Le roi de la synthèse…
Souvenez-vous, lorsqu’il était premier secrétaire du PS, Hollande était reconnu pour ses capacités à réaliser la synthèse entre les différentes motions lors des congrès du parti, en glissant la poussière sous le tapis.
Aujourd’hui, le Président de la République, ne dirigerait-il pas le pays comme il le faisait jadis avec le PS, au risque de l’affaiblir, lui aussi ?
Une lente évolution vers la droite
Entre le discours du Bourget, résolument à gauche avec ses envolées lyriques sur « son ennemi, la finance », Hollande avait placé la barre très haut, ce qui lui a permis de remporter l’élection présidentielle et d’avoir une majorité à l’Assemblée Nationale.
Pouvait-il avoir alors un autre discours ? Non, bien entendu, sinon Sarkozy aurait été reconduit, mais on a rapidement mesuré l’écart existant entre le discours de campagne et la réalité des actes, même si l’épisode Ayrault Premier Ministre a pu donner le change pendant un certain temps.
Aujourd’hui, avec Valls comme chef du gouvernement, le doute n’est plus permis, c’est un glissement constant vers une politique libérale à laquelle nous assistons, avec notamment le pacte de responsabilité et ses milliards versés aux entreprises qui ont « juste reconstitué leurs marges » et « oublient » d’en affecter ne serait-ce qu’une infime partie à la création d’emplois.
C’est bien évidemment la conséquence de cette politique mortifère de l’offre dont on voit qu’elle ne marchera jamais tant que le pouvoir d’achat des français sera en berne.
L’actualité au secours du Président
Les actualités tragiques des 7 janvier et 13 novembre ont permis à Hollande d’acquérir une dimension de « chef » qui lui était contestée depuis longtemps.
Son positionnement de « chef de guerre » est aujourd’hui reconnu et ni sa présence lors des évènements ni ses actions n’ont été semble-t-il contestées, comme le prouve sa cote de popularité actuelle.
Défiance en ce qui concerne la politique économique, mais confiance s’agissant de la gestion de crise, voilà le paradoxe actuel. Sentant une ouverture politique et en bon politique habitué aux synthèses, Hollande pousse son avantage en recherchant le consensus politique, allant même proposer des mesures que ne renieraient pas le Front National en matière de sécurité (contrôle des frontières, déchéance de nationalité), même si ces actions sont avant tout de l’ordre du cosmétique et destinées à rassurer les français.
Hollande peut-il capitaliser à court terme sur cette séquence ?
Le verdict viendra des urnes lors des régionales. Le fait de chasser sur les terres du FN surtout pour bloquer le parti de Sarkozy, redonnera-t-il confiance aux électeurs dont on sait déjà qu’ils seront à peine un sur deux à aller voter (et moins à s’exprimer compte tenu du vote blanc ou nul) ?
La nationalisation d’un vote local est-elle une bonne chose ? Certainement pas ! Tous les débats actuels tournent autour de la sécurité dont on sait qu’elle ne fait pas partie des compétences régionales et on parie sur l’ignorance des électeurs pour gagner des sièges locaux : tout le contraire de ce qu’il faut faire. Ou alors, puisque l’habitude semble prise de politiser chaque scrutin local pour lui donner une dimension politique nationale, autant prévoir un renouvellement global des mandats électifs des collectivités territoriales à date fixe. On gagnerait du temps, et de l’argent !
Le mythe de l’union nationale
C’est dans ce climat délétère que l’hebdomadaire « Marianne » publie un sondage sur le gouvernement attendu des français qui nous indique en particulier les quatre personnalités qu’ils attendent de voir rentrer dans un gouvernement d’union nationale (Juppé – Le Pen – Bayrou – Hulot) et fait la part belle aux « idées pour se réunir dans la République ».
Dont acte… Ainsi les sympathisants du FN sondés sont-ils à 72% favorables à cette union, ce qui s’explique « par le désir de voir Marine Le Pen accéder aux affaires fut-ce en partageant les responsabilités ».
Passons sur les autres motivations des sondés pour cette union nationale et interrogeons-nous sur ce curieux attelage allant du PS au FN en passant par le centre et « les républicains » avec une dose de personnalités civiles.
La situation de crise dans laquelle se trouve le pays, et ce, depuis au moins deux décennies résulte davantage des renoncements successifs à leurs idées de ceux qui ont gouverné le pays qu’à une union nationale rêvée.
L’addition d’échecs passés (gauche et droite) et à venir (FN) ne donnera jamais, une politique cohérente capable de redresser le pays, compte tenu par ailleurs des concessions que les uns et les autres devront faire quitte à braquer leurs électeurs.
Cette envie de gouvernement d’union nationale relève donc d’une grande lassitude populaire amplifiée par les évènements du 13 novembre et ses répliques probables à venir. Pire, il donne une idée de l’impuissance des politiques face aux défis économiques actuels et à la toute-puissance du pouvoir économique et financier.
Le désir d’union que véhicule ce sondage ne doit pas faire illusion. Il est par ailleurs désastreux pour la classe politique dans sa totalité en donnant l’image de cette classe qui se partage le pouvoir et les avantages qui vont avec.
Il donne aussi l’illusion que les électeurs n’ont plus besoin de se déplacer et que les élections doivent désormais être considérées comme une formalité sur laquelle on peut s’asseoir comme on l’a fait lors du référendum de 2005 sur la constitution européenne.
Laissez-nous faire : voilà en quelque sorte le message principal de ce que nous vivons actuellement et l’état d’urgence n’en n’est que la partie visible. Le reste viendra.