Le nouveau traité, la Charte et le mode de ratification
Tout ou presque a été dit sur le nouveau traité et son mode prévu de ratification. Je ne voudrais surtout pas faire comme ceux qui insistent inlassablement sur les mêmes litanies à longueur d’articles. Je promets de ne donner ici que de l’inédit puisqu’il s’agit d’une analyse personnelle. A prendre ou laisser comme telle donc, mais c’est très court, ça tient sur une page et ça se lit vite.
Trois questions, trois suggestions.
Tout d’abord, pourquoi ce mini-traité est-il aussi gros en volume ?
Si tout le monde s’accorde à dire que ce nouveau traité est complexe, très long à lire et encore plus à comprendre, en revanche personne ne s’est demandé comment cela était possible vu que la partie 3, la partie la plus longue, n’y figurait plus. Vous je ne sais pas, mais moi j’ai une hypothèse : les choses importantes contenues dans la partie 3, celles que les citoyens ne voulaient pas voir graver dans le marbre d’une constitution, auront été incorporées dans le nouveau traité par le moyen de renvois que l’on y trouve nombreux comme s’il en pleuvait à chaque page. Ce sont ces renvois qui chargent le nouveau texte.
Le deuxième point est relatif à la Charte des droits fondamentaux.
La Charte est-elle une bonne ou une mauvaise chose, et pour qui ?
Ecoutons ce que disait Mme Delmas-Marty sur France Culture le 2/1/2005 : "La Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne est le premier instrument international de protection de droits de l’Homme qui renonce à la distinction binaire entre d’une part les droits civils et politiques et d’autre part les droits économiques, sociaux et culturels."
Alain Gérard Slama dont j’approuve rarement les prises de position dans ses chroniques quotidiennes sur France Culture disait en réponse à Mme Delmas-Marty que selon lui, "le principal danger était le risque de confusion des genres entre les pouvoirs du politique, du judiciaire et des experts".
De fait, je soutiens ici que cette Charte est un OVNI qui a pour objectifs, à terme, de briser les institutions républicaines d’une part et de tuer définitivement la démocratie d’autre part, à savoir la règle "un citoyen une voix", en créant un statut de super citoyen accordé par ce texte aux personnalités morales et un cadre pour l’institutionnalisation des communautarismes.
Enfin mon troisième point concerne le mode prévu de ratification.
Il se disait ce 7 novembre sur France Inter que seule l’Irlande aurait recours au référendum*.
Or chacun sait que les Anglais ainsi que les Polonais seront dispensés de la Charte. Ce n’est pas rien. Relisons ce que disait Mme Delmas-Marty en 2005 : "Le plus grand apport du traité, c’est d’inclure la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne et de lui donner valeur juridique et pas seulement déclarative."
Je vois entre l’exonération de la Charte, ce "plus grand apport du traité", et l’abandon du référendum anglais une relation évidente de cause à effet : pour les Polonais je ne sais pas, mais je suis convaincu que les Anglais n’auraient jamais entériné cette Charte sans procéder à un référendum. Le deal avec leurs partenaires aura été l’exonération de la Charte en échange de l’abandon du référendum.
Pour finir, l’Irlande.
Au sujet de son référendum, on nous dit que le "oui" n’est pas acquis. L’Irlande a constamment été donnée en exemple de la réussite de l’UE. S’il faut monter les enchères pour que les Irlandais disent oui, cela ne fera que conforter sa réussite et donc sa valeur de modèle ! Alors, pas de problème, c’est pas beau la technique du judoka ?
Epilogue
Evidemment, toutes les critiques concernant l’ancien traité demeurent valables pour ce nouveau traité. François Hollande disait que le PS voterait oui tout en assurant que ce traité n’était pas suffisant. Le président peut s’occuper des faits divers, l’opposition travaille pour lui.
Merci.
* Contrairement à ce que disait François Hollande l’autre jour, à savoir que les Anglais exigeraient un référendum.