Hillary : la chute
Je n’accable pas madame Clinton. Elle est à terre et j’imagine sa déception. Construire sa vie sur cet unique objectif et échouer au poteau : destin cruel. Et si elle en avait trop fait ?
Erreurs de campagne
Les interventions des Obama en fin de campagne étaient de trop. Leur soutien massif contenait un message subliminal : la candidate n’y arrivait plus seule. Elle s’appuyait sur eux plus que sur elle-même, dans une sorte de mise volontaire sous tutelle. Je soupçonne que les démocrates connaissaient le risque réel d’échec malgré les sondages, et qu’ils ont mis le paquet pour la sauver. Peine perdue.
Le sourire souvent figé d’Hillary Clinton, son attitude surjouée à chaque apparition, attitude de vainqueur désigné, manquaient singulièrement de naturel et d’humilité. Ses embrassades dégoulinantes d’amour universel fabriqué étaient les signes repoussants d’un entre-soi de riches.
D’ailleurs dans le camp Clinton le mépris des petits, des ignorants, s’est étalé sans pudeur (image 1 : Andy Borowitz, contributeur au NYT). Mépris de classe.
Ses soutiens ? La reine-mère Barbie-Hillary était éclipsée sur scène par l’impératrice Beyoncé. Il est coutume au États-Unis que les stars soutiennent un camp. Cela ne me dérange pas : je regarderai De Niro et écouterai Bruce Springsteen avec autant de plaisir qu’avant. Leur talent n’est pas en cause, même si le premier a versé dans l’hystérie. Mais, tout ce monde autour d’elle, presque comme à son chevet… mauvaise image.
Hillary can
S’entourer surtout de blacks, qui plus est des kadors millionnaires, a dû faire une drôle d’impression au petit peuple. Parti-pris racial, clivant, de la part de la démocrate. Le spectacle des super-riches noirs n’a apporté qu’une ethnicisation de la campagne. Elle aussi a divisé le pays. Populisme ? Yes, Hillary can.
Le vote ethnique des hispanos devait la faire gagner, disait-on avant le 8 novembre. Or contre toute attente, 38% des hommes et 32% des femmes de cette communauté ont voté Trump. Ces hispanos doivent être racistes ! Ou alors Trump ne l’est pas, lui qui a gagné même dans les États du sud.
Le vote des femmes n’a pas mieux fonctionné. Les soutiens d’Hillary, femmes de pouvoir richissimes, n’ont rien à voir avec les femmes moyennes et la victimisation féministe. Trump domine sa rivale de 10 point dans l’électorat féminin blanc.
A-t-on trop insisté sur la petite phrase de vestiaire de Donald sur les chattes ? Comme je l’ai rappelé De Niro n’a pas fait mieux dans le passé. Et quand la presse présente sans état d’âme les toy boys latinos de Madonna, des hommes très jeunes considérés comme des jouets, personne ne crie à la chosification du mâle ethno. Deux poids deux mesures.
Madonna et Miley Cyrus (qui offre aux spectateurs sa chatte à toucher sur scène) ont imposé les codes du porno dans leurs shows : elles sont trop décalées d’avec le discours moral du camp du Bien pour moucher Trump. Je ne juge pas, la sexualité est une belle et bonne chose, mais je regarde avec amusement cette contradiction.
Hystérie
La phrase lourdingue de Trump n’est pas pire que cela. Combien d’hommes pensent Je me la ferais bien en abordant une femme sexy ? Surtout les hommes dont parlait le républicain : des hommes riches et célèbres, puissants attracteurs de nanas jeunes et jolies en quête d’un sugar daddy ? Et combien de femmes aimeraient toucher le joli cul de certains hommes ou leur mettre la main au paquet ? Hypocrisie.
L’hystérie règne dans une partie de la presse suite à la victoire de Donald. La gauche olfactive se lâche comme une diarrhée. Une partie de la droite lui emboîte le pas. Les mots pour désigner Donald Trump sont choisis : prédateur sexuel, misogyne, raciste, et j’en passe.
Jean-Noël Cuénod, poète insignifiant et chroniqueur de la Tribune de Genève, tient le pompon et étale son prêt-à-penser. Avec lui on est dans le vide-ordure, dans l’ambiance d’égouts, comme il l’écrit. Il accuse les autres de sa propre odeur intellectuelle. En réalité son impuissance à changer le cours des choses le rend anormalement agressif. La haine l’habite. Il divise le monde entre les bons et les mauvais. Bullshit.
Il parle d’effondrement moral et intellectuel. Son camp en est largement responsable. En France par exemple, des décennies de stigmatisation de la parole, de dictature intellectuelle et morale sur l’immigration, ont mis le pays dans le désordre que l’on sait.
Trump raciste et misogyne ?
L’étouffement de la parole, le hold-up sur le discours politique, c’est son camp. Or, sur l’immigration, si les mouvements de populations sont choses normales, le véritable humanisme n’est pas de se donner bonne conscience en ouvrant toutes les frontières mais de faire en sorte que ces populations puissent vivre mieux chez elles.
Trump est-il raciste ? Les femmes hispanos et les noirs qui ont voté pour lui ne le pensent pas. Ses propos provocateurs sur les immigrants illégaux mexicains doivent être compris dans la situation locale. Le nord du Mexique est sous la coupe des mafias de la drogue. Des tueurs sans merci – plus de 80’000 morts en dix ans ! – qui envoient leur merde (ce n’est pas du cannabis) et leurs dealers vers les States.
Tous ne sont pas criminels, Trump l’a dit lui-même (« il y en a des bons »), mais c’est suffisant pour s’inquiéter. Surtout quand le gouvernement mexicain est impuissant face à ces mafias. Trump veut renvoyer les illégaux criminels ? C’est une option. Obama a laissé faire. C’est une autre option. Qui a raison ?
Trump misogyne ? Ridicule. Il n’aurait pas placé autant de femmes à de hauts postes dans ses affaires. Selon les Inrocks, qui n’est pas vraiment pro-républicain :
« Trump emploie pourtant 47% de femmes dans ses différentes entreprises et n’hésite pas à leur proposer des postes à hautes responsabilités. » Non, pas de misogynie chez Trump.
Populisme
Les musulmans ? Ses propos de campagne généralisent trop mais ce n’est pas du racisme : l’islam, et l’islam politique en particulier, n’est pas une race.
Prédateurs sexuel, Trump ? Pas de preuve. Mais l’accusation permet d’oublier les frasques de Bill…
Fasciste ? Ce n’est pas pertinent. Il n’a rien de commun avec Mussolini ou Hitler, auquel Hillary Clinton l’a comparé dans une saillie outrancière. Le seul régime aujourd’hui qui ressemble au fascisme est Daesh. Et puis le fascisme (comme le nazisme) est un produit dérivé du socialisme, pas du libéralisme.
Populiste ? Mot à la con qui montre surtout la paresse intellectuelle de ceux et celles qui l’utilisent. Bien pratique pour noyer le débat et dénigrer le différent. Pourquoi restent-ils sourds à ce qui se dit dans le vote Trump, ou dans la résistance à une mondialisation trop rapide qui laisse des populations entières sur le bord de la route ?
Le recentrement de Donald Trump sur les fondamentaux états-uniens s’explique sans recourir à la stigmatisation. Je suis d’avis qu’il faut rediscuter de beaucoup d’aspects de l’évolution à marche forcée de nos sociétés, aspects qui ne sont pas réellement assimilées collectivement. Si on ne le fait pas, si on ne permet pas aux populations de se ré-approprier l’évolution, le rejet et l’insurrection seront très violents dans quelques décennies.
Respect
Hillary Clinton a échoué. Pas parce qu’elle est femme, mais parce que c’est elle. Les commentateurs de l’émission politique C dans l’air d’hier soir ne sont pas tombé dans le panneau du féminisme victimaire. De fait elle n’a pas convaincu. Parce que le temps n’est plus à l’aveuglement ou aux bisounours. Mais je respecte son ambition et son parcours politique malgré ses mensonges et ses casseroles.
Bien plus qu’un vote anti-femmes, raciste ou anti-élites c’est un vote de ras-le-bol. Pendant qu’Obama et Hillary cumulaient les erreurs au Proche-Orient (reportage d’Arte le soir de l’élection, Du 11 septembre à Daesh) la pauvreté augmentait dans le pays. À cause d’eux en partie, des millions de personnes sont sur les routes de l’exil en Syrie et en Europe, et et des millions sont dans la rue aux States.
Enfin, Trump n’est pas un idiot ni un simple clown. Il a joué la provocation, cela a marché : il est élu. Bravo l’artiste ! Il leur a joué un bon tour. J’étais déçu de sa campagne : aujourd’hui je la comprends mieux.
Maintenant, nous pouvons nous concentrer sur les objectifs de Donald Trump et en évaluer les bons et les moins bons aspects. Nous quittons l’hystérie pour revenir dans le monde réel. Et dans le monde réel les relations USA-URSS sont importantes et concernent directement l’Europe. De ce point de vue, la chute d’Hillary Clinton et de son clan sont, a priori, une bonne nouvelle pour nous.
Propos intéressants d’un des conseillers de campagne de Donald Trump, Walid Phares. Un tout autre portrait du nouveau président :