mercredi 25 octobre 2006 - par

Liberté de la presse, les lignes bougent

Quels sont les critères établis par RSF pour évaluer la liberté dans les pays ? Le classement intègre 168 pays ; pour les autres les données ont été jugées insuffisantes. RSF enregistre le nombre d’atteintes directes contre les journalistes, contre les médias, le sort réservé en justice aux auteurs de violations de la liberté de la presse, le cadre juridique qui régit les médias, le comportement de l’Etat face aux médias internes et internationaux, les atteintes à la libre circulation des informations sur Internet. Reporters sans frontières n’a pas seulement tenu compte des exactions dues à l’Etat mais aussi de celles de milices armées, d’organisations clandestines ou de groupes de pression. Un questionnaire est rempli par des correspondants, des associations, des journalistes, des chercheurs, des juristes... L’Institut de statistique de l’Université de Paris traite les données recueillies.

Les lignes ont bougé dans le classement 2006 (qui enregistre les faits de septembre 2005 à septembre 2006). Certes les pays contrôlés par une autorité politique qui exerce son pourvoir par la force sont, comme d’habitude, mal classés : en Corée du Nord, tout message est contrôlé par l’Etat, le pays est classé comme le plus répressif. A partir du 162e rang se trouvent l’Iran, la Chine, la Birmanie, Cuba, l’Erythrée, le Turkménistan. Les démocraties du Nord de l’Europe sont en tête de classement : Finlande, Irlande, Islande, Pays Bas occupent la première place.

Quels sont les troubles qui entraînent cette année un recul dans ce classement ? On observe que le Danemark a perdu dix-neuf places en se classant 19e... : « Pour la première fois au cours de ces dernières années, dans ce pays très respectueux des libertés fondamentales, des journalistes ont dû être placés sous protection policière en raison de menaces dues à leur travail », explique RSF. Les Etats-Unis perdent neuf places en un an (53e) : « L’atmosphère s’est nettement détériorée entre la presse et l’administration du président George W. Bush depuis que celle-ci, invoquant la sécurité nationale, tient pour suspect tout journaliste qui remettrait en cause sa guerre contre le terrorisme ». La Russie perd également neuf places (147e) avec « des problèmes fondamentaux de déficit démocratique, de rachats de la quasi-totalité des médias indépendants par des groupes industriels proches du pouvoir et d’une législation [...] décourageant l’activité des organisations non gouvernementales ». La France perd cinq places (35e, recul de vingt-quatre places en cinq ans) : « La multiplication des perquisitions au sein des médias et des mises en examen de journalistes est un réel sujet de préoccupation pour les organisations professionnelles et les syndicats » ; les événements perturbateurs cités dans le rapport sont notamment les caricatures de Mahomet, la dégradation de la situation au Proche-Orient, le conflit SNCM, les manifestations dans les banlieues.

A l’inverse, la Bolivie (16e, comme le Canada et l’Autriche), la Bosnie-Herzégovine, Haïti, le Togo, la Mauritanie, le Bénin, la Namibie remontent, à la faveur de changements politiques. Si la guerre reste « le fossoyeur de la liberté de la presse », il suffit parfois de tensions pour que cette liberté soit atteinte, y compris dans des pays démocratiques qui pourtant garantissent par la loi cette liberté. 




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