mercredi 28 avril 2010 - par Vigie le mag de l’IE

Le web a-t-il tué le X ?

On le sait, l’industrie culturelle a du mal à trouver sa place dans le modèle de la gratuité imposé par internet. Les grandes majors de la musique en font les frais depuis quelques années, peut-être au profit des petits labels indépendants qui arrivent plus facilement à faire percer leurs artistes. Avec le web 2.0, cette tendance à la gratuité culturelle s’est généralisée, les internautes devenant à la fois créateurs et consommateurs, et voire plus si affinités...

Bien que le piratage de film soit lui aussi courant, on imagine difficilement des acteurs anonymes proposant leurs propres créations cinématographiques sur internet. De même, l’on n’imagine pas Youtube ou Dailymotion faire de l’ombre à l’industrie du cinéma ; industrie qui s’en sort même plutôt bien cette année, avec un record de fréquentation. Oui mais, c’est qu’il y a cinéma et … cinéma !
 
En effet, dans cet optimisme ambiant d’une industrie qui se porte au mieux, le tableau n’est pas tout rose. Et, paradoxalement, c’est le cinéma du plaisir qui fait la tête. L’industrie traditionnelle de la pornographie, celle des DVD et des studios de production, a vu ses revenus chuter d’un tiers l’année dernière. A qui la faute ? comme d’habitude, le doigt se pointe sur le web 2.0, père du porn 2.0.
 
Ahhh… euh, le porn 2.0, c’est quoi déjà ?...
 
Au niveau du contenu, le porn 2.0 c’est d’une part la vidéo pornographique où l’internaute cesse d’être un simple spectateur pour devenir un véritable acteur et créateur de contenu sur Internet, et d’autre part la capture et la diffusion de courtes scènes provenant de films X professionnels. Dans la forme, c’est le modèle de Youtube, à savoir des vidéos en streaming, totalement gratuites, mises en ligne par les internautes eux-mêmes. Aujourd’hui, les sites les plus importants proposent plusieurs centaines de nouvelles vidéos par jour. De plus, la variété des pratiques sexuelles que l’on retrouve dans ces vidéos est assez large pour contenter les différents publics du porno traditionnel (gay, fétichisme, milf…)
 
Le même problème que l’industrie musicale, 5 ans après
 
La gratuité, c’est encore par là que le bât blesse. Sur le modèle du piratage musical, où l’internaute peut télécharger des titres grâce à la dématérialisation du support (mp3) qui abolit la frontière du physique dans la transmission des fichiers, l’internaute peut aussi capturer des scènes de films et les passer dans un format numérique. Et comme c’est le cas des pirates musicaux qui ne téléchargent souvent que quelques titres d’un album, les pirates des films X ne capturent souvent que de courtes scènes clefs. Ces scènes se retrouvent ensuite en streaming sur les sites dédiés et surtout, gratuits.
 
Les bénéfices consommateurs du porn 2.0
 
Le fait est qu’internet et le numérique sont particulièrement bien adaptés à la consommation du porno. Au-delà de la gratuité, c’est aussi le respect de l’anonymat qui favorise sa consommation : les sites 2.0 ne demandent pour la plupart aucune information personnelle.
Ensuite, le porno, comme tout genre culturel, obéit également à des phénomènes de mode. Actuellement, c’est le « gonzo » c’est-à-dire le porno amateur qui suscitent le plus d’intérêt. Il s’agit de vidéos où les acteurs sont des amateurs qui filment leurs ébats personnels. Il représente 80% du marché pornographique sur internet. Ainsi, cet attrait pour le gonzo ne fait évidemment que renforcer le phénomène du porn 2.0, et contribue à la chute de l’industrie du X professionnelle.
 
Un cas paradoxal
 
Parent pauvre d’une industrie cinématographique au beau fixe, la pornographie est aussi le secteur qui se développe le plus rapidement sur internet. Près d’un quart des requêtes effectuées sur les moteurs de recherche lui sont liées. Et encore une fois avec le modèle 2.0, c’est avant tout le consommateur qui en profite, pas l’industrie. Mais il est sans doute trop facile d’accuser le web 2.0 d’être responsable du malheur des productions professionnelles. Tout d’abord, le gonzo, considéré comme un sous genre honteux par la grande famille du X, n’a pas été pris suffisamment en considération alors que celui-ci était, il y a déjà 15 ans, un signal faible de l’évolution de la pornographie. Ensuite, beaucoup considèrent que les productions professionnelles sont aujourd’hui trop peu qualitatives, et que leur prix ne se justifie plus aux yeux du consommateur.
Toutefois, malgré son succès, le business model du Porn 2.0 reste fragile : le coût de la bande-passante de ces sites, qui peut aller jusqu’à plus de 3 téraoctets par jour, n’est guère couvert par les revenus générés par la publicité. D’un point de vue intellectuel, le Porn 2.0 est aussi accusé d’accentuer indirectement les dérives de la pornographie en ligne (en favorisant l’impossibilité de vérifier l’âge des internautes par exemple), de violer les droits d’auteurs et de ne pas respecter le consentement des personnes dans la diffusion des vidéos.
 
Le porn 2.0, et après ?
 
Les malheurs de l’industrie du X prêtent facilement à sourire. Mais se serait oublier trop facilement et sans doute trop niaisement l’histoire commune que le X entretien avec le cinéma… né en même temps que les premiers films, le porno a balisé l’évolution du cinéma : il a amorcé l’ère du VHS, du DVD puis du Blu-Ray et de la caméra numérique. La situation actuelle, qui a conduit le célèbre Larry Flint à demander au Président Obama d’inclure l’industrie pornographique dans son plan de sauvetage économique (le fameux Stimulus Package…), est-elle elle aussi annonciatrice de l’avenir du cinéma ?
 
 


18 réactions


  • Ploucman 28 avril 2010 10:53

    « (1 To faisant 1012 octets) »

    Ou pas ...


    • T.REX T.REX 29 avril 2010 14:34

      Mais tourner dans une vidéo XXX n’est-il pas une forme de prostitution moderne !

      Les « Modèles » louent leur corps à un cinéaste-proxénète qui en dispose selon son imagination en leur faisant subir les derniers outrages par des mecs bien montés (qui eux contrairement aux clients sont payés pour ça ! C’est la bonne planque !) qui servent de vecteur au plaisir par procuration du client final (qui lui paie sa place ou son film !) 

      Je trouve pas ça beaucoup plus reluisant et j’espère que les salopes qui tournent là dedans y prennent plus de plaisir que les travailleuses de l’ombre qui arpentent courageusement le trottoir ! En tout cas, à leur place j’aurais honte et je ne leur reconnais aucune respectabilité ! 


  • LE CHAT LE CHAT 28 avril 2010 12:49

    Est ce que Katsumi fait partie de la liste des soutiens Hadopi ?  smiley


  • sleeping-zombie 28 avril 2010 13:26

    @l’auteur

    Tu confonds amateur et gonzo.
    le gonzo est une mutation que le cinéma X « traditionnel » a opéré pour lutter contre la concurrence des productions amateurs (lesquelles sont diffusées gratuitement et sans notion de droits d’auteur). A ce titre, le gonzo se caractérise par des productions a très bas cout, sans décors ni scénario.

    Mais le gonzo ne s’oppose pas à l’industrie X professionnelle, comme tu sembles le souligner.

    Un parallèle avec un cinéma de meilleur qualité serait « le projet blair witch ». C’est pas un film amateur, même s’il a pas couté grand’chose a produire. Si demain les studios d’Hollywood décident qu’il vaut mieux produire 1000 « blair witch » qu’un seul Avatar, parce qu’au final ça rapporterait plus, on dira pas que les films de vacances amateurs ont tués le cinéma...


  • saint_sebastien saint_sebastien 28 avril 2010 13:28

    mouais , le porno devrait être gratuit ...

    Sinon ya peut être aussi un nouveau problème , tout le monde fait du porno , partout , et même gratuitement , donc comme la musique à un moment donné forcément ya tellement d’offre , que si les prix ne baissent pas , les consommateurs achètent moins.
    Sans parler du porno gratuit , fait maison mit en ligne par certains couples eux même.

    Comme les zicos les acteurs devront faire du live , via webcam ou strip tease en club , voir prostitution directe ( qui a toujours existée dans le milieu du X ) , les films n’étant que des cartes de visite.

  • fifilafiloche fifilafiloche 28 avril 2010 18:07

    La question de base est la suivante : qu’est ce qu’un nouveau film pornographique apporte de plus que les versions précédentes. Sa fonction est essentiellement onaniste, l’ancien sert de façon tout aussi efficace que le nouveau. Comme le montrent les sites gratuits, tout a déjà été exploré, fouillé dans un domaine somme toutes limité. Le marché est à saturation et son avenir est derrière lui.


  • Dragoncat Dragoncat 28 avril 2010 20:46

    @ l’auteur et à sleeping-zombie

    Pour correction.
    Le gonzo, comme le souligne sleeping-zombie, n’est pas du tout le cinéma X amateur. C’est un raccourci et une erreur nette.

    Le gonzo a été initié aux US par des producteurs comme John « Buttman » Stagliano - à l’époque hardeur et producteur, connu pour son amour des croupes féminines.

    Le gonzo se définit aujourd’hui en opposition aux « features », ces films X à gros budget qui singent, souvent maladroitement, le cinéma traditionnel.

    Cela ne veut pas dire pour autant que le gonzo soit fait à bas coût. Il peut demander un investissement significatif (pour ce type de prod’) sur les actrices, les décors, le make-up... Mais il se définit avant tout par une absence de scénario d’une part, et par des performances sexuelles plutôt agressives et spectaculaires d’autre part.

    Partant de là, les films peuvent être fait à bas coût ou pas.

    Et @ fifilafiloche

    Votre intervention montre une méconnaissance profonde (sans jeu de mot) de ce marché et des motivations des consommateurs. Vous avez raison sur un point : un nouveau film n’apporte souvent rien de plus que le précédent. Mais si cela avait du tuer ce marché, il serait mort depuis des années.
    Les consommateurs occasionnels, réguliers ou frénétiques ont un énorme besoin de renouvellement : nouveaux visages, nouvelles situations, nouvelles ambiances... Voilà qui explique le fait que ce marché perdure au-delà de toute logique.

    Une anecdote : contrairement à la plupart des grands marchés touchés par les attentats 9/11, le X US, notamment sur Internet, s’est relevé du crach économique en... Trois mois. C’est à dire que les chiffres de vente des principaux sites étaient redevenus normaux dès janvier 2002. Ca laisse à penser à quel point les besoins qui génèrent ce marché sont viscéraux.

    Cordialement,

    Dragoncat


  • Cogno2 29 avril 2010 09:54

    Faut dire qu’en général les films de cul sont nullissimes, c’est souvent de la boucherie, un pilonnage par un gourdin improbable d’une blondasse siliconée en talon et bas résille.
    Perso ce genre de machin ne me fait aucun effet.


  • Deneb Deneb 29 avril 2010 10:07

    Le Net va tuer le porno. Ben voyons.

    Ne craignez rien. Comme dans le cinéma, il y a une ancienne génération qui campe fermement sur leur « bussiness model » écoulé et obsolet. Comme la réalité casse sans cesse leurs illusions et leurs croyances, ils ne sont pas très contents. Et la bête blessée fait souvent preuve d’une agressivité irraisonnée.


  • eric 29 avril 2010 10:08

    Sujet passionnant parce qu’il permet de toucher un peu du doigt les aspects le plus souvent cachés de la société, de l’existence. Comme les ventes de pay per view dans les hôtels en son temps par exemple. Ainsi on découvre la fascination des américain pour la « féminitude » ou la « masculinité » étrangère et cela pose plein de question sur l’état actuel des rapports hommes femmes aux EUA.
    L’université de Toulouse le mirail donne quelques aperçus sur le phénomène, mais très convenus et politiquement correcte ( en gros, c’est la faute de macho qui ne supporterai pas l’émancipation féminine des capitalistes et... de Sarkozy...).
    Je me souviens que dans les début de l’internet, non seulement le X était le plus gros générateur de trafic, mais proposait aussi les seuls sites qui gagnaient de l’argent.
    Il fut un temps, comme le dit l’article, ou était proposé de courts extrait, les films eux mêmes étant payants.
    J’ai regardé, et effectivement quelque chose à changé. Désormais, l’ensemble de toute la production possible, passée et présente est disponible in extenso, et pas seulement de cours extraits, sur le net en accès direct et gratuit. On a du mal à comprendre le modèle économique. Il est parfois proposé de payer pour une éventuelle meilleure qualité, mais celle ci est déjà très correcte et tant sur le fond que dans la forme, la qualité du porno.... En revanche, si il n’y a pas de pub commerciales, malgré l’importance du trafic, il y a des pubs pour des rencontres.
    Je ne vois qu’une explication, qui serait que tous ces films sont mis en ligne comme produits d’appel pour de la prostitution. (mais si quelqu’un a une autre idée, cela m’intéresse). Mais je n’ai pas essayé de répondre à ces sollicitations très insistantes et je ne peux rien affirmer.

    Au cas précis, l’industrie serait victime non pas tant de l’internet mais d’une utilisation de ses produits par un secteur illégal et souvent criminel.
    Cela expliquerait, la chute des revenus du X, la hausse de la prostitution tous azimut.

    Comme le X a toujours été en avance sur tous les autres secteurs sur le net, cela donne peut être un aperçu des développements ultérieurs possibles par exemple pour le cinéma. En l’Etat, une mort annoncée ou une étatisation ? Si le film devient un bien public pur avec une gratuité totale, alors seul l’État pourrait encore être susceptible de financer des productions ?
    A quand un grand service public laïque unifié de la production X ?


    • Krokodilo Krokodilo 29 avril 2010 11:31

      Votre explication est la plus plausible, la diffusion gratuite d’extraits ou de l’intégralité de vieux films pornos, ou d’amateurs récents doit être publicitaire pour attirer de site en site vers des produits payants, probablement tous illégaux, type SM non simulé, très jeunes filles ou pédophilie. Effectivement, ça a dû faire beaucoup baisser la vente des pornos des débuts de Canal plus, genre Dorcel.
      Il faut dire que, comme dans la prostitution où les call-girls de luxe (cf autre article) sont l’exception, chaque euro investi dans ce milieu est un soutien à des crimes et des criminels.


    • S. Cosmicoïd 29 avril 2010 12:09

      J’APPELE DUTRONC ET JE METS MON SLIP EN FONTE SUR LA TETETE.


    • T.REX T.REX 29 avril 2010 14:40

      à éric...tile ?

      Le développement ultérieur ???

      Tu voulais sûrement dire le développement du postérieur !! 


  • Cogno2 29 avril 2010 10:10

    Parait que mon commentaire n’est pas politiquement correct et que j’aurai du dire :

    « Il convient de souligner que la règle générale, pour un film classé X, est d’afficher une succession incohérente de scènes de copulation mécanique frolant le choquant, irréalistes tant par le contexte que par la physionomie des acteurs, au détriment de la vraissemblance. Ces oeuvre n’éveillent aucunement ma libido, et je partage ce sentiment. »

    Un pote m’a dit avoir vu un reportage y a une dizaine d’année sur une metteuse en scène et une réalisatrice, qui s’étaient inspiré de ce qu’attendraient les femmes d’un porno, pour concevoir des films adaptés à leurs fantasmes.
    Les gens avaient l’air de trouver ça révolutionnaire
    Non parce que le public du porno de base, c’est quand même le camionneur mâle.


    • eric 29 avril 2010 11:50

      A cogno, cliché et préjugé. Sur le net, j’imagine que personne ne sait, mais sur les pay per view dans les hôtels internationaux haut de gamme pour business men, ll est clair que la clientèle camionneur de base était quand même assez minoritaire, or, déjà à l’époque, le x constituait l’essentiel des revenus.


  • Christoff_M Christoff_M 1er mai 2010 02:32

    Trop de porno a tué le sexe et le désir...

    Et le web véhicule ce qu’il y a de pire et de plus nauséabond...

    La quantité et la multiplicité n’amènent pas la qualité, mais la quantité bas de gamme ( toujours soldée !!)... et la vulgarité, on est bien loin des premiers Dorcel ou Emmanuelle qui passeraient presque pour des œuvres classiques, tellement les films actuels sont médiocres !!

    Nous sommes en pleine décadence de l’Empire, et sous prétexte de libération on nous balance tout et n’importe quoi, c’est comme le bio dans la bouffe !!!

    Demandez vous pourquoi les générations qui arrivent se remettent à la boisson...

    Et le tabou ??? que faire si l’on peut tout avoir et rien imaginer.... demandez vous pourquoi la drogue et


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