vendredi 14 janvier 2011 - par Michel Santi

Etats-Unis / Allemagne : aux antipodes

De plus en plus de responsables politiques, économiques et appartenant à la société civile américains observent l’Allemagne et ses performances économiques avec envie tout en étant conscients que leur modèle en est bien éloigné… Ainsi, alors que la « sucess story » allemande prend pour assise un secteur industriel dynamique, la richesse (aujourd’hui en grande partie révolue) du système anglo-saxon a été édifiée sur l’expansion boulimique du secteur financier. L’industrie, qui constitue en effet le quart de l’activité économique de l’Allemagne (mais seulement 11% de l’économie US), lui a ainsi permis d’obtenir des résultats phénoménaux puisque ce pays est aujourd’hui – derrière la Chine – le second exportateur mondial alors même que, en comparaison, il n’est peuplé que de 82 millions d’habitants…

De fait, les PME sont le moteur de cette réussite allemande : appartenant le plus souvent à des familles qui y travaillent, ces entreprises disposent de salariés fidèles et hautement qualifiés du fait de la qualité du système scolaire national, en grande partie orienté sur l’apprentissage. En outre, la nature même de ces structures permet à leurs dirigeants d’être moins préoccupés par l’évolution de leur cours en bourse que par la croissance sur le long terme de leur production et de leur développement. Sérénité renforcée par la présence, obligatoire au sein des conseils d’administration des sociétés cotées en bourse, d’une moitié de représentants du personnel… Bref, le visage du capitalisme allemand semble sympathique et d’autant plus inspirer l’optimisme que l’Etat participe activement à ce climat de confiance en payant aux salariés souhaitant ou étant contraint de travailler à temps partiel le différentiel avec leur revenu perçu à temps complet. Cette politique de l’emploi, appelée « kurzarbeit », a ainsi permis à l’Allemagne de sortir victorieuse de la crise et de renouer avec une croissance admirable de 3.6% en 2010, au mieux depuis la réunification.

Redevable bien-sûr à ses exportations et à son secteur industriel de qualité, la croissance du P.I.B. allemand fut, l’an dernier, la plus importante de toute l’Union Européenne, Suède et Slovaquie exceptées et ce dans un contexte où le taux de chômage (à 7.5%) est au plus bas depuis près de vingt ans. En fait, alors que le nombre d’actifs est, avec 40’500’000 salariés, à son plus haut niveau historique en Allemagne, le taux de chômage, lui, devrait péniblement s’améliorer d’un peu d’un pour cent aux Etats-Unis… Par ailleurs, les exportations ne comptent que pour 11.2% dans le P.I.B. américain tandis qu’elles représentent près de 41% de l’activité économique globale allemande (source : Banque Mondiale). Ainsi, la machine à exporter allemande fait-elle même des ravages dans un pays comme la Chine où ses ventes sont en progression de près de 50% sur 2010, Chine (et Hong Kong) qui reçoivent 6% des exportations allemandes par rapport à un chiffre de 4% avant la crise financière ! (Pour mémoire, l’Union Européenne achète à 42% allemand et les Etats-Unis 7.5%…)

Bref, alors que l’investissement à long terme est une constante de l’appareil de production allemand (Volkswagen n’a-t-il pas affiché ses intentions de devenir le premier constructeur mondial en 2018 ?), un pays comme les Etats-Unis, lui, se caractérise par sa propension morbide à s’endetter et à imprimer à vide de la monnaie… Alors que la compétitivité industrielle allemande permet de verser des salaires nettement plus attractifs que les revenus US, les écoles américaines, elles, produisent – à échelle industrielle ! – force avocats et financiers… sachant que la masse des travailleurs doit se résoudre à accepter des emplois mal rémunérés, sans protection sociale avec, comme seule perspective, des prêts pour entretenir l’illusion de faire encore partie d’une classe moyenne en voie de disparition. 



14 réactions


  • Ferdinand_Pecora 14 janvier 2011 10:15

    Une politique industrielle nécessite des taux de change fixes (Bretton Woods)

    Wall Street a sa maison-mère à Londres, qui détruisit Bretton Woods et garantie la spéculation sur l’argent du travail

    Vous voulez une politique industrielle digne de ce nom ? Il faut un Glass-Steagall Global.


    • rastapopulo rastapopulo 14 janvier 2011 15:54

      Je vois pas en quoi des taux de change fixe seraient nécessaire avec une politique économique vraiment efficace et un Glass Steagall...


    • Ferdinand_Pecora 14 janvier 2011 17:03

      @ rastapopoulo

      C’est très simple. Dans le cadre de parités fixes instaurées entre Etats-nations souverains émettant leur crédit productif public (voir plus bas lesquels ont commencé), sans que la spéculation influe d’une quelconque manière sur l’économie (principe politique du Glass-Steagall rooseveltien instauré au niveau mondial), ces Etats-nations peuvent s’entendrent pour réaliser des grands projets d’équipement de l’homme et de la nature. Pas n’importe lesquels : 4 mega-projets continentaux sont dans les starting blocks afin de relier les 5 continents : Nawapa, Transaqua, Bouchon de Darien et Pont terrestre eurasiatique.

      C’est tout l’enjeu de l’Alliance des Quatre Puissances (Etats-Unis, Russie, Chine, Inde) (à laquelle s’associeront ensuite tout autre pays préférant la croissance physique à l’austérité) : remplacer l’empire financier britannique par une coopération westphalienne sur la base d’une économie de type hamiltonienne. Ces 4 pays, en instaurant le Glass-Steagall à l’échelle mondiale, font disparaître de facto la spéculation du nouveau système économique ainsi instauré.

      Le 22 janvier prochain, en direct de Washington, l’homme d’Etat américain Lyndon LaRouche fera l’état d’avancement de ce projet déjà mis en oeuvre depuis 2 ans par la Chine, la Russie et l’Inde (accords du 13 octobre 2009)


    • labulle 17 janvier 2011 15:39

      Je me méfie d’un Lyndon Larouche qui utilise l’image insultante de son président avec un moustache d’Htitler.


  • zelectron zelectron 14 janvier 2011 11:49

    Si en France on pouvait mettre au pas les politiques vantards, imbus de leur personne et imposant leurs prérogatives en dépit de tout et prêtant une oreille attentive à tout les bruits de ch... * nous pourrions nous porter tellement mieux.
    On dit de l’Allemagne qu’elle a un comportement égoïste , mais c’est par jalousie, on dirait plutôt qu’elle nous a emprunté le rationalisme du discours de la méthode : c’est un comble !
    Quant aux USA on voit les dégâts collatéraux que peut occasionner la somme vertigineuse de l’investissement de la guerre
    Cet article est juste en ce sens qu’il met le doigt là où ça fait mal.
    .
    *Wo der König selbst zu Fuss geht = là ou le roi lui-même va à pieds


  • c.d.g. 14 janvier 2011 12:32

    je suppose que l auteur n a jamias vecu en allemagne pour ecrire un tel texte ...
    Bon meme si le modele allemand a des avantages sur le modele US, il faut pas raconter n importe quoi :
    1) Kurzarbeit = chomage techinque en francais. Ce n est pas quand un employé n a pas envie de travailler a plein temps comme vous l ecrivez mais quand la societe n a plus assez de charge pour le payer. L etat paye une partie du salaire de la personne. Pour l employé c est pas tres interessant car il touche nettement moins qu en allant travailler (certes il reste chez lui)
    Le chomage technique a ete utilise en 2009 pour eviter des vagues de licenciement massif et permettre aux societes de garder leur personnel afin d etre operationel lors de la reprise de l activite

    2) la qualite du systeme scolaire allemand est pas si bon que ca. Vous avez jamais entendu parler de l evaluation PISA ?. il y a quelques années la RFA etait avant derniere. Ils ont fait des progres mais ils sont au niveau moyen maintenant.

    Pour le reste d accord avec vous. les usa ont sacrifie leur industrie. donc quand vous batissez sur du sable, il faut pas s etonner qu un jour ca s secroule. On ne peut pas reporcher a un jeune americain de faire du droit et de voulair devenir avocat (ca paye bien) au lieu d ingenieur (nettement moins paye et risque de delocalisation eleve)


  • paoum 14 janvier 2011 12:44

    en allemagne, effectivement c’est une majorité de temps partiels imposés et très mal payé !

    il n’y a pas de miracle....comme chez lidl ou tout repose sur une précarisation des employés de base : multi-tâches, heures sup à gogo, lance-pierre à la fin du mois.
    ça reste du capitalisme néo-libéral sans pitié aucune.


  • plancherDesVaches 14 janvier 2011 13:26

    Bizarrement, j’ai cru comprendre que les « états-unis » étaient ... des états.

    Soit, comparer un ensemble d’états avec un seul état me semble assez peu pertinent.

    Et, chose amusante, les gouverneurs de 7 de ces états ont annoncé officiellement après un congrès vouloir quitter le dollar...
    Ca va nous changer de l’ « éclatement » de la Zone Euro. Ca finissait par faire rengaine.


    • rastapopulo rastapopulo 14 janvier 2011 16:02

      Il y a pas des landen en Allemagne ?

      Et le régionalisme anti-nation n’est pas soutenu depuis 300 ans par les élites anglosaxonnes ?

      Piquant que les anglosaxons qui avaient subi une sévère défaite avec Washignton, Lincoln,... ont maintenant contaminé les USA et l’UE et coulent ceux qui les avaient presque anéantis sous les dettes. 

      Seule concession, s’allier avec l’impérialisme allemand qui lui au moins est industrielle.


  • exocet exocet 14 janvier 2011 16:12

    Quelques jours après un article negatif au possible, rejetant indument la faute de la crise sur l’Allemagne,
    Michel Santi nous fait un deuxième article sur l’Allemagne, assez différent.

    On se demande ce qu’il cherche, Michel Santi ?

    Ils vous ont fait quoi, les Allemands, Michel ?


  • D'oeuf rance D’oeuf rance 14 janvier 2011 19:31

    Chaque fois que je vais passer quelques jours en Allemagne, comme ce sont les gens qui m’intéressent et non leur politique, ce que je remarque c’est que, comme ailleurs, beaucoup s’emploient à ressembler le plus possible à des bourgeois et parlent aussi pognon (moins qu’en F’rance et ce n’est pas difficile), mais le plus flagrant c’est la gentillesse des gens toujours prêts à vous renseigner, vous aider du mieux qu’ils peuvent et ça, ce serait plutôt une preuve que le morose individualisme f’rançais ne les concerne pas. Les jeunes (de tous les âges) sont, à mon sens, extraordinaires ! Voilà pour la note du peuple (pas pipole)... 

    Tiens, hommage für immer... pour l’éternité (an die Ewigkeit) !

  • fred 14 janvier 2011 23:12

    « le second exportateur mondial alors même que, en comparaison, il n’est peuplé que de 82 millions d’habitants »


    SAUF QUE

    L’Allemagne exporte vers la Chine leurs machines de productions : elle leur crée de quoi être encore plus indépendante de nous et nos technologies. Bref : elle vend ses meubles.

    C’est très différent comme croissance !

    Les politiciens locaux allemands prévoient une faillite globale des communes avant 2015 : leur situation est intenable.

    S’ils aident la Grêce etc... C’est pour protéger leurs banques également...

    Non non, même pour l’Allemagne, rien n’est rose. C’est mieux qu’aux States mais bon... Un mètre plus haut que l’autre avant la chute ?

  • amenis 15 janvier 2011 15:42

    On peut dire que Michel Santi a le don de faire tourner le lecteur en bourrique :p.
    Tout ce que je crois savoir , c’est qu’il est monétariste ...


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