mercredi 17 juin 2015 - par Michel DROUET

Réforme territoriale : une lente agonie

Le Parlement se réunira en session extraordinaire en juillet pour examiner, parmi d’autres, le projet de loi NOTRe (Nouvelle Organisation du Territoire de la République).

Pourquoi une session « extraordinaire » ? Pas parce que le contenu de ce texte nécessite un formalisme particulier, mais tout simplement parce que pendant le Parlement vote des amendements sur la publicité du vin et donne une image déplorable de lui-même lors des débats de chiffonniers retransmis ou par son absentéisme chronique en session ordinaire, les textes fondamentaux concernant notre organisation territoriale seront votés pendant que les français seront en vacances. Bronzez en paix !

C’est ainsi, la période estivale est propice à tous les coups en douce. En ce qui concerne ce projet, son enterrement programmé est le formidable révélateur de l’existence d’une caste politique crasse davantage préoccupée par ses intérêts particuliers que par l’intérêt général.

Un projet vidé de son contenu

Nous payons pour le savoir, il y a un gouffre entre les promesses électorales et les déclarations guerrières et la réalité, à tel point qu’on se dit qu’il ne vaudrait mieux pas essayer de réformer nos collectivités. Entre la suppression de la réforme Sarkozy (le conseiller territorial), les déclarations sur l’inutilité du Conseil Général, la réforme de l’intercommunalité, la nouvelle répartition des compétences entre les collectivités restantes, que reste-t-il dans ce projet ?

Rien ou si peu. Le Sénat s’est évertué à détricoter ce qui était susceptible de toucher à son pré carré (la diminution éventuelle du nombre de communes ou leur absorption au sein de grosses intercommunalités), ce qui était susceptible de diminuer prérogatives des conseils départementaux, même si cela coûte très cher aux contribuables locaux et tout ce qui touchait au renforcement des compétences des Régions, sans oublier de différer la mise en place du Grand Paris (pour des raisons de basse politique, essentiellement).

La bêtise crasse des élus et des partis

Jusqu’à preuve du contraire, un élu considère qu’il a surtout vocation à être réélu et par conséquent à faire carrière dans la politique, avec si possible des possibilités de promotion entre les différentes assemblées de la République.

Pour cela, il faut une organisation qui le permette et quoi de mieux que de multiplier les structures et surtout ne jamais accepter qu’on en supprime une. De la commune à l’intercommunalité en passant par les syndicats divers et variés, les conseils départementaux et régionaux, l’Assemblée Nationale pour les privilégiés et le Sénat comme stage de préparation à la retraite, tout doit être conservé pour favoriser un système qui favorise avant tout la classe politique et les partis plutôt que le citoyen et la bonne administration des affaires locales et nationales.

Conséquences tragiques pour la démocratie

Le gouvernement actuel (mais ce sera pareil pour les suivants) en quête d’économies budgétaires restreint ses dotations aux collectivités locales. Ceux qui votent ces mesures, au travers des lois de finances lorsqu’ils sont au Parlement gueulent et manifestent lorsqu’ils exercent leur cumul de mandat dans une commune, un conseil départemental ou régional et ce serait pareil avec une autre majorité. On entretient une rivalité fictive entre « Paris » et « les territoires », cela occupe les médias, nourrit une vie politique et démocratique tragique et surtout évite au citoyen de penser par lui-même. Mieux, le citoyen est lui-même instrumentalisé par ces discours schizophréniques d’élus en mal de réélection.

Cela nous donne de belles envolées et de belles images dans la presse : du crêpe de deuil sur le panneau de la commune aux déclarations définitives des maires ruraux (« l’heure est grave ! »), en passant pas une guillotine installée par des élus en colère, les conseils départementaux qui nous disent ne plus pouvoir payer le RSA et les régions qui déclarent « ce n’est pas tolérable ! » en passant par les déclarations de l’Assemblée des Maires de France qui tend la sébile auprès du gouvernement, le barnum médiatique des collectivités est en marche et ses acteurs hypocrites se chauffent la voix, avant sans doute aller symboliquement, la corde au cou et en chemises déposer les clés de leurs collectivités à la porte de l’Elysée.

Les citoyens ballotés

Peu avertis des enjeux et des manœuvres qui se trament dans son dos, le citoyen assiste, incrédule, à ce grand cirque médiatique et ses excès ainsi qu’aux « mesures » prises par les élus locaux pour pallier le tarissement des ressources budgétaires en provenance de l’Etat. En ce moment, ce qui marche bien, ce sont les annulations des festivités et des feux d’artifice pour le 14 juillet ou bien la suppression des festivals.

Pour des élus pour lesquels la culture se réduit à « l’œuvre d’art » implantée sur le rond-point à l’entrée de la commune, le choix est vite fait entre la subvention à l’association culturelle facile à sucrer et celle à l’association des anciens combattants à laquelle on ne touche pas de même que celle du club de foot ou celle du troisième âge, même si certains bénéficiaires n’en n’ont pas besoin.

Etre élu, c’est investir, qu’on se le dise ! Il faut du goudron, des pavés en granit, des jardinières en bois, des lampadaires en veux-tu en voilà, la salle de sport ou la salle polyvalente aux dernières normes mais sous utilisée, et l’endettement qui va avec, et des relais d’opinion permanents que sont les associations locales, de préférence sportives, que l’on arrose avec le message suivant : votez pour moi la prochaine fois !

Depuis la décentralisation de 1982 et les pouvoirs qu’elle a conférés aux collectivités territoriales, on a créé une bulle qui est en train d’exploser. Les élus se sont emparés de leurs nouvelles prérogatives et ont investi au début, pour remettre les équipements à niveau, ce qui n’a pas eu que des inconvénients lorsqu’on se rappelle la décrépitude des collèges et lycées transférés aux départements et régions. Cet essor de l’investissement aurait pu retomber à un niveau normal, mais désormais les élus, voulant toujours bien faire pour se faire réélire et surtout les entreprises et fournisseurs divers de ces collectivités se sont bien habitués au système et à bien vivre sur l’argent du contribuable local, peu regardant sur les dépenses en période de croissance économique.

Ce n’est plus le cas aujourd’hui, et il va falloir penser à réformer les politiques locales d’investissement pour aller vers les politiques destinées à promouvoir la vie citoyenne et le vivre ensemble : cela va du développement de l’offre des hébergements pour les personnes âgées à la multiplication des modes de garde et d’accueil de la petite et moyenne enfance, sans oublier la culture et le sport dans toute leur diversité.

Autrement dit, une révolution culturelle que nos élus ne sont pas du tout prêts à faire. Il faudra que les citoyens comprennent les enjeux de ce qui est en train de se passer, décodent les comportements et les dénoncent et obligent les décideurs à se réformer eux-mêmes avant de réformer notre quotidien.



6 réactions


  • zygzornifle zygzornifle 17 juin 2015 14:08

    Elle est a l’image même de la France.....Une lente agonie ....


    • Michel DROUET Michel DROUET 17 juin 2015 18:59

      @zygzornifle
      C’est vrai que le pouvoir politique s’efface progressivement devant le pouvoir économique et financier.
      A quand la bascule ?
      Le changement c’est maintenant ?


    • TOUSENSEMBLE OU L ECUREUIL ROUGE TOUSENSEMBLE OU L ECUREUIL ROUGE 18 juin 2015 19:01

      @Michel Drouet

      bientôt le million d’élus  ????ripoux1 a son ami le ripoux 2 :

      LES RIPOUBLICAINS echangent de bons procédés tu as besoin se vaches je te les donne contre 10 chèvres la France devient africaine !!!

      le ripoux maire 1 n’a plus de terrains pour les projets immobiliers de ses amis pavilloneurs ou marchands de biens et PROPOSE DONC A SON AMI RIPOUX D’associer leurs communes  !!!

      l’un a 6 fois plus d’hectares pour construire les paysans n’auront plus assez de terre pour cultiver !!!

      c’est la grande foire a l’encan tout cela avec des communautés de communes deja en place !!


  • taktak 17 juin 2015 14:17

    Il y a du vrai dans cet article même si on peut regretter le populisme « anti élu » en général, digne de propos de comptoir et qui ne voit pas derrière la paille la poutre. Car il y a une différence de taille entre le représentant élu et le professionnel de la politique.

    Cette loi a pour but le démantèlement de l’état unitaire avec effectivement pour but le renforcement de seigneuries locales tenues par les barons du Parti Maastrchieen Unique prets à lancer la concurrence entre métropoles et territoire pour le plus grand profits de patrons avides de subvention (la loi ne fait elle pas de l’euro région le chef de file du développement économique et l’état n’est il pas en train de transferer la gestion des budgets afférants aux barrons locaux).

    Il s’agit de faire exploser la République en ce qu’elle a de solidaire et d’agalitaire et le peu de cadre démocratique (les communes en premier lieu) au profit d’élus professionnels chantre de la défense de l’entreprise, du clientélisme envers non pas des citoyens mais des administrés.


    • Michel DROUET Michel DROUET 17 juin 2015 18:57

      @taktak
      Bonjour Taktak
      C’est de bonne guerre ! J’ai critiqué votre article qui dit le contraire de ce que j’écris.
      Je ne peux pas vous suivre dans votre argumentaire : "Cette loi a pour but le démantèlement de l’état unitaire avec effectivement pour but le renforcement de seigneuries locales tenues par les barons du Parti Maastrchieen« 
      L’argument des féodalités avait justement été utilisé par vos amis pour dénoncer la décentralisation en 1982 et vous nous le resservez pour nous dire qu’il faut cette fois les maintenir ! J’ai un peu de mal à suivre...
      Quant au »populisme anti élu« , il faut savoir nommer les choses. Si je me contente de parler simplement de »système" personne ne comprendra. Il faut savoir que les élus font eux mêmes le système même s’ils n’en perçoivent pas toujours les dérives.
      Ils se sentent concernés par l’injonction d’investir dans les collectivités territoriales et ils le font, mais pas toujours à bon escient (les ronds points...).
      Ils sont également prisonniers d’une idéologie ou de leur volonté de se faire réélire qui les conduit parfois à ignorer les règles de la République sur le logement social par exemple ou dans la mise en oeuvre de la réforme des rythmes scolaires (surtout dans les mairies de droite).
      Ce que je veux dire, c’est que les élus doivent être plus proches des préoccupations de leurs concitoyens et ne pas être les marionnettes des partis et du monde économique qui veut toujours plus de contrats qui se traduisent par de l’endettement et des impôts, et ce n’est pas du propos de comptoir (j’ai travaillé dans une collectivité locale).
      Je pense qu’il faut travailler en intercommunalité avec des assemblées élues et des maires délégués par commune. Je pense également que lorsqu’on aura franchit cette étape, le Conseil Départemental élu n’aura plus lieu d’être. Les économies réalisées iront tout naturellement vers les intercommunalités.


  • elpepe elpepe 18 juin 2015 03:29

    les mecs ils ont raison ils protegent leurs job bien payes loin de la pollution, et a glander
    Je ferais exactement pareil, c est bien normal
    il faut etre completement en France pour travailler dans le Prive, tare ou fou a lier
    Ou sinon golden boy dans la Finance le seul vrai job tout les autres jobs dans le prive c est de l esclavagisme
    Mes enfants vous qui etudiez, ecoutez bien Tonton Elpepe, faites fonctionnaire, politicien, financier ou bandit (bon notaire c est pas mal)


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