lundi 8 février 2016 - par Michel DROUET

Des élus fusionnels

Depuis de années, on s’époumone à dire qu’il y trop de collectivités locales en France et donc trop d’élus

Depuis des décennies on a incité les communes à se regrouper entre elles avec (paradoxe) la création d’intercommunalités, censées remplacer à terme les communes, mais qui sont devenues en fait une nouvelle couche dans le mille-feuille.

Tous les systèmes, toutes les incitations ont échoué, souvent au prétexte de la fameuse proximité élu/citoyens instrumentalisée par les élus eux-mêmes qui ne veulent surtout pas perdre leurs sièges et les partis politiques soucieux de leur influence qui finit par nous coûter très cher sans rien apporter de neuf à la démocratie locale.

Aujourd’hui, c’est plus simple, en apparence seulement, car les calculs politiques sont toujours bien présents et se font sur le dos des citoyens priés de croire que les élus agissent pour leur bien.

La contrainte financière, seul moyen de faire bouger les choses, les fait bouger effectivement, mais de manière différenciée, en préservant « l’élite ».

La piétaille municipale

Certes, 36300 communes, c’est trop. C’est sur ces collectivités que s’abat en premier la foudre budgétaire : moins de dotations de l’Etat et donc nécessité de travailler ou de fusionner avec d’autre communes si on veut éviter d’augmenter les impôts locaux.

Un processus de fusions de communes est en cours et connaît un succès sans précédent puisque plus de 1000 communes ont décidé de se regrouper pour ne plus en faire qu’environ 300 à terme. La France va donc se retrouver sous la barre des 36000 communes. C’est bien, générateur d’économies de gestion à terme, mais largement insuffisant car ce sont toujours les mêmes égoïsmes qui se manifestent pour refuser la fusion avec le voisin : là, la personnalité ou la couleur politique d’un élu qui ne se voit pas, à terme, ne pas être réélu, ou bien le refus de partager les excédents budgétaires récurrents avec les voisins.

Même si ce mouvement de fusion ente communes est mineur toujours est-il qu’il faut saluer le désintéressement des élus qui s’engagent dans ce processus en sachant que lors des prochaines élections municipales, beaucoup d’entre eux ne pourront pas se représenter.

Les petits barons départementaux

Le Conseil départemental, voilà un bel exemple de collectivité territoriale dont on aurait pu faire l’économie, tant ses compétences auraient pu facilement être transférées à d’autres collectivités ou organismes sociaux, mais ce serait ignorer le poids de ces petits baronnets.

Comme pour les communes, des fusions sont envisageables entre conseils départementaux voisins, mais là où la loi est bien faite pour les élus de ces collectivités, c’est que le nombre de conseillers élus selon une parité homme/femme dans des cantons redessinés récemment restera le même à terme. Les assemblées départementales continueront donc à coûter toujours aussi cher en fonctionnement (indemnités des élus, frais de communication, véhicules avec chauffeurs et autres petites mains chargées de faire fonctionner ces assemblées).

C’est ce qui va se passer prochainement avec la fusion des Yvelines avec les Hauts de Seine dont le Président, Patrick Devedjian, promet monts et merveilles en matière d’économies budgétaires liées à cette fusion, mais sans les chiffrer, bien entendu, car cette fusion répond surtout à un positionnement politique de ces deux assemblées face à la Région Ile de France au « Grand Paris » et aussi à l’Etat.

Donc, pas d’économies, pas d’élus en moins, juste des petites magouilles électorales et politiques que le bon peuple est prié d’accepter sans réfléchir et surtout sans être appelé à donner son avis, juste parce que les politiques qui dirigent ces assemblées ont un plan de carrière qui les fera finir éventuellement au Parlement, alors que les élus municipaux cités ci-dessus retourneront à leur travail sans rien dire.

La « montée en gamme » des élus régionaux

Les dernières élections régionales ont été l’occasion d’enjeux politiques nationaux très forts, alors mêmes que ces nouvelles régions taillées à la hache, sans grande cohérence par le pouvoir central, et uniquement dans le but pour lui de réaliser des économies sur les services déconcentrés de l’Etat, sont des naines financièrement parlant et également en terme de compétences.

La stabilisation du nombre d’élus régionaux a, comme pour les conseils départementaux, été gravée dans le marbre, puisque les nouvelles régions reprennent l’intégralité des élus des autres régions avec bien sûr les coûts de fonctionnement antérieurs de ces assemblées.

Aucune économie à prévoir, mais des surcoûts (bâtiments et salles de réunion pour loger tout ce petit monde, frais de déplacements en augmentation et alignement, vers le haut, des régimes indemnitaires des personnels).

Une réforme en trompe l’œil et politiquement désastreuse

En trompe l’œil, parce que derrière les bonnes intentions, on imagine bien que le coût global final sera plus élevé que les petites économies réalisées par l’Etat en baissant ses dotations aux collectivités et que les contribuables locaux seront appelés à ouvrir leur porte-monnaie.

Politiquement désastreuse, car cette réforme, plutôt cette réformette, préserve les intérêts des barons locaux et des hommes politiques qui « comptent » dans le débat national au détriment de la gouvernance locale, obligée sous la contrainte de réaliser des économies.

Cela donne le triste sentiment pour nos concitoyens des zones rurales ou périphériques d’abandon de la part d’une élite davantage préoccupée par ses intérêts personnels, la politique politicienne, que par la démocratie locale. 



9 réactions


  • Fergus Fergus 8 février 2016 11:47

    Bonjour, Michel

    Excellent article.

    En fait, la réforme des régions n’avait de véritable sens que si elle s’accompagnait dans le même temps d’une disparition du niveau départemental : les départements seraient devenus des antennes déconcentrées du pouvoir régional, le Conseil régional étant constitué d’élus territoriaux siégeant au Conseil régional tout en restant des représentants de leur département d’origine.

    C’est grosso modo le projet que voulait mettre en œuvre Sarkozy - à juste titre, pour une fois - et qui a été torpillé par le PS. Dommage que cette occasion ait été ratée !

    Pour ce qui est des « nouvelles communes », il reste beaucoup à faire, c’est évident, mais le mouvement est lancé et devrait s’amplifier si l’Etat reconduit un système d’incitation par le biais des dotations pour faciliter les fusions. A noter, et c’est une excellente chose, que nombre de ces fusions se font en calquant la carte de la communauté de communes qui, de ce fait, disparait.

    Il n’en reste pas moins d’énormes chantiers à conduire pour assainir le tissu administratif, et c’est effectivement loin d’être gagné, eu égard au poids des barons locaux et de leurs réseaux.


    • Michel DROUET Michel DROUET 8 février 2016 14:52

      @Fergus
      La seule nuance avec le projet de Sarkozy, c’est qu’il n’entraînait pas de disparition des anciens conseillers généraux qui étaient de fait intégrés dans la nouvelle Région.
      Or, si l’on part du principe qu’il y a trop d’élus, il me semble qu’un projet de réforme doit intégrer la disparition totale du niveau départemental (conseil départemental) , les compétences étant transférées soit à la région, soit aux intercommunalités ou aux communes nouvelles ou bien encore aux CAF pour la compétence sociale.


  • Robert GIL Robert GIL 8 février 2016 11:53

    Une solution possible pour que cela change consiste à supprimer les baronnies ainsi liées à ce statut de député-notable et remettre le député au centre du jeu politique. C’est à dire au cœur économique de la république :

    SIGNEZ CETTE PÉTITION

     Et vous participerez à un projet sinon révolutionnaire, du moins fort  bienvenu et salvateur pour la démocratie : le député redeviendrait –Ô utopie !– libre. Libre de ses choix. N’ayant plus aucun intérêt à lui manger dans la main, il ne serait plus à la botte du président-roi et de son gouvernement. Et du coup, il pourrait à nouveau le contrôler et même le censurer si ce dernier trahit les engagements pour lesquels tous deux ont été élus. Montesquieu en sourit déjà…


    • Legestr glaz Ar zen 8 février 2016 13:08

      @Robert GIL

      Et après avoir signé la pétition, qu’est-ce qui se passe ? Quel est le « pouvoir » d’une pétition ? Quelle influence aurait une pétition sur la conduite de l’Etat ?


    • Michel DROUET Michel DROUET 8 février 2016 14:58

      @Robert GIL
      Je suis un peu septique s’agissant des pétitions. Je parie plutôt sur l’abstention massive lors des élections pour faire prendre conscience aux élus de leur inefficacité pour régler les problèmes de notre société, mais je sais que je ne suis pas suivi par tout le monde sur ce point...


    • Michel DROUET Michel DROUET 8 février 2016 14:59

      @Ar zen
      Je partage votre point de vue. Il faut aller au delà des voies traditionnelles.


  • tashrin 8 février 2016 14:34

    entierement d’accord
    je vous rassure cependant, point besoin d’habiter en zone rurale ou peripherique
    Habitant Lyon, on assiste :
     - à la création de la Metropole qui remplace la communauté de communes du grand lyon
     - à la fusion Rhone Alpes / Auvergne
     => l’Auvergne vient de se faire construire un siege flambant neuf, rhone alpes egalement. On conservera donc les deux
     => Les elus auvergnats sont moins bien indemnisés que les rhonalpins. On aligne donc tout le monde sur le plus favorable
    Deux exemples types des « économies » réalisées...


    • Michel DROUET Michel DROUET 8 février 2016 14:54

      @tashrin
      Bonjour
      Vous confirmez bien mes craintes, celles d’une réforme faite avant tout pour les élus et non pour les citoyens.


  • zygzornifle zygzornifle 13 février 2016 18:45

    LE CONSEIL GENERAL DES ALPES MARITIMES SUBVENTIONNE AVEC NOS IMPOTS
    UNE ASSOCIATION CREE POUR FINANCER LA RETRAITE DES CONSEILLERS GENERAUX.
    BIZARRE, NON ?
    Avec les nouveaux conseillers dans les régions, on n’a pas fini de « découvrir » ce genre d’information !
    Ça c’est le pompon !!! 
    Cliquez sur ce lien =>
    https://www.facebook.com/mlrevuedepresse/videos/330248700518166/


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