lundi 28 juin 2010 - par
En deçà et au-delà de la Belgique
Les problèmes entre Région bilingue de Bruxelles Capitale, Flandre et Wallonie - ceux de la Belgique - peuvent être considérés comme une occasion de travail sur un prototype de "gouvernement européen". Certes sur un territoire réduit, mais avec difficultés non-réduites ! Les Belges sont de fait en position pour trouver des solutions qui pourront s’étendre (en les déclinant) au territoire entier de la communauté européenne.
L’Europe a eu un embryon : le BeNeLux. Belgique, Pays-Bas et Luxembourg sont nés comme tampons entre les incapacités allemandes, anglaises et françaises à s’accorder. Les divisions initiales non-vaincues ont tendance à s’y répercuter. La Communauté Européenne connaît en son sein au moins une mise à l’épreuve : Tchéquie et Slovaquie avaient décidé de se séparer dans leur ancien cadre. L’Europe peut également se référer à l’expérience de la Confédération Helvétique. Celle-ci est présente en son coeur même : la C.E. l’enveloppe comme un noyau. Elle dure depuis plus de 700 ans avec plusieurs langues et plusieurs religions.
Les problèmes belges ne sont pas des accidents, mais des figures particulières de difficultés communes. Les obstacles à dépasser vont dans deux sens :
- intérieur : une nécessité de respect des particularismes régionaux et locaux
- et extérieur : un besoin d’extension européenne et mondiale.
Toutes les nations d’Europe sont face à des demandes d’autonomie régionales et/ou communautaires. Elles sont aussi devant la nécessité de construire un gouvernement économique continental pour sauver l’euro et une gouvernance planétaire pour sauver la paix.
Indépendamment de leur taille, les divers territoires sont tous confrontés à des arbitrages à rendre entre dépendances et indépendances par rapport au reste du (des) pays ; un petit peu comme dans un corps, les organes.
Les frontières physiques matérialisent de façon visible des limites. Mais d’autres limites - moins visibles - sont tout aussi nécessaires. - Celle des souverainetés par exemple. Je vais rapprocher cette question de la subsidiarité, valeur européenne fondatrice.
La subsidiarité conduit en même temps à une affirmation et à une remise en cause de toute souveraineté.
Je vois souvent (et pas seulement en Europe) des réactions qui indiquent des souverainetés nationales abusives ou au contraire insuffisantes (Le Liban de la guerre de 1975 fut un symbole de manque d’Etat). J’observe des revendications d’autonomies régionales, départementales, communales... puis finalement claniques et individuelles. Ce sont en général des demandes de renforcement d’autonomie, mais on peut parfois remarquer, après des conquêtes indépendantistes, des basculements excessifs. Des minorités régionales, linguistiques par exemple (Les Russophones dans des pays baltes), se retrouvent discriminées, citoyens de seconde zone. Un passé injuste ne peut justifier des injustices présentes.
Si nous voulons vraiment qu’une autonomie continentale européenne se développe, il faut accepter que les souverainetés nationales se restreignent. La question d’une gouvernance économique et sociale de l’Europe est urgente pour les monnaies. Si les "marchés" (souveraineté excessive) abusent depuis des décennies c’est peut-être bien à cause d’un manque de gouvernement mondial. Dernier étage de la fusée "subsidiarité", à quelle part de sa jeune souveraineté le continent européen doit-il d’entrée renoncer pour faire vivre les questions planétaires dédiées à une Organisation des Nations-Unies recalibrée ? N’est-ce pas en confiant exemplairement à l’ONU ce qui lui revient que la Communauté pourra jouer son rôle au mieux ?
Toute "souveraineté" n’est ni vide, ni totale. Aucun pouvoir ne doit être nul ou absolu... seulement juste ou équitable. Pour me faire mieux comprendre, je vais utiliser l’image du fléau dans une balance romaine. Les deux bras n’ont pas une longueur égale. Cette astuce, comprise de longue date, permet de peser de grands poids avec des petits. La balance va quand même trouver un équilibre : il existe une solution. L’optimisme est donc raisonnable avec de la patience et du temps.
A nous de nous diriger consciemment vers des souverainetés équitables à tous niveaux de territoires. Dans l’idéal chacun a à progresser vers une image de lui-même, ni sur-estimée, ni sous-estimée. Cet effort est encore vrai pour chaque personne (On peut critiquer cette psychologisation mais pas lui ôter tout fondement).
Mon article est surtout inspiré par les mathématique des ensembles et les fractales où la même structure se reproduit à diverses échelles. On peut aussi le regarder d’un oeil écologique puisque réellement, dans la nature, aucun niveau d’existence ne néglige ou n’est négligé par un autre niveau d’existence.
De l’individu à l’humanité entière tous les collectifs observés ou observables ont leur réalité. Et par suite leur légitimité. L’inégalité de puissance n’implique aucune perte de dignité pour une partie.
J’ai été pédagogue de métier. Notre problème (qui est aussi celui de tout dialogue) est celui d’une inégalité qui ne doit pas tomber dans l’injustice.
Examinons la relation de l’élève et du maître par rapport au savoir. Le maître ne sait pas tout, l’élève n’est jamais totalement nul. Pour que le courant continue de passer l’échange, l’interaction, doit rapidement fonctionner dans les deux sens. Ni l’un, ni l’autre ne sont tout. Ni l’un ni l’autre ne sont rien. Prosaïquement, on retrouve cette nécessité de double circulation avec le courant électrique.
Pour conclure je dirai que dignité et démocratie sont inscrites par la nature dès les bases de la physique. Et pour polémiquer gentiment j’écrirai que la culture a un besoin urgent de rattraper le meilleur de la nature.