L’être, le savoir et le bonheur
L'article aurait pu s'intituler "le dimensionnisme pour les nuls" car il s'agit d'un résumé de deux tomes de philosophie. Qu'est-ce que le bonheur ? Qu'est-ce que l'être ? Qu'est-ce que le savoir ? Et surtout quelle méthode première chacun peut-il employer pour tracer ses lignes de perspectives personnelles, pour se dimensionner ? Cet article, contrairement aux deux tomes, va s'efforcer de faire court et clair.
Pour connaître et maîtriser les dimensions de l’Univers (macro dimensions) et les dimensions du Soi (micro dimensions) pour tracer les lignes de son bon dimensionnement personnel, il faut se poser à bonne distance du Réel afin que ce Réel ne soit ni trop près (en ce cas, aveuglant) ni trop éloigné (inaccessible). Il faut commencer par regarder le bonheur comme une chose universelle et extérieure à nous.
- L’état de bonheur naît de la transformation physique et chimique de molécules.
Pour réactiver régulièrement l’état de bonheur, il faut de l’énergie en permanence, d'où la nécessité de la nutrition (du corps et de l'esprit). Nous qui sommes façonnés de matière cosmique, nous pouvons trouver les éléments de cette nutrition dans l’Univers qui recèle les éléments du bonheur et ses nourritures.
- Le bonheur ne peut se contenter d’un état stable. Il lui faut suivre une ligne d’évolution : la constance (voire la croissance) du plaisir, l'équilibre entre les opposés, la conservation, et trois choses à ne pas confondre : le mouvement, le changement et la transformation.
- Le mouvement se traduit par le déplacement. Apprendre à se déplacer dans nos différentes dimensions aide à construire son bonheur. Ces dimensions sont au nombre de neuf, ce qui permet de réaliser un enneagramme. Ces neuf dimensions sont aussi représentables sous la forme de trois triangles où la valeur du sommet de chaque forme est reprise comme valeur de base de la figure suivante (ainsi pour le bien-être et la joie).
I - Les dimensions du bonheur
a - les triangles du bonheur
Les conditions du bonheur ici s'emboîtent une à une. La confiance est la base de tout ; elle se construit dès la naissance. De la confiance primaire dépend l'aptitude au bonheur. Il n'y a rien au-dessus du bonheur.
b - l’enneagramme de Pi : une représentation du bonheur
Par une coïncidence heureuse, le premier enneagramme des valeurs de Pi se calque sur celui du bonheur. Nous allons n'en faire qu'un seul !
Voici les 54 premières valeurs de Pi qui sont à l’origine de cette construction arithmétique. Ces valeurs, placées après la virgule, sont regroupées deux par deux. On les lit de gauche à droite et de ligne en ligne.
14 - 15 - 92 - 65 - 35 - 89 - 79 - 32 - 38
46 - 26 - 43 - 38 - 32 - 79 - 50 - 28 - 84
19 - 71 - 69 - 39 - 93 - 75 - 10 - 58 - 20
Les trois triangles formés par les additions sèment les bases des éléments suivants :
Le triangle n°1 : 14 (A : confiance) + 65 (B : santé) = 79 (C : sécurité).
Le triangle n°2 : 46 (D : bien-être) + 38 (E : reconnaissance) + 84 (F : accomplissement)
Le triangle n°3 : 19 (G : joie) + 39 (H : partage) = 58 (I : sagesse)
Elément |
A |
B |
C |
D |
E |
F |
G |
H |
I |
Valeur Pi |
14 |
65 |
79 |
46 |
38 |
84 |
19 |
39 |
58 |
c - l'enneagramme des quêteurs de bonheur
La théorie dimensionniste recense neuf stéréotypes de quêteurs de bonheur : le chasseur, le bâtisseur, le semeur, le passeur, le conquérant, l'explorateur, l'esthète, le serviteur, le pêcheur.
Ces neuf modes de quête du bonheur correspondent, dans cet ordre, avec quelques nuances, aux neuf stéréotypes de la personnalité (voir l'article "L'enneagramme" de Zolko sur Agoravox"). Alors que l'enneagramme de la personnalité trouve un intérêt certain dans le monde professionnel, l'enneagramme des modes de quête de bonheur s'applique à la vie privée.
Correspondances des deux enneagrammes :
perfection- niste |
meneur |
diplomate |
généreux |
battant |
original |
expert |
loyal |
jouisseur |
chasseur |
bâtisseur |
semeur |
passeur |
conquérant |
explo- rateur |
esthète |
serviteur |
Pêcheur |
II - Les trois directions de la vie humaine
Mais le bonheur n’est pas le seul but de la vie.
En réalité, l’être humain poursuit trois buts essentiels qui sont : le bonheur (le plus légitime), la liberté et la vérité. Ces deux dernières notions ont quelque chose de plus que le bonheur : ce sont aussi des valeurs. Le bonheur doit par conséquent en tenir compte même s’il est, des trois buts, le plus légitime. Qui dit « doit » dit « obligation ».
Cette obligation repose sur un triple principe :
1 - la liberté est un devoir sacré de chacun envers l’Homme (*),
2 - la vérité un devoir nécessaire envers la société,
3 - le bonheur un devoir très souhaitable envers soi-même.
(*) Notons cette apparente contradiction : l'homme a l'obligation d'être libre ! En réalité, il est libre par nature, mais il est engagé envers l'Homme et en tant qu'Homme (détenteur d'une condition supérieure). Il n'y a donc pas de contradiction logique sur un même plan : l'homme est libre, l'Homme est engagé par sa liberté.
III - Le précepte « connais-toi toi-même », base du savoir et de l'autonomie
Le précepte « connais-toi toi même » inscrit au fronton du temple d’Apollon est le conseil le plus intelligent qui ait jamais été donné. Seulement il faut savoir l’analyser. Socrate en avait fait sa devise mais, comme il n'a laissé aucun écrit sur ses travaux, on ne sait pas s'il avait développé un mode d'emploi, une technique. Rien en tout de plus que ce que nous transmis son disciple Platon. A nous de nous débrouiller seuls pour décoder les sens profonds de cette injonction première.
Que recommande ce précepte ?
1 - de tirer une forme du savoir de la connaissance de soi,
2 - de dimensionner la liberté pour en faire, à son niveau, l’autonomie,
3 - de domestiquer la force pour en faire un pouvoir sur soi-même,
4 - de transformer ses pulsions en désirs.
Cet en-dimensionnement peut se formuler ainsi : « prends le pouvoir sur toi-même pour créer la loi de ton autonomie, choisis tes désirs et bâtis ton savoir ! »
Ce précepte, en invitant à la connaissance des "évidences", a permis d’engendrer le cogito qui, lui, fonde la démarche du savoir ("je sais que je pense" et "je sais que je suis"...). Sans ce précepte, point de cogito car Descartes l’a bien monté : il a fondé toute sa méthode sur la connaissance de soi. Le savoir ainsi fondé, il fallait ensuite ("en suite") en mesurer l'étendue. Le "que sais-je" était le chaînon logique suivant du raisonnement.
Voici l’enneagramme qu’il engendre.
L’enneagramme de l’autonomie :
Etat naturel |
Liberté |
Force |
Connaissance |
Pulsions, instincts |
Etat transformé |
Autonomie |
Pouvoir |
Savoir |
Désir |
En effet, la connaissance de soi permet de connaître ces quatre dimensions naturelles, universelles, et à les dimensionner en fonction de soi pour mieux conduire sa vie.
Dans toute société, la vérité est en danger
Car toute société comporte des instances de pouvoir. Or, la vérité (le Savoir) entre en contradiction, si ce n'est en opposition frontale, avec le Pouvoir (politique, religieux). Face au politique, Socrate a été contraint de boire la ciguë, face à la religion, Galilée a dû se récuser. Toute forme de pouvoir semble, par nature, un ennemi en puissance du savoir et de la vérité.
Cette règle vaut aussi pour le plan individuel : le pouvoir de notre désir, de notre volonté ou de notre prétention à connnaître, par exemple, nuisent à notre savoir, à notre perception de la vérité.
Plus une société tend vers le pouvoir et plus elle s’éloigne de la vérité
Le pouvoir prend notamment la forme de l’appropriation, du pouvoir sur les autres (quelquefois, mais rarement, avec les autres), de l’influence (notoriété, lobbying). Dans cette situation, le politicien et les leaders et managers, supplantent le philosophe.
La chose fonctionne aussi dans l'autre sens : la vérité peut menacer le Pouvoir. Si l'on reprend les exemples de Socrate et de Galilée, on voit que ces deux hommes étaient perçus comme subversifs et dangereux par les autorités officielles car celles-ci fondent leur pouvoir sur l'illusion, le mensonge, la manipulation. Le Pouvoir s'éloigne toujours de la vérité pour pouvoir s'exercer. Cet éloignement du réel et de la vérité est la condition même de son existence et de son déploiement.
Aujourd'hui, des formes de savoirs se transmettent par le bas, via les réseaux sociaux ou l'open source. On parle aussi d'empowerment, qui est l'octroi de pouvoir aux individus ou aux groupes pour agir sur les conditions sociales, économiques, politiques ou écologiques qu'ils subissent. Tant que ces processus nouveaux demeurent à la marge et ne menacent pas directement le Pouvoir, ils pourront prospérer. S'ils venaient à le menacer dans sa légitimité, ses attributs ou dans son existence même, ils en subiraient les attaques. Car le pouvoir ne tolère la vérité que tant qu'elle ne le remet pas en cause.
IV - Les trois composantes de l'homme
L’homme, c’est un tiers d’animal, un tiers d’humain et un tiers d’humanité.
C’est un tiers d’animalité (avec les lois chimiques et physiques qui vont avec), un tiers de recherche personnelle de bonheur (l'une des trois directions de la vie humaine), et enfin un tiers de transcendance et de normatif qui est la part de l’humanité comme entité abstraite qui régit l’existence de l’individu et dont celui-ci n’est qu’un élément.
L'enneagramme des neuf dimensions de la vie humaine
Les trois directions de la vie (l'humain) | Les « passions » (l'animalité) | Transcendance & Normatif (l'Humanité) | |||||||
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bonheur |
liberté |
vérité |
désir |
joie |
tristesse |
foi(*) |
droits |
devoirs |
bonheur |
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liberté |
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vérité |
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(*) Transcendance
Ce tableau est issu de ma théorie dite du "dimensionnisme". Il s’inspire aussi de la thèse hégélienne des trois périodes historiques et de la conception spinoziste des passions. Enfin, l’enneagramme, cette modélisation à neuf dimensions, existe dans le Yi-King et dans la psychologie qui traite des formes de personnalité.
J’y ai ajouté ma conception de l’attelage du bonheur avec la liberté et la vérité. Ce tableau peut se révéler bien utile pour formuler les questions essentielles que l’on doit se poser sur le bonheur. On peut, au gré des cases que l’on pointe, confronter entre eux les neuf grands thèmes avec les trois buts essentiels de la vie (bonheur, liberté, vérité).
V - Les trois dimensions de l'homme
Nous sommes trois choses : une structure, un contenant, une chose reliée.
1°) La structure (masse et dimensions)
2°) Le contenant (puissance, force)
3°) La reliance (énergie, vitesse) : nous sommes cette fois dans la dimension du flux et des interactions. La reliance a trois dimensions :
- horizontale : les relations horizontales avec les autres (échanges, dialogues, coopérations...).
- verticale : on trouve sous cette catégorie la médiation, l’emprise, le lien de subordination, la dette.
- circulaire : les ensembles auxquels nous appartenons : catégories, famille, cercle d’amis, de relations, cité, région, peuple, nation, etc. Le philosophe Habermas a fait des interactions sociales l’un de ces thèmes de prédilection. Il faut, pour que celles-ci soient possibles, dit-il, un langage clair et sincère (une entente).
Nous pourrions ici reprendre l'enneagramme précédent et remplacer les rubriques des trois lignes par : structure, contenant, reliance.
VI - Les quatre parties de nous
Nous avons vu les dimensions et les éléments extérieurs ; nous avons évoqué l'être au travers de ses composantes. Il est temps de le voir en sa globalité.
Selon l'intuition de Plotin, confirmée par Hartmann (et par votre serviteur) l'être est Un. Il est composé d'un noyau qui rayonne (en osmose avec l'Absolu) et d'une périphérie (l'individu) qui est en contact avec le Réel, le relatif (cette partie est davantage liée à l'espèce qu'avec l'Absolu et Dieu).
Il me semble que ces deux cercles (l'Absolu et le Relatif) se subdivisent eux-mêmes, sur les bases suivantes :
- la prise d'autonomie de l'être par rapport à l'Absolu (Dieu) : le précepte "connais-toi toi-même est une distance prise avec les dieux, un affranchissement de leur tutelle.
- la confrontation de la force vitale de l'individu - à savoir le désir - à la réalité.
Dans la sphère de l’Absolu, l’être, frais émoulu de l’Univers, va prendre peu à peu son autonomie en construisant son identité personnelle. Sa pensée, tout en restant solidaire et au contact du cosmos, se singularise. Ainsi aurions-nous deux sous-parties dans la zone des forces du dedans : le noyau (le Un) et la zone du « Je » cartésien (la pensée autonome, l’ego).
Dans la sphère du Relatif, l'individu (élément d’une espèce) apprend à connaître ses désirs propres et les limites que lui oppose le principe de réalité. Ainsi s’opère une opposition entre le désir de jouir sans entrave et d’expérimenter et la nécessité. La zone des forces du dehors se séparerait en deux : la zone de sensualité, la zone de nécessité. Par une heureuse coïncidence, le cours de ce propos suit le sens des planètes en partant du soleil.
Quatre phases successives ont créé quatre composantes de l'être :
Le soleil (astre) |
Mercure (dieu) |
Vénus (déesse) |
La Terre |
Le noyau de l’être (le rayonnement) |
La pensée (l’autonomie) |
Le Vivant (la sensualité) |
Le lieu (la nécessité) |
Nous passerons sur la phase 1, trop mystérieuse quant à sa genèse et à son contenu. D'ailleurs, nous ne savons même pas si nous pouvons qualifier cette zone de "phase". Disons simplement que toute explication se trouve dans l'oeuvre de Plotin.
Phase 2 : l'autonomie
Mercure, en sa qualité de messager des dieux, donne à l'Homme son précepte d'autonomie. Mais Mercure, qui est aussi le dieu des voleurs, par son exemple fait de l'Homme un voleur. En effet, l'homme obtient la liberté de pensée en dérobant le feu au dieu, au Soleil
Phase 3 : le désir et la sensualité
Vénus est la divinité idéale pour incarner la sensualité. Comment pourrait-il en être autrement ? La coïncidence est trop belle pour ne pas faire le parallèle.
Phase 4 : la loi de la nécessité
C'est ici que l'être s'ancre dans un lieu.
Conclusion
La théorie dimensionniste repose sur le postulat que la valeur maximale universelle est trois. Il y a l'unité (l'atome), la dualité, la ligne de fuite (échappatoire à dualité quand il y a risque de spirale sans fin). Au-delà de ce chiffre, les valeurs sont des dérivées abstraites des trois valeurs primaires réelles : elles ne servent qu'au calcul. Ainsi, tout va par trois ou par neuf, éventuellement par six (comme les émotions chez Spinoza). Il existe trois dimensions dans notre monde. Au vu des récurrences des règles observées et des études poussées sur le nombre Pi, l'auteur laisse ouverte l'hypothèse que, par subdivision ou combinaisons, il puisse exister quelque part dans l'univers une possibilité de neuf dimensions.
La thèse dimensionniste développe également une partie consacrée aux quatre âges de l'Humanité : l'Age du récit, l'Age du précepte, l'Age de la Raison, l'Age du Bonheur.
Enfin, le tome "Plein bonheur" établit un parallélisme minutieux entre les enneagrammes formés par les décimales du nombre Pi et les différents stades d'évolution de l'enfant et de l'adolescent.
Pour aller plus loin, commentez cet article ou lisez les extraits gratuits en ligne ("Plein bonheur", suite de mon premier essai "Le Bonheur dimensionniste").