mercredi 20 décembre 2006 - par

Statut pénal du chef de l’Etat, relance d’une réforme en stand by

Promise pour la première année d’exercice du mandat présidentiel, examinée en Conseil des ministres en 2003 pour être portée devant les deux assemblées parlementaires, la réforme du statut pénal du président de la République française devrait être discutée et votée in extremis, avant l’élection du prochain président. Rappelons la proposition du Conseil constitutionnel, que nous avons déjà présentée début octobre.

Le Conseil constitutionnel distingue le statut du président dans l’exercice de ses fonctions et celui qui le concerne à échéance de son mandat. Tant qu’il exerce ses fonctions, « la responsabilité pénale du Chef de l’Etat [...] ne peut être mise en cause que devant la Haute Cour de Justice et par un vote identique des deux assemblées, qu’il s’agisse des actes commis dans l’exercice des fonctions et qualifiables de haute trahison (génocides, crimes contre l’humanité, crimes de guerre) ou des actes détachables des fonctions commis pendant son mandat ou, s’ils ne sont pas prescrits, antérieurement à celui-ci. »

La priorité est de ne pas « prendre le risque d’une perturbation de la fonction présidentielle au travers d’un harcèlement médiatico-contentieux préjudiciable au bon fonctionnement des pouvoirs publics et, partant, à la vie de la Nation tout entière ». On parle donc de « limitation provisoire du principe d’égalité devant la justice », au nom de l’intérêt supérieur de la nation.

En ce qui concerne les actes étrangers à l’exercice de ses fonctions, on parle d’un « privilège de juridiction ». Guy Carcassonne, autorité en droit constitutionnel, s’est interrogé avec humour sur la distinction entre les périodes d’exercice des fonctions et de non-exercice : « Si un président, en Conseil des ministres, rosse un chef du gouvernement ou, carrément, le trucide, sommes-nous dans l’exercice des fonctions ou non ? Et si, au lieu que la scène se déroule à l’Elysée, elle se situe au Fort de Brégançon, durant des vacances imprudemment prises ensemble, ou à l’occasion d’un dîner chez des amis communs ? En vérité, la frontière entre les actes accomplis dans l’exercice des fonctions et les autres est à peu près impossible à tracer. On n’est pas président de la République à éclipse... » Finalement en pratique la distinction ne se fait pas.

En revanche, à la fin de son mandat, quand la personne n’incarne plus la fonction de président, elle redevient un citoyen, et non seulement les poursuites de droit commun peuvent être reprises contre elle, mais encore les années d’exercice du mandat n’entrent pas dans le calcul du délai de prescription. « Il n’existe donc d’immunité ni de droit, ni de fait. » Le régime juridique est alors plus sévère pour l’ex titulaire de la charge présidentielle que pour un citoyen ordinaire, puisqu’il peut être poursuivi et condamné pour des faits beaucoup plus anciens que ceux qui pourraient être reprochés à tout un chacun.

Le statut pénal du chef de l’Etat applique le principe selon lequel : « A travers la personne du président, c’est la fonction et elle seule que protège la Constitution. »

 




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