lundi 13 avril 2015 - par Pierre Thivolet

Radio France : Mais qu’a donc fait, ou pas, Mathieu Gallet pour mériter une telle grève ?

Radio France : La grève finira bien par s’arrêter. Et Mathieu Gallet restera sans doute. Mais quel dommage, et quel gâchis. Et si Mathieu Gallet a des torts, toutes ces attaques contre lui, souvent personnelles, souvent pleines de sous-entendus et de non-dits sur de supposés pistonnages, sont tellement concentrées et soudaines qu’elles en sont suspectes : « Quand on veut noyer son chien, on dit qu’il a la rage ».Ne servent-elles pas à faire oublier le principal responsable : Le gouvernement, la « tutelle », ceux qui tiennent les cordons de la bourse ?

http://pierrethivolet.blogspot.fr/2015/04/radio-france-mais-qua-donc-fait-ou-pas.html

Pour être franc(s), et c’est le comble pour une entreprise qui est un des fleurons en matière de communication, on n’y comprend pas grand-chose dans la grève sans fin qui paralyse toutes les antennes de Radio France.

Depuis quelques semaines, son PDG est devenu la cible de toutes les attaques, l’objet de toutes les révélations. Et en dehors de Frédéric Mitterrand, qui l’avait en quelque sorte découvert quand il était ministre de la Culture, pas grand monde n’a pris sa défense.
Il y a l’histoire de la luxueuse voiture de fonction, celle de la rénovation du bureau, des bureaux, refaits pour 80-100 000 €. Bien sûr, ça fait tâche, surtout sur une moquette -LOL !-. Non je voulais dire : surtout lorsque l’heure est au serrage de ceintures et à 200, 300 « départs volontaires ».
Il y a également les conseillers en communication, contractés à l’extérieur pour 100 000 € ? Là, c’est vrai qu’on se pince ; Mais qui a donc conseillé à Mathieu Gallet de se prendre des conseillers en com’, dans une maison qui regorge de spécialistes de la com’ ? En plus, quand on voit le cafouillis actuel, on espère que ces conseillers rembourseront Radio France.
Mais comment celui qui était paré de toutes les qualités et de toutes les vertus, est-il devenu un incompétent sans expérience, en quelques semaines seulement ? 
Et certains de dire : C’est une erreur de casting du CSA (et tac, on tape sur l’indépendance très récente de cette autorité de l’audiovisuelle), c’est le fait du Prince (et tac, on tape sur l’ancien ministre de la Culture de Nicolas Sarkozy). Devant le CSA, il paraît qu’il a été brillantissime, plus que tous les autres candidats. Il aurait fait l’unanimité, pas une voix contre : Parmi les membres de ce conseil, des journalistes que je connais - Laborde, Kelly, Mémona Hintermann - dont j’imagine mal qu’elles auraient fermé leurs gueules si le candidat Gallet avait été pistonné ou pas à la hauteur.
Et puis, surtout le comble : « Il est trop jeune, il n’a pas d’expérience  ». Ca veut dire quoi, trop jeune ? Matteo Renzi est devenu Président du Conseil italien à 39 ans, Tony Blair à 43. Et puis, combien de vieux routiers des medias, des cabinets ministériels ont été nommés ou dirigent encore des entreprises publiques où ils se sont révélés totalement incompétents ? Allez on cite Corneille : « Je suis jeune, il est vrai, mais aux âmes bien nées, La valeur n'attend point le nombre des années ».
Je ne connais pas Mathieu Gallet, mais j’avais suivi son parcours après sa difficile nomination à la tête de l’INA, en 2010. On disait déjà : Il est trop jeune, c’est un parachuté à la tête d’une institution ingérable. Et puis. Et puis, ça a marché et bien marché. Apparemment, il a su établir le dialogue avec les syndicats et les salariés de l’INA. Il a modernisé cette société publique, conservatoire de notre mémoire audiovisuelle. Il a notamment largement ouvert ses formidables trésors au grand public, et à la consultation par internet. En moins de 4 ans : bravo, non ?
Alors, même brève, son expérience parlait en sa faveur.
Et depuis un an, c’était l’unanimité : Une directrice a été nommée à la tête de France Inter, une femme, c’est suffisamment rare pour être salué ; Un ancien confrère d’Europe 1, Laurent Guimier , connu pour son efficacité et son professionnalisme, a été nommé lui, à la tête de France Info. Et là aussi, bonne pioche puisque les premières campagnes d’audience montraient une remontée. Et en novembre dernier, tout le gratin de la culture et du gouvernement se pressait pour l’inauguration du nouvel auditorium de Radio France, où pouvaient enfin se produire après des années d’errance, les deux Orchestres maison ; A l’époque, personne ne parlait du coût des boiseries ou des moquettes.
Et puis ? Et puis, du jour au lendemain, le petit génie est devenu le pire des cancres.
Parce qu’entretemps, a commencé à filtrer le plan d’austérité draconien imposé à Radio France. En clair, des centaines de personnes vont se retrouver à Pôle Emploi, ou en pré-retraite. Cela n’est pas une découverte. Et c’est là peut-être où Mathieu Gallet et son équipe de DRH ont sans doute été trop technocrates. Au lieu de cultiver son image de bogosse intelligent, dialoguant avec les plus grands patrons aux entretiens de l’Université d’été du MEDEF à HEC, Mathieu Gallet aurait sans doute mieux fait de virer la cravate, de tomber la veste afin de retrousser ses manches. Parce que négocier la fin de toute une vie professionnelle, avec des personnes qui ont consacré leur vie à une entreprise et une belle entreprise, comme Radio France, cela suppose de se montrer à l’écoute, de ne pas donner l’impression de n’être qu’un technocrate brillant mais insensible. Après tout n’est-ce pas ce genre de comportement, typique de la technocratie à la française - je suis le plus brillant d’entre tous – je suis le meilleur d’entre nous – qui avait mis la France dans les rues contre Alain Juppé en 1997 ? Et c’est sans doute ce qui explique que depuis trois semaines, il paraisse si difficile de renouer le dialogue entre direction et personnel de Radio France.
La grève finira bien par s’arrêter. Et Mathieu Gallet restera sans doute.
Mais quel dommage, et quel gâchis. Et si Mathieu Gallet a des torts (voire plus haut), toutes ces attaques contre lui, souvent personnelles, souvent pleines de sous-entendus et de non-dits sur de supposés pistonnages, sont tellement concentrées et soudaines qu’elles en sont suspectes : « Quand on veut noyer son chien, on dit qu’il a la rage ».
Toutes ces « révélations » ne servent-elles pas à faire oublier le principal responsable, le « Deus ex machina » de Radio France : Le gouvernement, la « tutelle », ceux qui tiennent les cordons de la bourse. Fleur Pellerin demande des économies, réduit les dotations budgétaires, mais ce n’est pas elle, ni Emmanuel Macron, ni Michel Sapin, ni Manuel Valls, qui vont l’expliquer au personnel de Radio-France : Quel courage !
Nous vivons un e-poque formidable.


9 réactions


  • bernard29 bernard29 13 avril 2015 17:16

    Tout est fait pour que le public ne sache vraiment ce qui s’y passe. Pour le public, il semble ne rester à connaître le moment de l’augmentation de la redevance et quand ça va venir sur le tapis. c’est tout !!

    Pourquoi l’audiovisuel public entier n’est pas solidaire. ? 

    Pourquoi n’y a t’il pas un débat sur les inégalités de salaires ou de traitement en général, entre les gestionnaires, les animateurs, les producteurs et tous les techniciens ? Par ex ; y a t’il encore des emplois à « la Reine Christine Ockent » dans ce gourbi ??

    Pourquoi les auditeurs et téléspectateurs n’ont pas leur mot à dire dans la gestion et l’administration de cet audiovisuel public ? Est-ce si difficile de cela de créer une association d’auditeurs et de téléspectateurs qui aurait droit de regard et de vote (! ?) au Conseil d’administration ? 

    Pourquoi n’y aurait ’il pas un audit complet sur l’audiovisuel public français ?


  • lsga lsga 13 avril 2015 18:09

    la grève n’était pas porté contre le PDG, mais contre le plan de restructuration. 

    Les grévistes ont tout fait pour éviter d’attaquer Gallet le plus longtemps que possible.
    Mais, puisque la revendication principale ne pourra pas être obtenue, la tête de Gallet est offerte en pâture pour calmer les esprits. 

  • Dom66 Dom66 13 avril 2015 19:12

    Je n’ai pas tout compris. J’ai entendu dire que le dessinateur Siné avait briffé Gallet à Dakar,

    Et que ce dernier c’était fait rouler sur la plage.


  • bakerstreet bakerstreet 13 avril 2015 19:30

    deux orchestres de près de 300 musiciens, 14 semaines de congés par an, l’été réservée aux stagiaires, une gabégie entretenue, une augmentation du budget chaque année....L’irrationnel continue avec cette grève qui n’en est pas une, les salariés se débrouillant habilement pour bloquer la machine avec moins de 10% de grévistes tournant, afin de continuer à toucher leurs salaires....



  • cassandre4 cassandre4 13 avril 2015 23:14


     De plus le traitement infligé à Lepaon (que les merdias ont lunché) doit aussi s’appliquer à Gallet. (même faute = même sanction !) smiley


  • chantecler chantecler 14 avril 2015 09:18

    Ca ressemble effectivement un peu trop à une grève corporatiste pour le maintien d’avantages acquis , voire de privilèges .
    J’aurais aimé que l’on parle aussi , par exemple de l ’absence de pluralisme d’opinion à F.I , aux heures de grande écoute , par exemple la matinale 7/8 h , qui me tape sur le système , avec sa cohorte de néolibs et réacs ....
    Mais ici ça ressemble davantage à la défense de l’emploi , des revenus et de copains ?.
    Ce qui fait que personnellement je ne me sens pas vraiment concerné , en empathie avec les contestataires dont à peine 6 % paraît il bloque les antennes ...
    Et qui pourraient avoir des objectifs plus ambitieux , d’intérêt général (nourrir la démocratie) avec des « éditoriaux » et des débats de qualité .
    Le service public n’est pas la propriété d’un groupe , ni de l’état , d’autant qu’ici il est financé par la redevance imposée .


  • Trelawney 14 avril 2015 14:28

    On reproche à Mathieu Gallet deux choses :

    Il a dépensé environ 100000 euro pour relooker son bureau à l’identique de 63 (sauf la moquette). Donc il a fait changer le lambris en palissandre et le palissandre de 63 ne coutait pas celui de 2014.

    Il a dépensé 70000 euro pour confier sa com à un prestataire de service. 70000 euro TTC ca fait 56000 HT et avec 45 % de cotisations, impôts et taxes ca fait 30800 euro de salaire pour le chargé de com soit 2550 par mois. A Radio France il y en a beaucoup qui sont mieux payé que lui et s’il avait confier sa com à un salarié Radio France, je ne suis pas certain qu’il en aurait eu pour si peu cher.

    Ce Mathieu Gallet n’a pas l’air trop con et a plutôt un beau projet pour RF, mais il hérite d’un lourd passif à savoir la rénovation d’un truc rond qu’on aurait mieux fait de démolir, mais qui, pour les salariés Radio France, est un symbole : le dernier château fort de l’anti capitalisme.

    maintenant le grève en longueur aura deux conséquences :

    La fermeture programmée de (pas un) mais 2 orchestres, la fin de plusieurs radios (certainement France Info et France Musique) et le licenciement de beaucoup plus de 300 personnes.

    La fin d’un service public qui n’en est plus un depuis la fin du monopole radio.


  • Jean J. MOUROT Jean J. MOUROT 14 avril 2015 19:03

    Les grévistes de Radio France sont-ils tous logés à la même enseigne ? Et les sous-fifres ne sont-ils pas en train de se démener pour les privilèges de quelques uns ?
    De toute façon, on finit par s’habituer à se passer de Radio France, les grévistes sciant la branche sur laquelle ils sont assis !


  • Emmanuel Aguéra Emmanuel Aguéra 15 avril 2015 15:40

    La perception de France-inter depuis ma cuisine n’est certainement pas la même que celle des employés menacés de licenciement.
    Mais de quoi parle-t-on ? De sauver un service public, au fond. Je ne doute pas de la vocation civique des employés de Radio France, mais, que l’on m’excuse, c’est de ma cuisine que je connais ma chaîne.
    Matthieu Gallet n’est peut-être qu’un petit con de planqué (de la famille du ministre ?), le prix de son bureau m’intéresse moins que ses manoeuvres de séduction au csa. Ce n’est pas mon genre, mais il ne peut pas être tenu comptable du marasme économico-idéologique remarquable sur les ondes, même de ma cuisine.
    Il me paraît plus important pour recentrer la mission de cette radio publique d’en virer tous les animateurs qui se prennent pour des journalistes, et tous les chroniqueurs qui nous exposent des points de vues télécommandés dont on a rien à foutre. Pascale Clark a fait plus pour le front national que Philippot ou Alliot. Paoli et Cohen ont envoyé plus de gamins au Jihad que les imams des caves de cités. Et ils continuent, bravaches, et fièrement encore, joutr après jours, se croyant en mission divine. Ils sont devenus fous.
    Et que dire de l’abrutissement des masses, asséné à coups de Nagui (mais qu’est-ce qu’il fout là ????) ou de Charline Vanannaeker ? abrutir est partie de la mission ?
    Ces gens sont aussi décalés de leurs auditeurs que les politiciens dont ils dépendent le sont de la réalité sociale.
    Pardon, à Paula Jacques, pardon à Jean-Claude Amusen, au Masque et la plume, aux carnets de campagnes, à Pochon, y’en a plein de bien : des qui ne vous font pas « profiter » de leurs opinions.
    Quant à Finkelcrotte ou Fourest sur France Q... c’est dire l’état de la culture, c’est de la main basse sur les consciences... On est au-delà du scandale, c’est orwellien.
    En tous cas, cette grève aura rempli les poches de pas mal d’artistes, passés en boucle jusqu’au dégoût, l’amoralité n’ayant pas de limite, les petit-copinage non plus, apparemment. Vous achèterez votre prochaine bagnole à la santé des grévistes, mesdames et messieurs les artistes. Nos oreilles, tant-pis. La démocratruc et la mission de service machin-chose, on verra plus tard.
    Ah si les gars de Conti, ou ceux de Mory-Ducros, ceux de Florange, si tous ceux-là avaient eu à disposition une antenne pour expliquer, argumenter, débattre, éduquer... l’auraient-ils livrée à l’abrutissement en boucle... ? tu parles, une bande de nantis,n on leur achètera des bonnets jaunes, à ceux-là.
    Nuls jusqu’au bout. Ca sent la prise d’otage. Des employés comme des auditeurs.
    Je défendrai pourtant cette radio jusqu’au bout, contre l’indigence coupable et intéressée des Europe1, RMC, RTL, et autres machines à trépaner, mais c’est normal, c’est de la machine à fric et à endoctriner, mais on le sait.
    Restera que je ne m’attendais pas à avoir la défendre un jour contre ses propres supposés-serviteurs... qui sont bien partis pour en être les fossoyeurs.
    Ceci dit, c’est Sarko, avec Hees et Val, qui a foutu le ver dans le fruit. fallait-il compter sur les croûtons du CSA pour redresser la barre ?
    Celle-là, de plaisanterie.... comme on dit chez nous. Bravo les ministres.


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