerry (c’est la qualité principale que l’on peut lui reconnaitre avec le fait que fréquentant la région à ce point il doit sûrement avoir fait des progrès dans le double jeu) font qu’il n’est pas possible d’éviter des négociations avec ce grand pays en devenir qu’est l’Iran à l’heure actuelle. A ce propos les négociations sur le nucléaire iranien ne sont pas encore terminées que le directeur adjoint de la société Rosatom Nicolaï Spaski [Areva russe pour schématiser] s’est rendu en Iran pour négocier la vente de deux centrales nucléaires de 1000 MWe équipées d’unités de dessalement d’eau de mer apparemment. Le site retenu est proche du réacteur de Bouchehr que les russes ont aidé à terminer alors que Siemens avait plaqué le chantier et qui est en ce moment même en cours de chargement de combustible. [Sans doute est il assez incroyable pour nous qui connaissons bien les Ayatollahs « verts » chez nous, que ce pays sous la direction d’un guide suprême religieux soit aussi ferme et acharné dans son développement du nucléaire qui peut sembler être principalement à vocation civile, en évitant toutefois d’être trop naïf]
c) Il faut être clair, les possibilités actuelles de remplacement du nucléaire pour produire de l’électricité ne sont pas nombreuses. Ce sont principalement les recours au gaz et au charbon. [Des gens qui ont déjà fait excessivement fort avec leurs promesses électorales nous racontent maintenant que l’on va diviser par deux la consommation électrique en 2025. Mais dans le même temps ils veulent développer massivement le transport électrique, d’autre part la consommation électrique, hors industrie, est en hausse, notamment en Bretagne, et enfin il y a la donnée démographique].
Sur ce thème il y a l’affaire des projets de gazoducs, Southstream et Northstream, qui visent à acheminer le gaz naturel russe en contournant l’Ukraine. Le gazoduc southstream doit aboutir en Italie suivant deux points d’arrivée, tout au Nord et tout au Sud de la péninsule. Il se trouve que l’Union européenne fait pression sur les pays concernés par le transit southstream pour qu’ils suspendent leur accord. Ce qu’exécute la Bulgarie actuellement. Dans la mesure où le projet Northstream qui concerne l’Allemagne [où il a fait l’objet d’un pacte de non agression avec les « grünen »] n’est pas touché, on voit ici apparaitre clairement la différence de poids et de traitement des pays du sud, dont la France, vis-à-vis de l’Allemagne dans le cadre de l’Union européenne. Il est à noter que l’Autriche n’a apparemment pas l’intention de renoncer à être alimentée par Gazprom avec laquelle elle a un contrat pour sa compagnie OMV, suivant ce gazoduc.
A la lumière de ces faits, si l’on examine la politique extérieure de la France : maintien de l’attitude négative à l’encontre de l’Iran, soutien d’une coalition en Syrie qui n’existe plus, liens resserrés avec l’Arabie saoudite, la Qatar et Israël, d’ailleurs non suivis de véritables accords commerciaux (l’Arabie saoudite, entre autres, a choisi des réacteurs nucléaires coréens plutôt que notre EPR), hostilité permanente envers la Russie, force est de constater qu’elle est complètement à côté du sujet et qu’elle met gravement en péril les intérêts fondamentaux de notre pays.
Comme si cela ne suffisait pas on ajoute un ostracisme obtus sur la question de la prospection du gaz de schistes sur nos territoires.
Le projet de Loi Transition énergétique
Toute la tartufferie de la présentation de cette Loi, destinée à tromper des citoyens peu au fait de la question et soumis à un intense pilonnage médiatique de propagande, est contenue dans ce paragraphe : « Les politiques publiques concourent au renforcement de la compétitivité de l’économie française et à l’amélioration du pouvoir d’achat des ménages. Elles privilégient, à ces fins, un approvisionnement compétitif en énergie et favorisent l’émergence et le développement de filières à haute valeur ajoutée et créatrices d’emplois. Elles accompagnent les transitions professionnelles. » Mais rien ne peut cacher le fait que tout cela va conduire à une forte augmentation des coûts de l’énergie, absorbés principalement par les consommateurs et contribuables, et que la vraie mutilation d’un de nos pilier industriel à l’intérieur et à l’extérieur, où nous sommes en train de disparaitre du paysage, le nucléaire, va notamment se traduire par d’importantes destructions d’emplois qualifiés.
Alors que le fondement scientifique est quasi nul, on a droit dans le texte à des formules, couramment martelées à longueur d’ondes, mais qui sont totalement dépourvues de vérité sur le fond : « énergie propre » pour qualifier une voiture électrique bourrée de batteries, énergie positive pour un bâtiment suggérant une auto suffisance aujourd’hui inexistante dans les possibilités de conception, renouvelable pour un biocarburant qui nécessite de la chaleur industrielle pour sa fabrication… Il est vrai que l’on a déjà le charbon propre, le gaz vert, la combustion du bois au bilan carbone nul…
Une bulle financière
Ainsi la conclusion la plus évidente de toute cette nouvelle donne et peut-être est ce finalement son but véritable, est la création d’une bulle financière qui, dans la pratique, est insupportable pour notre économie en récession.
Les coûts : aperçu.
Une fois dressé ce contexte général et pour revenir au projet de Loi, notamment un de ses vecteurs de changement c'est-à-dire le soutien massif à l’éolien et au Photovoltaïque, on mettra d’abord en évidence la réalité, ci-dessous, en citant les chiffres du Figaro [qui n’est pas mon journal de référence, mais qui sur le nucléaire est un peu moins tendancieux] qui donne un ordre de grandeur du coût global du tournant énergétique issu de l’expérience allemande.
Le Figaro :
« En 2014, (en France) la contribution au service public de l'électricité (CSPE) devrait atteindre 8,4 milliards d'euros, contre 7,2 milliards en 2013. Cette taxe, acquittée par tous les Français sur leur facture d'électricité, est destinée à financer l'essor des énergies vertes, via le rachat subventionné du kilowattheure (KWh) éolien ou solaire. »
Alors que la part de production électrique de ces énergies est quasi nulle [on paie donc des sommes folles pour ces mâts avec pales qui saccagent les paysages], on se demande quel niveau de financement on atteindrait si l’on se situait à 30/40 % de part de courant produit anarchiquement de cette manière, selon l’objectif de la Loi. La contingence forte de tout cela est aussi passée sous silence. En effet, cela exige des améliorations énormes du réseau électrique et les « smart grids » dont les coûts ne sont absolument pas pris en compte, mais où l’unité est la dizaine de milliards d’euros.
Le Figaro :
« Les doutes sur la transition énergétique sont nourris aussi par l'exemple allemand. L'Energiewende (le « tournant énergétique »), qui se traduit par le retrait progressif et total du nucléaire, est estimé à quelque 500 milliards d'euros [en fait c’est plutôt le double], « davantage que le chantier de la réunification », grincent ses détracteurs. »
On aura compris que la facture va être salée et des mécanismes tarifaires de la future Loi précisent que ce sont les couches moyennes qui vont être sollicitées en priorité.
Les « économies d’énergie » se traduisent surtout par un alourdissement de la facture des travaux de rénovations à travers des mesures autoritaires.
Le nucléaire
En ce qui concerne le nucléaire, tout est évidemment faussé par la manière exclusivement politique dont le sujet est traité. Et cette approche conduit évidemment à naviguer entre les groupes d’influence pour arriver à une solution bancale qui ne satisfait personne. Il est à noter que la fermeture de Fessenheim ne fait pas partie explicitement du projet.
Les réacteurs nucléaires
Ainsi on « invente » littéralement une fin de vie des réacteurs REP à 40 ans, sans toutefois la formaliser dans la Loi, alors que la question est totalement scientifique et technologique et que de ce point de vue cette durée peut s’envisager sur 60 ans. Ainsi, pour les REP, avec un coût de rénovation et de mise à niveau de la sûreté raisonnable par rapport à de nouveaux investissements de moyens de production, on s’offrirait la possibilité d’avoir une électricité peu chère [à peu près au niveau actuel soit 40/45 euros/MWh, à peu près le coût du MWh gaz actuellement avant les augmentations inéluctables de cette source d’énergie, alors que l’EPR est déjà à 70/90 euros/MWh]
Se priver de cette option c’est aussi augmenter sérieusement la facture de cette Loi par un manque à gagner de plusieurs dizaines de milliards d’euros.
Aucun argument technique, ne parlons pas de critère scientifique, n’est donné à la donnée de base de réduire la part de l’électronucléaire à 50% [notamment cela ne joue pas sur la sûreté accidents graves, cela coûte pour l’équilibre du réseau et cela conduit à construire des chaudières à gaz à cycles combinés]]. C’est une promesse électorale justifie-t-on. Et la responsabilité est laissée à l’EDF de planifier les fermetures de réacteurs nucléaires, en fonction aussi des réalisations comme l’EPR de Flamanville, pour atteindre cet objectif politique rétrograde.
Le stockage des déchets nucléaires
Parmi les sujets sensibles, il y a le site de stockage profond des déchets nucléaires. Là, il faut reconnaitre qu’il y a tout de même des gros problèmes de cohérence et d’orientation dans ce projet Cigéo. La première question est l’antinomie entre la notion de réversibilité et le stockage profond dont l’esprit est d’être permanent. Du coup on aboutit à un projet complexe qui n’inspire pas confiance. Enfin, l’esprit de Loi Bataille de 1991 est d’aboutir à un cycle d’élimination des transuraniens [éléments à vie longue] et des Produits de fission par transmutation ou combustion. Il semble que des essais partiels réalisés dans Phénix avant qu’il ne ferme étaient prometteurs sur une voie qualifiée d’ « homogène » en ce sens que l’on intégrait les éléments à traiter dans le combustible nucléaire même. Cette démarche semble enterrée.
Les articles 34 et 35 du projet de Loi concernent notamment le stockage profond des déchets nucléaires. Et l’article 35 autorisait le gouvernement à engager par ordonnance Cigéo, le site prévu près de Bure. Il vient d’être retiré sous pression politique démontrant bien que l’essentiel se tient à ce niveau. Reste l’article 34 qui autorise le gouvernement à légiférer par ordonnance pour transposer les directives européennes relatives aux transports et stockage des déchets radioactifs.
Un projet autoritaire
D’une manière générale le ton de ce projet est autoritaire. Il s’agit d’imposer les choix et les références à la transparence et aux consultations ne sont qu’un habillage. Le recours à une gouvernance par ordonnances va au-delà du problème de stockage des déchets nucléaires.
Il concerne aussi le développement de ce l’on nomme le réseau intelligent, c'est-à-dire les « smart grids ». Et il y a un nombre invraisemblable de contraintes.
En route vers l’anarchie
Enfin, on relèvera une privatisation rampante de la gestion de l’Hydroélectrique et un encouragement au développement de sources autonomes de production en matière d’énergie. On abolit ainsi le seuil de 8.000 kVA dans le code général des collectivités territoriales pour permettre aux communes d’exploiter une installation hydroélectrique quelle que soit sa puissance. Cela peut par exemple générer de multiples petits barrages au fil de l’eau dont on sait qu’ils sont nuisibles à l’environnement et à la faune.
Il est absolument clair que pour absorber et gérer tout cela au niveau du réseau électrique, il est impératif d’imposer le réseau intelligent.
Une inflation de fonctionnaires
Du point de vue de la création d’emplois, la chose la plus claire concerne le nombre de fonctionnaires supplémentaires qu’il faudra pour gérer les chèques énergies, dans des agences, dans les collectivités territoriales pour gérer les interrelations et les plans énergies, ainsi que les dossiers d’autorisations…
Conclusion
Ces choix complètement à contre courant de ce qui a amené la France à une position privilégiée dans le monde, symbolisé par le rayonnement d’EDF, avec un courant électrique peu cher et sûr, un niveau très faible des incidents nucléaires sur nos installations, une industrie nucléaire compétitive mondialement et une recherche d’un niveau élevé, conduisent au naufrage de notre économie et de notre industrie. Et le renflouement n’est absolument pas garanti.