mardi 13 avril 2010 - par Fergus

Pierrounet, rebouteux de l’Aubrac

Pierre Brioude, plus connu sous le surnom de Pierrounet, découvre très jeune qu’il possède un don : remettre en place les membres démis ou fracturés des animaux dont il a la charge. Des bêtes, il passera aux hommes et deviendra le plus célèbre rebouteux du Massif Central...

Né à Nasbinals (Lozère) le 6 décembre 1832 de parents agriculteurs dans la commune de Saint-Laurent-de-Muret, le jeune Pierrounet a sa vie toute tracée : il sera paysan comme ses parents et comme la presque totalité des gens de son village. Dès l’âge de dix ans, il intègre l’été la vie des burons, ces solides bâtisses de granit couvertes de lauzes et perdues au milieu des immensités de son Aubrac natal. On y surveille les troupeaux, on y aide les vêlages, et surtout l’on y fabrique le fromage avec le lait trait dans les pâturages d’estive et ramené au buron dans de lourdes gerles en bois. Pierrounet y gagne ses galons de paysan, passant au fil des ans de l’état de roul, chargé des tâches subalternes, à celui de cantalès, le plus noble, à la fois patron du buron et maître-fromager. Entretemps, l’adolescent est successivement devenu bédelier, autrement dit chargé des veaux, puis pastre, soit gardien du troupeau et responsable de l’élaboration de la tomme.

C’est là, dans ces rudes tâches de buronnier, qu’il découvre très vite le don qui va lui assurer une incroyable notoriété. Ce sont tout d’abord les veaux blessés qui requièrent son attention. Intuitivement, le garçon visualise l’anatomie des animaux et comprend de quelle manière ils peuvent être remis sur pattes, échappant ainsi à un abattage inévitable. Et cela fonctionne : les manipulations de Pierrounet font merveille, et l’adolescent, placé à 17 ans dans une ferme de Saint-Laurent, élargit le champ de ses interventions aux poulains, aux vaches et aux bœufs des exploitations voisines.

Des bêtes aux hommes, il n’y a qu’un pas. Pierrounet, dont la réputation grandit de mois en mois, le franchit en réduisant bénévolement les entorses, luxations et fractures dont sont victimes les paysans du canton. En ces temps où les médecins de l’Aubrac sont rares, chers et souvent impuissants à soigner ces blessures, la réputation de Pierrounet s’étend très vite, et la clientèle vient parfois de fort loin pour solliciter le don de ce jeune paysan aux mains expertes qui se met spontanément au service des accidentés.

Des patients… américains !

Utile à ses contemporains, l’activité de Pierrounet lui est également profitable : bien que le rhabilleur, comme on dit en Aubrac, n’exige rien en échange de ses services, les dons spontanés affluent en remerciement d’une guérison souvent vitale pour des paysans réduits à une catastrophique inactivité. Un argent dont Pierrounet trouve rapidement l’usage : en 1852, victime d’un mauvais numéro lors du tirage au sort de conscription, le jeune homme est condamné à partir pour sept ans à l’armée comme le veut la loi. Grâce à l’argent économisé, il cède son numéro de conscrit à son frère en échange d’une confortable indemnité. 

En 1858, âgé de 26 ans, Pierrounet abandonne le métier de paysan, trop prenant, pour celui de cantonnier dans la commune du Buisson, activité qui lui laisse plus de temps pour s’occuper des patients qui affluent d’un peu partout. Parmi les habitants de la commune figure une certaine Marie-Rose Meissonnier. Pierre Brioude l’épouse en 1863. Quelques mois plus tard, Pierrounet et sa femme partent s’installer à Nasbinals dans une modeste maison achetée avec les économies du couple. C’est là, dans une petite pièce, que Pierrounet reçoit ses patients, parfois tôt le matin, souvent tard dans la soirée lorsqu’il a terminé son travail de cantonnier. Mais il lui arrive également d’intervenir dans des salles de café ou d’auberge, et même en pleine nature quand les circonstances le nécessitent.

Les années passent, et la réputation de Pierrounet ne se dément pas, portée par les commentaires élogieux des patients guéris. On voit affluer à Nasbinals des éclopés venus de régions lointaines. Il en arrive même d’outre Atlantique : des expatriés revenus du… Canada et des États-Unis en quête d’une guérison. Pierrounet soigne désormais 20, 25, voire 30 clients par jour, toujours bénévolement. Des gens qu’il faut loger et nourrir. Grâce au rhabilleur, trois hôtels sont construits à Nasbinals, principalement pour accueillir ses patients, et un service de voitures à cheval est mis en place pour relier Nasbinals à la gare d’Aumont.

Stupéfaction dans l’amphithéâtre

Basés sur la technique d’extension / contre-extension, les soins de Pierrounet nécessitent force et précision, mais aussi une mise en confiance dans laquelle le rebouteux excelle. Quant au doigté, Pierrounnet n’en manque pas, notamment dans ses deux pouces phénoménaux dont il se sert pour explorer les cavités osseuses. Il lui faut néanmoins de l’aide pour réduire certaines luxations et fractures. Des assistants appelés à la rescousse s’emploient à cette tâche. Parmi eux, la fille aînée de Pierrounet qui restera à son côté jusqu’à sa mort le 8 mars 1907. Pierre Brioude est âgé de 75 ans lorsqu’il décède d’une crise d’hypertension, au grand dam d’une population désemparée et unanime à porter le deuil de son rhabilleur.

Unanime ? Pas tout à fait, car le syndicat départemental des médecins n’est pas fâché de voir disparaître ce concurrent illicite qu’il a fait condamner deux ans plus tôt pour « exercice illégal de la médecine » par le tribunal de Marvejols contre l’avis d’une foule entièrement acquise à Pierrounet. Une condamnation sans effet : soutenu par les Lozériens, le rebouteux n’interrompt pas ce qu’il considère comme une mission quasiment sacrée. Il est vrai que le petit Pierre aurait directement reçu son don du Ciel en remerciement de la réparation qu’il fit, enfant, d’une croix hosannière cassée par des bergers.

Légende évidemment. Comme cette anecdote qui a pourtant encore la peau dure ici et là en Aubrac : Un jour, disent les conteurs locaux, Pierre Brioude est convoqué par les éminents professeurs de la Faculté de Médecine de Montpellier. Reçu dans les prestigieux locaux par ces sommités, le rebouteux sort de son ample blouse de travail un agneau dont il luxe les membres dans un concert de craquements et de bêlements. La pauvre bête, désarticulée, git sur le sol, incapable du moindre mouvement. Pierrounet met alors médecins et chirurgiens au défi de remettre l’agneau sur pattes. « Impossible ! » déclarent doctement les scientifiques, drapés dans leurs certitudes. Pierrounet saisit alors l’animal et, en quelques manipulations, remet sur pied l’agneau qui, tout joyeux, se met à gambader dans l’amphithéâtre sous le regard stupéfait des médecins.  

Toujours présent dans la mémoire collective des habitants de l’Aubrac un siècle après sa mort, Pierrounet l’est également physiquement dans le village de Nasbinals, sous la forme d’un buste de bronze posé sur un socle de granit où figurent symboliquement des béquilles. L’œuvre, conçue par le sculpteur Joseph Malet, a été financée, réalisée et inaugurée quelques mois seulement après le décès du plus célèbre rhabilleur de Lozère. Mieux que n’importe quel témoignage, cet empressement à honorer Pierrounet montre, dans ce pays âpre et sévère où chaque sou est durement gagné, à quel point l’enfant du pays était tenu en haute estime.

Il se trouve même encore des gens pour soutenir que jamais l’Aubrac n’a retrouvé de praticien aussi expert, pas même parmi les meilleurs diplômés de la Faculté. On murmure pourtant qu’ici ou là… Mais à l’heure de la judiciarisation, mieux vaut taire les bonnes adresses. Les rebouteux et les guérisseurs sont à cet égard comme les champignons : inutile de crier sur les toits où ils ont pris racine !
 


39 réactions


  • alberto alberto 13 avril 2010 10:58

    Excellent, Fergus !

    Mais bon, en Auvergne comme ailleurs, difficile de discerner le « rhabilleur » parmi les quatre cantonniers qui regardent celui qui bosse !

    Bien à toi.


    • Fergus Fergus 13 avril 2010 11:22

      Salut, Alberto.

      Lorsque des cantonniers sont inactifs, c’est sans doute qu’ils préparent mentalement leur intervention, un peu à la manière de ces skieurs qui, dans leur concentration d’avant-course, visualisent tous les pièges du parcours !

      Cela me rappelle une anecdote : un jour, l’un de mes oncles auvergnats a eu besoin de beaucoup de pierre pour construire pour une très longue étable (78 m !). Il se trouve que la voirie avait en projet l’élargissement d’un virage, sur une petite route de campagne, qui nécessitait de creuser dans le granit. Une tâche sans cesse reportée. L’oncle a proposé de faire le travail à la place des employés moyennant le prêt d’un compresseur, de deux marteaux-piqueurs et de quelques pains d’explosifs. Marché conclu : durant deux jours, nous avons miné le banc de granit, disloqué la roche à l’aide des explosifs puis récolté les pierres, moyennant quelques précautions pour protéger la route et ses rares usagers. C’était la première fois que j’utilisais un marteau-piqueur et des bâtons d’explosif. Un autre monde et une autre époque. Et surtout un « arrangement » totalement inimaginable de nos jours ! 

      Bonne journée.


  • Le chien qui danse 13 avril 2010 12:16

    Il y a une pratique qui est maintenant maitrisée et dont le « Pierrounet » devait en avoir l’instinct, c’est la chiropractie, dont je suis l’heureux bénéficiaire réparé par un jeune chiropracteur qui à redonné de la souplesse à mon squelette que j’avais meurtri dans les accidents motocyclistes de ma jeunesse.

    Trouver un bon chiropracteur qui est toujours en apprentissage (si c’est un ancien notamment) n’est pas non plus chose facile, mais c’est une médecine que je recommande et pas seulement pour le squelette.


    • Fergus Fergus 13 avril 2010 12:46

      Vous avez raison, Le chien qui danse, la chiropractie est une science directement inspirée de l’art, le plus souvent instinctif, des rebouteux. Cette discipline a d’ailleurs été ’inventée" par un contemporain de Pierre Brioude, le Canadien Daniel Palmer, lui même un rebouteux rénommé.

      Un discipline de manipulation qui semble effectivement soulager de nombreux patients, parfois totalement insensibles aux traitements médicaux traditionnels. L’un de mes ex-collègues a ainsi pu guérir, grâce à la chriropractie, de douleurs persistantes de la nuque et totalement rétives aux soins hospitaliers. 

      Bonne journée.


  • brieli67 13 avril 2010 13:28

    chriropractie -sic_ n’est pas une science pas remboursée par l’AOK en Allemagne ni l’ostéo, ni l’homéo, ni l’acupuncture. Après études et expertises du Ministère Fédéral de la Santé à Berlin

    La radonthérapie par inhalation ou balnéo reste remboursée.

    Fergus, il te faut de la doc pour te convaincre ?


    • Fergus Fergus 13 avril 2010 14:11

      Bonjour, Brieli.

      Personnellement, je nai d’a priori ni pour ni contre les disciplines parallèles à la médecine et à la chirurgie officielles. Je me contente d’observer ce qui se passe autour de moi sans en tirer de conclusions définitives.

      Comme je l’ai indiqué précédemment, j’ai un ex-collègue qui a été manifestement guéri par les manipulations d’un chiropracteur, et des membres de ma propre famille ont suivi sans le moindre effet des traitements homéopathiques.

      Un échantillon insuffisant pour affirmer que la chiropractie est plus efficace que la médecine traditionnelle dans certains cas ou que l’homéopathie est une vaste blague.
       
      Ma seule expérience hors de la médecine traditionnelle est beaucoup plus marginale que ces disciplines tantôt controversées tantôt défendues bec et ongles par des inconditionnels. Elle remonte à mes 12 ans. J’avais à l’époque en Auvergne attrapé une sorte de pelade infectieuse sur l’une de mes tempes. Emmené chez une guérisseuse, celle-ci avait coupé une mèche de mes cheveux, l’avait trempée dans un bol de plantes chaudes puis m’avait ordonné d’avoir toujours sur moi quelques feuilles de houx soigneusement enveloppées dans un mouchoir, ce mouchoir devant, la nuit, être placé sous mon oreiller.

      Huit jours plus tard, la situation n’ayant fait qu’empirer, un oncle que j’avais accompagné pour une foire à Saint-Flour m’avait conduit chez un pharmacien. « Impétigo » avait dit le potard en me prescrivant de nettoyer ma pelade avec de la simple Eau de Dalibour. Quelques jours plus tard, tout était revenu dans l’ordre.


    • rocla (haddock) rocla (haddock) 13 avril 2010 14:20

      Il a vu Impétigo , l’ aurait pu diagnostiquer un gwan-maigue.... smiley


    • vivien françoise 13 avril 2010 14:27

      Capitain,
      J’ai bien mis deux mn à comprendre !
      Fait toujours beau chez vous !
      Sylvia


    • brieli67 13 avril 2010 14:49

      Ah les vertus de la « bouillie bordelaise » sisi ça marche et pas de résistances.

      Les champignons des plis.... très efficace le badigeon au bleu de méthylène. Ma foi c’est la journée du Bleu.


    • rocla (haddock) rocla (haddock) 13 avril 2010 14:54

      Bonjour Sylvia ,

      On a un temps de milliardaire aujourd’hui .

      Bien à vous .


  • rocla (haddock) rocla (haddock) 13 avril 2010 13:45

    Très bonne présentation Fergus .

    L’ art de ces simples paysans m’ a toujours fasciné . De par quelle manière des personnes n’ ayant aucune instruction théorique arrivent à conceptualiser leur technique .

    On dirait un don , un truc inné .

    Brieli , t’ énerve pas , il reste assez de boulot pour les carabins .


    • Fergus Fergus 13 avril 2010 14:17

      Salut, Capitaine.

      Il est vrai que l’on trouve dans les milieux paysans des gens remarquablement doués. Outre la transmission orale par les aînés, je mets cela sur le compte de la formidable capacité des gens de la terre à observer les hommes, les animaux et les éléments pour les comprendre et agir en connaissance de cause.

      Une qualité (l’observation) que très peu de citadins possèdent ou cultivent. Ce en quoi ils ont tort car c’est une excellente école des comportements et parfois un miroir de nos propres défauts !

      Bonne journée.


    • rocla (haddock) rocla (haddock) 13 avril 2010 14:42

      Fergus ,

      Votre réponse me fait bien plaisir , en dehors du bon sens acquis au contact de la réalité , mettre  en éveil son radar pour capter ce qui se passe autour de nous , la vie rurale doit développer des savoirs que les livres ne peuvent donner . Le contact de l’ air , la terre , le vent , la pluie , le froid , la rudesse de la vie n’ ont rien à voir avec la vie que nous connaissons en ville . L’ écoulement du temps lui-même semble être autrement à la campagne .

      Dommage que certaines personnes puissent croire avoir une intelligence supérieure .

      Simplement une autre forme d’ intelligence .


    • Fergus Fergus 13 avril 2010 16:53

      Bien d’accord, Capitaine. Durant des millénaires, faute de savoir lire et écrire, les hommes ont acquis leur savoir et leur expérience par eux-mêmes. Les livres, c’est génial pour apprendre, mais l’observation n’est pas mal non plus. C’est d ’ailleurs très exactement ce que font les scientifiques et les philosophes, ceux-là mêmes qui alimentent les livres du futur.


  • brieli67 13 avril 2010 14:01

    Bugatti tu connais ? donc Dorlisheim http://fr.wikipedia.org/wiki/Dorlisheim

    Personnalités liées à la commune

    * Gottlieb Jost « D’Schloffer von Dorelse » (1846-1912)

    ce « dormeur » en fait faisait de la reflexologie plantaire http://unelouvecombat.canalblog.com/archives/2008/12/18/11793786.html

    Avant ses conseils et ses prescriptions, il s’enfermait dans un cagibis et humait le jus des chaussettes et des chaussures...

    D’où cette saga « historique » http://antoinejacob.fr/video1/schloofer.html même une petite vidéo du spectacle http://antoinejacob.fr/video1/schloofer_video.html

    Nègre un jour, nègre toujours.


    • Fergus Fergus 13 avril 2010 16:47

      Merci, Brieli, pour ces liens, et notamment la surprenante et méconnue « réflexologie plantaire ».

      Pour ce qui est de la pièce « D’r Schlofer von Dorelse », mieux vaut quand même comprendre l’Alsacien.

      Uff Wedersah !


  • vivien françoise 13 avril 2010 14:33

    Bonjour Fergus,
    Hier soir, j’ai regardé par curiosité les articles à modérer. Lorsque j’ai vu Pierrounet, rebouteux de l’Aubrac, je savais que c’était le vôtre.
    Je n’aime pas trop les articles parlant de politique, heureusement qu’il y a des auteurs comme vous pour continuer à me donner envie de revenir et de rester sur le site.
    Bonne journée
    Sylvia.


    • Fergus Fergus 13 avril 2010 16:31

      Merci pour votre commentaire, Sylvia.

      Je crois qu’en effet il est indispensable de ne pas tout centrer sur la politique et l’économie, car on s’expose à des idées fixes et à des risques d’irritabilité liés à l’impuissance à changer le cours des choses.

      Cela n’empêche pas de se battre pour ses idées. Mais cela ne doit pas non plus empêcher de parler d’autre chose, et les sujets ne manquent pas. 

      Cette variété est précisément l’un des points que j’apprécie le plus sur AgoraVox.

      Bonne journée. 


    • Fergus Fergus 13 avril 2010 18:50

      Bonjour, Pasou.

      Vous avez raison, ces techniques sont devenues très courantes et font l’objet de formations, malheureusement de niveaux effectivement assez disparates, ce qui ne va pas sans poser parfois des problèmes comme il en existe chez les psychothérapeutes, autre domaine où les gens sérieux et efficaces sont concurrencés par des praticiens peu expérimentés, voire des charlatans, malgré la loi de 2004 qui, à ma connaissance n’est toujours pas entrée en vigueur.


  • Salsabil 13 avril 2010 18:25

    Bonjour Fergus smiley

    Merci pour cet agréable article au sujet duquel je ne saurais mieux dire que ce qu’en dit Sylvia smiley

    J’ai souvenir durant mon enfance campagnarde que chacun allait chez le rebouteux et pas du tout chez le médecin lorsqu’il y a avait un problème, disons « pratique » lié aux mouvements ou à des douleurs tenaces. Et c’était sytématiquement rétabli avec succès.

    J’ai grandi entourée de cette culture et je continue à y croire dur comme fer. Après tout, ça n’enlève rien à la médecine traditionnelle (dont il est toujours bon d’avoir l’avis) et ça marche, alors pourquoi se priver !
    Plus étonnant sont les « magnétiseurs » qui eux ne replacent rien de façon a priori concrète et qui pourtant font aussi parfois des miracles.
    Ces deux disciplines se retrouvent un peu dans l’ostéopathie aujourd’hui. Difficile d’en trouver un bon mais pareillement certains ont un don, ou un « toucher », assez extraordinaire.

    Et puis pour extrapoler un peu, mais finalement pas tant que ça, que dire des chamans ou des marabouts qui par le biais de pratiques qui nous sont tellement étrangères arrivent à soigner, encore de nos jours, des populations géographiquement reculées n’ayant pas accès (ou en tous cas très difficilement) à des techniques plus modernes.

    Leur connaissances ancestrales, transmises de Maître à élève soigneusement choisi, sont impressionnantes. Quant à celles concernant les plantes médicinales (pardon ! je m’éloigne vraiment !), elles sont aujourd’hui étudiées de très près, non seulement par les anthropologues mais également par les labo pharmaceutiques.... Comme quoi ! smiley

    Merci beaucoup de nous rappeler ces « petites » choses simplement humaines.

    Quand nous fais-tu un papier sur les réducteurs de (grosses) têtes ? smiley

    Affectueusement, et mes amitiés à Madame Fergus smiley


    • Fergus Fergus 13 avril 2010 19:20

      Bonjour, Salsabil.

      Eh oui, si l’on a un tant soit peu vécu à la campagne, on a un jour ou l’autre, pour soi-même ou pour son entourage, eu affaire à des praticiens empiriques, qu’ils soient rebouteux ou guérisseurs.

      Et le fait est qu’il en est de très bons, si j’en crois le compte-rendu qu’ont pu en faire des membres de ma famille ou des voisins, souvent plus prompts jusqu’à un passé récent à fréquenter, et avec succès, ces praticiens-là plutôt que les médecins.

      Quant aux plantes médicinales, les « simples », il existe encore nombre d’herboristes dans les campagnes qui les récoltent et qui font profiter le voisinage de leurs vertus. Nous ne sommes toutefois plus dans l’empirisme, mais (la chose pouvant être délicate, voire dangereuse) dans la transmission de savoir de mère à fille ou de père à fils ou à disciple, un peu à la manière de ces chamans ou de ces marabouts dont tu parles et qui, depuis des siècles, fonctionnent de la même manière. Au point que les scientifiques continuent de s’intéresser de très près aux méthodes ancestrales de soins des tribus primitives qui vivent encore dans les forêts d’Asie ou d’Amérique du Sud.

      Des herboristeries, on en trouve d’ailleurs dans quelques villes, fréquentées par des habitués qui, le plus souvent, sont également des inconditionnels. Il y en a d’ailleurs une en centre-ville à Rennes que je ne fréquente pas. J’aurais pourtant beaucoup à y apprendre ! Peut-être cela pourrait-il faire un projet d’article...

      Pour ce qui est de réduire les grosses têtes, sûr qu’il y aurait à faire dans notre beau pays tant l’hypertrophie de l’ego semble y sévir, et cela dans la plupart des milieux. Mais je crains que la tâche ne soit trop ambitieuse !

      Verra-t-on prochainement un article signé Gül ou Salsabil ?

      Amitiés de nous deux.


    • Salsabil 13 avril 2010 21:17

      Pas ici, mon ami,

      Je ne suis pas maso et malgré quelques bonnes recettes ancestrales, je reste vulnérable ! smiley

      Si cela doit se faire ailleurs, tu seras incontestablement parmi les « informés ».

      Amicalement.


  • Mmarvinbear mmarvin 13 avril 2010 20:40

    Sincèrement, je ne vois pas là de quoi s’extasier.

    Remettre une articulation en place ou réduire une fracture, c’est à la portée de n’importe qui : pour peu que l’on ait eu une formation basique en secourisme, tout le monde peut le faire !

    Je suis curieux de voir ce qu’il aurait fait face à une crise d’appendicite, une tumeur, un choléra ou une tuberculose.


    • Fergus Fergus 13 avril 2010 22:44

      Bonsoir, Mmarvin.

      La formation de secouriste n’existait pas alors chez les paysans de l’Aubrac. Qui plus est, il existe des multiples formes de luxation et de fracture loin d’être aussi faciles à réduire que vous semblez le croire, particulièrement dans les cas de fractures avec déplacement ou en vrille.

      Il fallait également une grande force. Ancien gardien de but, j’ai moi-même été victime de trois luxations de l’épaule (deux à gauche et une à droite) et je peux vous dire que l’une d’elles a été si difficile à réduire que l’interne d’Henri Mondor et deux infirmiers qui m’avaient pris en charge ont dû s’y reprendre à plusieurs reprises avant de réussir aux prix d’une belle suée. Pierrounet intervenait avec se fille aînée ou avec un aide, et parfois deux lorsque le cas le nécessitait.

      Pour le reste, il n’était pas médecin et, pas plus que vous ou moi ne pouvait prétendre soigner le choléra ou la tuberculose...


    • Alpaco 13 avril 2010 22:47

      Mmarvin, passez donc « une formation basique en secourisme » et après avoir appris le bouche à bouche, le massage cardiaque et la PLS, faites nous une démonstration de remise en place de l’épaule d’un veau ou d’un mouton. Une franche rigolade en perspective.

      Il y a bien des rebouteux dans les campagnes, et contrairement à la caricature du marabout, ils n’en font pas commerce et pratiquent leur savoir-faire en dehors des religions. Comme précisé dans les commentaires précédents, on les connait par le bouche à oreille. Ce qui les caractérise le plus souvent c’est qu’ils ne recherchent ni gloire ni rémunération par l’exercice de leur habilité.

      Ma mère a été guérie d’un ulcère à l’estomac. Ulcère avéré après les prélèvements de rigueur, et analyse de spécialistes. Elle ne dormait plus trop la nuit, se tournant tournant d’un coté ou de l’autre pour avoir moins mal. Elle n’avait plus droit à rien, cigarettes, alcool, nourriture acide, etc. Malgré les médicaments et le « régime » idéal elle souffrait toujours, et c’est surement ce qui l’a poussée à tenter le rebouteux.
      Un couple de « petits vieux » vivant à proximité d’un village à la limite entre le Cantal et la Corrèze. Mère m’a précisément raconté comment cela s’est passé : L’homme lui a posé une main sur le ventre et l’autre en opposition sur le dos. Il lui a dit quasi-directement qu’il n’était pas sur de pouvoir la guérir en une seule fois. Il a gardé les mains dans cette position pendant quelques minutes. Quand il a retiré ses mains, elle lui a demandé si c’était fini et si cela avait marché.
      Il lui a servi un plein verre de cantine de vin rosé à étoile, pour tester le résultat. Elle l’a bu cul-sec tellement le verre était cradingue. Elle n’ a rien payé, juste « offert » une bouteille de rouge « sans étoile ».
      Depuis ce jour (c’était il y a plus de 15 ans) elle n’a plus jamais souffert de cet ulcère. Elle refume, boit des apéros quand l’occasion le justifie et prend plaisir à manger des tomates à la vinaigrette.

      Il n’y a rien de surnaturel ni de magique dans cela. De la même manière que l’on bombarde des calculs rénaux d’ultra-sons, ou que l’on utilise des sangsues en chirugie, il y a des processus médicaux efficaces que nous sommes en train de découvrir et d’autres que n’avons pas encore découvert.

      Mmarvin, sortez de votre ultra-pragmatisme naïf. La science avance par des intuitions, des analyses et des remises en questions. Personne n’a de pouvoir magique pour soigner tous les maux, une fois cela admis laissons progresser la science enrichie de toutes les pistes possibles.


    • Fergus Fergus 13 avril 2010 23:02

      Bonsoir, Alpaco, et merci pour ce témoignage.

      Il est vrai que nous sommes loin de connaître encore toutes les possibilités existantes en matière de soin des animaux et des personnes. Et nombre de pratiques dans les campagnes qui sont moquées des citadins se révèlent parfois très efficaces sans que l’on sache exactement de quelle manière agit le procédé.

      A noter que la psychologie joue un rôle non négligeable dans la guérison de certaines affections. De manière générale, la parole d’un guérisseur ou d’un rhabilleur prend d’ailleurs une grande importance, et Pierrounet lui-même parlait toujours préalablement et de manière très douce à ses patients pour les mettre en confiance et les préparer à ses interventions.

      Enfin, et vous avez raison de le souligner, la plupart de ces gens sont avant tout des altruistes et des humanistes qui cherchent à aider leurs semblables et non à faire fortune. La rémunération est le plus souvent modeste et prend chez les plus humbles l’apparence d’un don en nature comme cette bouteille de vin. Pour ce qui est de Pierrounet, la plus belle récompense qu’il ait reçue est venue d’un... médecin de Béziers qui ne pouvait soigner sa femme et l’avait amenée dans l’Aubrac pour demander l’aide du rebouteux. Sa femme guérie, le médecin avait laissé, dans la corbeille près de la porte, un bijou de valeur au rebouteux qui ne demandait rien.


  • rocla (haddock) rocla (haddock) 13 avril 2010 21:03

    Vaudrait mieux une extase que d’ avoir des métastases .... smiley


  • rocla (haddock) rocla (haddock) 13 avril 2010 21:30

    Je connais une technique de boutonneux consistant à allonger la vie d’ une demie seconde par année . 

    Basée sur la technique d’extension / contre-extension consiste à bouger le zigomatique gauche vers icelui de droite dans un mouvement circulaire et concommitant .

    Cet exercice droit sorti du manuel du parfait soldat , donne des résultats stupéfiants si chers aux canons de la guerre contre la morosité .


    • Fergus Fergus 13 avril 2010 22:47

      Merci, Capitaine, pour ce conseil en rigolomanie. Par les temps qui courent, mieux vaut retenir toutes les recettes !


  • Yohan Yohan 13 avril 2010 22:57

    Salut Fergus
    Des petits savoir faire bien utiles quand vous avez une coupe de bois à finir et que le corps dévisse bêtement. Dans ces moments là, on voit l’avantage de la patte du rebouteux sur la chimie du toubib 


    • Fergus Fergus 13 avril 2010 23:06

      Salut, Yohan.

      Eh oui, on a tous connu cela un jour : le dos bloqué et l’allure cassée d’un vieillard. Pouvoir disposer d’un rebouteux près de chez soi est dans ces cas-là un plus indiscutable car pas un médecin généraliste n’est capable d’apporter de solution à ce type de problème.

      Bonne nuit.


    • brieli67 13 avril 2010 23:34

      on Du gloibsch !!

      à part que les touristes à la pêche d’un arrêt maladie ( une petite semaine, Docteur) hantent nos cabinets ...

      Si je le subodore .... les fesses ont droit aux injections anti-inflammatoires, valium et .. des bonnes doses de vit B qui sont très douloureuses...
      y sera bien flagada guéri de sa « lombalgie » mais n’aura pas l’occasion de faire grand chose au jardin, au grenier, au jardin..


  • Arunah Arunah 14 avril 2010 06:56

    Bonjour Fergus !

    Merci pour ce sympathique article.
    La rebouteux moderne est maintenant l’osthéopathe et je ne peux que me féliciter d’avoir eu recours à l’un d’eux pour soigner une sciatique, le généraliste étant inopérant.
    Malheureusement ce génie des manipulations a pris sa retraite et son successeur - son ancien assistant - ne fait pas « craquer » correctement. Il est clair qu’en plus de la formation adéquate, il faut aussi avoir le don ou à tout le moins unr très longue pratique.


    • Fergus Fergus 14 avril 2010 08:53

      Bonjour, Arunah.

      Vous avez raison, les rebouteux sont désormais devenus des osthéopathes et des chiropracteurs dont les manipulations soulagent et guérissent nombre de nos concitoyens. Dommage, comme vous le soulignez pour votre cas particulier, qu’ils n’aient pas tous les mêmes dispositions, qu’ils ne bénéficient pas tous du même doigté. Mais il en va ainsi dans toutes les activités humaines...


  • popov 12 février 2016 12:40

    @Fergus et Rocla


    Ah je vois que vous avez trouvé un coin pour discuter tranquillement, à l’abris des mouches agressives.

    • Fergus Fergus 12 février 2016 12:50

      Bonjour, popov

      En effet ! On peut avoir des idées très divergentes en matière de politique et d’économie sans pour autant s’envoyer des invectives et des anathèmes.


    • popov 12 février 2016 13:57

      @Fergus

      Bonjour

       
      Pas si divergentes que ça à mon avis. 
       
      Les petits entrepreneurs comme Rocla et les ouvriers ont en commun le même ennemi : les grandes entreprises qui corrompent les politiciens, sucent le sang de leurs employés, détruisent les petites entreprises familiales et s’arrangent pour ne pas payer leurs taxes.
       
      Les gens comme Rocla, quand ils ne trouvent pas de travail qui les satisfont, ou pas de travail du tout, au lieu de chômer, ils se retroussent les manches et créent du travail, pour eux mêmes, pour leurs employés s’ils en ont et pour leurs fournisseurs. 
       
      Est-ce que cela en fait des « fachos » ? S’ils arrivent à bien gagner leur vie, c’est parce qu’ils se lèvent tôt tous les jours.

    • popov 12 février 2016 15:53

      @Fergus

       
      Petit cadeau
       
      Je viens de retrouver en ligne un vieux livre que j’avais découvert planqué dans une armoire de ma grand’mère quand j’étais gosse. 
       
      Rien qu’à le voir à l’écran, l’odeur de papier moisi me revient au nez.
       
      Il s’agit du livre de chevet de nos rebouteux, écrit dans des français de diverses époques et émaillé de délicieuses coquilles.

      http://gallica.bnf.fr/ark :/12148/bpt6k5579947f/f5.image


    • Fergus Fergus 12 février 2016 15:53

      @ popov

      Entièrement d’accord sur la première partie de votre commentaire.

      Sur la deuxième, je suis en revanche plus nuancé car devenir entrepreneur n’est pas à la portée de tous : cela demande une solidité mentale dont la plupart des personnes sont dépourvues.

      Même au sein d’une entreprise, nombre de salariés se satisfont pleinement d’un job subalterne dénué de responsabilités, et n’aspirent en aucune manière à s’élever dans la hiérarchie. Cela, j’ai souvent eu l’occasion de le constater en travaillant durant une douzaine d’années dans le domaine des ressources humaines.

      « Est-ce que cela en fait des « fachos » ? » 

      Certainement pas. D’autant plus que la plupart des travailleurs indépendants bossent pour gagner leur vie, pas pour faire fortune.

      Il est toutefois dommage qu’entre salariés du privé, salariés du public, artisans et commerçants, il y ait souvent des prises de bec aussi stériles qu’inutiles, les motivations des uns et des autres étant tout aussi respectables. Seules les pratiques du grand capital, trop souvent caractérisées par la voracité des dirigeants et des actionnaires au détriment des salariés, justifient d’être pointées du doigt.


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