J’ai l’esprit soucoupiste
Pour le moment tout va bien, il y a sauvetage d'une entreprise, ou plutôt des ouvrières. Sarkozy annonce qu'il ne laissera pas tomber les 93 ouvrières de Lejaby. Un miracle ! c'est fait ! Et avant même l'élection présidentiel. Laurent Wauquiez se gargarise de l'action du Président. Il a fait ce qu'il a dit.
Pourtant, pourtant, pourtant, il y a anguille sous roche.
Eh oui, le repreneur est un sous traitant de LVMH, dont le PDG n'est autre que Bernard Arnault, un proche de Sarkozy. Un hasard ?
Une chose est sûre, les ouvrières seront licenciées, puis embauchées en cdi. Est-ce que l'embauche se fera après la formation pour intégrer la nouvelle entreprise ou après l'embauche pour s'adapter au poste proposé ? En tout cas, elles perdent leur ancienneté et ce qui en découle comme droit et protection. Si elles sont actuellement dans le même bateau, la même situation qui fait leur force, elles se trouveront bientôt dans des situations diverses que chacune tirera la couverture à soi et essayera de sauver sa peau, bien compréhensible comme comportement. Ce sera moins médiatique et moins impressionnant qu'une centaine d'ouvrières en grève à la veille de l'élection présidentielle. Entre temps l'eau aura coulé sous les ponts. C'est de la pure politique, comme le sait faire Sarkozy et son clan.
Le coût de la formation sera-t-il à la charge de la collectivité ou c'est le repreneur qui en assumera les dépenses comme il y a pénurie de mains d'œuvre en maroquinerie. La veille il nous chante le refrain ultra libéral sur le coût du travail qui pénalise la compétitivité. Et le lendemain, il nous présente un repreneur altruiste, généreux, dépensier, sans perspective économique pour l'utilité d'un tel rachat.
- Lejaby
L'on a ici un exemple pour illustrer le lien de servilité et de soumission par lequel les donneurs d'ordre enchaînent leurs sous-traitants. Ceux-ci subissaient jusqu'à présent les pires externalités négatives qui permettent aux actionnaires des sociétés donneuses d'ordre d'engranger le maximum de profit. Ils feront le prête-nom depuis cette affaire Lejaby.
De même, les journalistes ont été élogieux pour la vente du rafale. Ce n'est toujours pas concrétisé, mais déjà l'euphorie s'empare du monde médiatique, et le voilà s'évertuant à attribuer le mérite et le succès des négociations au Président.
Pourtant, pourtant, et pourtant il y aura beaucoup de choses à redire sur la vente du Rafale. Certains d'un cynisme inouï nous expliquent que la guerre de la Libye fut l'occasion de faire une démonstration à échelle réelle pour balayer tout doute quant aux qualités du Rafale qui surpassent celles de ses concurrents.
Je ne suis pas spécialiste des armes, et encore moins dans les ventes d'armes. Mais une chose me rend sceptique. L'affaire Karachi n'est toujours pas terminée. Des commissions et des rétro-commissions, des comptes de compagne non conformes pourtant validés par le Conseil Constitutionnel. Les mêmes concernés par ce scandale ne sont toujours pas inquiétés par la justice. Ils se préparent pourtant pour un nouveau mandat.
- Rafale © Dassault
Deux choses sont à analyser. L'Inde est connue pour un haut degré de corruption de la classe politique. Ensuite la vente du Rafale se fait avec le transfert de technologie. Mais le contrat n'est pas encore signé, et il ne faut pas vendre la peau de l'ours avant de l'avoir tué. Mais qu'importe, il faut vendre l'illusion maintenant et ici pour tenter de gagner les élections, plus tard sera un autre jour, et il y aura une autre actualité qui rendra les affaires Lejaby et la presque vente du Rafale bien obsolètes.
Comme le répète en ce moment les présentateurs de la météo, il y a la température réelle et la température ressentie. Il y a la crise chiffrée par l'Insee et la crise vécue par le citoyen. Il y a l'information donnée gracieusement par les médias aux consommateurs et aux citoyens qui ont déjà payé le coût de la masse salariale des journalistes et éditoriaux, et qui ont payé par la publicité des émissions à « la bonne nuit les enfants, on s'occupe de tout, parce que on sait tout », il y a également l'information qui sortira dix ans, voire vingt ans après pour nous parler des coulisses pour vendre les rafales, et le sauvetage d'une entreprise.