lundi 18 janvier 2016 - par Michel DROUET

Faire de la politique autrement, qu’ils disent…

Depuis le désastre démocratique des Régionales, beaucoup de voix s’élèvent pour réclamer une gouvernance d’union nationale. Certains hommes politiques et beaucoup d’éditorialistes vont dans ce sens, mais quelle portée donner à leurs propos ?

Dans les faits

Dans les faits l’union nationale quant aux politiques à appliquer existe déjà. Il n’est pour s’en convaincre de mesurer le grand écart fait par le gouvernement actuel et son Président entre le discours pré-électoral de Grenelle et la réalité d’aujourd’hui, notamment sur le rapport à l’argent et aux acteurs économiques et financier qui le manipulent uniquement à leur profit. « Mon ennemi, c’est la finance » : cette déclaration guerrière faite uniquement pour caresser l’électeur dans le sens du poil a rapidement été oubliée, de même que l’idée de renégocier le traité européen.

La politique de « gauche » menée actuellement ressemble furieusement à la politique de la droite et flirte parfois avec les propositions de l’extrême droite.

Nous avons donc un gouvernement qui se déporte globalement à droite ou au centre gauche (pour les plus optimistes) et les partis de droite ou du centre accompagnent ce mouvement en se disant qu’ils n’auront pas à se salir les mains lorsqu’ils reviendront au pouvoir.

Le sale boulot

Faire le sale boulot aujourd’hui consiste à répondre favorablement à toute demande de dérégulation du travail, de « réforme » des systèmes de retraite, de protection sociale ou de la famille, en gros démolir tout ce qui fait la singularité de notre pays pour l’aligner sur les moins disant sociaux comme un peu partout dans le monde. Bien sûr, tout cela n’est pas arrivé de manière spontanée. La concurrence mondialisée, la rapacité du capitalisme qui est tout sauf social, la bêtise de nos économistes acquis à ces thèses qui squattent les médias ont instillé peu à peu l’idée qu’il n’y avait pas d’autre solution. Nos politiques ont achevé le travail en se soumettant à cette doxa comme solution exclusive uniquement pour continuer à faire semblant de diriger le pays.

Les petites PME politiques

Jusqu’à il y a peu, le système était verrouillé essentiellement par deux partis que nous nommerons gauche et droite uniquement par facilité de langage. Tout allait bien dans le meilleur des mondes puisque l’alternance permettait de réguler le système : un coup c’est toi, un coup c’est moi. Tout le monde avait ses chances et d’obscurs apparatchiks pouvaient devenir, au mérite, c’est-à-dire choisi par le parti en fonction de son allégeance, député, sénateur, voire même Ministre, et une fois sa « carrière » interrompue par les aléas du suffrage universel, être recasé comme conseiller ou au cabinet d’un Président, d’un Ministre, voire d’un Maire ou d’un Président de Région.

Pour les « meilleurs » ou bien les plus remuants susceptibles de ruer dans les brancards, c’est le Conseil d’Etat, la Cour des comptes, une Inspection (éducation, affaires sociales,…) ou bien le Conseil Economique et social, voire un poste de Préfet qui s’imposait. Combien sont-ils aujourd’hui, ceux qui nous disaient qu’il faut se serrer la ceinture et qui aujourd’hui émargent sur nos impôts dans des postes protégés, s’épargnant ainsi les vicissitudes du demandeur d’emploi qui lui émarge à Pôle Emploi ?

A côté de cette « crème » des partis, il y a aussi les petites mains, c’est-à-dire ceux et celles qui assistent les « grands hommes » au quotidien, qui leur préparent des fiches, des discours, répondent aux courriers et permettent ainsi aux régnants de cumuler allègrement plusieurs mandats ou délégations bien rémunérés dans des satellites des collectivités locales ou de l’Etat. Combien sont-ils ces petites mains ? Nul ne le sait exactement, car le système autrefois limité aux parlementaires s’est beaucoup répandu dans les collectivités locales, jusque dans les Mairies de petites communes. Impensable aujourd’hui de ne pas avoir son conseiller, son chargé de mission de ceci ou de cela ou son chef de cabinet. Pourquoi se priver puisque c’est le contribuable qui paye !

Lors des alternances, ce sont donc ces amis fidèles et dévoués qu’il faut essayer de recaser ailleurs, quitte d’ailleurs à négocier avec les nouveaux tenants du pouvoir pour employer ces personnes sur des missions peu exposées politiquement mais néanmoins rémunératrices.

Les partis politiques classiques fonctionnent dont comme des PME dont l’objet est la conquête du pouvoir (et pas le triomphe d’idées) et qui, lorsqu’elles perdent des « marchés », s’efforcent de préserver l’emploi dans leurs rangs. Nous sommes loin de l’idée des licenciements économiques nécessaires qu’ils nous assènent constamment.

Le loup dans la bergerie

Tout allait bien dans le meilleur des mondes jusqu’à l’arrivée d’un troisième larron, le FN, qui n’en doutons pas, pratiquera, et pratique déjà, les modes de fonctionnement en vigueur chez les deux autres : la soupe est bonne, à défaut de mettre en œuvre autre chose que des mesures symboliques comme les crèches de Noël dans les Mairies. N’en doutons pas, le FN enfilera les pantoufles des prédécesseurs et adoptera la même bienveillance que les autres vis-à-vis de ce cher M. Gattaz, en distribuant des milliards et en pratiquant les allègements de charges qui videront les caisses sociales sans aucun effet sur l’emploi (rappelons-nous la baisse de la TVA dans les restaurants qui a finalement coûté à l’Etat 150 000 € par emploi créé).

Le danger est là, clament en chœur gauche et droite, pas tant en raison des mesures que professent le FN, (puisque certaines d’entre-elles comme la déchéance de nationalité, par exemple sont reprises allègrement, puisque « nous sommes en guerre »), que parce que le FN menace leur petit commerce, tout entier porté par la soumission au monde économique et financier et qui leur permet de se protéger eux-mêmes à défaut de trouver des solutions pour les demandeurs d’emploi, par exemple.

Ces partis politiques fonctionnent comme les grandes sociétés : un peu de concurrence ne nuit pas, puisque de toute façon on s’arrangera entre nous pour fixer les prix, mais trop, ce n’est pas bon pour nos marges. C’est ce qui s’est passé depuis plusieurs années dans la téléphonie mobile avec l’arrivée d’un quatrième opérateur. Les choses sont en train de se « réguler » par le mariage annoncé de Bouygues avec Orange. C’est la même logique qui prévaut à la fameuse union nationale.

Attendons donc l’union nationale annoncée et réclamée à cor et à cri par les fossoyeurs de la démocratie et dont le héraut n’est autre que M. MACRON qui saura expliquer, n’en doutons pas, aux citoyens qu’il faut remettre un cran supplémentaire à la ceinture pour que M. Gattaz commence à concéder quelques emplois.

Ce jour-là il ne sera plus nécessaire d’aller voter.



5 réactions


  • Le p’tit Charles 18 janvier 2016 08:14
    ( beaucoup de voix s’élèvent pour réclamer une gouvernance d’union nationale...)
    Notre classe politique est bien trop corrompue pour changer le cour des choses..
    Notre horizon est bien noir...

  • leypanou 18 janvier 2016 10:44

    Attendons donc l’union nationale annoncée et réclamée à cor et à cri par les fossoyeurs de la démocratie et dont le héraut n’est autre que M. MACRON qui saura expliquer, n’en doutons pas, aux citoyens qu’il faut remettre un cran supplémentaire à la ceinture pour que M. Gattaz commence à concéder quelques emplois. : les médias aux ordres le promeuvent déjà en permanence et Julien Dray disait même hier qu’’E. Macron est de gauche.

    Avec l’ANI, puis le Crédit d’Impôts Compétitivité Emploi, le Pacte de Responsabilité et de solidarité, vient ensuite la demande du Contrat Agile et N Sarkozy veut en remettre une couche supplémentaire en rendant dégressif les allocations de chômage qui déjà ne représentent que 57% du dernier salaire.

    Quant on sera au Contrat zéro heure comme au Royaume Uni, il n’y aura plus de chômeurs -statistiquement parlant, mais c’est le plus important pour eux- en France.


  • zygzornifle zygzornifle 18 janvier 2016 13:18

    faut mettre tout ce beau monde au SMIC et il ne restera plus que ceux qui ont vraiment envie de s’occuper de la France, tous les vautours parasites se seront enfuis vars d’autres secteurs a piller ......


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