jeudi 2 mars 2017 - par Renaud Bouchard

La mise en examen de F. Fillon : impair, passe et manque, les jeux sont-ils faits ?

« L'homme qui maniait les cartes ainsi devait être leur maître... Il y avait dix ans de tripot dans cette foudroyante et augurale manière de donner. »

Jules Amédée Barbey d'Aurevilly

A l'image d'un kaléidoscope dans lequel le moindre mouvement recompose brusquement en une nouvelle configuration les losanges et les prismes du cylindre, la conférence de presse de F. Fillon de ce mercredi 1er mars 2017 vient de compliquer le jeu politique en rebattant les cartes de la campagne présidentielle.

I- Basculement

La politique qui a horreur des situations incertaines et s'accommode mal de l'errance éprouve en effet un besoin vital de s'attacher à un point fixe, de corriger, de rectifier et donc d'éliminer tout ce qui vient troubler son ordonnancement. C'est ce qui aura probablement poussé F. Fillon à sortir du bois, chassé par les aboiements de la meute judiciaire, médiatique et politique qui lui court aux basques, le sachant chaque jour plus fragilisé.

F. Fillon ne pouvait pas faire autrement que d'annoncer officiellement sa prochaine mise en examen fixée à la date du 15 mars prochain, un événement procédural tout aussi inéluctable quoi qu'il en dise que l'annonce à laquelle il sera probablement contraint, malgré ses dénégations, de renoncer à la course présidentielle.

Il ne suffit pas en effet de déclarer que l'on ne « cèdera pas », que l'on « ne reconnaît pas les faits », que l'on « ne se rendra pas », que l'on « ira jusqu'au bout parce qu'au-delà de (sa) personne c'est la démocratie qui est défiée » pour se mettre à l'abri d'un processus judiciaire, aussi critiquable et implacable soit-il, et de s'en remettre au peuple français et au suffrage universel.

Les miracles existent rarement en politique.

Les propos de M. Fillon sont courageux et ne manquent pas de souffle mais portent à faux et sont en complet décalage avec une réalité implacable, celle de la machine judiciaire et de la machination politique qui y préside dans l'ombre. Il n'en demeure pas moins que l'on assiste à quelque chose de nouveau : une opinion publique ne saurait venir au secours d'un manque de probité.

http://www.lepoint.fr/presidentielle/je-ne-cederai-pas-la-declaration-complete-de-francois-fillon-01-03-2017-2108488_3121.php

II-Recomposition du jeu...

Les réactions aux déclarations de M. Fillon n'ont pas tardé avec la démission de Bruno Le Maire qui a décidé de renoncer à ses fonctions de « représentant pour les affaires européennes et internationales de la campagne de François Fillon" en annonçant dans la foulée qu'il allait poursuivre "le combat politique au service de la France et des Français".

Il est vrai que B. Le Maire aurait eu grand tort de se priver de l'occasion que venait de lui offrir F. Fillon en rappelant fort opportunément que dans son communiqué du 26 janvier dernier celui-ci déclarait devant les Français que, dans ce cas de figure (une convocation par les juges, préalable à son éventuelle mise en examen), « il retirerait sa candidature à la présidence de la République française".

Même si la justification donnée par l'ex-candidat à la primaire de la droite semble quelque peu appuyée pour la circonstance : « Je crois au respect de la parole donnée, elle est indispensable à la crédibilité de la politique  » et constitue "la condition nécessaire pour mener sereinement les efforts de redressement de la France", il n'est pas exclu que B. Le Maire se positionne en réalité très vite parallèlement en candidat avant que de se substituer purement et simplement à F. Fillon si les circonstances comme l'intérêt supérieur de la France devaient l'exiger, pour reprendre une phraséologie de circonstance que chacun traduira par un « Vae Victis ! » ou plus prosaiquement par un « pousse-toi de là que je m'y mette ».

En temps normal une telle abnégation forcerait le respect à ceci près – chacun l'aura remarqué -, que nous ne vivons pas des temps normaux avec cette campagne qui n'a de présidentielle que le nom.

Deux autres sénateurs (M. A. Houpert, sénateur de la Côte d'Or et Mme F. Keller, sénateur du Bas-Rhin) viennent à leur tour de marquer leur désaveu de M. Fillon en indiquant avec justesse pour le premier que le destin de la France ne pouvait être suspendu à l'avenir judiciaire de l'intéressé et pour la seconde qu'il était vain de lutter contre la justice.

III-...contradictions

Pour autant et malgré la pugnacité affichée dans sa conférence de presse F. Fillon n'aura pas réussi à être pleinement convaincant dans la mesure où plusieurs contradictions n'auront pas échappé à des auditeurs attentifs, fragilisant encore plus son message comme sa réception auprès de tout l'électorat.

On a en effet du mal à comprendre que malgré de très sérieuses alertes l'intéressé puisse encore servir une défense aussi fragile à son public.

- Le 26 janvier 2017, soit quelques jours après les premières révélations du "Canard enchaîné", F.Fillon protestait en effet de son innocence sur le plateau du "20 Heures" de TF1 et posait la seule condition qui pourrait le faire renoncer à la présidentielle : "Il n'y a qu'une seule chose qui m'empêcherait d'être candidat, déclarait-il, c'est si mon honneur était atteint, si j'étais mis en examen  », déclarait-il.

Nous y sommes ! Dès lors et sauf à afficher une conception élastique de l'atteinte à l'honneur, pourquoi attendre plus longtemps tout en censurant une parole et un engagement publics et ne pas renoncer ?

-De même le 31 janvier dernier, alors que la veille le couple Fillon avait été entendu par les enquêteurs, leur avocat se félicitait de la célérité de la justice : "Le soir-même de l'ouverture de l'enquête, François Fillon a souhaité être entendu rapidement. On se réjouit que la justice ait fait droit à cette demande d'être reçu aussi vite", déclarait-il en effet dans des propos contredits par F. Fillon déplorant désormais une précipitation inacceptable.

« Il est sans exemple dans une affaire de cette importance qu'une convocation aux fins de mise en examen soit lancée quelques jours à peine après la désignation des juges, sans qu'ils aient pris connaissance du dossier, ni procédé à des investigations supplémentaires", a-t-il déclaré au cours de sa conférence, dénonçant le fait que : "L'enquête préliminaire (ait) été ouverte en quelques heures ».

- De même enfin, déplorant subir un traitement particulier de la part de la justice ("La présomption d'innocence a complètement et entièrement disparu. Depuis le début, je n'ai pas été traité comme un justiciable comme les autres"), - ce qui soit dit en passant est effectivement le cas par rapport à d'autres hommes ou femmes politiques qui donnent l'impression d'avoir bénéficié plus que de mesure des égards de la justice sous la forme de traitements plus favorisés et beaucoup moins rapides -, F. Fillon qui a décidément la mémoire brouillée semble avoir oublié la petite leçon de morale qu'il administrait en toute amitié le 24 novembre 2016 à A. Juppé auquel il faisait part de sa conception du statut des personnages politiques face à la justice. Ainsi expliquait-il charitablement à A. Juppé que, lui, président, un membre de son gouvernement qui ferait l'objet d'une instruction judiciaire devrait hélas ! quitter ses fonctions : "On est des hommes politiques, on n'est pas des citoyens comme les autres. Les citoyens comme les autres, ils ont le droit à la présomption d'innocence. Les hommes politiques, ils ont comme responsabilité de montrer le chemin". « On » imagine que l'intéressé puisse sans doute sourire aujourd'hui au souvenir de ce propos empreint de morale et de sagesse.

IV-...et avis de gros temps

Point n'est besoin d'être devin pour comprendre que la situation risque fort de se compliquer à compter du 15 mars prochain dans la mesure où il ne serait pas impossible qu'intervienne un autre tour d'écrou ou un serrage complémentaire du garrot.

Celui-ci pourrait prendre la forme d'une décision annexe qui accompagnerait l'ordonnannce de mise en examen de F. Fillon avec, pourquoi pas ? une ordonnance de mise en détention provisoire assortie d'une caution (dont le montant dissuasif sera à la hauteur de la mesure prise et de l'importance des faits reprochés) ou à tout le moins d'un contrôle judiciaire avec remise du passeport, interdiction de communiquer avec telle ou telle personne, interdiction de sortie du territoire, en bref, pour résumer, le cortège habituel des sujétions imposées aux « justiciables et aux citoyens comme les autres qui, comme chacun sait, bénéficient de la présomption d'innocence ».

Est-il encore besoin de préciser qu'à ce stade la campagne présidentielle subirait un coup d'arrêt ou serait en tout cas irrémédiablement compromise au point qu'il n'y aurait plus qu'à regretter (vainement) de ne pas avoir mis M. Fillon tant qu'il en était encore temps – c'est-à-dire maintenant –, devant la réalité de la situation en l'invitant séance tenante à renoncer à ses ambitions, sauf à vouloir couler son parti et l'entraîner avec lui dans l'abîme ?

C'est d'ailleurs là le sens des propos pourtant très clairs que j'ai récemment tenus à M. Bernard Accoyer dans une correspondance à son attention encore à ce jour demeurée sans réponse ainsi qu'à M. le sénateur A. Houpert précité.

Face à un appareil d'Etat et à un appareil judiciaire qu'il ne maîtrise pas et qui travaillent à sa perte, le jeu de cartes dont dispose F. Fillon est manifestement trop faible, la roulette manifestement truquée et biaisée pour imaginer qu'il puisse continuer sa course sans désemparer.

La seule parade qui s'offre aujourd'hui à F. Fillon est de rompre ce jeu malsain et à l'évidence faussé - quels que soient les reproches que l'on puisse faire à l'intéressé - en mettant directement en cause l'institution judiciaire. On ne pactise pas avec le crocodile qui cherche à vous dévorer.

Encore faudrait-il disposer pour cela d'atouts solides, dont une probité indiscutable. Si tel était le cas, seule une défense de rupture serait à même de le sauver. Mais est-ce bien le cas ? Rien n'est moins sûr et on ne voit pas très bien de quelle manière la manifestation de soutien prévue à Paris place du Trocadéro dimanche prochain pourra être d'un quelconque secours.

L'attitude de F. Fillon est politiquement suicidaire.

La mise à l'écart de M. Fillon comme le risque que la coalition politique qui le soutient vole en éclats deviennent chaque jour plus que probables d'ici le 15 mars prochain. Rien ne va plus. Les jeux sont faits.

Qui succèdera à M. Fillon ? La question est désormais posée.

Comme dans la célèbre nouvelle d'E. Poe, le pendule vient encore de descendre d'un cran et le mouvement de balancier s'accentue...

 



28 réactions


  •  
     
     
    « Je ne me rendrai jamais ! »
     
    Farid Fillon* le braqueur
     
     
    *Farid Fillon et « Peine Salope ! » sont un couple mythique de la caste des braqueurs du Boobaland (colonie multiethniquée de l’Empire mondialiste de Goldman-Sachs, dépecée par la comtesse du Baron de Rothschild).
    Appelé aussi le gang des fictifs, ils sévirent pendant le gland remplacement avant le Califat de Soros 1er, le Gland Mufti bobo.


  • devphil devphil 2 mars 2017 10:08

    Rien ne va plus .......

    Tant mieux qu’il soit brulé dans les flammes de l’enfer judiciaire Mr Propre.

    Plus blanc que blanc , les voleurs en col blanc sont les pires surtout quand ils ont à leur disposition les caisses de l’état.

    Il est notoire de constater que tous ces voleurs politiciens sont toujours victimes d’acharnement , de complots à leur égard et jamais ils ne se remettent en question quand à leur comportement frauduleux.


    • Renaud Bouchard Renaud Bouchard 2 mars 2017 12:38

      @devphil
      Pourquoi se remettraient-ils en cause ?
      Ils ne voient pas où est le mal et crient au complot dès qu’ils se font ramasser par la Patrouille.


    • devphil devphil 2 mars 2017 13:37

      @Renaud Bouchard

      La loi c’est pas pour eux , c’est pour le bon peuple.

      Si la loi n’est pas bonne pour eux alors il suffit de changer la loi .....
      (Voir loi de prescription du 16/02/2017 qui tombe à point initié et voté par la PS )


    • Renaud Bouchard Renaud Bouchard 2 mars 2017 23:47

      @devphil
      « Si la loi n’est pas bonne pour eux alors il suffit de changer la loi .....
      (Voir loi de prescription du 16/02/2017 qui tombe à point initié et voté par laePS ) ».

      Certes, mais la justice et en l’espèce le parquet national financier ne sont pas tomés dans le panneau, d’où la décision annoncée de mise en examen pour couper court à toute manœuvre et tentative de faire.passer quelques années à la trappe.

      « Ay ! Caramba ! », encore raté !


  • kalachnikov lermontov 2 mars 2017 11:40

    @ Renaud Bouchard

    Fillon fait comme il peut ; je pense qu’il craint plus ce qu’on ne sait pas encore et qu’on ignorera toujours plutôt que ce qu’on sait déjà.


    • Renaud Bouchard Renaud Bouchard 2 mars 2017 12:40

      @lermontov
      "F.Fillon fait comme il peut ; je pense qu’il craint plus ce qu’on ne sait pas encore et qu’on ignorera toujours plutôt que ce qu’on sait déjà."

      ...ou que ’on ne va pas tarder à apprendre.


    • kalachnikov lermontov 2 mars 2017 15:27

      @ Renaud Bouchard

      Ce type n’est pas dingue ; la fantaisie lui est étrangère, un profil de notaire de province. Il ne semble voir le salut que dans la fonction présidentielle, en dépit de tout bon sens et coûte que coûte. il a déjà sacrifié beaucoup dans l’affaire : son apparence de sérieux et de dignité échafaudé toute une existence durant, etc,etc. Il est certain qu’un nombre conséquent de personnes et de proches lui ont dit de raccrocher, ils ne sont quand pas tous atteint de folie. Et la seule chose qu’il a dû trouver à répondre, c’est : ’je ne peux pas’.

      C’est les questions auxquelles il conviendrait de répondre : pourquoi ne peut-il pas ? en quoi la fonction présidentielle lui serait un salut.


  • ZenZoe ZenZoe 2 mars 2017 14:20

    En attendant, c’est Fillon qui est largement en tête pour les parrainages, déjà presque 750 !! Hélas.


    • Renaud Bouchard Renaud Bouchard 2 mars 2017 23:50

      @ZenZoe

      750 parrainages qu’il va falloir songer à refiler à quelqu’un d’autre.
      Les chiffonniers et « hommes providentiels » soucieux de « redresser la France » vont se battre...
      Guadalcanal.sera rétrospectivement une partie de bac-à-sable à côté de ce qu’il est en train de se passer pour, sans doute, succéder à F. Fillon.


  • gaijin gaijin 2 mars 2017 15:24

    https://www.youtube.com/watch?v=FHb4a58UJPo
    « a la grande table de poker
    deux as planqués sous la théière
    fillon relançait les enchères
    une main posée sur le revolver ....
    ..........
    et soudain......le coup de feu
    fillon morfle entre les deux yeux
    pour une fois qu’il avait du jeu
    rigole macron en rangeant son feu ......

    6 plombes du mat ça sent le sang ...écarlate ... »

     smiley


    • Renaud Bouchard Renaud Bouchard 2 mars 2017 21:04

      @gaijin

      Ces élections présidentielles revues par le Grand orchestre du Splendid.
      Très bien vu, bravo !
      Ah ! Macao, l’enfer du jeu, le vicomte relançant les enchères etc...
      On ne s’assied pas à une table de jeu quand on n’est pas un professionnel, sauf à courir le risque de terminer la soirée plombé dans un arroyo glauque, oublié de tous.

      https://www.youtube.com/watch?v=FHb4a58UJPo

      « a la grande table de poker
      deux as planqués sous la théière
      Fillon relançait les enchères
      une main posée sur le revolver ....
      ..........
      et soudain......le coup de feu
      Fillon morfle entre les deux yeux
      pour une fois qu’il avait du jeu
      rigole macron en rangeant son feu ......

      6 plombes du mat ça sent le sang ...écarlate ... »


    • gaijin gaijin 3 mars 2017 08:56

      @Renaud Bouchard
      merci d’apprécier smiley
      le grand secret de la politique c’est qu’il n’ y en a pas : c’est juste un marigot remplit de crocodiles. 
      comme on disait dans dallas : malheur a celui qui n’a pas compris !


  • Claude Courty Claudec 2 mars 2017 17:07

    "Qui imagine un seul instant le général de Gaulle mis en examen ?"

    Pas davantage le Général que François Fillon lorsqu’il s’est quelque peu naïvement  engagé au retrait de sa candidature s’il devait se trouver dans cette situation (si ça a été calculé c’est ni plus ni moins que génial), ne pouvaient penser que cette disposition de justice pourrait être instrumentalisée au point où elle l’est.

    N’est-ce pas se moquer du monde que d’occulter qu’avant la mise en examen, il y a eu la communication à la presse, à un moment qui doit probablement peu au hasard, d’un dossier semblable à bien d’autres, concernant d’autres parlementaires (Au moins 1/3 d’entre eux reconnaît rémunérer des membres de son entourage)  ; communication suivie de sa saisie par la justice avec une promptitude jamais observée dans une affaire de cette nature ? C’est en cela qu’il y a tentative d’assassinat politique par instrumentalisation de la justice ; et ce n’est pas injurier les juges que de le dire. Le plus médiatique d’entre eux nous explique que cet empressement n’a rien de surprenant ; mais il ne dit rien sur les conditions – qui elles, le sont – dans lesquelles la justice a été alertée. Cette justice n’a-t-elle pas à considérer ces conditions, dès lors qu’elles désignent un élu parmi des centaines qui se trouvent dans le même cas que lui, surtout s’il se trouve être le candidat le plus craint du pouvoir dont elle tient le sien  ? À défaut, ne se fait-elle pas objectivement complice de ceux qui ont manifestement voulu éliminer ainsi un candidat de la compétition ?

    Quant à ceux qui se félicitent de cette affaire, ils ne font qu’étaler leur propre conception de la justice et de l’usage qui peut en être fait par le pouvoir, suivi en cela par une presse qui lui est acquise à 80 % au nom de la pensée unique, et bien entendu par les autres candidats (ce qui dans ce dernier cas est de bonne guerre).

    En tous cas l’intervention ayant fait suite à l’annulation de la visite matinale au salon de l’agriculture a été une superbe opération de communication.

    Et le feuilleton n’est pas fini.


    Pour ceux que cela pourrait intéresser, voir ici « Les dessous de l’affaire Fillon » :

    https://docs.google.com/document/d/1zQubS6iB_J140h-j8vqAwwmo9V61dqRRJ5yDxCI7JHk/edit


    • Renaud Bouchard Renaud Bouchard 2 mars 2017 20:54

      @Claudec
      Bonsoir et merci pour vos très intéressantes observations.

      "N’est-ce pas se moquer du monde que d’occulter qu’avant la mise en examen, il y a eu la communication à la presse, à un moment qui doit probablement peu au hasard, d’un dossier semblable à bien d’autres, concernant d’autres parlementaires (Au moins 1/3 d’entre eux reconnaît rémunérer des membres de son entourage), écrivez-vous.Communication suivie de sa saisie par la justice avec une promptitude jamais observée dans une affaire de cette nature ? C’est en cela qu’il y a tentative d’assassinat politique par instrumentalisation de la justice ; et ce n’est pas injurier les juges que de le dire. Le plus médiatique d’entre eux nous explique que cet empressement n’a rien de surprenant ; mais il ne dit rien sur les conditions – qui elles, le sont – dans lesquelles la justice a été alertée. Cette justice n’a-t-elle pas à considérer ces conditions, dès lors qu’elles désignent un élu parmi des centaines qui se trouvent dans le même cas que lui, surtout s’il se trouve être le candidat le plus craint du pouvoir dont elle tient le sien  ? À défaut, ne se fait-elle pas objectivement complice de ceux qui ont manifestement voulu éliminer ainsi un candidat de la compétition ?« 

      Je souscris pleinement à cette analyse.

      J’ajouterais toutefois que si la proie a été choisie ce n’est absolument pas par hasard dans la mesure où l’on ne peut qu’être malgré tout étonné de voir qu’un candidat à la présidence de la République n’a pas eu le nez creux sinon la prudence élémentaire de ne pas se mettre dans une situation de fragilité qui ne pouvait qu’ouvrir un boulevard à ses ennemis, détracteurs et concurrents.

      Si l’on ajoute à cela la naïveté du personnage qui proteste de son innocence avec une défense calamiteuse en devançant la justice, en lui fournissant les preuves de son innocence (je résume), en témoignant de sa »confiance en la justice de son pays« , on ne peut qu’être confondu devant pareille candeur qui semble confirmer que sur le fond F. Fillon n’est pas foncièrement malhonnête.

      Le problème est qu’en matière politique la naïveté est sévèrement punie, surtout lorsque l’on construit son programme et son engagement sur une image de probité qui vient de se fracasser sur les récifs de la réalité.

      Paul Watzlawick, psychothérapeute et théoricien de la communication, a écrit un ouvrage au titre évocateur intitulé : »Faites vous-même votre malheur". Nous y sommes. F. Fillon aura largement contribué à générer sa propre défaite par imprudence. Où l’on voit que ces petits notables et ces petites baronnies politiques ne sont rien dans la mesure où il leur manque un élément fondamental pour être à l’abri : une (solide) fortune personnelle ou si tel n’est pas le cas, une inféodation complète à une ploutocratie comme l’oligarchie qui a créé et mis en avant E. Macron.

      Voyez en ce sens l’intéressante et passionnante livraison de la revue Frustration (numéro 9) actuellement en kiosque, dont les 4, 90 € valent largement l’achat, et qui vous éclaireront sur E. Macron, sa vie, son œuvre etc..

      Cordialement et à bientôt !

      Renaud Bouchard

      Frustration n°9 – Les élites en campagne (printemps 2017)
      Une riche héritière, un ex-banquier d’affaires énarque ami de tous les patrons et deux rentiers de la politique sortant des gouvernements les plus détestés de la Ve République : voici le casting des favoris des sondages pour les élections présidentielles.
      Que s’est-il donc passé depuis le printemps dernier, lorsque la grande majorité des Français s’élevait contre la loi Travail, symbole de l’extension infinie de l’influence des patrons et des actionnaires sur notre vie politique ? Deviendrons-nous amnésiques tous les cinq ans ? Non, mais entre les différences de moyens considérables des candidats et la mainmise des médias dominants sur la qualification définitive des programmes – “réalistes” et “pragmatiques” pour les uns, “utopiques” ou “sans aucune chance” pour les autres -, force est de constater que d’autres tentent de choisir pour nous les projets politiques que l’on a le droit de considérer et qui ont pour point commun d’être faussement à notre avantage et vraiment au leur.
      À l’approche des présidentielles, Frustration veut remettre les candidats à leur place sociale, celle de puissants qui prétendent devenir, le temps d’une élection, nos représentants.

      Au sommaire :

      • ACTUALITÉS « L’actualité vue par Frustration » – Les commentaires, coups de gueule et espoirs de la rédaction ces trois derniers mois.

      DOSSIER : LES ÉLITES EN CAMPAGNE

      • ENQUÊTE : « Qui est l’élite au pouvoir ? » Il est devenu à la mode de taper sur « les élites », et tout le monde s’en donne à cœur joie, de Macron à Le Pen. Des « bobos multiculturels » aux « fonctionnaires privilégiés », on détourne le sens de ce mot pour éviter de parler du groupe dominant dont font partie la plupart de nos candidats. Cette enquête donne, preuves à l’appui, une définition autrement plus rigoureuse que les embrouilles de campagnes ne le font.
      • CONTRE-PORTRAIT : « Emmanuel Macron, candidat du système » – Emmanuel Macron est la coqueluche des médias et beaucoup de citoyens sont conquis par son profil « d’outsider » ou son étiquette « anti-système ». Mais qui est donc cet homme qu’on nous vend ? Frustration a enquêté sur le « produit Macron » et y a trouvé de nombreux éléments qui devrait doucher l’enthousiasme de beaucoup, de ses liens avec le nouveau magnat des médias Patrick Drahi à ses riches donateurs.
      • ENTRETIEN : « Profession chauffeur de ministre : la classe politique est-elle déconnectée ? » – Sous couvert d’anonymat, un chauffeur dans un ministère répond à cette question : la vie des hommes politiques français les condamne-t-elle à se mettre au service du pouvoir des riches ?
      • DÉBAT : « Le revenu universel, une fausse bonne idée » – Idée phare d’un Parti Socialiste en pleine décrépitude, le revenu universel n’est peut-être pas la mesure « très à gauche » que beaucoup décrivent hâtivement. Passant à coté de la nécessaire critique de la façon dont le travail est rémunéré dans ce pays, il pourrait même arranger bien de puissants intérêts.
      • PORTRAIT : « Henri de la Croix de Castries : la finance avec Fillon »  – l’ex-PDG d’Axa est sans doute un des hommes les plus puissants du pays. Représentant de la finance française, il soutient Fillon et pourrait bien devenir – si nous ne faisons rien – son ministre de l’économie. Avec de Castries, la finance a un visage et nous avons voulu vous le montrer.


    • kalachnikov lermontov 2 mars 2017 22:15

      @ Renaud Bouchard

      "Au moins 1/3 d’entre eux reconnaît rémunérer des membres de son entourage." : ce n’est pas le problème car dans le cas de Fillon, il s’agit d’emploi fictif et, si j’ai bien suivi, d’emploi réel mais pour le compte d’un tiers étranger au payeur. (on me comprend, j’espère).


    • Renaud Bouchard Renaud Bouchard 2 mars 2017 23:55

      @lermontov
      Les juges comme le Grand Public vous comprennent parfaitement.

      Mais comme l’a écrit le Canard, les emplois (fictifs) ont bien existé puisque l’on a même retrouvé les indemnités de licenciement...

      Il va falloir que les intéressés soient très clairs et très précis dans leurs explications face au trio de juges d’instruction qui va les entendre.

      Voilà une journée que je prévois comme pénible à vivre.

      Bad vibes en perspective...


    • franc 3 mars 2017 01:56
      @Renaud Bouchard

       Oui le péché de Fillon est sa naïveté

       Et la naïveté est une faute impardonnable en politique .

  • Pyrathome Pyrathome 2 mars 2017 19:20
    les jeux sont-ils faits ?

    Bonjour,

    Pour lui, vraisemblablement oui....il est carbonisé à point !

    Mais pour les élections, rien n’est fait, tout reste encore ouvert , pour peu que Hamon/Mélenchon scellent une plate forme commune ( chacun a le droit de rêver...) , ils sont censé représenter selon les sondages ( dont il faut bien évidemment se méfier..) 11 et 14 % ce qui fait 25 % normalement additionnés.....

    Et puis la liste des candidats potentiels ne sera close que le 18 mars, pas sûr que le trio de tête actuel reste en l’état....

    Il va y avoir surprise, c’est juste mon intuition....


    • Renaud Bouchard Renaud Bouchard 2 mars 2017 20:57

      @Pyrathome
      Bonsoir Pyrathome et merci de votre visite.
      Vous écrivez : "

      Pour lui, vraisemblablement oui....il est carbonisé à point !

      Mais pour les élections, rien n’est fait, tout reste encore ouvert , pour peu que Hamon/Mélenchon scellent une plate forme commune ( chacun a le droit de rêver...) , ils sont censé représenter selon les sondages ( dont il faut bien évidemment se méfier..) 11 et 14 % ce qui fait 25 % normalement additionnés.....

      Et puis la liste des candidats potentiels ne sera close que le 18 mars, pas sûr que le trio de tête actuel reste en l’état....

      Il va y avoir surprise, c’est juste mon intuition...."

      There will be blood...


    • Pyrathome Pyrathome 2 mars 2017 22:35

      @Renaud Bouchard
      There will be blood...
      .
      Yes sir, on the wall....


    • Renaud Bouchard Renaud Bouchard 2 mars 2017 23:57

      @Pyrathome
      "Pour lui, vraisemblablement oui....il est carbonisé à point !

      Mais pour les élections, rien n’est fait, tout reste encore ouvert , pour peu que Hamon/Mélenchon scellent une plate forme commune ( chacun a le droit de rêver...) , ils sont censé représenter selon les sondages ( dont il faut bien évidemment se méfier..) 11 et 14 % ce qui fait 25 % normalement additionnés.....

      Et puis la liste des candidats potentiels ne sera close que le 18 mars, pas sûr que le trio de tête actuel reste en l’état....

      Il va y avoir surprise, c’est juste mon intuition...."

      Bonne intuition.

      La surprise va être simple : tous chez Macron ! Open bar !


  • franc 3 mars 2017 01:48

    Mr Bouchard ,vous dites :


    « Face à un appareil d’Etat et à un appareil judiciaire qu’il ne maîtrise pas et qui travaillent à sa perte, le jeu de cartes dont dispose F. Fillon est manifestement trop faible, la roulette manifestement truquée et biaisée pour imaginer qu’il puisse continuer sa course sans désemparer. »

    « Les propos de M. Fillon sont courageux et ne manquent pas de souffle mais portent à faux et sont en complet décalage avec une réalité implacable, celle de la machine judiciaire et de la machination politique qui y préside dans l’ombre »

    « On ne pactise pas avec le crocodile qui cherche à vous dévorer. »



     Vous semblez donc admettre qu’il ya un complot d’appareil d’Etat par la machine judiciaire en une machination politique qui préside dans l’ombre ,et pourtant vous demandez à Mr Fillon de se rendre sans essayer de mener un combat qui serait perdu d’avance car l’ennemi est trop puissant ; cela m’étonne de votre part que je considérais comme un homme politique de grande force et conviction implacable ;

     Ne faut il pas quand même essayer de combattre cette machine diabolique qu’est l’Etat profond par l’intermédiaire des élections en s’addressant directement au peuple comme l’a fait Trump et non pas tout de suite courber la tête et se soumettre ad viternam

    • Renaud Bouchard Renaud Bouchard 3 mars 2017 09:55

      @francBonjour Franc.
      Je réponds à votre observation : "
      « On ne pactise pas avec le crocodile qui cherche à vous dévorer. » Vous semblez donc admettre qu’il y a un complot d’appareil d’État par la machine judiciaire en une machination politique qui préside dans l’ombre...« 

      Il est manifeste que cette mécanique, le choix de sa mise en ouvre, le tempo qu’elle suit et l’alimentation régulière en informations destinées à maintenir le public sous tension établissent un complot de l’appareil d’Etat.

       » ,et pourtant vous demandez, écrivez-vous, à Mr Fillon de se rendre sans essayer de mener un combat qui serait perdu d’avance car l’ennemi est trop puissant« ...

      Le combat mené par M. Fillon a été mené et continue d’être mené en dépit du bon sens.Lorsque je dis que l’on ne pactise pas avec le crocodile qui veut et va vous dévorer, j’entends par là que si M. Fillon avait eu les moyens comme la certitude d’affirmer sans contestation possible son innocence des faits qui lui sont reprochés, il n’aurait pas opposé une défense calamiteuse notamment en évoquant les rémunérations, souvenez-vous, de ses enfants au regard de leurs qualités d’avocats qu’ils n’avaient pas encore acquises pour les périodes considérées. Un tel amateurisme surprend. S’il avait été le »tough man« , le candidat sur de lui, réellement irréprochable, il aurait violemment et fermement réagi en contre-attaquant immédiatement contre une institution judiciaire qu’il aurait alors eu eau jeu de présenter comme dirigée contre lui pour, précisément, l’éliminer par des moyens légalistes ou légaux (chacun choisira) de la course présidentielle. Il aurait - ce que j’aurais fait - dénoncé la Cinquième colonne qui ne veut pas de la remise en selle d’une diplomatie française solide, souveraine et indépendante. Il aurait pointé ces gens qui refusent le retour vers une politique constructive et apaisée avec la Russie et l& levée des sanctions économiques de l’UE dans le fil des positions américaines.
      Mais voilà, rien de tout cela n’a eu lieu car il est probale, possible (mais je puis me tromper) que M. Fillon n’ait pas été en mesure d’opposer un mur d’acier parce qu’il se savit trop fragile sur cette pratique d’emploi fictifs qui, décidément, ne passe pas (ce qu’ont d’ailleurs parfaitement perçus ceux qui sont à la manœuvre pour abattre M. Fillon). Vient un moment où il convient d’être réaliste, de mener le combat différemment ou encore, par-delà sa propre personne, de prendre en compte les seuls intérêts qui importent : ceux de ses électeurs et de sa famille politique qu’il emporte vers le désastre. La preuve de tout cela est apportée par les défections de tous ceux (collègues, élus, membres de sa campagne) qui ont sans doute après réflexion fait le choix difficile de ne plus le soutenir et de sauver les meubles ou ce qu’il en reste.

       »...cela m’étonne de votre part que je considérais comme un homme politique de grande force et conviction implacable« .

      Force et conviction de ma part, certainement et plus que jamais. Lorsque l’on s’engage comme l’a fait M. Fillon publiquement à se retirer de la candidature que l’on poursuit en faisant valoir que la seule condition pour cela serait la survenance d’une mise en examen - désormais certaine - la moindre des choses est de respecter sa parole et de procéder à ce retrait, que cela plaise ou non. Là encore comment M. Fillon a-t-il pu imaginer un seul instant - à moins d’être d’une naïveté insondable que ses qualités de juriste comme la présence dans son entourage proche d’avocats rendent inexplicables - qu’il pourrait passer entre les gouttes après l’ouverture d’une enquête préliminaire le concernant lui et son épouse ? »C’est une erreur et je m’en excuse« a-t-il fini par être obligé de reconnaître. Tout a été dit par l’intéressé. La suite n’est que le cours normal des choses d’un combat qu’il a été incapable de mener car il était dans l’impossibilité de le mener. Les faits sont là.

       »...Ne faut il pas quand même essayer de combattre cette machine diabolique qu’est l’État profond par l’intermédiaire des élections en s’adressant directement au peuple comme l’a fait Trump et non pas tout de suite courber la tête et se soumettre ad vitam aeternam ?"

      Tout à fait d’accord avec vous. Mais que ne l’a -t-il fait ? La politique ne souffre pas l’amateurisme.Quant au recours à l’audience populaire, où a-t-on vu qu’elle pouvait compenser ce qui est perçu et sera peut-être prouvé comme étant le manque de probité d’un candidat qui a précisément construit et basé sa campagne sur cette même probité ?
      D. Trump que vous citez ne se serait jamais fourvoyé dans un cas de figure comme celui-ci, les tentatives de le compromettre s’étant toutes révélées comme des échecs car ne reposant sur rien de sérieux.

      Bien à vous et à bientôt !

      Renaud Bouchard


  • Renaud Bouchard Renaud Bouchard 3 mars 2017 10:27

    Aux lecteurs.
    A propos de l’appel au rassemblement populaire de M. Fillon prévu dimanche prochain, parvis des Droits de l’Homme, place du Trocadéro.

    Désormais cerné par la meute médiatico-judiciaire et abandonné par les siens, iM. Fillon en appelle au Peuple pour lui demander de lui sauver la mise.

    M. Fillon n’a pas compris que ce qui pouvait être légal n’était pas forcément juste et moral.

    Il est surprenant que M. Fillon en appelle aujourd’hui au soutien populaire d’un peuple et de citoyens dont il n’a eu que faire durant les cinq années qu’il a passées en sa qualité de Premier ministre.

    - Aurait-il oublié qu’en 2005, le NON à la Constitution européenne l’avait emporté avec 55% des voix, mais qu’en 2008 c’est précisément sous le gouvernement Fillon que la droite a balayé la volonté du peuple en faisantratfier le Traité de Lisbonne par le Parlement ?

    S’il l’a oublié ce n’est pas le cas en ce qui me concerne.

    - Faut-il lui encore lui rappeler que c’est sous son gouvernement qu’a été supprimé de la Constitution l’article rendant obligatoire le référendum préalable à tout élargissement de l’UE ?

    S’il l’a oublié ce n’est pas le cas en ce qui me concerne.

    -Faut-il lui encore rappeler qu’en 2014, il déclarait :

    « Si François Hollande choisissait d’introduire ne serait-ce qu’une dose de proportionnelle, il ferait courir à la France, qui pourrait devenir ingouvernable, un risque historique. »

    N’y a-t-il pas là l’aveu d’une défiance certaine contre toute manifestation électorale et démocratique que l’on tete de brider par tous les moyens ?

    Tel est le vrai Fillon qui en appelle aujourd’hui au peuple pour obtenir de lui sa rédemption et le tirer des sables mouvants dans lesquels il s’est lui-même enlisé.

    Avant de parler de déni de démocratie ou d’élection confisquée, il me semble qu’un coup de projecteur dans le passé serait le bienvenu.

    Le « peuple » - ce recours bien commode dans les occasions difficiles - n’aime pas être trompé et ne sera donc peut-être pas au rendez-vous.


  • Renaud Bouchard Renaud Bouchard 3 mars 2017 10:29

    Aux lecteurs.

    A propos de l’appel au rassemblement populaire de M. Fillon prévu dimanche prochain, parvis des Droits de l’Homme, place du Trocadéro.

    Désormais cerné par la meute médiatico-judiciaire et abandonné par les siens, iM. Fillon en appelle au Peuple pour lui demander de lui sauver la mise.

    M. Fillon n’a pas compris que ce qui pouvait être légal n’était pas forcément juste et moral.

    Il est surprenant que M. Fillon en appelle aujourd’hui au soutien populaire d’un peuple et de citoyens dont il n’a eu que faire durant les cinq années qu’il a passées en sa qualité de Premier ministre.

    - Aurait-il oublié qu’en 2005, le NON à la Constitution européenne l’avait emporté avec 55% des voix, mais qu’en 2008 c’est précisément sous le gouvernement Fillon que la droite a balayé la volonté du peuple en faisant ratifier le Traité de Lisbonne par un Parlement méprisant de ses électeurs ?

    S’il l’a oublié ce n’est pas le cas en ce qui me concerne.

    - Faut-il lui encore lui rappeler que c’est sous son gouvernement qu’a été supprimé de la Constitution l’article rendant obligatoire le référendum préalable à tout élargissement de l’UE ?

    S’il l’a oublié ce n’est pas le cas en ce qui me concerne.

    -Faut-il lui encore rappeler qu’en 2014, il déclarait :

    « Si François Hollande choisissait d’introduire ne serait-ce qu’une dose de proportionnelle, il ferait courir à la France, qui pourrait devenir ingouvernable, un risque historique. »

    N’y a-t-il pas là l’aveu d’une défiance certaine contre toute manifestation électorale et démocratique que l’on tete de brider par tous les moyens ?

    Tel est le vrai Fillon qui en appelle aujourd’hui au peuple pour obtenir de lui sa rédemption et le tirer des sables mouvants dans lesquels il s’est lui-même enlisé.

    Avant de parler de déni de démocratie ou d’élection confisquée, il me semble qu’un coup de projecteur dans le passé serait le bienvenu.

    Le « peuple » - ce recours bien commode dans les occasions difficiles
    -  n’aime pas être trompé et ne sera donc peut-être pas au rendez-vous.


  • Christian Labrune Christian Labrune 4 mars 2017 12:33

    @Renaud Bouchard,
    Le cas Filllon est désormais fort peu défendable. L’éthique de ce singulier personnage qui va à la messe le dimanche et se réclame ostensiblement des valeurs chrétiennes, force est de le constater, se révèle des plus élastiques, et fait penser à celle de M. Tartuffe  : « ce n’est pas pécher que pécher en silence ». L’essentiel serait donc de respecter les bienséances. Or, elles n’étaient pas vraiment violentées. Quand Léon Dupuis pousse madame Bovary dans un fiacre aux rideaux tirés afin de pouvoir consommer plus discrètement le premier adultère, il lui dit « cela se fait à Paris ». Ah bon, si cela se fait à Paris... ! Et pareillement, cela se fait, aussi très bien bien, au Sénat comme à l’Assemblée, de mettre un peu de beurre dans les épinards de sa petite famille en attribuant à ses membres des fonctions imaginaires assez bien rémunérées.

    La raison d’état, qu’on a vue à l’oeuvre en maintes circonstances, aurait dû jouer et induire nos socialistes, s’ils avaient un peu le souci du destin de leur pays, à étouffer dans l’oeuf l’affaire Fillon. Pour les présidentielles, leur parti était foutu d’avance, et l’assassinat politique de Fillon n’y changerait rien du tout. Restait la France. Depuis que l’homme à la francisque, au milieu des années 80, a délibérément et cyniquement propulsé sur le devant de la scène une extrême droite qui était devenue moribonde, le petit chantage : si c’est pas nous ce sera le FN, est devenu le premier argument de toute propagande électorale. L’un des premiers intérêts de la candidature Fillon eût été d’assécher le vote FN en réconciliant avec la République, pour peu qu’on fît droit à quelques unes de leurs exigences les plus légitimes, tant de Français un peu naïfs qui votent désormais pour ce parti d’inspiration fascisante et ne sont évidemment pas pour autant, comme ses fondateurs ou ses cadres, des nostalgiques de Vichy et de la politique du IIIe Reich.

    Il faut donc croire que les socialistes auront mis tous leurs espoirs dans une baudruche Macron qui leur ressemble quand même ressemble un peu, avec l’aide d’une magistrature si largement acquise à leurs vues (souvenons-nous du « mur des cons ») qu’il n’est même plus nécessaire d’user des éperons pour la faire avancer.

    Il y a tel membre du Parti socialiste qui se trouve évoqué dans « Nos très chers émirs », chargé des questions au gouvernement, qui avait proposé spontanément ses bons offices à l’ambassadeur du Qatar : il était en mesure de faire en sorte que les questions qui fâchent ne soient jamais posées devant l’Assemblée, mais « il n’avait pas à le faire gratuitement »(*). Et les sommes qu’il réclamait deviendraient vite bien plus considérables que celle dont bénéficia l’épouse de M. Tartuffe. A la concussion s’ajouterait, si les faits étaient avérés, l’intelligence avec une puissance objectivement ennemie. La justice s’est-elle saisie de l’affaire ? Une enquête aura-t-elle été diligentée ? Je n’en ai pas vraiment l’impression. Justice elle aussi très élastique en la circonstance !

    (*) page 12 : Propos prêté à ce ministre par un officiel à Doha : « En tant que ministre en charge des Relations avec le Parlement, je tiens tous les députés et sénateurs de mon camp, via les questions au gouvernement. Je peux bloquer des questions hostiles au Qatar ou au contraire les alimenter. Mais je n’ai pas à le faire gratuitement »
    « Nos très chers émirs » - Chesnot et Malbrunot - éditions Michel Lafon


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