vendredi 23 mai 2008 - par Yohan

Au pays de l’ORE gris

Est-ce bien raisonnable ?

Le projet de loi prévoyant des sanctions pour les chômeurs refusant deux offres, rebaptisé ORE "offre raisonnable d’emploi", deviendrait-il un nouveau poil à gratter pour le gouvernement ?

En attendant, la discussion prévue le 26 mai avec les partenaires sociaux et les arbitrages qui en découleront, il se dit que la mesure pourrait être quelque peu re-toilettée et assouplie comparativement aux toutes dernières hypothèses.

Ainsi, la formation, la qualification, l’expérience professionnelle seraient prises en compte, tout comme la situation sociale et familiale de l’intéressé, en relation au bassin d’emploi.

La zone géographique de résidence du demandeur d’emploi et l’offre salariale vont donc peser dans l’appréciation d’un refus, ce qui pose sans nul doute la question de la bonne gestion de l’ORE par l’ANPE.

Cette offre raisonnable d’emploi qui se conjugue avec une pression nouvelle mise sur le chômeur, avec sa dégressivité par paliers au fil des mois, risque de faire foi en matière de décision de sa radiation éventuelle.

Il convient de se garder de toute appréciation hâtive et de se lancer en imprécations stériles.

En effet, chacun s’accordera sur la nécessité de devoir élargir le champ de la recherche d’emploi au terme de quelques mois de recherche infructueuse, de revoir au besoin à la baisse ses prétentions, voire, le cas échéant, de rechercher l’emploi au-delà du périmètre initialement privilégié.

En revanche, ce qui indéniablement va fâcher, c’est qu’au bout d’un an l’assuré se retrouve face à des obligations nettement plus contraignantes.

Si nous cotisons à la "prévoyance chômage", il serait bon que l’on revienne sur la notion d’engagement contractuel mutuel.

Nul n’est dupe, puisque au fond, nous cotisons sans garantie stable en contrepartie, celle-ci pouvant être remise en question à tout moment.

Les devoirs du cotisant ne sont pas mieux définis, d’où les dérives dénoncées par certains.

Le durcissement envisagé n’a, dit-on, d’autre but que d’inciter les "ramollis de la prospection" à reprendre au plus tôt un emploi qui leur tend les bras. Rien de choquant à cela, de prime abord.

Or, nous savons qu’il existe des catégories de chômeurs fragilisés, sous-qualifiés ou déclassés pour qui ce revirement stratégique devient une véritable bombe à désorientation.

Si au moins l’effort du service public de l’emploi s’orientait résolument dans le sens d’une amélioration des services rendus aux demandeurs d’emploi !

Malheureusement, pour l’heure, il semble que rien de mieux ou de plus ne soit prévu en matière de formation et d’accompagnement des chômeurs.

Les plus gâtés en la matière restant les salariés… et de loin !

Les dernières évolutions des politiques du service public de l’emploi laissent présager une transition de la notion d’accompagnement - qui prêtait déjà à polémique - vers une marche forcée vers l’emploi.

Pas à pas, il semble bien que nous nous approchions du modèle de traitement du chômage britannique, alors que nous n’avons ni la fluidité de son marché ni l’efficacité de ses Jobs Centre Plus.

Les Français étaient pourtant prévenus et notre président n’a jamais caché son vif intérêt pour les modèles danois et britanniques.

En choisissant de s’inspirer du moins disant, il apparaît que ce dernier a, pour l’heure, oublié d’en exporter le "Plus" et plus sûrement, l’esprit.



20 réactions


  • tvargentine.com lerma 23 mai 2008 14:27

    Reconnaissez au Président Nicolas Sarkozy de faire bouger des structures conservatrices par la gestion opaque et "syndicaliée" de structure comme l’unedic et anpe dans une autre mesure

    Le budget de la formation professionelle pése plusieurs milliards d’euros en France ,mais il semble qu’une partie de cette argent n’aille pas au besoin des travailleurs de se former mais plutot à faire vivre des structures ou sociétés bidons de formations,qui ne sont que des pompes à fric pour financer des syndicats patronaux ou de salariés

    Il faut que chaque demandeur d’emploi dont l’activité est en recession puisse avoir le choix d’un éventail de possibilité de reconversion professionelle avec la formation

    Ce n’est pas le cas jusqu’à présent


    • foufouille foufouille 23 mai 2008 15:24

      la formation sert uniquement a ceux qui ont des "amis. les autres ont droit a des trucs pourris

      en plus il y a plus de boulot

      nagui bocsa a plus de 50a. il etait en vacances sous chirac ?


    • 1984 23 mai 2008 17:31

      @ lerma la tache

      TA GUEULE !!!


  • Sandro Ferretti SANDRO 23 mai 2008 14:31

    Salut, Yohan.

    J’ai méme pas eu le temps de te voir passer en cuisine, dis-donc....

    De l’or dans les doigts....


  • Bof 23 mai 2008 17:38

    Vous écrivez  : "Or, nous savons qu’il existe des catégories de chômeurs fragilisés, sous-qualifiés ou déclassés pour qui ce revirement stratégique devient une véritable bombe àdésorientation. Si au moins l’effort du service public de l’emploi s’orientait résolument dans le sens d’une amélioration des services rendus aux demandeurs d’emploi ! "

    Et c’est vrai . Mais, il est également vrai que des entreprises ont fermé faute d’employés peu qualifiés mais surpayés par l’anpe et leurs petits travail non déclarés . Il suffit de regarder vers les belles maisons de certains quartiers et d’y trouver les chomeurs d’il y a dix ans ...il y a un sacré truc ,quand même. ! puisqu’ils ne sont plus jamais retournés en entreprise. Beaucoup parlent même de partir de France pour raison d’imposition...combien de maisons ont été vendues par certaines familles en dix ans ?


  • Yohan Yohan 23 mai 2008 18:15

    @ Lerma

    C’est vrai qu’il y a du gaspillage avec les fonds de la formation. On attend d’ailleurs une refonte du paysage de la FP qui ne vient pas.

    Ceux qui profitent le plus de la formation ne sont pas toujours ceux qui en ont le plus besoin. Bcp de salariés partent en formation pour obtenir des diplômes par peur de ne pas pouvoir faire reconnaitre leurs compétences plus tard. De l’autre côté des employés, ouvriers se laissent distancer en négligeant ou en ignorant leurs droits à se former. Résultat : quand il se retrouvent licenciés, c’est déjà trop tard pour eux et ils ne trouvent actuellement pas grand chose à se mettre sous la dent.

    Par ailleurs, Il y a trop de formation universitaires théoriques, trop de formations attrape gogo et pas assez de formation pratiques professionnalisantes. Et heureusement que nous avons encore l’AFPA présente dans tout le territoire.

    Quant aux sytèmes étrangers qui inspirent tant nos gouvernants, ils sont plus généreux à offrir des formations de reconversion et d’adaptation aux chômeurs.

    Chez nous, il est plus facile de se former en étant salarié qu’en étant demandeur d’emploi. Ce déséquilibre est très préjudiciable et accentue le glissement progressif vers l’assistanat et le RMI.

    Enfin, nous avions dans les années 80 les formations dites de promotion sociale (ascenseur social), qui servaient à évoluer professionnellement ou à s’adapter. Celles-ci n’existent plus en tant que telles.

     


  • Yohan Yohan 23 mai 2008 18:38

    @ Constant

    j’en vois pas mal qui ne demandent qu’à bosser et qui se démènent tous les jours pour en trouver.

    j’en connais aussi qui préfèrent l’assistanat, surtout quand il est mieux rémunéré que le travail


  • Fergus fergus 23 mai 2008 18:56

    Le cocasse dans la recherche d’une offre valable d’emploi, c’est que ce système, a priori très contraignant, porte en lui-même sa propre perversion, comme j’ai pu personnellement le constater dans les entreprises où il est déjà, et parfois depuis fort longtemps, expérimenté.

    Rien n’empêche en effet un chômeur d’accepter une offre d’emploi (et par conséquent de montrer sa bonne volonté à l’ANPE) puis de torpiller sa candidature lors de l’entretien d’embauche. Les techniques sont multiples et d’une redoutable efficacité. Ce n’est donc pas le demandeur d’emploi qui refuse le poste, mais l’employeur qui renonce à s’attacher les services de notre chômeur. Je vous garantis que ça marche, et point n’est besoin de se présenter déguisé en bouffon ou non rasé depuis huit jours : il suffit généralement de deux ou trois mots, attitudes ou questions utilisés à bon escient !

    Tout cela pour dire qu’aucun système n’est parfait, et que nos amis libéraux auraient tort de croire qu’ils ont trouvé la poule aux oeufs d’or !


    • Yohan Yohan 23 mai 2008 20:33

      @FERGUS

      Exact ! cette mesure témoigne d’une impatience doublée d’une méconnaissance des réalités de terrain.

      J’ai une longue pratique professionnelle en ce domaine et je pense qu’il vaut mieux se consacrer à aider ceux qui sollicitent spontanément de l’aide plutôtt que de traquer ceux qui trichent ou qui font semblant.

      Vous avez peut être entendu parler ce qu’on appellait hier les SIFE, (stages d’insertion et de formation à l’emploi.) payés par l’Etat. Environ 1 tiers des stagiaires nous avouaient au bout de trois mois d’accompagnement qu’ils ne demandaient rien, ne voulaient rien et surtout pas bosser.

      En revanche, ce suivi inutile et prescrit par l’ANPE au forceps coûtait très cher à la collectivité pour rien.

      L’organisme de formation était payé à les accompagner, le chômeur l’était également (somme qui se cumulait à ses revenus de l’assistance) sans parler des administrations chargées d’organiser le toutim, et des formateurs dégoûtés de s’être battu vainement à tenter de les réinsérer.

      J’ai vu des rémunérations versées au DE par le CNASEA avoisinant les 1400€ pour des gens hors circuit depuis plus de cinq ans. Un salaire en quelque sorte pour faire semblant de participer, et s’asseoir le cul sur une chaise.

      j’avais évalué àl’époque la dépense pour la collectivité à 5000€ par mois, au bas mot, par personne. J’ai alerté l’administration du problème en vain...

      Absolument contre-productif donc. Mais l’Etat pensait bien faire en voulant nettoyer ses listes.


    • Fergus fergus 24 mai 2008 10:45

      Tout à fait vrai, Johan. Et il existe le même type de dérive dans les fonds communs comme j’ai pu le constater durant plusieurs années en tant qu’administrateur d’un Fongecif.


    • Yohan Yohan 24 mai 2008 14:22

      @ Fergus

      Tout à fait prêt à en discuter avec vous, d’autant qu’il se trouve que nous travaillons avec vous. Ceci dit, le Fongecif connait les démarches qualité et mène une politique bien plus clairvoyante que les pouvoirs publics ou le SPE. Néanmoins, bcp de progrès restent encore à faire en matière de gestion des fonds de la formation


  • Rosemarie Fanfan1204 23 mai 2008 21:32

    Bonsoir Yo, merci pour ton article. J’ai vu il y a qq jours un reportage édifiant et qui fait rêver. La Norvège. Le plein emploi. 1 % de chômeurs. Les locaux de leur "ANPE" vides et l’employée filmée s’y ennuie ostensiblement. Un français, boulanger, installé là-bas cherche vainement des employés qualifiés. Pour cela, il va sur son pc tous les quarts d’heure vérifier qu’une demande d’emploi n’a pas été déposée et être le premier à téléphoner au demandeur d’emploi pour l’embaucher.... Je me suis pincée. Mais non cela avait l’air vrai. Ce n’était pas un film passant en première au Festival de Cannes.

    Ton sujet est intéressant et complexe. Car les situations le sont. C’est peut-être justement là que le bat blesse. Appliquer des solutions globales à des individus très différents et dans des situations également très différentes.

    Bonsoir à toi Yo


    • Yohan Yohan 23 mai 2008 22:34

      @ bonsoir Fanfan

      On ne te voit plus bcp ces derniers temps ?

      Cette histoire norvégienne souligne à quel point nous sommes mal en point. Pire encore, nous avons perdu l’intelligence à résoudre nos problèmes.

      Bon WE Fanfan !

       


    • Fergus fergus 24 mai 2008 10:42

      Amusant d’évoquer la Norvège dans un article titrant sur l’ORE. Rappelons pour mémoire que l’ORE (la couronne) est la monnaie de la... Norvège !


    • Rosemarie Fanfan1204 24 mai 2008 15:00

      Eh oui Yo, un accident domestique m’avait immobilisé chez moi pendant + 2 mois et maintenant c la reprise du travail, itinérant pour moi. Jje suis dans le SO toute la semaine et en we chez moi. Mais j’ai toujours plaisir à retrouvr les amis.

      Biz


  • Francis, agnotologue JL 24 mai 2008 12:03

     

    Bonjour, sujet intéressant. Je lis : ""Si nous cotisons à la "prévoyance chômage", il serait bon que l’on revienne sur la notion d’engagement contractuel mutuel. Nul n’est dupe, puisque au fond, nous cotisons sans garantie stable en contrepartie, celle-ci pouvant être remise en question à tout moment. Les devoirs du cotisant ne sont pas mieux définis, d’où les dérives dénoncées par certains.""

    N’auriez-vous pas dû évoquer plutôt les droits des cotisants ?

    Je pose la question : qui doit financer le coût du chômage ? Ceux qui pâtissent des gains de productivité ? ou bien ceux qui en tirent profit ? Les travailleurs ? Ou bien les actionnaires ?

    Cette législation qui considère les cotisations chômage comme une assurance que le travailleur contracte est archaïque : elle date d’une époque de plein emploi, une époque révolue depuis des lustres. Le libéralisme qui entend faire table rase des règles du passé devrait reconnaître que celle là est devenue absurde et inique dans un monde où le capitalisme a ravagé l’artisanat. La face cachée du "capitalisme qui crée des emplois" est qu’il en détruit davantage qu’il n’en crée et le taux d’emploi se maintient peu ou prou grâce à une consommation toujours plus démesurée.

    Dès lors que des emplois sont comptés, que les ressources naturelles sont en déliquescence, que la pollution est insoutenable, le culte de la croissance est une faute commise contre les générations futures, et il appartient à toute la collectivité de financer le chômage, et pas aux travailleurs. Les entreprises devraient y trouver leur compte puisque le coût des emplois baisserait !

    La seule alternative raisonnable est le partage du travail ou le financement du chômage par les profits. Le RSA et toutes ces mesures de financement des emplois ne sont que fuites en avant et cataplasmes sur jambes de bois.


  • maxim maxim 24 mai 2008 13:32

    le grand malheur chez nous ,c’est que l’on a voulu faire passer le Bac à tout prix à tout le monde ..et quel Bac !!!

    censé être la clé pour accéder à une formation supérieure ;

    et l’apprentissage dans tout ça ? et une formation professionnelle ,avec un Cap à la clef ,ah oui c’est vrai le travail manuel c’est bon pour les nuls ,pour les prolos !!

    c’est le message qu’on a voulù faire passer depuis des lustres ...

    des générations de travailleurs bacheliers se retrouvent soit caissiéres pour les femmes ,soit manutentionnaire pour les hommes ,c’est à dire des boulots non qualifiés,payés à coup de lance pierre ,peu épanouissant et instables à souhait ..

    idem pour les OS ,ouvrier spécialisé c’est à dire sans formation et devant se contenter de gestes répétitifs comme remplir des cartons de marchandises diverses ou d’un travail qu’on apprend dans l’heure ne necessitant aucune formation particulière ...

    quantités de petites et grandes sociétés utilisant ce type de personnel ont préféré délocaliser ,le coût de la main d’oeuvre étant sans commune mesure avec le nôtre ,et ce genre de travail disparait de jour en jour pour être définitivement exclu de chez nous à plus ou moins brefs délais .....

    alors bien entendu ces mauvaise habitudes ont généré des masses de chômeurs souvent âgés ,il y a bien des formations annoncées mais combien la cinquantaine venue vont vouloir ou pouvoir se lancer dans l’apprentissage d’un vrai travail .......

    d’un autre côté il y a aussi le problème ,et il existe ,des chômeurs professionnels ,en a t’on le chiffre exact ,de quels moyens efficaces l’administration dispose t’elle pour pour contrôler et distinguer le sincère du fraudeur ?

    l’Anpe at’elle les moyens de proposer de vrais boulots en rapport avec la compétence professionnelle de demandeur ?

    je pense que tout ces problèmes ont bien été retounés dans tous les sens avant de mettre en pratique les ordonnances du gouvernement ..

    il faudra que l’Anpe joue franc jeu ,et elle a elle aussi besoin d’un bon dépoussiérage !

    remettre les gens au boulot ,oui ,cent fois d’accord ,mais donner les armes à ceux qui veulent travailler ou retravailler ,d’aborder leur nouveau job dans les meilleurs conditions ,et d’urgence revaloriser l’apprentissage et le travail manuel ,on a besoin de travailleurs qualifiés en toute urgence !

    il vaut mieux un bon plombier qu’un mauvais avocat !

    sinon le problème restera sans fin !


    • Yohan Yohan 24 mai 2008 14:14

      @ Maxim


    • Francis, agnotologue JL 24 mai 2008 14:57

      Maxim écrit : ""le grand malheur chez nous ,c’est que l’on a voulu faire passer le Bac à tout prix à tout le monde ..et quel Bac !!! censé être la clé pour accéder à une formation supérieure  ;""

      Le bac était un examen que bien des familles ayant les moyens d’offrir de coûteuses et rémunératices études à leurs rejetons redoutaient. En revanche, les familles modestes n’avaient et n’ont toujours aucun d’intérêt à voir leurs enfants acquérir ce diplome qui quand il est sec ne sert à rien sur le marché de l’emploi.

      Cherché à qui a profité le crime et vous saurez à qui imputer ce que vous appelez ce grand malheur


    • Francis, agnotologue JL 25 mai 2008 10:12

      "Cherchez" bien sûr.

      L’esprit de Bologne : " Si les universités ne s’adaptent pas, on se passera d’elles " : " avant, il y avait les universités de " Mode 1 ", au sein desquelles les scientifiques posaient les questions et y répondaient ; aujourd’hui se mettent en place les universités de " Mode 2 ", auxquelles la société pose les questions — et des groupes ad hoc d’experts y répondent." (Yves Winkin )

       

       

       


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