vendredi 9 septembre 2016 - par Aimé Mathurin Moussy

GABON : « On vous connaît »

Gabon : « On vous connaît »1

 

Nous sommes devenus aveugles. La mauvaise pente que suit notre continent risque de nous conduire au drame. En quelques jours, elle s'est dangereusement raidie, le Gabon. Une élection mal ficelée et mal gérée a déclenché une explosion de violence disproportionnée, avec en prime, la volonté tactique d'une oligarchie en perte de vitesse et plus soucieuse de ses intérêts que de ceux de la nation. Le terrain est favorable à cet embrasement. Il est inévitable que la politique confuse et velléitaire menée par la famille Bongo depuis quatre décennie conduisît à cette épreuve. L'élection présidentielle n'est que le catalyseur d'une réaction qui trouve ses sources multiples dans un mécontentement général et lui-même porteur de divisions. Le pays est à tous les égards déchiré, jusqu'au sein de chacune des familles politiques qui le composent. La République gabonaise est gangrenée.

Vient de s'ajouter à ce paradigme l'apparition de la violence physique sous des formes extrêmes. Les voies de fait commises au cours des récentes manifestations, ont eu pour point d’ancrage la mise à feu du parlement. Signe de rejet des institutions et d'un pouvoir. On court vers une tragédie et les prémices des tragédies de ce siècle sont plus politiques que sociales. Le fait que ces tragédies n'aient pas interpellé la communauté internationale avec des signes forts, ouvre le champ d'une navigation à vue qui sert les autocrates.

Il est vrai que les honteuses incitations à la haine menées contre la communauté internationale, ont de quoi décourager les âmes de bonne volonté et encourager les dictateurs. Ce scandale illustre le délabrement moral de l'Afrique. En Afrique, la pauvreté, la mort, le malheur ne sont jamais gratuits, c'est soit la faute du sorcier, soit la faute du Blanc.

L'intelligentsia africaine se suicide

L'intelligentsia africaine réagit à ce désordre par une ambiguïté effarante,par des arguties panafricanistes disproportionnées. Faisant-fi de sa rigueur scientifique, et de sa fermeté dans une analyse logique et circonstanciée. Car comment rester aveugle devant ce cas d'école ?

soit un pays de 1,8 millions d'âmes divisées en neuf provinces et comptant 62800 électeurs inscrits.sachant que le cumul des suffrages recueillis par le candidat Jean Ping dans huit des neuf provinces lui donne une avance de plus de 60000 votes sur le sortant Ali Bongo, quel score doit atteindre ce dernier dans le Haut-Ogoué où l'on dénombre 7174 inscrits, pour combler et devancer son challenger et devancer son challenger de 5594 voix ?

Consignes

Deux chiffres après la virgule. Vous prendrez soin dans votre réponse, de combiner le taux de participation et résultat. Vous ne tiendrez pas compte du fait que l'abstention dépasse dans le reste du pays, 40%. Ni que la gouvernance du chef de l’État est contestée jusque dans ladite province, fief historique du clan Bongo.

Réponse

le chef de l’État doit pour cela recueillir 95,46% de suffrages, avec une participation de 99,93%. Ainsi fut fait le 27 août. CQFD.

Vincent Hugeux , in Présidentielle au Gabon l'ultime triche. L'express du 09 septembre 2016.

A titre de rappel voici les provinces du Gabon et leur population :

Estuaire : 662,028 habitants,Jean Ping est gagnant

Ogoue Martime : 128,471 habitants, Jean Ping gagnant

Nyanga : 50,297 habitants,jean Ping gagnant

Moyen Ogoue : 60,990 habitants,Jean Ping gagnant

Ngounié : 101,445 habitants, Jean Ping gagnant

Ogoue Ivindo:64,534 habitants, Jean Ping gagnant

Ogoue Lolo : 64,534 habitants, jean Ping gagnant

Woleu Ntem : 157,013 habitants, Jean Ping gagnant

Haut-Ogoué : 228,471, Ali Bongo gagnant

Sources de la population, GEOHIVE , d'après les informations de la direction des statistiques du Gabon

Cette assertion, ne laisse planer l'ombre d' aucun doute qu'Ali Bongo, est loin d'avoir la légalité et la légitimité requises. C'est face à toutes incongruités, qui insultent l'intelligence humaine que certains rhéteurs : avocats,philosophes, écrivains, voire des hommes politiques, qui aspirent un jour à la magistrature suprême , s'érigent en défenseurs de l'indéfendable .

 

Le panafricanisme de circonstance d' Ali Bongo

Serait-il disposé à le devenir sur le tard tard ? Son discrédit est trop avancé, il a fait voter une résolution envoyant Mouammar Kadaffi au gibet, un panafricaniste celui qui se dit être en rupture avec l'Occident, aurait pris , même au prix de sa vie une résolution contraire. En Côte-d'Ivoire, tandis que toutes les braises brûlaient contre Gbagbo, il a attisé l'incendie, Nkrumah ne l'aurait jamais fait.

Par ailleurs, celui qui prétend être en rupture avec les puissances impérialistes a payé à fortes sommes des lobbies de communicants, pour avoir la primeur de passer à une heure d'écoute sur les médias impérialistes. Cependant, sa milice a détruit les médias de l'opposition .Qui veut-il tromper ?

Celui qui veut être en rupture avec les forces impérialistes, a épousé la fille des impérialistes... Celui qui est anti impérialiste est gardé par les Coréens et les Marocains, sans oublier les mercenaires des puissances impérialistes qui entraînent la garde présidentielle... Il utilise encore la monnaie coloniale . Quand il est malade, il se fait soigner au Maroc, en France. Son directeur de cabinet en ce moment est soigné au Maroc ! Populisme quand tu nous tiens !

L'autorité procède d'un consentement. Il n'en dispose plus. Un comble : le peuple le nargue en dressant contre lui un procès en déni de démocratie tout en annonçant de nouvelles manifestations, au risque de provoquer le pire. Dans le même temps, la menace d'une pénurie alimentaire réapparaît sous la forme la plus aveugle.

Toutes les conditions sont réunies pour laisser au hasard le soin de décider de notre destin, sauf à penser à une reprise en main brutale de la situation par la rue, hypothèse imaginable dans le contexte politique actuel.

Le rêve serait que survienne un sursaut d'union nationale, perspective à laquelle aspire confusément une majorité de Gabonais et d'Africains. Ça ne peut être qu'à l'initiative de la classe politique. C'est l'ère de la révolution, comme le disait si bien Alain Mabanckou, pour décrier le holp-up électoral, au Gabon et au Congo.

 

« Les nés avant la honte »2 ?

Les jours qui viennent vont donner la mesure du civisme des acteurs de la présente crise.

Dans cette crise, un relent de racisme est agité dans certaines communautés. On affuble Ping d'être un suppôt de l'étranger du fait de sa peau. Et c'est sur cette vague que surfe une apeurée opinion du changement. Cette opinion veut faire croire que les Gabonais sont des abrutis, qui ne se savent pas différencier Ping de Bongo. C'est un parjure loin s'en faut ! Ping est métisse chinois, donc vouer aux gémonies ?. Manière de faire et de voir qui est contraire à notre culture africaine, encline à la tolérance, et à l'hospitalité.

Pour sortir de l'étau de la violence qui s'enracine quotidiennement, la rencontre entre l'Union africaine et les différents protagonistes, sera le marqueur du retour à l'ordre républicain. Cette négociation est décisive. Surtout ne pas apporter des solutions à la Kenyanne, où il faille se partager le pouvoir, éviter ce genre de solutions boiteuses.

Politiquement et socialement, on souhaite qu'elle aboutisse à un accord. Ça ne sera de toute façon qu'une trêve. Mais il éviterait que la crise ne prenne dans l'immédiat des proportions tragiques. Nos gouvernants africains sont-ils si inconscients et Ali Bongo si monstrueusement irresponsable pour que les uns et les autres soient prêts à plonger le Gabon et la sous région dans le chaos ?

  1. titre de Patience Dabany

  2. Patience Dabany

    AIME MATHURIN MOUSSY

 



3 réactions


  • Sozenz 9 septembre 2016 12:21

    bonjour .

    depuis un certain temps je vois de nombreux articles sur les elections au Gabon que ce soit sur agoravox ou ailleurs
    je ne peux simplement vous dire , que les politiques sont biaisées . toutes les politiques dans le monde entier .
    Je sais que ça ne va rien arranger , ni rien changer de dire cela . sauf que votre situation , notre situation et la situation de tous les pays sont liées et concernent tous les peuples du monde entier ...
    Cordialement.


  • geronim23 9 septembre 2016 20:36

    Ce qu’il ne faut pas oublier c’est que Jean Ping n’est qu’un pion (pour ne pas dire pneu secours des occidentaux) vu qu’Ali Bongo (qui est tout aussi pourri que Ping) refuse de danser maintenant sur la musique de ces néocolonialistes.


    • Oceane 9 septembre 2016 22:29

      @geronim23

      L’auteur en est encore à croire que voter pouvait changer quelque chose.

      « Si voter pouvait changer quelque chose ce serait interdit ».

      J’ignore si la citation est exacte, mais l’esprit y est.


Réagir