samedi 8 avril 2017 - par

La dictature de l’émotion et la Syrie

Bernanos le disait déjà, les hommes modernes ont le « cœur sec et les tripes molles ». Et l'émotion superficielle prime sur tout, envahit tout. Le sur-affectif est la règle, la réflexion et la nuance l'exception. L'homme moderne ne réfléchit pas, il aime pleurnicher. Et pleurnicher en public devant tous les passants y compris virtuels afin de montrer combien il est sensible et humaniste, un humanisme mièvre, aseptisé, très frelaté, un humanisme de pacotille. Un petit garçon meurt sur une plage européenne, la photo indécente, abjecte en elle-même de l'enfant est mise en « statut » facebook, montrée un peu partout. Elle fait le « buzz » jusqu'à l'écoeurement, beaucoup de « bruit médiatique » et puis l'homme moderne oublie, il passe à autre chose.

Il a plus important à faire comme se passionner pour une campagne présidentielle de caniveau...

Il s'est donné bonne conscience pour continuer à jouir sans trop utiliser sa cervelle. Il ne fera pas quoi que ce soit pour aider des migrants ou un migrant, pour s'engager au bénéfice des plus pauvres. Il ne recueillera personne dans son jardin mais continuera cependant à livre des leçons de morale aux autres. Lui il peut, il s'est donné bonne conscience.

Pour l'Irak, lors de la première et de la deuxième Guerre du Golfe, les bonnes consciences lui ont menti allègrement, elles ont évoqué des « armes de destruction massive », des photos des victimes kurdes de Saddam Hussein ont largement circulé bien qu'à l'époque internet n'avait pas encore pris autant de place. Rappelons que les missiles les ayant gazé utilisés contre elles étaient fabriqués en Europe, en grande partie en France. Il a de nombreux « likes » sur les réseaux dit sociaux. Et il a réalisé que la guerre tuait les petits enfants, que la guerre c'est laid...

Et les peuples se sont fait avoir, il n'ont pas marché, il ont couru alors que Saddam bien que tyran sanguinaire, ce que personne ne conteste, était un des seuls dirigeants laïcs de cette région du monde, et qu'après lui il n'y avait que des islamistes sinistres. Il protégeait aussi les chrétiens arabophones, mais il faut dire que ces chrétiens, tout le monde s'en fout en Occident à commencer par les catholiques français qui en parlent quand ils ont le temps.

Pour Kadhafi, nos élites ont bien menti également au peuple. Le monde était près du chaos s'il restait en place, c'est à peine s'il n'allait pas provoquer la Troisième Guerre Mondiale. Nos plus brillants philosophes de comptoir (sic), ainsi BHL, notre Victor Hugo de « hard discount » sont allés voler vers ce pays. Ils sont revenus réclamant à cors et à cris que les européens renversent le dictateur libyen, le punissent voire le condamnent à mort.

Là encore le stratagème a fonctionné au delà de toute mesure...

Depuis sa mort, le fait que son pays vive un enfer absolu, l'homme moderne concerné s'en fiche complètement. On le répète, il s'est donné bonne conscience. Et il a donné de lui un reflet flatteur sur le web. Il peut dormir tranquille.

En Syrie, l'homme moderne frémit d'indignation, et pleurniche en voyant les photos des enfants tués par des armes chimiques, des photos complaisamment distribuées aux médias occidentaux par les soit-disant rebelles, vous savez, les « islamistes modérés », qui décapitent leurs victimes en leur chantonnant de jolies comptines pour les apaiser. Les bonnes consciences et nos philosophes de comptoir savent très bien ce qu'il en est de leur fameuse modération mais au moins ils auront vendu des milliers de livres témoignages chocs sur le sujet.

Parfois hélas, l'homme moderne soumis à la dictature de l'émotionnel est l'homme le plus puissant du monde. Il est alors président des Etats Unis, il peut nous conduire à l'Armaggedon de par son envie de faire quelques « retweets » flatteurs en plus.

Et c'est ainsi qu'Allah est grand...

 

Sic Transit Gloria Mundi, Amen

Amaury – Grandgil

illustration prise ici




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