De l’utilité des réformes…
Réformer le pays est indispensable ! C’est du moins ce que l’on nous dit depuis plus de 20 ans, mais à y regarder de plus près la « réforme » qui sortira la pays de son problème majeur supposé - la dépense publique trop importante et le chômage de masse – se traduit dans les faits par de la régression sociale pour les citoyens alors que la finance et le CAC 40 se gobergent chaque jour davantage.
A quoi sert la réforme ?
Selon les analystes, les économistes, journalistes et syndicalistes chantres de « la réforme », son utilité repose avant tout sur notre « crédibilité » en Europe et au-delà. Dès lors, il est facile d’imaginer que le curseur doit être placé sur le moins disant en matière sociale. Oublié le programme du Conseil National de la Résistance à l’origine des droits sociaux que nous possédons et qui se délite peu à peu après chaque « réforme ».
Vous aurez noté par ailleurs que la « réforme » ne s’intéresse que très peu aux débordements de la finance et des entreprises puisque chaque année nous découvrons des affaires de paradis fiscaux dans lesquels trempent nos banques soi-disant si vertueuses qui nous préparent la prochaine crise financière, ou bien encore « d’optimisation fiscale » (Google, AirBnB, etc…). Ajoutons à cela la fraude fiscale et sociale bien française de la part des entreprises qui coûte bon an mal an environ 60 Milliards d’euros au pays.
Ajoutons également que le nombre de millionnaires et de milliardaires continue d’augmenter dans notre beau pays
Créer des emplois…
Une des vertus supposées de la « réforme », c’est qu’elle devrait permettre de retrouver le chemin d’une économie porteuse d’avenir, créatrice d’emplois. Depuis plus de vingt ans, les réformes s’accumulent, toutes destinées à rogner les droits des salariés afin de diminuer les déficits sociaux créés par le chômage, sans que l’on constate d’effets majeurs sur la courbe du nombre de demandeurs d’emplois.
Dans le même temps, toujours dans la logique d’aide aux entreprises « submergées par les charges », on s’évertue à aligner les cotisations payées par les entreprises sur celles de nos voisins européens puisqu’il a été décrété que ce sont eux la référence alors qu’on aurait pu aligner ces voisins sur notre modèle.
Pour ce faire, le gouvernement précédent (dont l’ennemi était la finance…) a créé toute une série de mesures destinées à alléger les « charges » des entreprises (Pacte de responsabilité, CICE,…) qui devaient aboutir à « l’inversion de la courbe du chômage » que l’on attend désespérément. Plus de 40 Milliards ont été dépensés pour un résultat quasiment nul en termes d’emplois.
L’évaluation des politiques publiques
Régulièrement, la Cour des Comptes publie des rapports stigmatisant l’action de l’Etat et des collectivités en matière de gestion de l’argent public, rapports qui font la une de la presse pendant deux jours et qui finissent ensuite dans des armoires.
La Cour des Comptes émet des observations sur la gestion des finances ou sur l’opportunité de certaines dépenses au vu des résultats obtenus, ce dont nos gouvernements successifs se contrefichent puisque eux font de la politique, ce qui n’est pas la même chose, et autorise parfois de faire n’importe quoi au nom du dogme de l’économie mondialisée qui suppose que le futur est dans la régression sociale.
Un exemple ?
Revenons un instant sur les 40 Milliards du pacte de responsabilité et du CICE : Combien d’emplois créés ? 100 000 peut-être, mais guère plus. On est loin du million promis par M. Gattaz… On nous explique désormais que ces sommes colossales ont permis aux entreprises de récréer leurs marges d’avant, puis de faire des bénéfices et enfin, nous en sommes à un « frémissement de l’investissement ». A ce train-là, nous devrons attendre le siècle prochain pour avoir un « frémissement sur l’emploi ». Pendant ce temps, les dividendes, les salaires mirobolants des dirigeants et les stocks options distribuées, se portent bien et permettent à leurs bénéficiaires de très bien vivre.
Mettons maintenant en parallèle les quelque 500 000 emplois aidés crées par l’Etat, les Collectivités locales ou les associations pour un dépense publique de 3 ou 4 milliards, emplois dont on nous dit qu’ils sont inutiles, et qu’ils ne débouchent pas sur des emplois réels. Sauf que… les 500 000 emplois avec 4 Milliards comparés avec les 40 Milliards pour 100 000 emplois, nous démontrent que ce n’est pas en versant des milliards à fonds perdus aux entreprises que l’on résoudra le problème du chômage.
Le dogme des emplois publics inutiles et coûteux
Emplois inutiles ? Cette affirmation est à relativiser, même si on sait que l’accumulation des structures publiques est génératrice de doublons qui sont de la responsabilité des élus qui votent ces emplois garantissant leur propre survie électorale.
Emplois coûteux ? Là aussi, il suffit de se replonger il y a une trentaine d’année pour savoir que les emplois publics n’ont pas toujours été bien payés (et ne le sont pas toujours : cf infirmières…), mais que ce sont les rémunérations des emplois privés qui ont subi une érosion importante du fait de l’accroissement du chômage de masse et par conséquent de la position de force des recruteurs en matière de négociation des salaires.
Dans la logique actuelle, qui consiste à opposer les salariés du public à ceux du privé, les deux sont perdants et l’argent dégagé des dépenses publiques pour payer les fonctionnaires ou les emplois aidés continuera à alimenter le trou sans fond des subventions aux entreprises créatrices de profits et de dividendes pour quelques-uns mais pas d’emplois.
La réforme : une question de vocabulaire
Déjà le mot « réforme » est en lui-même une escroquerie intellectuelle puisqu’il induit que les efforts doivent être supportés par une seule catégorie sociale alors que d’autres catégories en seraient exemptées.
Le mythe de la « dépense publique », insupportable, bien sûr, doit être précisé afin que les contribuables et cotisants sachent bien ce qui se passera lorsque des pans entiers de notre système public aura vécu : open bar pour les assurances privées qui se substitueront au régime de protection sociale en vigueur (avec sans doute, un « léger surcoût » de cotisations pour les personnes à risque), place aux cliniques privées et aux honoraires libres du corps médical, augmentation des factures des particuliers aux prestataires remplaçant les services publics (transports, crèches,…), boom des écoles et universités privées avec des frais de scolarité « à l’américaine », etc., etc…
« La réforme est urgente », bien sûr. Elle ne peut plus attendre, c’est du moins ce que l’on nous serine depuis plus de 20 ans, sans qu’un horizon clair soit tracé, et pour cause : la course aux profits ne cessera jamais.
Enfin, pour entrer dans la « réforme de l’emploi » qu’on nous propose, admirons l’urgence affichée à « faciliter les licenciements » pour « relancer les embauches » : une magnifique pépite linguistique réformiste !
Les petites mains de la réforme
Comme dans toute manipulation intellectuelle destinée à tromper les citoyens, il faut des « experts » et des élus qui donneront un vernis démocratique à la réforme qui montent en première ligne tandis que les véritables bénéficiaires resteront dans l’ombre à compter les bénéfices.
Parmi ces experts et ces élus, beaucoup ont un pied dedans et un pied dehors, c’est-à-dire qu’ils ont un passé dans la Banque (Macron) ou dans un grand groupe (Pénicaud) et sont donc bien au courant des enjeux pour leurs mandants et aussi pour eux-mêmes lorsqu’ils auront terminé leur carrière politique pour laquelle ils acceptent de perdre beaucoup de revenus (quelle abnégation ! mais suspecte, tout de même).
Il y a également les Inspecteurs des finances élevés à la mamelle de l’Etat qui savent si bien « pantoufler » grassement dans le privé, en n’ayant pas peur de créer des conflits d’intérêts en freinant la régulation du secteur privé, et qui sont toujours prêts à offrir leurs services
Il y a enfin les idiots utiles comme ces syndicats favorable à la réforme et qui n’ambitionnent rien d’autre que de devenir les leaders de la représentation syndicale, ou bien ces convertis à 1300 euros par mois qui crachent sur le secteur public sans savoir ce qui les attends (cf, plus haut) et qui se précipitent dans la boutique du PSG pour acheter le maillot de Neymar à 150 euros.
Avec de telles petites mains, la réforme a de beaux jours devant elle, en même temps que le naufrage du politique et l’arrogance et la vulgarité des riches.