mercredi 14 février 2007 - par Keith

La sécurité, entre démagogie et pratique

L’insécurité est une injustice que des personnes font subir à d’autres. Là où elle est une réalité quotidienne, ceux qui la combattent ont besoin d’être soutenus à tout niveau. Il faut valoriser et faire connaître les propositions que ces acteurs dans la vie quotidienne ont à formuler, les solutions qu’ils ont expérimentées. Il est grand temps que ceux qui affrontent quotidiennement l’insécurité interviennent dans cette lutte pour une tranquillité publique, un bien-être de chacun dans les collectivités locales, départementales et nationale.

Mieux que quiconque, les habitants des cités, au sens noble du terme, savent que la misère économique et sociale est la principale cause de la violence et de la délinquance, même si plus personne n’ose le dire. Ils savent également que le manque de moyens et de formation rend certains agents de police cruellement inefficaces. Ils sont les premiers à reconnaître aux parents un rôle vital dans l’apprentissage des devoirs et des obligations sur lesquels repose toute éducation.

Mais, ceux qui vivent l’insécurité savent aussi que pour éradiquer ce fléau, il faudra davantage qu’une surenchère de centres fermés pour délinquants mineurs, de brigades de police anti-banlieue et de sanctions pénales à l’encontre des parents défaillants.

Outre leur caractère démagogique, ce qui choque dans ces mesures ce n’est pas leur sévérité, mais leur impuissance évidente à réduire immédiatement et sensiblement l’insécurité dans la vie quotidienne.

Or, des solutions existent à condition que les principaux intéressés de part et d’autre soient étroitement associés à leur élaboration et à leur mise en œuvre.

Faire des citoyens « les responsables » de la sécurité.

Lorsque dans la cité des personnes se réunissent dans les halls d’immeubles, fument des pétards, rigolent et font du bruit, à la longue, tous les habitants sont exaspérés. Lorsque d’autres réveillent une rue entière avec leurs mobylettes ou pire, brûlent des poubelles voire des voitures, les gens appellent la police qui ne vient pas ou qui en venant déclenche des incidents plus graves encore. Voilà la réalité.

Alors, comment la changer, comment apporter une réponse immédiate à tous ceux qui vivent cette situation ? Bien sûr, lorsqu’un délit est commis, l’intervention de la police et de la justice est indispensable, mais ces institutions ne sont pas en mesure, à elles seules, de réduire l’intensité de la violence. Or, nous sommes dans l’urgence. L’idée est donc de confier une responsabilité à tous ceux qui du fait de leur expérience ou de leur statut dans la cité, peuvent intervenir immédiatement sur toutes les formes de violences et d’incivilités : leur autorité et leur crédibilité peuvent produire des effets considérables sur le comportement des délinquants. Respectés par les uns et par les autres, ils sont un recours permanent et accessible pour tous ceux qui souffrent de l’insécurité.

Si dans chaque cité, des filles et des garçons identifiés se voient confier cette responsabilité, les résultats ne se feront pas attendre. On pourrait ainsi créer un numéro vert servant de relais entre eux et les habitants à chaque fois qu’un incident éclate.

Redonner aux parents la crédibilité indispensable pour qu’ils puissent éduquer et encadrer leurs enfants.

Nombreuses sont les familles dans les villes ou les quartiers où des parents rencontrent d’énormes difficultés. Certains, d’origine étrangère, se heurtent à l’obstacle de la langue française, mais un nombre important de parents sont totalement dépourvus de repères face aux institutions, à l’école ou tout simplement aux pratiques sociales. Les parents sont néanmoins détenteurs de savoir et de savoir-faire auxquels il faut donner toute leur place. Il est indispensable de leur restituer pleinement leur légitimité d’adulte, multiplier les actions de soutien à leur parentalité en valorisant dans un premier temps leurs pratiques culturelles. C’est seulement par ce moyen qu’ils pourront retrouver leur statut de parents et jouer pleinement leur rôle d’éducateur premier de leurs enfants.

L’éloignement utile des délinquants mineurs

Il est clairement des situations où les jeunes délinquants doivent être arrêtés et éloignés de l’univers de violence qui est devenu leur unique repère. Pour répondre à cette exigence, il nous est aujourd’hui proposé de revenir cinquante ans en arrière, aux bonnes vieilles maisons de redressement, que chacun sait aussi coûteuses qu’inefficaces.

Pourtant, la punition de l’éloignement peut changer profondément le parcours d’un jeune délinquant à condition qu’il sorte radicalement de son cadre de vie quotidien.

En impliquant ces jeunes, sous le coup d’une mesure privative de liberté, dans la réalisation de chantiers ou de programmes d’aide dans des pays en voie de développement, on provoque en eux la coupure salutaire dont ils ont besoin.

Ce type d’expérience a déjà montré objectivement les changements profonds que provoquent chez ces jeunes la confrontation avec des hommes et des femmes qui, dans des conditions de vie autrement plus difficiles, se battent dans la dignité et le respect pour s’en sortir. Ces éloignements doivent s’effectuer en accord avec des pays tiers, des collectivités territoriales, des associations, dans le cadre de partenariat d’objectifs permettant de construire des programmes utiles et nécessaires aux divers développements locaux dans des zones notamment rurales.

L’éloignement devient alors une punition utile qui peut changer la trajectoire d’une vie.

Des propositions comme celle-ci, nourries d’expériences et de réussites concrètes dans le combat contre l’insécurité, nous voulons les faire émerger avec force dans le débat sur cette cruciale question de société. L’enjeu est trop important, les besoins de solutions trop urgents pour laisser la question de la sécurité aux seuls démagogues de la tolérance zéro. Cette question est l’affaire de tous et surtout des jeunes qui subissent aussi tous les jours les conséquences, permettons-leur de prendre leurs responsabilités, associons-les à la création de solutions qui marchent.

Nous sommes et restons intimement convaincus que sûreté et citoyenneté sont intimement mêlées, si l’on veut rétablir la première, il faut faire vivre la seconde.



5 réactions


  • Jimmie Danger (---.---.164.192) 14 février 2007 13:05

    « On approche des présidentielles.. »

    - Le thême de l’insécurité est-il appelé à devenir incontournable à chaque approche de présidentielle ? On peut le craindre car il ne reste à peine plus qu’une cinquantaine de jours..

    - Les solutions proposées dans cet article ont déjà toutes, à plus ou moins grande échelle, été testée : qu’il s’agisse de l’implication d’habitants du quartier, de la mise en place d’équipe de médiateurs, de mesures d’éloignement, etc.. mais ne seront jamais aussi payantes électoralement (surtout pour les votants quin’ont jamais vu une banlieue ailleurs qu’au journal de 20 heures) que les fanfaronnades et les dérapages verbaux de ceux qui savent à la fois créer la peur (en gonflant des faits divers) et apparaître ensuite comme le recours unique.

    - Nous sommes donc repartis comme en 14 pour l’exaltation des valeurs, la reprise en main par la République de territoires hors la loi, l’installation à demeure de compagnies de CRS et de vidéo surveillance, au nom « des-français-qui-se-lèvent-tôt » contre les « barbares-qui-ne-dorment-jamais ».

    Au fait, où en est Mr le ministre de l’Intérieur dans sa chasse aux « réseaux tchetchènes » qu’il accusa un temps de l’organisation des émeutes de 2005 ?

    Jimmie Danger


  • Jaï (---.---.128.162) 14 février 2007 23:49

    Rien d’orginal dans votre article, vous ne faite que d’énoncer des théories qui ont déjà été appliquées sans succès. Ainsi même les raisons de l’insécurité que vous énuméré sont galvaudées.

    Il ne faut pas trop perdre de temps dans des analyses complexes et imprécise pour comprendre et évaluer.

    En France on a créé une situation dont les causes sont multiples et inextricables débouchant sur l’anarchie véritable convergeances d’antagonismes, la perte de l’autorité de l’état régalien.

    Or tout le monde est responsable de se dèsordre, car tout le monde la voulu et a voté pour, maintenant comment rétablir l’ordre ?

    L’histoire nous apprend que l’ordre c’est la matraque et rien de plus !

    Regardez autour de vous, et expliquez que la liberté des uns s’arrête ou commence celle des autres, et vous vous aperçevrez que n’importe quel crétin comprend et a parfaitement intégré cette notion à la porté de n’importe quel citoyen même le plus démuni intellectuelement.

    Lorsque les citoyens ne comprennent plus cette notion, c’est qu’ils sont dans la barbarie ainsi la réponse doit être adapté, c’est à dire qu’il n’y a que la force de la répression qui fait loi dans son expression la plus sévère.

    Les démocraties doivent comprendre cela, si elle veulent pèrdurer dans le futur, car c’est la seule attitude qui garantie la liberté !

    Le dèrnier échelon et rempart qui garantie les libertés individuelles sont les forces de l’ordre, lorsque ces dèrnières n’arrivent plus a garantir nos libertés, c’est toute la démocratie qui est en danger.


    • Gazi Borat (---.---.164.192) 15 février 2007 10:18

      « Le dèrnier échelon et rempart qui garantie les libertés individuelles sont les forces de l’ordre »

      Pas très démocratique tout ça..

      D’autant plus que ce type de discours est à la base de la théorie dite des « Forces saines de la nation ». Cette théorie, enseignée à la « School of the Americas » nous explique que la démocratie et, par là même le processus électoral, est un outil dangereux dont les gens pourraient faire mauvais usage en élisant des dirigeants dangereux pour les intérêts de la nation.

      Heureusement, selon cette théorie, on peut trouver, au sein des forces de police et de l’armée, des éléments sains qui devrait, lorsque cela est nécessaire, prendre le pouvoir, interrompre la démocratie, le temps que les citoyens redécouvrent le bons sens (en l’occurence, ici, les intérêts des oligarchies).

      Cette théorie est à la base de toutes les justifications des putschs militaires d’Amérique du sud, de Grêce, de Turquie et d’ailleurs..

      Attention : DANGER !

      Jimmie Danger


  • Jaï (---.---.215.34) 15 février 2007 14:57

    «  »« Cette théorie est à la base de toutes les justifications des putschs militaires d’Amérique du sud, de Grêce, de Turquie et d’ailleurs.. »«  »

    Des centaines de milliers de jeunes diplômés sont aujourd’hui dans la panade, pourtant on le savait déjà il y a 20 ans.

    Qui a empêché toutes les réformes de l’éducation nationale ?

    Croyez-vous que c’est comme cela que doit fonctionner une démocratie ?

    Les centaines de milliers de jeunes diplômés aujourd’hui dans la panade, sont les même qui ont manifesté contre les réformes, manipulés par les enseignants et leur syndicats.

    Ca aussi c’est une forme de putch !


  • padrole (---.---.211.93) 21 février 2007 17:50

    Il est étonnant de constater qu’il reste des partisans du baton et du maton alors même que cette politique montre bien ses limites, puisqu’elle ne semble avoir pour résultat que d’augmenter la défiance entre les parties et d’amener à des actes de rebellion des individus qui sans elle n’auraient probablement jamais bougé.

    Une injustice est déjà suffisamment insupportable, mais quand vous en punissez les victimes, il est évident que vous augmentez la probabilité qu’elles se rebellent. Or, le rejet sans distinction par une grande partie de la population, le catalogage, la pauvreté et le chômage étant déjà suffisamment injustes, ajouter la brimade et la « tolérance zéro » risque fort de mettre le feu aux poudres, on le voit chaque semaine.

    De plus, à vous adeptes de la force policière, je vous pose la question : une fois que les sauvageons et autres racailles auront été éradiqués par tel ou tel moyen, pensez vous vraiment que l’insécurité dont on nous rabat les oreilles à longueur de journée, cheval de bataille de nos apprentis sorciers, aura cessé à leurs yeux ? Ou bien trouveront ils d’autres mécréants à punir ? Les fumeurs, les asociaux, les sdf qui polluent nos trottoirs, les automobilistes énervés, les voisins mauvais coucheurs, les alcooliques occasionnels ou chroniques, les homosexuels, les fumeurs d’herbe, etc... Puis finalement les opposants politiques. Autant de dangers pour la sécurité des français qu’il faudra bien un jour ou l’autre éradiquer à leur tour. Ca ne vous rappelle rien ? Et êtes vous bien certains de ne pas faire partie de l’une de ces catégories ? Et si c’est le cas, serez vous toujours aussi prompts à défendre cette politique ?

    Sérieusement, pour retrouver la paix sociale, je ne crois pas que se lancer dans une guerre soit la solution la plus adaptée. Par contre, comme le suggère l’auteur, éloigner les délinquants du lieu qui les a façonnés et leur montrer que la vie peut être autre chose que ce qu’ils ont toujours connu, oui, c’est une solution, et qui fonctionne, contrairement à ce que je lis ici. Pour ma part je pense même qu’il faudrait le faire maintenant, avant que le « jeune de cité » ne devienne un délinquant.


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