mardi 11 janvier 2011 - par Frédéric Bosqué

La TVA sociale et environnementale (TVASE) : Le nouveau levier fiscal

Dans une économie mondialisée où les systèmes fiscaux sont en concurrence, où la quantité de matière première et de travail humain dans le coût d’un produit baisse au profit de l’entretien de notre modèle humain, social et environnemental, la TVASE peut se substituer à tous les revenus de l’état et devenir un levier fiscal pour plus de justice et de cohésion sociale à l’intérieur de nos frontières mais aussi sur le reste du monde.

Quand on ne sait plus où l'on va, parfois, il est bon de regarder d'où l'on vient... l'Article XIII des droits de l'homme et du citoyens de 1789 (fondement de la constitution française) nous renseigne sur quoi se fonde la fiscalité : "Pour l’entretien de la force publique, et pour les dépenses d’administration, une contribution commune est indispensable. Elle doit être également répartie entre tous les Citoyens, en raison de leurs facultés."

Cette contribution commune à donc deux fonctions : l'entretien de la force publique et les dépenses d'administration. En France, en 2010, à peu près 50% des richesses de la nation sont prélevées au titre de cette contribution (impôts, taxes et charges). Ce que l'on sait moins, c'est que cette participation est alimentée par plus de 214 formes d'impôt et de taxes.

Au delà des clivages habituels, une idée circule dans toutes les parties prenantes de notre république pour les unifier tous ses prélèvements en une seule taxe supportée non plus par les seuls revenus de la production, mais par toute transaction en monnaie créatrice de valeur ajoutée. Elle a pour nom : Taxe sur la Valeur Ajoutée Sociale et Environnementale (TVASE).

Il y a création de valeur quand, à partir de son chiffre d'affaire et une fois payée ses fournisseurs, , il reste à une entreprise de quoi financer, ses facteurs de productions (salariés, monnaie, stocks et investissements) et sa contribution à l'Etat. En effet, sans supplément de richesse, pas de revenu distribué, donc plus de prélèvements sociaux ou d'impôts qu'ils soient directs ou indirects. On pourra argumenter qu'il reste les impôts et les taxes sur le patrimoine, mais sans revenu, son propriétaire ne pourra ni l'entretenir, ni en payer l'impôt ! Par suite, excluant le prêt (transfert d'épargne), ou le crédit (création monétaire permanente ou temporaire), l'intégralité des ressources de l'état trouve son origine au niveau des ventes réalisées par l'appareil de production.

Qu'est-ce que cela signifie ? Comme l'intégralité des ventes en monnaie est issue d'une transaction monétaire, l'entretien de la force publique, les dépenses d'administration reposent en définitive sur chaque transaction en monnaie. Pour mémoire, une transaction consiste à échanger un euro contre un bien, un service, une information, une devise ou un titre de propriété immobilier (investissement matériel comme un terrain, un immeuble, une machine,...) ou mobilier (investissements immatériel comme une action, une obligation, une couverture de risque,...). Alors pourquoi ne fonderions nous pas la collecte de notre contribution commune sur chaque transaction monétaire ?

C'est la philosophie de la TVASE (1).

Cette taxe unique passerait à un taux moyen de 50% et serait payée par un citoyen lors de l'achat d'un produit, d'un service, d'une information, d'une devise, d'un titre de propriété d’un bien mobilier ou immobilier. "Les produits vont être plus de deux fois plus chers" me direz vous ! Non, puisque le taux de contribution actuel et le taux moyen de la TVASE proposé sont de 50%. Il n'y a donc ni augmentation, ni diminution de la pression fiscale, mais une nouvelle répartition.

Après la suppression des 214 formes de taxes, d'impôts et de charges, il n'y aura donc plus d'autres prélèvements sur le prix d'un produit ni de charges sur les salaires. Les impôts directs ou indirects ne pèseront plus non plus sur le pouvoir d'achat réel des citoyens. Ils n'existeront tout simplement plus. Les effets sociétaux de l'instauration d'une TVASE sont considérables (2) ;

C'est d'abord la fin du dumping social. De nos jours, lorsqu’on achète un produit, on n'achète pas que la matière 1ère, le travail et le capital qui a permis de le fabriquer, mais aussi, s’y retrouve confondu le coût de notre modèle humain, social et environnemental. il en résulte, sur nos propres marchés intérieurs, comme à l'exportation, une forte concurrence entre les entreprises qui fabriquent les mêmes produits sans supporter la même contribution au bien commun. Avec la TVASE nos produits redeviennent concurrentiel car ils quittent notre pays libre de cette taxe. Inversement, les produits étrangers vendus en France se trouvent relevés par la TVASE et contribuent à la pérennité de notre modèle (3).

L’intérêt porte également sur la suppression des niches fiscales, la simplification de la comptabilité des particuliers, des entreprises et de l'état au profit du renforcement de son pouvoir de contrôle sur les évasions fiscales. En effet, puisque tout ce qui est échangé contre de la monnaie est taxé à 50%, à part ne jamais rien acheter ou ne jamais vendre, tout citoyen paiera l'impôt. Le marché noir restera la seule façon pour un citoyen de se détourner de sa contribution commune sauf que tous les fonctionnaires du fisc n'auront plus qu'un seul impôt à contrôler !

La TVASE est aussi une façon efficace de répartir au mieux les efforts fiscaux pour respecter la deuxième partie de l'article XIII cité plus haut : " Elle doit être également répartie entre tous les Citoyens, en raison de leurs facultés.". En effet, aujourd'hui, la fiscalité pénalise l'économie réelle au profit de la sphère financière, puisque l'essentiel de la contribution commune est prélevé sur les revenus issu de la production. En prenant comme base "la transaction monétaire" sont réintégrés TOUTES les transactions, y compris les transactions financières qui composent 97% des transactions monétaires !

Mais peut-on faire payer la même TVASE qu’on soit citoyen gagnant 10 fois le smic ou citoyen sans revenu ? L'instauration d'un Revenu de Base (RdB) inconditionnel pour chaque citoyen, de sa naissance à sa mort permet cette progressivité. Nous devons cette démonstration à nos amis Allemands, défenseurs d'un revenu de base (1). Je reprends ici dans son intégralité leur calcul. Imaginons que nous fixions le revenu de base à 1000 € :

  • Celui qui n'a aucun revenu d'activité touche 1000 € de RdB... Il les dépense et paye une TVASE de 50%. Son taux est négatif de 50%
  • Avec un revenu d'activité de 500 €, il a un revenu global de 1500 €. Il les dépense et paye une TVASE de 50%. Son taux est maintenant de -25%
  • Avec un revenu d'activité de 1000 €, il a un revenu global de 2000 €. Il les dépense et paye une TVASE de 50%. Son taux d'imposition devient nul.

Ce n'est qu'à partir du double du RdB que l'on commence à payer un impôt :

  • 4- Avec un revenu d'activité de 2000 €, il a un revenu global de 3000 € moins les 50% de TVASE payée sur ses dépenses, son taux devient positif de 17%
  • 5- Avec 4000 € donc un revenu global de 5000 €, après ses dépenses et le paiement de la TVASE, son taux d'imposition passe à 30%
  • 6- Afin, avec 8000 € donc 9000 € de revenu global, une fois payé ses 50% de TVASE, son taux d'imposition arrive à 39%.... et ainsi de suite jusqu'à un maximum de 50%

Donc, La TVASE sur les citoyens est bien progressive. 

Enfin, comment ajuster cette progressivité également sur les entreprises et leurs produits ? Peut-on dans une même zone économique appliquer le même taux de TVASE à un produit qui respecte l'homme et la nature, à une entreprise créatrice de bien commun ou à une autre qui le déconsidère ? Non, assurément pas. Pourquoi ? Tout simplement en raison du fait que la destruction du bien commun et son renouvellement ont un cout aujourd'hui collectivement assumé. Seules les entreprises qui en sont responsables devraient en supporter les surcoûts, et par suite leurs consommateurs finaux.

Cet ajustement de la TVASE peut se faire en fonction de ce que l'on appelle désormais la performance globale (4) d'une entreprise. C'est à dire au moins l'équilibre des trois bilans économique, social et environnemental de son activité. La TVSAE pourrait être mesurée par une note décernée périodiquement depuis une instance indépendante, représentative de toutes les parties prenantes de son secteur d'activité, de son bassin économique et de la nation. L'AFNOR a d'ailleurs officialisé le début de cette notation grâce à la norme 1000NR.

Plus la note sera élevée moins l'entreprise aura de TVASE. Inversement, moins la note de performance globale sera importante, plus ses clients auront à s'acquitter de TVASE. L'apparente injustice qui voit les clients d'une entreprise payés pour la mauvaise performance de leur fournisseur se verra rapidement compensée par une réorientation de leur pouvoir d'achat vers de nouveaux fournisseurs plus vertueux et donc ... moins chers ! 

C'est en cela que réside la force du levier de la Taxe sur la Valeur ajoutée Sociale et environnementale : Etendre la démocratie au marché.

· (1) Pour démarrer, le très bon site d'A. Grandjean : http://www.tva-sociale.org

· (2) Le livre de Bichot pour appondir l'idée : http://minilien.fr/a0lp8k

· (3) Pour les matheux, une étude par le CREST de Stéphane Gauthier sur la neutralité de son instauration sur les comptes sociaux : http://minilien.fr/a0lp8j

· (4) sur la progressivité de la TVASE via le revenu de base, voir la deuxième partie du film le revenu de base : http://minilien.fr/a0lvjr

 (5) Le centre des jeunes dirigeants, à fait une étude importante la performance globale, voir sur http://minilien.fr/a0lp8l



14 réactions


  • foufouille foufouille 11 janvier 2011 12:04

    "Plus la note sera élevée moins l’entreprise aura de TVASE. Inversement, moins la note de performance globale sera importante, plus ses clients auront à s’acquitter de TVASE. L’apparente injustice qui voit les clients d’une entreprise payés pour la mauvaise performance de leur fournisseur se verra rapidement compensée par une réorientation de leur pouvoir d’achat vers de nouveaux fournisseurs plus vertueux et donc ... moins chers ! "
    comme la note des etats


  • Ced 11 janvier 2011 18:00

    Je suis désolé de vous annoncer que votre article n’est rien d’autre qu’un sophisme...
    Les hauts revenus continueront de payer moins d’impôts que les revenus moyens puisqu’il est bien connu et évident que les hauts revenus épargnent une part bien plus importante que les revenus moyens et à plus forte raison bas.

    Encore une fois, ce sont les revenus moyens qui auront le plus fort taux d’imposition.


    • Tribert Tribert 11 janvier 2011 18:07

      A défaut d ’etre une solution idéale, l idée d une TVASE est une proposition constructive, qui ne peut qu ameliorer la situation.
      Plutot que de railler les propositions de bonne volonté des autres, apportez des contre-propositions constructives, pour qu ’ensemble on invente un meilleur monde.


    • Ced 12 janvier 2011 10:47

      Des propositions :

      _ effectuer un vrai travail de sauvegarde/retour de l’emploi (protectionnisme raisonné par zone de même niveau de vie comme le proposais le regretté Maurice Allais) parce que le plus gros problème du pays, c’est le chomage de masse
      _ impôt confiscatoire à partir d’un certain seuil de revenu à définir
      _ réelle progressivité de l’impôt par la suppression des niches fiscales
      _ impôt sur les successions progressif et vraiment important pour favoriser l’égalité des chances et démanteler l’oligarchie actuelle
      _ revaloriser les revenus du travail pour les classes moyennes

      Voilà des propositions qui favoriseront réellement les travailleurs et les forces vives de ce pays et pas les possédants et les rentiers.


    • Tribert Tribert 15 janvier 2011 09:57

      En effet, une limite haute sur les revenus de l ordre de 10 000 euros par mois serait une solution interessante associée au RdB.
      Vous indiquez qu il faut faire un travail pour reduire le chomage de base, mais pas quoi...
      La limitation des hauts revenus aurait un effet indeniable sur le chomage.


  • guyléo 11 janvier 2011 20:17

    les choses simples sont les meilleures

    pour moi la TVASE c’est très bien mais cela ne doit pas intervenir dans l’impôt des sociétés

    bien conserver un taux différent (très bas ou nul) pour les produits de 1ère nécessité (alimentation, eaux, air...)

    le Rdb j’oublie cette idée instantanément !


  • DUCATI 11 janvier 2011 21:04

    les meilleures entrées fiscales sont l’emploi, les salaires ici en FRANCE, mais le mondialisme a des régles financières autres.


  • Christophe 11 janvier 2011 21:18

    En tant qu’ingénieur de l’industrie, et avec plusieurs collègues, je regarde ce principe depuis plusieurs années. J’ai d’ailleurs soutenu la cfe cgc essentiellement aux élections prudhommales parce qu’elle soutient cette initiative.
    La TVA sociale est assurément le seul levier utilisable par nos démocraties et notre République pour infléchir le cours des choses, et retrouver une puissance industrielle dans un monde équitable.
    Pour cela, la tva sociale doit être accompagnée d’un dépoussiérage de la fiscalité, et de la suppression de nombreuses taxes.
    Notre fiscalité pourrait être financée par un pourcentage de tva assez minime.
    Une telle fiscalité créerai un cercle vertueux créateur de richesse et d’emploi. Si l’on veut mettre en avant les principes sociaux et moraux de la république, il faut une république riche.
    Une telle taxation, très bien décrite dans l’article est assez vertueuse. On pourrait la coupler avec des crédits pour les entreprises en fonction de leur nombre d’employés. En effet, a chiffre d’affaire égal, une entreprise qui emploie avantage de main d’œuvre est plus utile socialement. C’est la fonction sociale de l’entreprise dans la nation. On devrait l’aider. cependant, l’entreprise n’étant pas morale, l’état doit la driver, s’il le souhaite. (Notre état prétend bien diriger l’économie, et l’europe également).
    Un tel système aurait tôt fait de nous pousser au plein emploi, et donc de faire une incitation à la consommation qui enrichirai les citoyens et les entreprises, et également diminuerai les dépenses des caisses de chômage..... Egalement, on ne parlerai pas longtemps d’insécurité et de problèmes des banlieues, d’intégration... ca serait plus efficace que d’y envoyer ponctuellement des crs.
    Je suis stupéfait que cette idée soit dénigrée depuis plus de 10 ans, et a peine présentée par les partis politiques y compris alternatifs. En consultant leurs sites, cet aspect est totalement indigent. Seules quelques organisations syndicales l’évoquent partiellement.
    Quand à la suppression des taxes patronales et professionelles, je m’en souviens encore, j’avais été sidéré que cela ait été évoqué par le PCF dans les années 80 !!! Depuis cela à été oublié.
    J’espérais qu’avec la crise de ns systèmes sociaux, on mettrait la question de leur financement par une telle tva a l’ordre du jour. Malheureusement non : Au lieu de poser la question du financement, on coupe les dépenses, on ne sait rien proposer pour l’emploi. c’est d’une pauvreté !
    Avec la tva sociale, ne pas oublier que la taxe d’apprentissage et la taxe professionnelle devraient être supprimées, et remplacées par la tva sociale, qui devrait être reversée aux communes et établissements d’enseignement. L’état devra gérer cette redistribution. cela pourrait être plus juste et équitable que ce que nous avons aujourd’hui, à condition que cela soit fait. Il y a de criantes inégalités sur le financement des communes.
    La tva sociale est la seule initiative capable de sauver la République et qui devrait être de tous les programmes pour 2012.
    Ce devrait être le combat de tous les citoyens d’exiger sa mise en place.


  • plastic 11 janvier 2011 22:54
    Merci à l’auteur. 
    La combinaison TVA sociale / Revenu d’existence est évidemment la piste à creuser.

    Avec un revenu d’existence « bien choisi », libre à chacun de refuser un travail absurde, dégradant ou mal payé. Il faut coupler cela avec la liberté d’entreprendre, aujourd’hui très compromise. La TVASE permet justement ceci !! et avec une meilleure trésorerie pour l’état (on peut imaginer une TVA payée quotidiennement)

    imaginez :
    - le travail humain détaxé
    - des contrats plus flexibles (car chômage/précarité n’existeraient plus)
    - une simplification administrative réelle
    Que rêver de mieux pour entreprendre ?

    Quelques remarques :
    - les 50% récupérés en taxes sont une moyenne... mais ce chiffre est très variable selon si le produit/service fait intervenir beaucoup de travail humain ou non. Comme il n’y a pas plus cher (en taxes) que le travail humain : les secteurs nécessitant de la main d’oeuvre seront avantagés, les produits fabriqués à la chaîne par des machines seront désavantagés (sauf si TVASE « sur mesure », par secteur ou types de produits)

    - l’état peut être vraiment gagnant, car moins dépendant des revenus du travail humain (qui diminue, grâce aux machines). Enfin la simplification des prélèvements ET des redistribution (via le revenu d’existence) est loin d’être négligeable en économies (fonctionnaires, systèmes informatiques, etc... )

    - Concernant la performance globale, l’idée est intéressante, il faut effectivement adapter la fiscalité en fonction de l’impact écologique notamment. Pour l’aspect « social », j’ai moins confiance en l’Afnor que dans le revenu d’existence qui offrira la liberté aux employés d’un dialogue sain avec leur entreprise (la peur du chômage fausse les rapports aujourd’hui...)

  • Christophe 11 janvier 2011 22:55

    Pour se documenter, on peut consulter par exempe le site tva-sociale.com, qui présente le sujet, avec exemple de modéle chiffré, et liste des organisations qui soutiennent l’idée.

    Dommage qu’il n’y ait pas d’essai de chiffrage sur la base du budget d’un état. (Sauf erreur de ma part)


    • Peretz Peretz 18 janvier 2011 16:25

      Etablir un revenu de base, sans l’indexer sur le travail, issue d’une taxation sur la consommation encouragerait l’oisiveté. L’assistanat instauré par le principe dit « Etat providence » a l’avantage de lier les recettes au salariat. S’en éloigner c’est tout simplement entrer dans le système américain où les aides de l’Etat n’existent pratiquement pas. On risquerait de transférer la masse monétaire de la production au bon vouloir de celui-ci et à l’avantage des société privées type fonds de pension. Attention danger ! www.voixcitoyennes.fr


  • Revenu de base 15 janvier 2011 16:33

    Revenu de base inconditionnel et REFORME FISCALE voir aussi

    http://revenudebase.free.fr/
     

    A+


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