mardi 5 juillet 2005 - par Michel Monette

Et Dieu créa le marché libre.

Lorsque j’étais petit, la solution de tous nos malheurs passait par la prière. Aujourd’hui, elle passe semble-t-il par la mondialisation des marchés. Or cette mondialisation, comme la prière, ne peut pas tout règler. Dans le secteur agricole, par exemple, une trop grande ouverture aux marchés internationaux nuit aux agriculteurs Africains. En réaction, de plus en plus de voix s’élèvent en faveur de la souveraineté alimentaire.

Il est beaucoup question des difficultés des producteurs Africains de coton. Les subventions faramineuses aux producteurs Américains font en sorte que ces derniers peuvent vendre leur coton à un prix inférieur au coton africain sur les marchés internationaux.

Il est cependant beaucoup moins question des millions de petites productions familiales de l’Afrique menacées par « l’ouverture des marchés qui provoque une baisse des prix des produits agricoles locaux (oignons, pommes de terre, tomates...) », selon Ndiogou Fall, président du Réseau des organisations de producteurs d’Afrique de l’Ouest (Roppa).

Même l’aide alimentaire n’a pas toujours été sans effets négatifs sur les agriculteurs Africains en provoquant une transformation des habitudes alimentaires au détriment de productions locales, voire dans certains cas une baisse des prix sur les marchés locaux.

On peut même se demander, comme Matt Mellen dans le magazine Seedling de GRAIN, une ONG qui fait la promotion d’« une gestion et l’utilisation durables de la biodiversité agricole fondées sur le contrôle exercé par les populations sur les ressources génétiques et les connaissances locales », À qui profite l’aide alimentaire ?

Depuis quelques années, des organisations paysannes et de producteurs agricoles de plusieurs pays d’Afrique, d’Amérique, d’Asie et d’Europe refusent la pensée magique des économistes néolibéraux.

Elles ont plutôt choisi la concertation et la coordination de leurs activités en lien avec les négociations commerciales de l’OMC. Cela a donné la Déclaration de Dakar en mai 2003 et, plus récemment, l’Atelier pour des politiques agricoles et commerciales solidaires - Prix, soutien et gestion de l’offre à Chapecó, Brésil.

Ces organisations défendent une agriculture paysanne performante et durable au service des exploitations familiales et des producteurs agricoles.

Même le président Chirac est venu plaider, en février dernier au Dakar agricole, un forum international visant à réduire la fracture entre paysans du Nord et du Sud, pour une réorientation du développement agricole en fonction de la souveraineté alimentaire.

C’est l’organisation Via Campesina qui a lancé en 1996 le concept de souveraineté alimentaire.

Different from many other terms invented by intellectuals, policy makers and bureaucrats, food sovereignty springs from the peasant struggles as a need to create a strong, radical and inclusive discourse about local realities and needs that can be heard and understood globally.

GRAIN. Food Sovereignty : turning the global food system upside down.

Le concept de souveraineté alimentaire est né en réaction au concept de sécurité alimentaire alors à la mode dans les rencontres internationales .

La sécurité alimentaire - assurer à chaque individu un régime alimentaire de base - peut se faire au détriment des agriculteurs locaux et entraîner une dépendance envers les exportateurs du Nord comme du Sud, au contraire de la souveraineté alimentaire qui s’appuie sur les productions locales.

Ceux qui utilisent le concept de souveraineté alimentaire ont toutefois tendance à le dénaturer, à l’exemple du président Chirac qui défend à la fois la souveraineté alimentaire et la politique agricole de l’Europe, laquelle menace pourtant de disparition les petites productions agricoles.

L’exemple du poulet est assez révélatrice à ce propos des dommages que peuvent causer les politiques agricoles européennes.

Le coût le l’alimentation est une composante majeure du prix de revient du poublet, or les producteurs de céréales européens profitent de généreuses subventions pour vendre leur production à faible coût. Les producteurs de poulet sont aux oiseaux car ils peuvent ainsi envahir les marchés étrangers avec leur surplus de production.

Pourquoi pas plutôt des agricultures durables et solidaires ?




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