UBER : libre concurrence ou concurrence déloyale ?
Plus d’une centaine de chauffeurs « Uber » se sont manifestés mardi 22/11 au centre de Londres ; ils cherchaient à faire pression sur le maire de la capitale britannique, M. Sadiq Khan pour obtenir d’être rémunérés au salaire minimum.
Ils ont défilé en lançant des slogans et en bloquant la circulation pour exprimer leur colère contre la société californienne qui leur impose des conditions de rémunération qu’ils jugent inacceptables.
La manifestation a exaspéré certains conducteurs qui se sont trouvés bloqués derrière une ligne de voitures Toyota Prius roulant au pas. Un chauffeur de taxi « conventionnel » en colère a crié : « Commencez par apprendre votre métier ! » faisnt ainsi référence à leur propre obligation de mémoriser les rues pour obtenir leur licence alors que les chauffeurs UBER utilisent leur GPS.
L'action a été organisée par deux chauffeurs qui ont obtenu un jugement du tribunal équivalent à nos prudhommes affirmant qu’Uber devait considérer ses chauffeurs comme des salariés et non comme des travailleurs indépendants. Cette décision signifie qu'ils doivent être payés au salaire minimum national, recevoir des indemnités de maladie et bénéficier des jours fériés. Uber a déclaré qu'il ferait appel du jugement. Les deux intéressés ont mis en place un groupement représentatif des conducteurs de « minicabs » travaillant pour Uber : l’United Private Hire Drivers (UPHD).
En mai 2017, la licence d'Uber doit être renouvelée à Londres, et le maire doit évaluer les critères de renouvellement, en particulier en ce qui concerne les droits des travailleurs.
UPHD a également envoyé une lettre à M. Khan pour s'excuser pour la perturbation causée par la manifestation protestation, et expliquer que le modèle de gestion Uber se traduit par "des abus qui rappellent l'époque victorienne de Londres plus que celle de la méga ville mondiale du XXIe siècle".
Cette lettre affirme : « Le fait que de tels abus soient commis dans une profession réglementée et contrôlée par TfL [Transport pour Londres] au nom de tous les Londoniens n'est rien de moins qu'un scandale public. Plus que cela, les conducteurs travaillant jusqu'à 90 heures par semaine pour 5 £ (5,87 €) de l’heure représente un risque caractérisé de sécurité publique. "
Uber prétend que ses pilotes gagnent davantage et affirme que le seul cas d'un conducteur qui avait gagné £ 5 par heure sur 90 heures venait du fait qu’il s’agissait de tarifs promotionnels. Mais plusieurs chauffeurs qui s’étaient joints à la manifestation ont déclaré que leurs rémunérations étaient inférieures au minimum légal : "Je travaille 70 à 80 heures par semaine, ce qui revient à gagner 4£ de l'heure, ce qui est inférieur au salaire minimum", a déclaré l’un d’eux.
Un porte-parole d'Uber a pris la défense de son entreprise et affirmé que "des dizaines de milliers de chauffeurs licenciés à Londres avaient choisi de s'associer avec Uber parce qu'ils aimaient la liberté et la souplesse que leur procurait le fait d'être leur propre patron".
Il a ajouté que son propre sondage révélait que 90% des conducteurs étaient « satisfaits du partenariat avec Uber et qu’une majorité considéraient que l’argent qu'ils ont gagné, ainsi que la possibilité de concilier travail et vie familiale, avaient augmenté depuis qu'ils avaient intégré l’organisation : « Nous sommes fiers des opportunités économiques que nous avons mises en oeuvre pour les gens qui peuvent choisir de conduire quand et où ils veulent. Les pilotes utilisant notre application ont perçu plus de 16 £ nets de l'heure en moyenne en septembre, et 20% des conducteurs ont été connectés à l'application pendant 10 heures ou moins par semaine."
Selon le modèle économique présenté par la société, 80 % du tarif payé par le client sont redistribués au chauffeur, les 20 % restants revenant à Uber sous forme de commission, mais, en fait, une plainte a été déposée par une utilisatrice américaine accusant la société de publicité mensongère. Elle considérait qu'en réalité la société gardait une part plus importante qu’annoncé. La subtilité de la stratégie d’UBER consiste à présenter une activité commerciale régulière de vente de service comme s’il s'agissait d'une activité occasionnelle, mais de plus en plus de signes indiquent que cette arnaque ne tient pas à long terme. La réaction des chauffeurs dans les rues de la capitale mondiale du « libéralisme » est un de ces signes.