dimanche 4 septembre 2005 - par

La Nouvelle-Orléans entre frustration et espoir après le passage de Katrina

LA NOUVELLE-ORLEANS (AP)

A La Nouvelle-Orléans, les habitants sont partagés entre espoir et frustration. Cinq jours après le passage de l’ouragan Katrina, des milliers de rescapés attendaient encore samedi d’être évacués d’une cité où plane à chaque coin de rue l’odeur de la mort et de la pourriture. Mais les secours semblaient enfin monter en puissance.

Depuis l’arrivée vendredi de la cavalerie à La Nouvelle-Orléans, plus de 25.000 personnes ont été évacuées de la ville, a précisé le directeur de l’Agence fédérale de gestion des situations d’urgence (FEMA), Mike Brown, lors d’une conférence de presse samedi matin à Baton Rouge (Louisiane).

Ni le nombre d’habitants encore présents dans la ville dévastée ni le nombre de morts ne sont connus parce que des rescapés continuent à se présenter sur des sites d’évacuation et que le décompte des cadavres n’est toujours pas achevé, a expliqué M. Brown.

En début de semaine, le maire de La Nouvelle-Orléans, Ray Nagin, avait dit qu’il fallait s’attendre à des milliers de morts après le passage de Katrina sur la Louisiane, le Mississippi et l’Alabama. Samedi, la gouverneure de Louisiane, Kathleen Blanco, a elle aussi avancé un bilan final de plusieurs milliers de morts. Ainsi, dans la prison St-Gabriel, une seule morgue pourrait recueillir de 1.000 à 2.000 corps, a déclaré Craig Vanderwagen, du Service américain de santé publique.

Dans le Superdome de La Nouvelle-Orléans, où une grande partie des sinistrés avaient trouvé refuge après la catastrophe, le processus d’évacuation massif s’est brutalement interrompu dans la nuit. Visiblement débordés par l’ampleur de la tâche, les services de secours d’urgence de Louisiane ont expliqué qu’ils avaient dû déplacer leurs efforts vers le centre des congrès de la ville où des milliers d’autres sinistrés attendaient, eux aussi, de quitter la cité dévastée.

Du coup, le sentiment de frustration s’est accru parmi les milliers de rescapés du Superdome qui pensaient être évacués avant l’aube et qui restaient bloqués dans l’immense stade de La Nouvelle-Orléans où les conditions sanitaires sont devenues déplorables.

« Au début, ils nous ont dit 6h30 du matin, puis 9h », s’est emportée Jennifer Washington, 25 ans, sans nouvelles de ses quatre enfants depuis le passage lundi de Katrina sur la ville.

Au centre des congrès, en revanche, les rotations de bus ont apporté un peu de réconfort aux quelque 25.000 réfugiés qui sont entassés dans l’édifice dévasté depuis des jours, au milieu de la puanteur des corps en décomposition et des détritus amoncelés.

Des milliers d’entre eux, poussant ou traînant de maigres affaires sauvées du naufrage, sortaient du centre des congrès et se dirigeaient vers une quinzaine de bus climatisés, l’air davantage hagard qu’euphorique.

« J’avais foi en leur venue. Je me sens mieux à l’idée de pouvoir rejoindre ma famille », a expliqué Yolanda Sanders, après cinq jours passés dans le centre des congrès. Elle ne sait pas encore où on va l’emmener, mais « tout vaut mieux qu’ici », lance-t-elle. « Ici, il y a des gens qui meurent partout ».

Le lieutenant-colonel Jerry Crooks, de la Garde nationale, a précisé que ses hommes avaient servi plus de 70.000 repas devant le centre des congrès et étaient prêts à en servir 130.000 autres.

Attendant un repas devant la caravane des gardes nationaux, Leschia Radford, visiblement submergée par l’ampleur de la catastrophe, préférait faire les louanges d’une puissance supérieure. « Seigneur, je te remercie de nous sortir d’ici », hurlait-elle.

Non loin d’elle, un homme mort gisait sur le trottoir, sous une couverture, un filet de sang s’écoulant de son corps vers le caniveau. Car l’insécurité et les pillages n’ont pas épargné la ville, certains profitant de la confusion générale, d’autres cherchant simplement à se nourrir devant le retard des secours.

Pour tenter d’endiguer ces actes de violence, mais aussi le flot des critiques sur la lenteur de l’aide fédérale, George W. Bush a annoncé samedi qu’il envoyait 7.000 soldats du service actif en renfort pour y rétablir l’ordre et venir en aide aux rescapés.

Ces militaires seront sur place dans les 24 à 72 heures à venir, a précisé le président américain qui, fait rarissime, tenait en direct depuis la Maison Blanche son allocution hebdomadaire, habituellement préenregistrée.

« Notre nation a le caractère, les ressources et la détermination pour surmonter ce désastre », a-t-il déclaré. « Nous reconstruirons la grande ville de La Nouvelle-Orléans et nous prouverons une nouvelle fois au monde que la pire adversité fait ressortir ce qu’il y a de mieux dans l’Amérique. » AP




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