L’ivresse des sommets
Terrain glissant à Orléans ...
Alors que le quinze municipal vient tout juste de rentrer de sa tournée triomphale en Louisiane avec un incroyable marquage à la culotte pour son capitaine et chef d’équipe, le laissant épuisé et sans énergie au retour de cette folle escapade aux frais de la princesse, de nouveaux projets de vacances bon marché sont dans les tuyaux des élus d’un conseil municipal bien décidé à jouir pleinement des dernières années de mandat qui leur restent à vivre, le vent du boulet étant si proche.
Les bruits les plus surprenants courent à propos d’un téléphérique qui n’aurait, nous dit-on d’autre intérêt que de démontrer que la ville, depuis son passage sous la tutelle de cette sensibilité politique a pris du relief et de la hauteur à défaut de grandeur d’âme. Non seulement construire un téléphérique dans une cité réputée pour sa platitude et celle de quelques-uns de ses représentants serait un formidable défi à la logique et et au bon sens, mais cette prouesse placerait notre bonne cité au rang des villes où il fait bon rire.
L’instigateur en chef de ce projet pharaonique, grand spécialiste des gadins électoraux et des glissades verbales a souhaité laisser une trace définitive dans son glorieux bilan. Nous vous rappelons que c’est lui qui est à l’origine de la fabuleuse idée de l’inexploitable, bateau à l’aube et fiasco financier au crépuscule. Nous pensions que cet exploit constituerait alors son chant du cygne, son bâton de maréchal.
Mais je n’avais pas achevé d’écrire cette expression que notre cher Louis Philippe reprit au bond ma réplique. Dans une des formidables associations d’idées dont lui seul est capable – n’a-t-il pas pensé unir Loire et Champagne pour son merveilleux bateau cloué à quai dans la plus totale ignorance de notre viticulture ligérienne ? - le prince de la facétie a pensé que mettre au pied de son téléphérique des canons à neige serait du meilleur effet et une formidable promotion pour la cité devenue Métropole Nord.
Je dois lui reconnaître un sens de l’à propos qui me laisse pantois. Que n’y a-t-il pas pensé plus tôt il aurait ainsi évité sa seconde Bérézina législative. C’est sans doute le souvenir des eaux glacées de la défaite et de la bataille de Russie qui l’ont conduit à imaginer cette belle propagande pour un projet injustement vilipendé par des adversaires toujours prompts à le critiquer. La vie publique est souvent très injuste pour ceux qui sont toujours en avance sur leur temps.
Ainsi donc, afin d’étudier la faisabilité de la chose, une délégation municipale prépare activement un séjour dans l’une des stations les plus huppées des Alpes. Il convient en effet de dépenser autant pour ce séjour à la neige que pour celui dans les bayous de Louisiane afin de donner la crédibilité que mérite ce nouveau projet. Le séjour permettrait ainsi d’examiner à la loupe et sans compter leur temps ni notre argent, les caractéristiques techniques des canons à neige, leur utilisation tout en se penchant un peu plus sérieusement qu’ils ne l’ont fait à Brest sur la technologie du téléphérique.
Par la même occasion et dans la perceptive de la future inauguration en grande pompe de cette cerise sur le fardeau municipal, les plus brillants représentants de la troupe des bronzés sont invités à s’inscrire aux cours de l’École du ski français pour y préparer assidûment le diplôme de la flèche, le plus approprié selon eux à leurs immenses mérites. En matière de dérapage financier, ils sont largement en mesure d’évoluer sur un terrain verglacé pourvu qu’ils n’aient pas à mettre la main à la poche.
Nous vous tiendrons au courant de la suite de cette formidable initiative. D’autres projets sont encore dans les cartons, nos responsables ayant désormais fait don de leurs congés pour l’examen de jumelages et d’animations toutes plus lointaines les uns que les autres. Il suffit pour ce faire de mettre dans leurs bagages la représentante de l’opposition locale pour éviter tout remou en interne. La Chine se prépare à recevoir toute la joyeuse troupe. Après les bâtons de ski, les baguettes seront à l’honneur. Le voyage devant se faire en bateau pour les besoins du symbole.
Admirativement leur.