samedi 1er juillet 2017 - par

Versailles(s)

J'aime bien Versailles. Il y a cette merveille que demeure le château même si c'est une boîte vide en somme. Et la ville en elle-même a une architecture remarquable, des avenues larges et ouvertes. On peut croiser au hasard des cafés de cette cité des ivrognes narquois, un rien goguenards et philosophes riant du touriste, du passant. Parfois même certains sont écrivains, ils observent, ils s'amusent, ils ont toujours "une oreille à Toulouse". Et puis il y a aussi le souvenir de ce gros type tenant dans sa patte la toute petite main d'une fillette par qui il se laissait mener par le bout du nez, tel un ours avec son anneau dans le nez.

J'y habite depuis deux ans.

Avant d'y arriver, je pensais que tout ce que l'on racontait sur certains versaillais, les plus favorisés matériellement, étaient des légendes, des caricatures ceux-ci étant souvent catholiques et de droite d'où les méchancetés. Mais en réalité, tous les clichés sont vrais et se vérifient chaque jour. Je pensais également que de par certaines de mes convictions et de par ma foi je serais proche d'eux et m'intègrerais à ce milieu. Ce ne fut pas le cas et j'en suis heureux finalement car c'est un milieu de faux semblants et d'hypocrisie morale, tout autant que les "bobos" pour qui les versaillais bon teint n'ont pourtant pas de mots assez durs alors que c'est "bonnet blanc et blanc bonnet". C'est d'ailleurs leur commune hypocrisie qui les rend totalement insupportables, car ils prétendent tous défendre des valeurs élevées dont ils se fichent complètement...

Cette épithète de "bobo" se voulant méprisante c'est surtout une manière de se justifier de son ignorance et de son inculture (la culture c'est une lubie de "bobo" prétentiard)...

Chez ces versaillais tout individu normalement constitué se doit d'être marié et d'avoir une famille nombreuse. S'il ne satisfait pas à l'une ou l'autre de ces conditions c'est forcément qu'il est soit homosexuel, soit pire encore à leurs yeux...

 Certes les apparences ont un peu évolué et superficiellement on pourrait avoir l'impression qu'ils se sont émancipés :

Les versaillaises ne portent plus le bandeau obligatoire dans les cheveux, ne sont plus certainement coupées "au carré" avec une jupe plissée bleue marine et un foulard "Hermès" (TM°). Les versaillais quant à eux ne sont plus systématiquement en "Loden" (TM°) et "Méphisto" (TM°). Mais fondamentalement rien ne change bien que les deux sexes aient adopté le même genre de look peu ou prou : pantalons ou bermudas de couleur pastel, rouge ou rosée, ou orange, ou vert pistache avec le petit "polo" ou la petite chemisette assortis.

On continue à aller à la messe et à éduquer les enfants dans la religion catholique. Mais au fond c'est plus à cause de la comédie sociale et de l'endogamie de ce milieu qu'autre chose, à quelques notables et sincères exceptions. Finalement, ce que dit monsieur le curé, "un homme charmant", de leur milieu lui aussi, c'est très bien à la messe mais une fois sortis de l'église cela n'a plus guère d'importance. Il faut quand même être réaliste, faire des affaires, payer les études des enfants, le "rallye" de la petite dernière, les camps scouts du fils de famille.

Dans les deux cas, il s'agit surtout que l'une se trouve un bon reproducteur capable d'assurer sa pitance et l'autre une poule pondeuse docile ayant quand même un peu de conversation. Quant à l'éducation, disons ce que ce n'est plus qu'un vernis, les enfants sont rois et reines, encouragés à faire preuve du même sans-gêne que bonne partie de leurs parents car quoi ils sont riches, ils peuvent se le permettre.

Ce que l'on attend d'un prêtre est qu'il soit dynamique sous entendu qu'il compense les carences des parents en l'occurrence et qu'il demeure dans ce tout affectif pénible étant la règle en ce moment pour de nombreux catholiques, de ces grands rassemblement où l'on se tient tous par la main, ce qui n'empêche nullement une fois celui-ci terminé de débiner le voisin et d'ignorer son prochain sans aucun remords. Les versaillais de ce genre attendent des ecclésiastiques que ceux-ci en bref les confortent dans leur perception très flatteuse de leurs petites personnes, de leur statut.

Je me suis aperçu également que ces personnes étaient extrêmement complexées pour la plupart, qui parce qu'elles se sentent inférieures aux "bobo", qui parce qu'elles viennent pour la plupart de la province aisée. Curieusement ces péquenots parvenus expriment tous ou presque une étrange -et désuète- détestation de Paris, la capitale si proche et forcément corruptrice. Paris Pantruche les fascine aussi, ils aimeraient bien goûter à ses plaisirs mais leur appétence pour le camouflage les empêche de le faire.

Ils sont aussi complètement déconnectés du réel, incapables de comprendre le monde moderne dans ses nuances, se réfugiant dans des bravades que n'auraient pas désavoué leurs ancêtres "louis-philippards". Et pour cela j'ai pitié d'eux car ils ne voient même pas leur propre déliquescence.

 

Sic Transit Gloria Mundi, Amen

Amaury -Grandgil

illustration prise ici à ce lien




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