mardi 22 novembre 2005 - par

Enchères inversées : votre salaire est trop élevé

De nombreux sites Internet d’offres d’emploi par enchères inversées voient le jour actuellement. Y a t-il une limite à l’homme marchandise ?

Personne ne niera que le climat social actuel est relativement morose en ce qui concerne le marché du travail. L’apparition de sites Internet d’offres d’emploi par enchères inversées peut-elle contribuer à relancer la confiance que les agents individuels accordent au marché du travail ? Est-ce la bonne solution ? La solution miracle ?

Un nouveau stade est atteint avec ces sites qui donnent la possibilité à des demandeurs d’emploi de revoir à la baisse la vente de leur force de travail. Un marché complètement libre : l’individu devra être le plus offrant pour obtenir un poste. On imagine que le système d’enchères touchera davantage les secteurs où aucun homme n’est vraiment irremplaçable, autrement dit, les "boulots précaires".

Quoi qu’il en soit, la CFE-CGC dénonce clairement ces nouvelles pratiques. Les sites internet d’offres d’emploi par enchères inversées et les entreprises qui souhaitent profiter du créneau doivent, selon elle, être boycottés.

Un marché du travail qui reposerait uniquement sur un système d’enchères au salaire le plus faible est-il valorisant humainement ? De tels sites n’auraient aucun succès si aucune entreprise ne faisait appel à leurs services.

La situation actuelle du marché du travail, avec ses bataillons de chômeurs, est idéale pour accroître l’illusion de la possibilité d’une concurrence parfaite avec sa transparence et sa flexibilité. Les défenseurs de la mise aux enchères en ligne arguent que les propositions de baisse des salaires sur de tels sites ne sont pas inévitables : les enchères peuvent aussi être à la hausse. Toutefois, on peut se demander dans quelle mesure l’individu est acteur dans ce processus de négociation, où c’est le recruteur qui pose ses conditions et fait jouer la concurrence des salariés entre eux.

Michel Lamy, qui est le secrétaire national de la CFE-CGC, appelle les entreprises à la raison : un site d’offres d’emploi par enchères inversées comme www.jobdealer.net est "socialement odieux". En Allemagne, le site jodumping.de avait suscité de nombreuses critiques lors de sa mise en place, notamment de la part des syndicats. En France, le site Jobdealer.net a ouvert ses portes le 2 novembre dernier.

Comment fonctionnent de telles plates-formes Internet ?

Le système d’enchères inversées permet à un employeur de proposer sur son site un emploi qui est le plus souvent manuel, et de fixer le salaire maximum qu’il est prêt à verser pour un tel travail. Les demandeurs d’emplois qui viennent sur le site peuvent alors proposer un salaire moindre. Celui qui remporte le contrat est celui qui propose le salaire le moins élevé. Ce système pousse ainsi les salariés à accepter des salaires toujours plus faibles.

De point de vue du droit, le salaire minimum est une barrière en France, toutefois, force est de constater que le marché des offres d’emploi en Europe est libre. Mais peut-on rejeter toute responsabilité sur l’Europe ? Les minima sociaux français sont une limite à une baisse des salaires qui est "stupide économiquement" estime Michel Lamy, dans une société qui repose "économiquement" sur la consommation.




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