Entre « Ras le bol fiscal » et compétitivité, où se trouve le rêve Français ?
Entre Nostalgiques de l'Ancien Régime et "Modernistes" de Wall Street, la Pensée citoyenne, responsable, solidaire devra enfin faire le choix d'une Transition écologique de l'écosystème économique
L’impôt a toujours été en France une source de manifestations plus ou moins violentes, plus ou moins spontanées. Sous l’Ancien Régime, les Nobles et l’Eglise n’en payaient point et le Tiers Etat devait à lui seul entretenir Noblesse, Clergé et Royauté. Cela n’allait pas sans provoquer des émeutes récurrentes et autres jacqueries, surtout quand les récoltes venaient à dépérir. L’impôt et tout son cortège de taxes et corvées étaient donc vécus comme une parfaite iniquité par le petit peuple français.
La Révolution Française est venue fort heureusement rebattre les cartes et redistribuer partiellement les richesses mais l’impôt n’a pas disparu avec elle ; la toute nouvelle République a du consentir d’importants efforts de guerre et faire appel à la conscription nationale, tant et si bien que personne n’y trouva son compte, ni les anciens contribuables, ni les nouveaux qui assimilèrent l’impôt à la spoliation de leurs biens.
Dans un pays colbertiste, centralisé comme la France, ancien petit Royaume, jadis menacé de toutes parts par les Anglais, les Bourguignons, les Espagnols, les Autrichiens et autres Prussiens, l’Etat s’imposa comme valeur centrale, garant de l’unité avec et contre les Régions. Aussi l’impôt a-il-été souvent perçu comme un impôt colonial se substituant au vieil impôt féodal.
La toute récente « révolte bretonne » des bonnets rouges s’inscrit en droite ligne dans cette tradition : jacquerie paysanne et émeute bretonne. Les communicants de cet évènement connaissaient vraiment trop bien leur histoire pour nous faire avaler le côté spontané de ces manifestations qui cachent mal une récupération poujadiste par le mouvement anti-impôt qui agite notre pays depuis de nombreux mois.
Sans entrer dans une analyse de sociologie comparée on peut observer cependant que les sociétés du nord de l’Europe semblent avoir un meilleur consentement à l’impôt que celles du sud, tout comme une plus grande tolérance aux règles de discipline civile. Il y a d’ailleurs une contradiction-au moins apparente-avec le fait que politiquement elles inclinent plus à un libéralisme économique. Sans doute, est ce lié au poids de la Réforme et des valeurs du protestantisme qui ont plus pesé sur l’histoire de ces peuples par ailleurs moins marqués par la centralité des états ou de la Religion catholique.
A trop vouloir parler d’impôts encore faudrait-il d’abord savoir de quoi l’on parle.
Jusque dans les années 70, et pendant les Trente Glorieuses l’impôt sur le Revenu est la cible première des débats et l’objet de la révolte poujadiste ; les impôts indirects sont beaucoup plus indolores et les taxes foncières moins discrètes. Après le choc pétrolier de 1973 les taxes sur l’essence et les vignettes automobiles sont de plus en plus mal vécues.
Avec la Révolution libérale des années 80, l’expansion de la mondialisation, l’installation durable d’un chômage massif déstabilisant les systèmes de protection sociale, la notion de « cotisations sociales » se trouve au centre d’un nouveau débat, ou plutôt la reprise d’un ancien débat qu’avaient clos d’une part, l’histoire patronale de l’Occupation et d’autre part, la dynamique unitaire du CNR (Conseil National de la Résistance). Rappelons que les cotisations salariales et patronales ne constituaient alors que deux éléments du salaire différé du travailleur ; on peut justement penser que la cotisation patronale n’a été dissociée de la salariale que pour alléger cette dernière aux yeux du salarié et pour marquer aussi symboliquement la participation de l’entreprise ; ces cotisations sont intégrées dans le coût salarial de production et sont donc répercutées dans le prix payé par le consommateur final.
Le principe historique de base établit donc que les cotisations sociales sont la propriété du salarié et qu’elles sont payées collectivement par les consommateurs.
Mais cette notion de salaire différé a fini par disparaitre progressivement du champ économique et social des médias au profit du vocable lourd de sens de « charges sociales ». Chez beaucoup d’artisans et commerçants elles sont même vécues comme un véritable impôt sur le revenu puisqu’elles sont prélevées sur leur chiffre d’affaires. Certains perçoivent d’ailleurs la TVA de la même manière.
Il faut reconnaitre que pour un professionnel peu scrupuleux et tenté occasionnellement par le travail clandestin ou au noir, une partie au moins de ces contributions va alors alimenter son revenu. Un exemple très instructif en a été la récente baisse de la TVA dans la restauration qui n’a été que très peu traduite par une baisse des prix.
Les professionnels arguent souvent de la concurrence qui les empêcherait de traduire complètement dans leurs prix tout le montant éventuel d’une hausse des taxes ou des cotisations, aussi dans ce cas là, est-il parfaitement contradictoire de constater que cette même concurrence ne les a pas conduits à répercuter massivement la baisse de la TVA.
Force est donc de constater que le discours des professionnels sur l’impossibilité de répercuter sur les prix toute hausse des contributions-qui serait alors prélevée sur les bénéfices de l’entreprise- relève davantage d’une posture corporatiste et de vieux réflexes poujadistes.
Que peut-on dire simplement sur ces différentes contributions ?
L’impôt sur le revenu (IR) est destiné au fonctionnement de l’Etat et des services publics ; il est calculé suivant un barème progressif qui assure une certaine redistribution ; Les taxes du type TVA, TIPP (carburants), tabac, alcool, s’appliquent à tous sur la consommation et représentent la plus grosse partie des recettes de l’Etat. Le budget de l’Etat est alimenté également par les impôts sur les sociétés (IS) et le capital.
Les taxes locales (habitation, foncière) vont au budget des collectivités locales.
Les cotisations sociales alimentent le budget des Administrations de sécurité sociale, elles correspondent en fait à des primes d’assurance obligatoire couvrant la maladie, la vieillesse, la famille, le chômage, l’invalidité. Contrairement à une idée couramment véhiculée-on se demande par qui ?- le coût des assurances de la Sécurité sociale est largement inférieur à celui éventuel d’assurances privées lucratives comme le démontre l’étude très complète de Gilles Caire (université de Poitiers 2002)
La CSG et la CRDS (contribution pour le remboursement de la dette sociale) sont deux contributions sociales prélevées sur les revenus et destinées également aux administrations de sécurité sociale ; dans les statistiques de l’OCDE elles sont assimilées à un impôt sur le revenu et elles feront partie de la future réforme générale de la fiscalité.
Les Prélèvements obligatoires ?
Les taux de prélèvements obligatoires (PO) sont devenus depuis la révolution libérale le marqueur de référence des économies modernes, à égalité peut être avec le niveau de la dette. Les plus libéraux, parmi nos hommes politiques, les assimilent même à des taux d’imposition…
Rappelons qu’il s’agit en fait du montant des taxes, impôts et contributions sociales obligatoires. En faire le marqueur central de la compétitivité ou du dynamisme d’un pays ne correspond pas à une analyse économique précise.
Les USA en fournissent une excellente démonstration : il n’y a pas aux Etats Unis de système de protection sociale générale, tout au plus un système d’aide pour les personnes les plus déshéritées et on voit toutes les difficultés auxquelles se heurte Obama pour essayer d’instaurer une assurance maladie minimale pour tous.
Le taux de prélèvements obligatoires y est donc faible : 24,8% du PIB mais près de 40 millions d’Américains n’ont aucune couverture médicale ou sociale et pourtant les dépenses de santé représentent 17,6% du PIB contre 11,6 en France. Les USA connaissent par ailleurs une crise économique, sociale et industrielle encore plus profonde que la zone euro et s’ils n'avaient pas bénéficié du statut privilégié du dollar ils auraient eu beaucoup de mal à faire face à la crise de 2007-2008 dont ils ont été les initiateurs.
Le taux de prélèvements obligatoires n’est donc pas un indicateur significatif en soi ; ce qui importe ce sont la pertinence et l’efficience des financements des secteurs de base d’une économie développée, qu’ils soient publics ou privés. On observera cependant que les financements privés de services de base seront en général plus onéreux car ils comportent une part de profit et de coût de commercialisation.
Si l’on est si attentif aux « dépenses non volontaires » du consommateur, pourquoi ne se préoccupe-t-on pas alors des dépenses de publicité (payées par la consommation finale) ? Elles se montent en France à près de 25 milliards € d’après l’INSEE soit la moitié du montant de l’IR ou l’équivalent du montant de la taxe foncière. C’est un secteur qui emploie 112000 personnes en France.
Comparons, comparons !
Citons en préambule quelques propos du rapport 2011 du Conseil des prélèvements obligatoires :
« La France se distingue aujourd’hui à l’échelle internationale par :
- un poids relativement moins élevé des impôts sur le revenu (en 2007, 7,4% du PIB au lieu de 9,4% en moyenne dans l’OCDE),
- un poids plus élevé des cotisations sociales (16,1% contre 9,1%) et, désormais, des impôts sur la propriété (3,5% au lieu de 1,9%). Dans ce dernier cas, l’écart devient toutefois sensiblement moins important si l’on exclut de ce total la taxe d’habitation qui s’y trouve comprise dans les statistiques de l’OCDE.
Elle est en revanche très proche de la moyenne en matière de taxes à la consommation et d’impôt sur les sociétés. »…
« En particulier, l’effet des dépenses fiscales est très variable d’un pays à l’autre, de par leur nombre et/ou leur générosité. A cet égard, la France se trouve être précisément le pays qui compte le plus de dépenses fiscales parmi les grands Etats développés. En 2009, on évaluait à 36,3 Md leur coût au titre de l’impôt sur le revenu, soit près de 80% des recettes encaissées. »
remarque : dépenses fiscales=niches ; la comparaison avec la moyenne OCDE n’est pas pertinente car les écarts sont très grands entre pays. Le poids de l’IR seul proprement dit, hors CSG et CRDS, est de 2,5 % PIB
tableau 1
On peut comparer plus utilement avec des économies plus proches :
tableau 2
Les taxes sur le revenu comprennent en France CSG, CRDS et sont pourtant plus faibles que dans la majorité des pays comparables ; le taux de contributions sociales est plus élevé en Fr ; la différence avec l’Allemagne s’explique car les retraites représentent en France en tout 13,7% du PIB et en Allemagne, 11,3%. Mais les retraites d’entreprises et les fonds de pensions ajoutent 2,4 points de PIB de prélèvements privés qu’il faudrait ajouter car ce n’est pas compté dans le calcul de l’OCDE.
Avec la plupart des autres pays, la différence s’explique en général par des périmètres de prise en charge ou des montants de prestations inférieurs , en particulier pour les retraites et le chômage ; certains pays à qualité de soins comparables ont des systèmes de santé plus économes tenant à une organisation moins libérale des personnels médicaux et à une discipline plus stricte des assurés (Angleterre, Suède, Espagne, Belgique).
Le tableau comparatif des dépenses montrent des valeurs assez proches pour la santé et l’éducation. La France présente des chiffres nettement plus élevées pour ce qui concerne les retraites et surtout le montant global des dépenses sociales.
L’explication du coût plus élevé des retraites tient, comme on l’a vu plus haut, à des taux de remplacement des pensions plus faibles, à des durées effectives de cotisation plus longues et à la non prise en compte (dans les données OCDE) des retraites privées d’entreprises et des Fonds de pension.
La comparaison France-Allemagne montre que nos voisins d’outre Rhin gagnent 1 point de PIB dans le secteur de l’éducation du fait de leur faible démographie.
La France dépense en moyenne près de 5% de plus que ses semblables dans le secteur social ; l’importance de cet écart mérite que l’on s’y intéresse de plus près. Le tableau4 suivant détaille les comptes de ces dépenses sociales.
Poursuivons la comparaison France-Allemagne : l’écart le plus fort porte sur les retraites +3,2 auquel on doit soustraire la part correspondant aux retraites d’entreprise et aux fonds de pension soit 2,4 , il reste +0,8, par contre pour la survie et l’incapacité l’écart est -0,7 ; pour la santé, les dépenses totales sont comparables ; l’écart pour la branche famille est +1,1 lié à la démographie plus active et à la politique familiale ; le chômage et le logement donnent un total identique ; on trouve un écart de +0,2 pour les autres domaines.
L’écart en termes d’efficacité (que la prestation rendue soit « volontaire ou obligatoire ») est donc de +1,4 dont 1,1 est lié à la démographie ; On peut observer cependant dans le tableau 5 que la population âgée allemande est nettement plus nombreuse et en particulier les personnes dépendantes.
Le taux de pauvreté (cf tableau 6) exprime le pourcentage de personnes vivant en dessous de 50% ou 60% du revenu médian disponible des ménages. Pour ceux qui ne voient pas l’intérêt des taxes ou transferts (politique sociale) on peut observer qu’en France le taux de pauvreté (à 60%) passe ainsi de 39,6 avant transferts sociaux à 14,4. Il est de 15,3 en Allemagne. Les revenus sont en monnaie locale. L’Autriche et les Pays Bas ont de faibles taux de pauvreté, contrairement à la Belgique, le Royaume Uni, la Suède, l’Irlande mais surtout l’Italie, le Portugal et l’Espagne
Aux USA, comme il y a peu de transferts sociaux le taux de pauvreté (à 60%) est de 24,2
Tableau 6
income : revenu, poverty rate : taux de pauvreté, coefficient de Gini : de 0 (égalité) à 1 (inégal)
Entre 2000 et 2010, le taux de pauvreté a augmenté de 0,6 en France et de 2,8 en Allemagne. On constate également une hausse des inégalités avec les valeurs du coef. de Gini du Tableau 6
Le sens des réformes du modèle allemand est donc très clair.
Perception et réalité de l’impôt par rapport aux économies comparables
Il est intéressant de comparer la réalité de la pression fiscale des ménages sur des cas représentatifs et comparables :
- Célibataire sans enfant avec un salaire égal à 67% du salaire moyen (en France : 1,5 Smic)
- Couple, un salaire moyen, deux enfants (2 smic)
- Couple, deux salaires, 1 salaire moyen +67% salaire moyen, deux enfants (3,5 smic)
Tableau 8-9-10
- Le taux moyen d’imposition comprend impôt, CSG et CRDS
- Le taux moyen de cotisation patronale comprend toute taxe éventuelle sur salaire
- Le taux moyen net d’imposition des personnes est calculé en enlevant aux cotisations les prestations reçues (par ex allocations familiales)
- Les pourcentages sont calculés /au salaire brut ; le revenu net est augmenté des prestations éventuelles reçues
Le salaire brut moyen en France est de 36673 €/an ; Le smic annuel brut est de : 17112 € soit 47% du salaire moyen ; si on traduit en $ ppa (à parité de pouvoir d’achat) cela donne : salaire moyen 42056$ smic 19624$ (1$=0,872€ français ppa ) ;
Le revenu disponible moyen des ménages est de 24726€ en France et de 23322€ en Allemagne.
Le revenu disponible médian des ménages est de 21000€ en Fr et de 20535€ en All
On constate qu’en termes de revenu disponible des ménages la France est très proche du Danemark, devant l’Italie, l’Espagne et le Portugal mais devancée par les autres pays du tableau ; le cas du Danemark est assez particulier car il n’y a pas de cotisation patronale, peu de cotisation salariale et tout le financement social résulte essentiellement de l’impôt sur le revenu des personnes et des taxes sur la consommation. Les salaires bruts sont environ 17% plus élevés qu’en France.
C’est le pays le plus égalitaire du panel avec le taux de pauvreté le plus faible et les prélèvements obligatoires les plus hauts.
Evolution des impôts ?
Avant la crise de 2007-2008, la tendance était à la baisse des impôts directs d’état mais les dépenses sociales augmentant régulièrement (santé, vieillesse, chômage) le poids des cotisations continuait de progresser ; après 2009, l’ensemble est reparti à la hausse. Il s’ensuit un certain ras le bol fiscal majoré par l’incertitude économique.
« Ce sentiment est d'autant plus justifié qu'un certain nombre d'évaluations récentes ont mis en évidence l'ampleur - sans doute trop longtemps sous-estimée - du phénomène de la fraude fiscale. Si le Conseil des prélèvements obligatoires, dans une étude de mars 2007, l'évaluait à un montant situé entre 29 et 40 milliards d'euros (soit près de 2 % du PIB), le syndicat national Solidaires finances publiques a pour sa part considéré qu'il approchait plus certainement les 60 à 80 milliards d'euros par an - soit un montant comparable au budget consacré à l'enseignement scolaire dans le budget de l'État en 2013. » C’est ce que l’on peut lire dans un récent rapport du Sénat.
Les tableaux suivants montrent quelques évolutions du barème et du poids des impôts.
Tableau 11
La structure de cette imposition globale, le plafonnement des cotisations sociales et les impôts sur la consommation font que le poids relatif des PO va être plus fort sur les bas revenus que sur les hauts comme le montre ce graphique d’O.Berruyer
Tableau17
Impôts et compétitivité
Tableau 18
On peut constater sur ce tableau que les pays qui s’en tirent plutôt mieux que la France pour la balance des opérations courantes ont des taux moyens d’imposition des salariés plus importants que la France (sauf l’Italie) et ont des salaires bruts moyens supérieurs.
Par ailleurs la productivité horaire française se classe bien dans la liste étudiée. Le coût salarial n’apparait donc pas à priori comme le facteur déterminant.
Tableau 19
On peut noter les difficultés de la France, des Pays Bas, de la Belgique et surtout du Royaume Uni pour la dette (privée pour les Pays Bas) et le déficit ; France et Royaume Uni ont des balances courantes déficitaires.
La France a un secteur manufacturier insuffisant qui perd des parts de marché intérieur et un taux de chômage trop important pour équilibrer les comptes sociaux, le taux d’emploi global y est insuffisant.
Le coût total du travail ne peut être placé en bouc émissaire de la crise car la baisse de consommation est avant tout liée au chômage dont une part résulte d’anticipations d’entreprises soucieuses de préserver leur rentabilité ce qui accélère le cycle de baisse. Le dumping social mondialisé s’est accéléré avec la crise et des petits producteurs et fabricants perdent des marchés locaux.
L’Allemagne utilise l’absence de salaire minimum pour embaucher à moindre coût des européens de l’est et prendre des parts de marché ; elle a su développer depuis longtemps des secteurs de haute valeur ajoutée tels l’automobile de luxe ou la machine outil.
La France n’a pas su garder ses grands groupes industriels privilégiant souvent des secteurs d’opportunités financières rapides sur le modèle de J.Marie Messier ou C.Bébéar.
Un article de FOD sur le Blog de Paul Jorion étudie les relations coût du travail-compétitivité et il s’interroge ainsi :
« Le manque de compétitivité ne serait-il pas tout simplement la conséquence d’un manque notoire de compétences, d’imagination et de volonté chez certains de nos grands patrons ? Raison de plus pour contrecarrer, par tous les moyens possibles, la politique qui consisterait à faire payer aux salariés l’incompétence de quelques-uns. »
Les graphiques suivants comparent l’évolution du poids respectifs des dividendes et des salaires pour les entreprises non financières d’après l’INSEE.
le graphique 2bis montre sur une base 100, prenant 1993 comme année de référence, que la masse salariale est restée relativement stable par rapport à la valeur ajoutée brute (66,93 % en 93, 67,77 % en 2011) alors que dans le même temps, le poids des dividendes totaux distribués était multiplié par presque 3 dans leur rapport avec la valeur ajoutée brute (7,5 % en 93, 21,1 % en 2011) de même que les dividendes distribués ou les dividendes nets (total dividendes distribués – dividendes reçus) en rapport avec la VAB ou l’EBE.
On observe dans le graphique 6 que l’excédent de dividendes nets correspond symétriquement à un déficit de financement des entreprises.
N’oublions pas que les allègements généraux et exonérations ciblées de cotisations patronales accordées depuis 2000 se montent à un coût annuel de 32,1 milliards d’euros –chaque année !
Ces milliards là sont soit payés par le contribuable consommateur, soit inscrits au montant de la dette pour être réglés par de futurs consommateurs contribuables.
Apparemment, ces milliards là n’ont pas servi à grand-chose, en tout cas pas à améliorer les comptes de la Sécu, ni la dette, ni la compétitivité, ni la consommation des ménages, ni même à faire baisser les prix ! Si, j’oubliais, ils ont fait baisser un instant les PO ! Pour être honnête, accordons leurs le mérite d’avoir partiellement permis le passage aux 35 heures.
D’autant plus que la France a connu entre 2002 et 2009 une politique fiscale de redistribution à l’envers comme l’écrivent Daniel Vasseur, économiste, et Thomas Chalumeau dans Médiapart :
« 20 milliards d’euros par an, plus d’un point de la richesse nationale, sont pris aux classes moyennes pour être redistribués aux ménages les plus aisés. »
Cela fait beaucoup de milliards qui n’ont pas changé de main pour aller alimenter une consommation peut-être plus locale, surement moins dispendieuse, moins de grosses voitures allemandes ( plus de 6 Milliards € importées/an en France), moins de millions dissipées chez Christie’s ou Sotheby’s ou moins de milliards alimentant les multiples paris financiers du Marché.
La quasi faillite des banques en 2008, ruinées par le poids des bulles spéculatives éclatées en série dans l’écroulement des subprimes, a plongé le Marché dans une Crise noire comme un tunnel sans fond. Un instant condamnées par les politiques, les Banques se sont vite refaites en spéculant de plus belle sur la Dette des Etats gonflant telles des tiques parasites.
Elles ont pu ainsi geler toutes les velléités de réforme et de taxes sur la spéculation et ont fait pression sur les entreprises pour « consolider » leurs comptes en resserrant effectifs et investissements ou en recentrant leurs activités. Ainsi, en temps de crise, est-il plus facile de licencier « pour sauver l’emploi ».
Tout comme il est plus facile de crier au « Ras le Bol fiscal » et d’exiger plus de travail et moins de salaire pour les autres, plutôt que de s’interroger sur la complexité de l’écosystème économique en milieu ouvert et sur la pertinence de son mode de fonctionnement pourtant si catastrophique et chaotique !