lundi 17 juillet 2017 - par Aimé FAY

Heures supplémentaires défiscalisées : quels risques ?

Avec la mise en œuvre de la promesse de campagne d’Emmanuel Macron sur les heures supplémentaires défiscalisées, le gouvernement risque d’être confronté à plusieurs écueils de taille. D’une part, favoriser l’emploi dans les pays étrangers et d’autre part, déclencher une baisse de la production en France, avec toutes ses conséquences négatives sur l’emploi et les revenus. Exactement l’effet contraire à celui recherché par notre Président jupitérien !

Tout d’abord, il convient de dire que ce n’est pas la loi qui crée le besoin d'heures supplémentaires. Pour une entreprise, les heures supplémentaires n’ont rien d’un phénomène de génération spontanée comme le laisse croire depuis quelques mois le Président Macron... comme l’avait fait croire Nicolas Sarkozy, avec les conséquences que l’on connaît.

En effet, c’est l’augmentation de la demande, c’est-à-dire la croissance, anticipée ou non, en volume du chiffre d’affaires des entreprises qui crée un besoin d’heures supplémentaires... ou de nouvelles embauches, s'il perdure. Et, surtout pas l’inverse ! Pas non plus, naturellement, la volonté du salarié de travailler en heures sup sans l’accord express de son entreprise.

Le modèle du Président nouvellement élu s’inspire d’un modèle libéral. Celui-ci énonce en l’espèce que :

Production = Revenu

Dans cette équation, il est supposé que l’équilibre "production-revenu" est réalisé a priori et que les revenus vont développer la production et donc l’emploi. En fait, ce modèle libéral édicté par Adam Smith au 18ème siècle - c’est quand même assez loin - est purement théorique. Dans la réalité économique, si l’équilibre est réalisé, celui-ci l’est a posteriori (ex post) et non surtout pas a priori (ex ante) !

Le gouvernement a établi ses prévisions sur le fait que les nouveaux revenus créés par les heures supplémentaires vont engendrer une croissance de la production et alimenter ainsi le triptyque vertueux "revenu-production-emploi". Cela suppose au moins deux choses intangibles : que les nouveaux revenus ne soient pas épargnés et surtout que ces revenus aillent alimenter la demande de consommation de produits fabriqués par les industries implantées sur notre territoire. Dans le cas contraire, cela sera catastrophique. Les deux risques suivants sont explicites.

1er risque.

C’est celui de voir ce surcroît de revenus favoriser non pas les productions françaises, mais celles importées de pays étrangers, car utilisé pour acheter des produits fabriqués à l’extérieur du territoire tels que : les écrans plats, les chaînes hi-fi, les équipements vidéos, les téléphones portables et autres vêtements et chaussures de basse et de moyenne gamme. Sans parler d’achats de voitures à bas prix fabriquées dans les pays de l’Est européen ou au Maghreb. Dans ce cas, l’argent du contribuable - par cadeau fiscal interposé fait aux salariés comme aux entreprises - sera utilisé pour favoriser la croissance et l’emploi dans d’autres pays. C’est sûrement bien pour eux, notamment pour les nouveaux pays de l’Union européenne (chers au Président, comme à nous), mais catastrophique pour l’économie de la France et tout à fait contraire à l’effet, sincèrement recherché, par le Président de la République !

2ème risque.

C'est d’affaiblir notre croissance. En effet, quand une entreprise demande à ses collaborateurs de travailler en heures supplémentaires c’est qu’elle va, de façon mécanique, mettre plus de produits sur le marché (concept keynésien de demande anticipée). Or, si ses produits ne sont pas tous achetés, car le consommateur porte sa demande plutôt sur des produits importés, l’entreprise va réagir de deux façons : soit baisser sa production et écouler ses stocks, soit diminuer ses prix. Dans les deux cas, il y a un risque de baisse de la croissance et aussi d'un réajustement plus ou moins brutal de la masse salariale. Voire aussi des licenciements !

Par ailleurs, dans les risques énumérés ci-dessus, nous n’avons pas non plus tenu compte que l’État sera aussi perdant en termes de rentrées fiscales puisque que ces fameuses heures supplémentaires seront exonérées tant pour l’entreprise que pour le salarié, même partiellement. Nous n’avons pas non plus évoqué le fait qu’une entreprise aura désormais intérêt à remplacer toute embauche (par exemple moins de 10 % du personnel employé) et toute augmentation de salaire, par un volume (quelque 10 % par exemple) d’heures supplémentaires défiscalisées.

Voilà peut-être une nouvelle niche fiscale qui apparaît. Favorable tant aux entreprises qu’aux salariés, mais dont les effets sur la croissance et la création d’emplois risquent d’être déplorables.

En conclusion.

Le projet du Président Macron doit donc être rapidement repensé sous peine d’un éventuel échec cuisant.

Confronté à la réalité de présider et de gouverner, il n’est pas impensable de revenir sur une mesure prise en période d’élection. Période durant laquelle les électrices et les électeurs veulent entendre des promesses, tout en sachant qu’elles ne doivent pas obligatoirement être mises en œuvre... comme le passé l’a toujours démontré !



14 réactions


  • Francis, agnotologue JL 17 juillet 2017 10:41

    Il y a deux aspectes : la défiscalisation et l’exonération de charges.

     
    La défiscalisation des heures supplémentaires est contraire à l’égalité devant l’impôt : ça donne une couleur à l’argent qui n’a pas lieu d’être. A revenu égal, un cadre et un employé ayant réalisé plus de 39 heures par semaines, et le même nombre d’heures, et toutes choses égales par ailleurs, ne paieront pas le même impôt sur le revenu : le cadre paiera davantage, puisque ses heures ne sont jamais comptabilisées en heures supplémentaires.
     
    Sarkozy avait fait à la fois la défiscalisation et l’exonération des HS. Comme on ne voit pas de logique à la défiscalisation seule, il faut croire que le maître des horloges a l’intention de précéder en deux temps.
     
    Lorsque la défiscalisation et l’exonération des HS seront instituées, alors, il n’y aura plus de différence entre un revenu acquis par travail rémunéré en HS et un travail réalisé « au noir »
     
    Qu’est-ce qui empêchera alors les chefs d’entreprises indélicats à gonfler artificiellement le poste coimptable des heures supplémentaires payées, détournant ainsi à leur profit des bénéfices rendus par le fait, occultes ?
     
    Voir l’article et le forum intéressant réalisés il y a déjà quelques années et enrichi au fil du temps : 35 heures et heures sup’

  • Sozenz 17 juillet 2017 10:55

    C’est celui de voir ce surcroît de revenus favoriser non pas les productions françaises, mais celles importées de pays étrangers, car utilisé pour acheter des produits fabriqués à l’extérieur du territoire tels

    C’est d’affaiblir notre croissance...

    euh c est quoi le rapport avec la défiscalisation des heures supp ?
    votre logique parfois me dépasse complétement.
    restez centré sur des points essentielles au lieu de vous disperser n importe comment 

    non mais c est fou... sortez de vos bouquins et allez vivre la vraie vie . vous confronter à la réalité des choses .
    je n ai jamais pu etre d accord avec un seul point de vos articles . c est incroyable . il y a des moment où certaines personnes ont pu me coller des doutes . mais vous même pas un seul .


    • Aimé FAY Aimé FAY 19 juillet 2017 06:55

      @Sozenz

        • C’est d’affaiblir notre croissance...

          euh c est quoi le rapport avec la défiscalisation des heures supp ?
          votre logique parfois me dépasse complétement. »

      Réponse : les HS sont un surcroît de revenu. Avec ce supplément de revenu que fait l’ouvrier ? Il achète des produits de luxe « made in France » ou des produits d’importation : portable, vêtements, chaussures, Hi-Fi, petite voiture, etc. Les importations entrent, par soustraction, dans le calcul de la croissance. Donc : plus d’importations = moins de croissance éco. CQFD !

      Soyons plus sévère, MAIS avec vous-même. Il lisant vos articles « on » en apprendre beaucoup sur vous et votre logique. Donc, restez très très modeste !


    • Sozenz 22 juillet 2017 01:25

      @Aimé FAY
      Avec ce supplément de revenu que fait l’ouvrier ? Il achète des produits de luxe « made in France »

      alors là vous confirmez bien que vous êtes hors réalité ...
      savez vous ce qu est un ouvrier ; et ce que sont des produits de luxe .
      arrêtez la moquette , ou comme je disais , sortez de vos bouquins . allez discuter avec les gens ; les monsieur ou madame tout le monde .
      Savez vous que certains travailleurs n arrivent pas a boucler leur fin de mois . allez leur dire que si on leur donne 100 euros en plus ça va les inciter à aller chercher des produits de luxe . les mecs vont vous lyncher ...
      Vous pensez que le majorité des personnes touchent combien mensuellement ?
      n allez pas courrir regardez la moyenne française ( je vous donne le chiffre 22225). allez voir les gens .
       

      le français de base bosse pour le smic . qui lui n a évolué de la même manière que le prix des produits de consommation usuels . le montant moyen du Smic net 2017 est de 1153 euros nets mensuels ( c est a dire la moitié du salaire median.( je ne parle même pas du salaire de jeunes en stage ..) A ces gens là ;

      vous vous souvenez en plus que hollande voulait favoriser les emplois au smic ... mettre un max de personne en bas ... et vous venez me parler que ces gens là vont aller acheter du luxe .


  • Sozenz 17 juillet 2017 10:58

    en faite vous me faite « peur » , je vous trouve complétement barré . un peu comme le sylvain ..
    A la limite vous êtes adapté à ce monde ;; ;


  • gogoRat gogoRat 17 juillet 2017 11:43

     ’Quels risques ?’
    une entreprise aura désormais intérêt à remplacer toute embauche (..) et toute augmentation de salaire, par un volume (..) d’heures supplémentaires défiscalisées.’

    -----
     Comment ne pas penser à ce passage de l’éloge de l’otium (B. Russell) :

    « A l’Ouest [...] Nous n’avons aucune velléité de justice économique
     [...] nous produisons une foule de choses qui ne sont pas demandées.
     
    Nous gardons un grand pourcentage de la population active inoccupée, parce que
    nous pouvons nous passer de leur travail en faisant se surmener les autres
    .
     
    Quand toutes ces méthodes s’avèrent inadéquates,
    nous avons une guerre :
    nous faisons en sorte qu’un certain nombre de personnes fabriquent des explosifs puissants, et qu’un certain nombre d’autres les fassent éclater,
    comme si nous étions des enfants qui venaient de découvrir le feu d’artifice
     »
     


  • foufouille foufouille 17 juillet 2017 11:58

    "C’est celui de voir ce surcroît de revenus favoriser non pas les productions françaises, mais celles importées de pays étrangers, car utilisé pour acheter des produits fabriqués à l’extérieur du territoire"
    ce qui est le cas de la plupart de ce que tu achètes mais le plus souvent c’est une entreprise française qui revend ces objets importés.


  • gogoRat gogoRat 17 juillet 2017 12:24

     Essayons benoîtement de deviner comment a pu germer cette idée fausse de favoriser les heures supplémentaires :
     - estimation d’un manque de ’ressources humaines’ pour la production ?
     _ mais alors, vu la proportion énorme de chômage, cela voudrait dire que :
     * soit les chômeurs sont tous incapables de combler ce ’manque de ressources humaines’ ?
     * soit, ils peuvent être compétents et motivés mais leur emploi reviendrait trop cher ?
     Trop cher pour qui ? Pour l’Etat ??
    Mais alors pourquoi l’Etat préférerait-il ’aider’ des non-chômeurs (qui voudraient travailler plus pour gagner plus  ?) ... que des demandeurs de contrats de subordination, qu’Il a pris l’habitude de radier de leurs droits ?

     Tout se passe comme si les chômeurs étaient vus, à la fois par l’Etat (et ses fonctionnaires à vie) et par les présumés ’employeurs’ comme des ’emmerdeurs’, des ’rien’ (cf actualité récente) qu’il serait bon de tenir à l’écart jusqu’à ce que mort s’ensuive.
     
     Mais supposons maintenant (serait-il indécent ou non pertinent de le faire) que l’économie du pays marche mal pour des raisons de compétences globales bien autant que pour cet aspect boutiquier et comptable de ’gestion des ressources humaines’. Supposons que des dysfonctionnements aient besoin d’être corrigés dans le ’travail’ de ceux qui sont actuellement à l’oeuvre. Comment se figurer que ces gens accrochés à leur poste, malgré l’évidence (preuve) de leur incurie actuelle vont arriver, juste en faisant plus et moins cher ce qu’ils font déjà si mal, à ouvrir les yeux sur ce qu’ils doivent corriger ? Comment ne pas voir qu’il renforceront au contraire une tendance néfaste à mettre dehors tout rapporteur de bogue , et qu’il maintiendront la porte fermée devant tout concurrent potentiel (fût-il un ’frère’ français, égal en droit) susceptible, sait-on jamais (*), de perturber par une contribution positive cette belle mécanique déficitaire et génératrice de dette, chômage, ruine et deuil !

     (  ’... et vous n’y sèmerez que la ruine et le deuil’ )
     
    (*) ’L’ennui dans ce monde, c’est que les idiots sont sûrs d’eux, et les gens avisés pleins de doutes
    dixit le logicien B. Russell


  • Sozenz 17 juillet 2017 13:02

    il n y aura pas de changement de cap de la part de macron . l objectif est de mettre une concurrence acharnée entre les personnes . de faire baisser drastiquement les salaires . le pouvoir d achat , il s en fiche . . il va faire augmenter tous les produits .
    la marge bénéficiaire sera plus grande donc , les grosses entreprises vont s’ y retrouver . les petites vont couler par contre car plus de carnet de commande .
    les heures sup seront pour les secteurs qui ne peuvent pas se passer de mains d œuvre et les gros secteur marchands non délocalisable .
    Tout le monde pour survivre et subvenir a ses besoins « doivent » acheter et effectuer des transactions . donc il y aura toujours une economie que les lobbies s approprient totalement . bientot la paysannerie , n existera plus . ce sera le moment du coup de grâce .
    priez pour que ce moment arrive le plus tard possible . 


  • Spartacus Lequidam Spartacus 17 juillet 2017 15:26

    Les revenus développent la production et évidemment l’emploi....
    On ne voit pas ce qui aurait changé depuis Adam Smith....


    Vision Keynésienne dramatique, d’une science de l’économie et d’un monde dépassé qui raisonne comme si nous étions une nation industrielle...
    La pensée ubuesque d’un raisonnement sur la pensée que c’est « la demande qui fait l’offre ».....
    Et non c’est l’inverse, c’est l’offre, qui fait la demande....

    1-Le salarié dépense « ou pas » l’argent de ses heures supplémentaires.....
    Interprétation en procès d’intention qu’il consommera de suite et en produits importés....

    2-Inversion de la logique. Si une entreprise donne des heures...Sic c’est qu’elle envisage de vendre la production... Et une production a toujours le risque d’être invendue...Nouvelle production ou pas.


    Et on découvre la vraie motivation de l’auteur.....Les rentrées fiscales de l’état.....Bref sa gamelle et la prise de conscience qu’elle ne se remplira pas...
    Quand chacun travaille à 57% pour l’état, l’auteur pense surement qu’il n’y en a pas assez à gaspiller encore ?...


  • Le421... Refuznik !! Le421 17 juillet 2017 18:21

    Depuis des lustres, on utilise les mêmes recettes avec le résultat que l’on connaît.
    Macron va juste accélérer le processus.
    Le côté positif, c’est que ça va vite se voir.

    Comme disait un copain, ne gueule jamais « Mort aux cons !! » dans la rue si tu ne veux pas être inculpé pour génocide...


  • Le421... Refuznik !! Le421 17 juillet 2017 18:24

    http://www.la-croix.com/Monde/La-Nouvelle-Zelande-possible-refuge-pour-milliardaires-americains-2017-01-26-1300820239

    Je crois qu’il y a des rats qui veulent quitter le navire.
    C’est con pour eux, la pollution est terrestre, sans frontières.
    La merde qu’ils sèment leur retombera dessus un jour ou l’autre !!


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