lundi 19 décembre 2016 - par H.Ramirez

La crise française et la laïcité

LES RETOMBEES DE LA CHUTE DU MUR DE BERLIN SE FONT SENTIR SUR LES INSTITUTIONS FRANCAISES.

Ces temps-ci, la France semble se réveiller et s'apercevoir qu'elle vit sans s’en rendre compte, dans un cauchemar dû probablement à la perte de son influence dans le monde, situation qui se traduit dans la vie quotidienne des Français. Effectivement ce constat peut se faire plus clairement depuis quelques mois, mais cette situation s’observe et s’aggrave depuis une trentaine d'années. Sa perte de compétitivité se fait dans tous les domaines : dans l'industrie lourde, dans l'informatique, dans l'éducation, dans le secteur agro-alimentaire responsable, dans les arts, etc.

Parallèlement, la corruption envahit tous les rouages de la société, ce qui se traduit par le mépris de la part de certains dirigeants de l'industrie et du commerce pour les citoyens et pour l'environnement. A ceci s’ajoute que des hommes politiques abusent du pouvoir à leur bénéfice, et que des hommes de loi se mettent au service d’intérêts douteux. Les exemples parmi les plus connus sont les affaires de la viande de cheval, du Médiator, des affaires médiatico-judiciaires du procureur Ph. Courroye, la mise en examen des deux derniers présidents de la République : Chirac et Sarkozy , enfin tout dernièrement par des scandales politico-financiers qui se succèdent autant au niveau national que régional sous la gouvernance des partis de droite ou des partis de gauche d'orientation social-démocrate, dont le dernier en date est l'affaire du ministre du budget Cahuzac forcé à démissionner et à être jugé pour les délits commis.

A cette situation vient s’ajouter le symptôme majeur de ces derniers temps, les attentats terroristes.

Tout ceci s'accompagnant de l’appauvrissement de la plupart de ses citoyens, la ghettoïsation des banlieues populaires et l'emprise des groupes mafieux sur la vie quotidienne dans ces quartiers.

Ces faits, ne sont pas des cas isolés mais la manifestation symptomatique d'un dérèglement généralisé des Institutions Républicaines.

 

LES INSTITUTIONS

Les Institutions qui s’installent et perdurent dans une société ne sont pas des constructions artificielles, elles correspondent à des besoins profonds de l'être humain.

Quelle que soit leur structure, il y a un élément essentiel qui doit apparaître dès le début, et qui doit jouer un rôle comme enveloppe contenant afin de leur permettre remplir leurs fonctions, et assurer leur pérennité. Cet élément ou discours idéologique, ce sont les principes et points de référence philosophiques, éthiques, politique, économiques,etc qui doivent être la boussole qui trace le chemin à suivre et à agir de toute institution.

Dans le cas de l’État - et des institutions qui l’étayent-, institution fondamentale pour la vie d’une Nation, il doit être ou devenir le corps le plus harmonieux, pétri et traversé par cet élément intégrateur. En effet cet élément primordial idéologique doit être « contenant » et au même temps principe d’action.

Pour la France dès les début du XX siècle l’attachement à la laïcité et aux Droits de l’Homme ont été les pivots essentiels de son fonctionnement démocratique.

Or à côté et parallèlement de la référence primordiale des Droits de l’Homme et de l’adoption de cette conception laïque pour le fonctionnement de l’État français, le XX siècle a été le scénario de l'opposition, principalement et presque exclusivement de deux conceptions idéologiques qui peuvent se résumer ainsi : d'un côte la croyance en un être humain entrepreneur individualiste, regardé et jugé par et sous l’œil d'un Dieu qui lui offrirait, comme prix et récompense, une vie éternelle après sa mort, et de l'autre un être humain épris d'égalité, partageant le produit de son travail, récompensé par le regard de l'autre, et sans la croyance en une quelconque vie éternelle comme prix de son passage dans le monde.

La laïcité en France, comme principe bien évidement, faisait paradoxalement pont et en même temps partie des points d’opposition de ces deux conceptions.

L’opposition et lutte entre ces deux conceptions : marxiste et capitaliste de la Société, a facilité et permis la continuation d’un développement scientifique et technologique et des avancées sociales sans précédents, or ils souffrent à l'heure actuelle d'un arrêt historique marqué symboliquement par la chute du Mur de Berlin (9 novembre 1989).

De ce fait même, le monde technologique actuel est obligé de vivre sur les acquis scientifiques extraordinaires du XIX et du début et de la moitié du XX siècle, sans rien ajouter foncièrement d'important depuis 50 ou 60 ans. Actuellement il y a un essor de la technologie mais pas de la science. Les merveilleux appareils électroniques que nous possédons actuellement, truffés de microprocesseurs ou de transistors, sont le résultat des recherches fondamentales et de découvertes d'il y a au moins un demi siècle.

En ce qui concerne l’épanouissement social et les avancées dans cet ordre, elles sont à l’arrêt ou carrément régressent.

A partir des constats que nous venons d’énoncer on pourrait presque établir comme postulat du fonctionnement de la Société Humaine, le principe qu’elle ne peut pas progresser de façon rapide s’il n’y a pas une confrontation et un équilibre instable entre deux conceptions sociétales. La prédominance de l’une ou de l’autre annonce ou provoque l’arrêt ou ralenti le progrès social de tout ordre. Exemples qui abonnent dans notre constat : le période du Moyen-Age en Europe avec la prédominance de la vision chrétienne et, à l’heure actuelle dans le Proche et Moyen Orient, la prédominance sans partage de la vision sociétale fournie exclusivement par l’Islam. Ce qui se traduit par des périodes stériles pour leurs populations et pour le progrès scientifique de ces sociétés.

LE DESEQUILIBRE EN MARCHE : LA CHUTE DU MUR.

La disparition de l'URSS, pôle fondamental de cet équilibre instable dont nous venons de parler, schématisée et représentée par la chute du Mur de Berlin, n'est pas seulement un fait politique majeur dans les rapports internationaux, mais un événement dont les vagues se font sentir et se feront sentir à l'intérieur de chacun des pays du monde et plus particulièrement des pays européens dans les décennies à venir.

Sans entrer dans l’analyse des causes de cet échec il faudrait accepter et analyser ce constat sans appel : la création et l'implantation d'un système socialiste dans l'ancienne Russie, inspiré par le marxisme-léninisme, a abouti à un échec et à une catastrophe et à l’arrêt du jeu dialectique fructueux entre ces deux conceptions : la capitaliste et la socialiste ou communiste.

Le bilan humain, le bilan politique, le bilan social et le bilan symbolique de cet essai d’une partie de l'humanité de créer d'autres rapports sociaux, différents des rapports de production aliénés qui dominant dans la conception du capitalisme, s'est avéré négatif et source par conséquence d'une perte des repères et d'un vide idéologique qui se manifeste gravement de nos jours.

Ce constat connu et redit dans toutes les occasions et par tous les moyens de communication, n'a pas été analysé suffisamment nous semble-t-il, en ce qui concerne l’effondrement d’une dynamique dialectique dans les rapports de l’humanité. De même que sur les résultats et sur les conséquences dans les organisations sociales et dans la vie économique, sociale et politique de chaque pays, et moins encore dans la détermination des chemins qui semblent se présenter comme voies du destin pour nos pays européens et pour le reste du monde.

UN ROULEAU COMPRESSEUR

Les conséquences ne se font pas attendre. Le monde n'est pas le même dès qu'une conception idéologique disparaît ; et plus particulièrement quand elle a joué un rôle fondamental comme élément essentiel d’un équilibre nécessairement instable mais dynamique.

Une fois la conception du monde qui avait été inspirée par le marxisme disparue, et n'est plus utilisée comme un des moteurs de la confrontation et de l'avancée du monde, la conception opposée se présente nécessairement comme victorieuse et comme unique voie de rédemption pour l'être humain. De ce fait, le monde est saisi ainsi par l'ivresse et l’invasion dans tous ses rouages de cette seule et unique pensée et forme de vie. On ne peut que constater que le capitalisme et la pensée néo-libérale, c'est à dire, le désir de l'argent et du profit sans limites, règne en maître dans toutes les régions du monde et dans l'esprit de ses dirigeants et de ses populations.

Rien ne s'oppose à ce rouleau compresseur ; il installe ainsi une vision du monde : industriel, commercial et des affaires, dont l'objectif semble être d'assujettir les hommes, femmes et enfants, en vue de les amener à l’adoption d’un mode de vie de production et de consommation effrénés. Et tout ceci avec l'appui de gouvernements véreux dans la plupart des pays du monde.

A cette conception du monde et à la tendance concomitante de domination de l'élite des possédants sur l'être humain, s'ajoute que des entreprises et des industries de tout genre, se lancent sauvagement et sans aucune considération dans la prospection des mers, l'exploration spatiale, les exploitations minières, etc., détruisant l’environnement et surtout la ressource précieuse et essentielle à la vie humaine : l'eau ; ainsi que les autres espèces vivantes : animaux et plantes y compris.

Il ne se passe pas une seule journée sans que des groupes d'indiens en Amérique du Sud, de cultivateurs et paysans en Afrique, en Asie, voire même dans des pays dits développés, qui ne soient pas l'objet de l’expropriation et de l’appropriation honteuse de leurs terres productives, soit par les grands groupes de l'industrie agro-alimentaire, soit par l'exploitation pétrolière ou minière. Et pour ce faire ils n'hésitent pas à mettre en question par toutes sortes de pressions et subterfuges la validité de l'occupation millénaire de ces espaces et terres, au détriment des réels propriétaires : les hommes et femmes qui les ont cultivées et qui les ont préservé depuis toujours. Le résultat de ce pillage sur ces populations est leur condamnation à la malnutrition, à la misère et à la mort.

Le constat est amer, les épurations et les spoliations des populations sans défense au niveau des blocs géopolitiques par des multinationales s’est aggravée sous la direction et les regards complaisants de gourous du capitalisme néo-libéral, capitaines de la mort et de la destruction.

Tout est monnayable et en conséquence tout est abîmé et pollué dans la course au profit et à la rentabilité. Mais pire encore ce sont surtout les esprits des hommes qui nous gouvernent ainsi que ceux de la plupart des gouvernés, qui sont contaminés par la folie du gain facile et immédiat sans aucune limite.

Les véritables hommes d’État, à leur tour, ont disparu de la scène politique, laissant leur place à des professionnels et techniciens du marketing de la politique, de plus en plus incapables à la gestion des affaires publiques. En vérité ce ne sont que des guignols de la politique, mais qui se présentent comme les grands experts ou spécialistes devant un public de plus en plus soumis et ignorant.

De ce fait, il ne faudrait pas s’en étonner de voir les principes démocratiques et laïques de la Nation Française, attaqués, malmenés et mis en doute par les agents de l’État même.

La convergence de ces deux courants : une idéologie néo-libérale qui semble triompher et un État laïque qui perd ses repères, provoque une perte totale d’orientation et une situation permanente de crises.

L'ALLEMAGNE COMME MOTEUR DE CE MIRAGE

La France sous le choc de celle nouvelle donne géopolitique et face à sa progressive perte de compétitivité et désolation éducative, sociale, industrielle, économique, éthique, et surtout de perte de ses soubassements fondateurs, se tourne vers l'Allemagne croyant trouver en elle l'étoile qui va la guider vers la rencontre miracle, afin de la sauver de ses malheurs.

Il n'y a pas de domaine, à l'heure actuelle, où les dirigeants français évitent de comparer l’Allemagne à la France, et regretter l'absence ou le retard dans l'adoption ou l'imitation du « modèle allemand ».

Ces dirigeants français des secteurs politiques, économiques, sociaux, oublient ou feignent d’ignorer qu'une nation a ses propres ressorts profonds qui n'agissent pas au simple appel de l'imitation ou de la copie.

Or, il est illusoire de vouloir imiter et copier l'Allemagne. D'abord parce que l'Allemagne d'aujourd'hui résultate d'avoir subi dans sa propre chair cet événement majeur qui a été sa défaite totale pendant la deuxième guerre mondiale, et ce qui s'en suit : l'amputation d'une partie de son territoire correspondant à la RDA. Tout ceci a produit nécessairement les caractéristiques historiques, industrielles, économiques, idéologiques et politiques que nous observons en ce moment au sein de l'Allemagne d'après la chute du Mur.

L'ALLEMAGNE PIVOT FRAGILE DE L'EUROPE

Si le passé peut expliquer le futur, il ne devrait pas nécessairement le déterminer. C'est pour cette raison qu'il serait nécessaire de comprendre les raisons et le pourquoi profond du rôle qu’essaie d'avoir l'Allemagne d'aujourd'hui.

L'Allemagne a resurgi des cendres de la guerre, supportant l’opprobre de l'histoire par son rôle dans la destruction d’une bonne partie du peuple juif et tzigane, ainsi que de millions de slaves de toute croyance ou culture.

Par la balançoire de l'histoire, la chute du Mur de Berlin va s'accompagner nécessairement de la réintégration de la RDA., comme une partie de la patrie séculaire allemande. Cet événement réel et symbolique va avoir l'effet d'un électrochoc sur l'esprit du peuple allemand, très proche des réactions et de l'effet subi par la débâcle de la première guerre mondiale et qui se terminera plus tard par le processus du réarmement.

Pour l'Allemagne de l'après guerre de 1945, il fallait réagir ; il fallait se racheter si elle voulait continuer à compter dans le monde d'aujourd'hui. C'est ainsi que tout type d'effort et de sacrifice demandé par ses gouvernants : Adenauer, H. Kohl et plus particulièrement par G. Schröder, seront acceptés par le peuple allemand sans difficulté, parce qu’articulés et supportés par une vision et le rôle en Europe que l'Allemagne veut se donner aujourd'hui. Comme nous l'avons dit, cette intention et ce fait a exigé de la part de l'Allemagne un effort économique, industriel, politique et social énorme. Les bénéfices et les résultats de cet effort, l'Allemagne les récolte avec un certain succès actuellement.

Malgré tout, il faudrait aborder brièvement un bémol majeur à cette donne : cet effort a été placé du côté de l'industrie électro-mécanique et plus particulièrement dans la fabrication de machines-outils où l'Allemagne traditionnellement a su exceller. Or, de ce fait, l'avenir de l'Allemagne n'apparaît pas aussi radieux qu'on pourrait le penser. Ce domaine industriel correspond à un type d'industrialisation du XIX et XX siècles dont l'industrie de l'automobile est le symbole le plus représentatif. C'est dans ces domaines que les pays en voie de développement se donnent et se donneront la capacité de développer leurs propres industries. Et surtout dans le secteur où elle a su s'imposer jusqu'à présent dans le développement et la fabrication de machines qui font d'autres machines, base fondamentale d'une industrialisation naissante. En prenant d'assaut bientôt ces champs industriels où il y a essentiellement peu d'innovation, les pays émergents auront le loisir dans un proche avenir de faire une concurrence d'égal à égal avec l'industrie allemande et avec l'industrie électro-mécanique de l'Europe.

En résumé l'Allemagne n'a pas dirigé ni privilégié ses efforts et son développement industriel massivement vers les nouvelles technologies de l'informatique, la robotique et les biotechnologies, technologies du présent et de l'avenir. Cette faiblesse compromet et engage dangereusement son avenir économique. A cet handicap s'ajoute le vieillissement de sa population et le recours massif à l'immigration sans avoir la volonté surtout dans le passé récent, de l'intégrer réellement.

En synthèse l'Allemagne n'est pas l'exemple tant loué à suivre ou à imiter par la France et ses dirigeants.

LA FRANCE ET SES FAIBLESSES.

Si tous les pays de l'Europe ont reçu l'impact de la disparition de l'affrontement entre le « monde occidental » et le bloc des pays communistes, l'Allemagne pour sa part a su bénéficier et tirer profit de cette situation ponctuelle, et ceci rapidement. Elle a pu construire, se donner, et mettre en application une nouvelle vision idéologique de sa place et de son rôle en Europe. Et ainsi profiter de cette situation largement, pour pouvoir imposer une vision néolibérale de la société et de l'économie ; et de ce fait se présenter comme tête et leader de l’actuelle Communauté Économique Européenne.

La vison et les objectifs de structurer l'Europe comme simple zone commerciale de libre échange s'est imposée graduellement et cette conception s'affirme et triomphe largement sous l'impulsion et l'orientation décidée de son Chancelier actuel : Angela Merkel.

Le mot clef de cet espace commercial européen qui se construit actuellement à la hussarde, est le dérèglement. Or par ce biais on abandonne totalement l'idée de la construction d'une union politique et solidaire dans une Europe pour tous. L'Allemagne à la tête de cette conception parcellaire et très limité, condamne l'Europe à être la proie de toute une série de crises économiques, industrielles, commerciales, voire sociales, à répétition.

Au milieu de ce monde nouveau qui émerge par la volonté du secteur de l'argent et du profit sans mesure, la France déboussolée par ces changements et nouveautés, n'a pas trouvé vraiment une place solide dans cet espace européen en mouvement, et moins encore dans le monde contemporain.

La crise politique actuelle de ses institutions n'est pas étrangère à l'impossibilité de retrouver un concept, ou des objectifs, ou un discours qui puisse rassembler ses concitoyens et leur donner la force nécessaire comme peuple ou comme Nation. Les droits de l'homme ne font plus recette, le droit d'ingérence est une perversion du passé. Son rôle et ses décisions sont contestés partout : par les anciennes colonies, par les populations de ses territoires d'outre mer, ainsi que par ses citoyens en métropole. Ses mots symboles de Liberté, d’Égalité, et de Fraternité résonnent vides de sens pour les populations de jeunes dans les banlieues ; or c'est là, précisément qui se trouve l'avenir de la France, vu le vieillissement de sa population.

Les politiques de ségrégation de la vie de la cité, contre les anciens et les nouveaux immigrés, ainsi que les politiques d'un urbanisme élitiste qui a confiné et coupé durant des années les quartiers populaires des autres quartiers des grandes villes, ont précipité et approfondi la fracture et la perte d'identité de la population française dans tous les domaines et crée un mal-être sans précédent. Fait surprenant et révélateur de cette séparation et distance : bientôt un habitant d'un quartier chic de Paris ne pourra plus comprendre le français parlé par un citoyen français habitant la banlieue, et plus tard l'inverse pourra être aussi vrai. Alors lentement le précipice de la grande fracture pointe à l’horizon.

Bien entendu avec cet ouragan malsain néo-libéral qui agite le monde, l’État français essaie de tenir à ses fonctions et prérogatives, mais il est secoué violemment, perdant sa force et son rôle traditionnel de guide, de point de repère, et d'élément essentiel dans la vie citoyenne de chaque français.

 

LA FAIBLESSE DE L'ETAT

Pour la pensée et l'action néolibérale, l’ennemi à abattre en premier lieu c'est l’État, ses prérogatives et sa capacité d'édicter des normes. Les leaders industriels, politiques et sociaux en France, se font écho de ce qui est devenu la mode dans le monde actuel : prêcher et promouvoir une économie de marché et de l'injustice. Ils proclament haut et fort comme de véritables oracles, pour affirmer, dire, redire et crier à l'unisson : déréglementation, réduction de charges et des impôts, et présenter l'entreprise privée comme dogme infaillible pour le bon fonctionnement de la vie d'une Nation. Ils oublient surtout que l'entreprise doit avoir avant tout, une fonction sociale et pas seulement l’appât du gain. et du bénéfice pour leurs propriétaires.

Mais ironie du moment, ils peuvent aussi oublier facilement cette rengaine sur le libéralisme économique et sur l'entreprise libérale, si leurs intérêts se trouvent menacés. Et n'hésitent pas à trahir ces dogmes et ces principes de la libre entreprise et d'appeler l’État à leur soutien et à leur rescousse. Ceci a été le cas du système bancaire et de l'industrie de l'automobile française, mis en péril dernièrement par la cupidité et l'imprévision de leurs dirigeants et propriétaires. Ces mêmes dirigeants hérauts du libéralisme économique profitent sans vergogne de l'aide d'un État complaisant qui oblige chaque contribuable du fisc français à mettre la main dans son porte-monnaie afin de payer les pots cassés, et ceci sans véritable contrepartie. Par contre, aider ponctuellement une famille en détresse, en difficulté, est une action qui est devenue presque un crime, et surtout si cette famille est une famille d'immigrés.

Double morale ou simplement absence de morale dans les modes et formes d'action de l'économie du marché et de ses dirigeants. Et probablement calcul tordu de vouloir affaiblir l’État pour bien imposer ses désirs et desseins de régner en maîtres du destin du monde. Parce que sinon comment expliquer qu'ils acceptent l'aide ou des prêts de l’État afin de corriger ses errements et leur donner la possibilité de développer, par exemple, la voiture hybride ? Mais par contre aider un chômeur et sa famille est considéré comme un sacrilège.

On est en droit de se poser aussi la question de savoir si l'affaiblissement de l’État ne correspond pas à une stratégie bien pensée pour pouvoir avoir les mains libres ; et ainsi rendre esclaves, dépendants et plus fragiles tous ceux qui ont été frappés par le malheur ponctuel du chômage, la fracture d'un divorce, la mort d'un des parents, etc. ? Et ceci en utilisant la double morale, et obtenir par ces biais tous les bénéfices de rentabilité et gains pour eux tous seuls, sans contrôle et sans loi.

LES COUPS BAS CONTRE LES INSTITUTIONS

Durant une période assez longue la République Française a pu bénéficier d'une stabilité politique assurée par les institutions établies par la Constitution de la V République et par la confrontation Est-Ouest. Cette constitution avec tous les défauts qu'on peut lui imputer a reposé entre autres sur deux éléments essentiels pour le bon fonctionnement démocratique de ses institutions : la laïcité, le centralisme administratif et un mandat présidentiel de 7 ans.

Ce mandat présidentiel de 7 ans permettait au président de la République d'agir comme président de tous les français, et ne pas être obligé aussitôt élu président, d'être « responsable de parti » et des échéances électorales à venir. N'étant pas pressé par ce temps des échéances électorales, il pouvait préparer sa réélection s'il le souhaitait, calmement et plus particulièrement à la fin de son mandat. Avec la modification de la période de 7 en 5 ans cet équilibre s’altère. La période de 5 ans dans un État centralisé, avec l'organisation de tous les rendez-vous électoraux qui s'ensuivent après son élection, ne lui permettent pas de gouverner sans se soucier de tenir compte immédiatement de son avenir politique et de l'avenir des élus des partis qui le soutiennent. De ce fait, surtout maintenant avec les crises financières à répétition et les décisions stratégiques concernant l'économie et le renouveau industriel, nous pouvons voir les limites de ce mandat présidentiel de 5 ans et la fragilisation de la fonction de l’État.

Si le rôle de l’État n'a pas cessé d'être mis en question de façon permanente, dernièrement son pilier fondamental la famille est l'objet d'une déstabilisation dans son organisation, fonctionnement et soutien. C'est ainsi que simultanément toutes les institutions qui servent d'étayage à la cellule familiale sont attaquées comme source de dépenses et comme foncièrement inutiles. On réduit le budget des institutions d'aide alimentaire, on transforme et on sacrifie les institutions hospitalières, les détournant de leur mission de service public, on prône par petites touches la fin de la gratuité de l'éducation pour l’aliéner aux intérêts privés, on change la loi pour permettre le travail de dimanche et ainsi couper encore la communication et la vie en famille, etc.

L'existence du groupe familial et de l’État ont été de tous les temps les noyaux essentiels de la Nation. La famille depuis le temps des cavernes n'a pas changé de structure fondamentale. Il est vrai qu'elle a subi des aménagements selon les besoins sociaux, les phénomènes provoqués par les guerres ou l'évolution des mœurs, dont l'union libre ou le mariage entre personnes du même sexe est une des dernières expressions de ces modifications marginales dont elle a pu souffrir dans son fonctionnement a travers le temps.

Or les attaques dont elle est l'objet de la part de l’État néolibéral, la fragilisent et la rendent de plus en plus incapable de remplir sa fonction essentielle de soutien solide des enfants qu'elle doit élever et transformer en citoyens responsables. A ceci s'ajoute que l’État lui-même, en proie à l'orientation néolibérale en vogue, a récemment mis en question le principe de la laïcité, fondateur de la paix sociale, par le comportement de ses plus hauts fonctionnaires et agents et par des actes apparemment anodins. C'est ainsi qu’en tant que Président de la République, on se montre chrétien pratiquant, lors d'actes publiques. Ou on fait des déclarations sur l'importance de la tradition chrétienne de la France lors de voyages officiels, de même on hésite à établir une loi claire sur les us vestimentaires et les signes d'appartenance religieux dans les lieux publiques et sociaux comme le lieu du travail, les institutions de l’État, etc , et on favorise économiquement la multiplication des écoles privées avec une claire orientation religieuse, on tolère la prolifération de sectes de tout genre, etc. En un seul mot, on démonte peu à peu la structure laïque de l’État, comme pivot fondamental du fonctionnement républicain.

Cette déstructuration des institutions de la République et ces formes regrettables d'agir de l’État, sembleraient obéir aux injonctions de la conception idéologique néolibérale, présentée comme seule issue à la crise qui règne dans le monde.

 

ALORS, QUE FAIRE  ?

Quand l'enveloppe idéologique qui soutient, préserve et étaye les institutions de la République se fragilise, l’effondrement du fonctionnement démocratique commence à pointer, et des fissures de plus en plus profondes et inquiétantes se font jour comme nous l'avons vu. Ces symptômes doivent être considérés comme des signaux d'une catastrophe annoncée qui peut encore être contenue et renversée.

Alors dans ce monde actuel de tous les périls pour l'État et les institutions qui lui servent d'étayage, il faudrait qu'on puisse reformuler sa mission et sa raison d'être. Il faudrait une nouvelle élaboration idéologique de son rôle et de ses objectifs et se débarrasser ainsi de certaines fonctions que les conceptions néolibérales ou capitalistes lui ont glissé subrepticement afin de profiter de lui, de l'affaiblir et de le paralyser.

Bien entendu cette action de préciser les fonctions de l’État et ses institutions doit se faire démocratiquement à travers de grands débats et par consultations populaires. Pour notre part nous allons signaler quelques uns de ces objectifs qui nous semble essentiels : l’État et ses institutions doivent se démocratiser dans la forme et dans le fond. Il est nécessaire, si on veut éviter son affaiblissement, que une fois élus, tous les représentes de la volonté populaire y compris le Président de la République, puissent être révoqués par le peuple de leurs fonctions et investitures. De même qu’il faudrait limiter la possibilité d’être réélu plus de deux fois et ainsi éviter la professionnalisation de la politique. Également l’État ne doit pas être un agent du grand capital au détriment de l’artisanat, la petite et moyenne entreprise, et du peuple en général.

Il faudrait l'élaboration et l'acceptation d'une nouvelle conception démocratique de l'exercice du pouvoir, de la élaboration et construction d'un État au vrai service de tous les citoyens, reflet réel des décisions du peuple. Dans le cas contraire c'est de la pure mensonge et de l'illusion de croire qu'on vit dans une République laïque et démocratique.

Dans cette situation de doute et désorientation, nous arrivons à l’extrême que certains naïfs pourraient se permettre de rêver et voir dans l’affaiblissement de cet État déjà assez éloigné des principes démocratiques, tel qu'il est actuellement, la possible transition vers un État qui a tendance à disparaître et que ce fait soit considéré comme le signal que puisse annoncer l'arrivée d'une société mondiale sans États, autogestionnaire, comme certains utopistes l'ont envisagé dans le passé. Mais bien au contraire, il faudrait se rendre à la réalité qui nous frappe et à l’évidence, l’heure actuelle n’est plus au rêve, elle est grave et pleine de doutes et d’incertitudes sur l’avenir de la France et l’Europe.

La prochaine élection présidentielle en France n’est pas un simple maillon dans la chaîne des faits qui conforment l’histoire de notre pays ; elle est, et sera le chaînon par lequel la solidité de l’État laïque et démocratique pourrait sortir renforcée ou affaiblie, face à la monté d’un capitalisme totalitaire.

 

Hernando Ramirez Ardila

Décembre 2016



6 réactions


  • howahkan 19 décembre 2016 11:37

    Salut et tout cela parce que les humains qui ont perdu une partie vitale de leur cerveau ne gardant que la partie survie , vitale elle aussi, au détriment de la partie capable de vivre dans cet univers,parce que les humains refusent encore de coopérer et de partager...en paix en choisissant la compétition qui est une élimination et qui produit tous ces effets criminogènes

    le coupable c’est l’humain, non pas ce qu’il est à la base en profondeur, mais ce qu’il est devenu...

    ceci est bien sur nié farouchement, se remettre en cause objectivement n’est plus dans nos capacités restantes...qui sont là cependant en sommeil, pour tous...

    c’est au début un chemin solitaire or comme nous sommes tous pétrifiés de peut sans même savoir ce que cela signifie, on n’y va pas,sauf trop peu d’exceptions...alors le pire a cause de cela ne peut que continuer....

    des que la masse voudra collaborer et partager...le mal disparaîtra...

    quand a ce qui serait « bien » il n’est bien sur pas, dans ses fondements, de notre ressort...la pensée n’étant alors que un outil de mise en œuvre d’une « destin » Universel ou vivre est le miracle, au delà de nous mêmes..

    ces mots sont bien sur parfaitement débiles pour tout bon occidental et amis achetés à vil prix..au prix de la trahison des autres


  • Victor 19 décembre 2016 12:28

    « A Sevran, le café qui interdit les femmes est un café ouvrier » Hamon


  • rogal 19 décembre 2016 19:20

    Un résumé serait le bienvenu.


    • Pierre Régnier Pierre Régnier 20 décembre 2016 11:22

      @rogal

      réponse résumée de quelqu’un qui n’a lu que le titre de l’article : la France est dirigée par des faux laïcs qui ont fait le choix de poursuivre l’islamisation du pays. C’est là qu’est l’aspect principal de sa « crise ».


  • Le421... Refuznik !! Le421 20 décembre 2016 08:51

    On est en droit de se poser aussi la question de savoir si l’affaiblissement de l’État ne correspond pas à une stratégie bien pensée pour pouvoir avoir les mains libres...

    Je me demande vraiment si il y a la moindre question à se poser !!

    Notez, en définitive, que la règle est :
    Privatisation des gains
    Partage des pertes.
    Et tout est dit.

    Votre article est bon, mais pêche par sa longueur.


  • zygzornifle zygzornifle 20 décembre 2016 14:22

    La crise est entretenue par les gouvernements, c’est un bonne aubaine pour passer des mesures impopulaires d’aller vers la dictature de museler les oppositions, la crise c’est la résultante d’une UE composée par des incapables, ceux qui ont saignés leurs pays respectifs , de la mondialisation galopante , de la surnatalité qui amène une surconsommation donc une sur-pollution qui entraîne le réchauffement climatique , de l’immigration envahissante mise en place par nos gouvernants voulant baisser le niveau de vie et créer des emplois au salaire au rabais emplois que les migrants ne voudrons pas car ils pourront presque aussi bien vivre avec les aides qu’un smicard qui lui n’a rien sans se lever le matin pour aller bosser ..... 


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