mardi 15 novembre 2011 - par Catherine Segurane

Les banques françaises spéculent sur la dette française (le JDD)

"Selon nos informations, des banques et assureurs français ont vendu plusieurs milliards d'euros de dette française ces derniers jours."

C'est ce que j'ai lu avec stupéfaction dans le JDD du 13 novembre 2011, édition papier, page 20.

Il s'agit d'un simple encadré de deux colonnes et d'une vingtaine de lignes. 

Le titre :

"Les banques spéculent sur la dette française."

Dans le corps de texte, nous apprenons qu'il s'agit de banques et de compagnies d'assurance françaises :

"Selon nos informations, des banques et assureurs français ont vendu plusieurs milliards d'euros de dette française ces derniers jours. Des mouvements qui ont poussé les taux d'intérêts à la hausse (3,4 %) et provoqué l'inquiétude des marchés."

En réalité, il ne s'agit pas d'une adjudication du Trésor qui se serait faite à 3,4 %. Nous sommes bien évidemment sur le marché secondaire. L'Etat ne paiera pas 3,4 % : il paiera comme prévu le taux auquel il a placé ses obligations à l'origine.

Explication : si j'emprunte 100 euros à mon banquier A au taux de 3 %, je lui paierai annuellement 3 euros d'intérêts.

S'il revend mon crédit à un banquier B à 90 euros (c'est ce qu'on appelle : le marché secondaire), je ne suis pas partie prenante, et je continue de payer 3 euros d'intérêts et de devoir mon capital de 100 (au banquier B). Pour moi, donc, ma dette est à 3 %

Mais, vu que le banquier B a payé 90 euros ma dette de valeur faciale 100, elle lui rapporte plus de 3 % par rapport aux 90 euros qu'il l'a payée. Elle lui rapporte 3-virgule-quelque-chose pour cent.

Si ma dette est à 3% pour moi, et rapporte 3-virgule-quelque-chose pour cent au banquier B, c'est parce que le banquier B a fait une bonne affaire au détriment du banquier A. Pour moi, rien n'est changé.

Du moins en arithmétique pure. En réalité, la rumeur joue là dessus un rôle néfaste ; elle diffuse le taux de 3-virgule-quelque-chose comme si c'était un taux primaire et non un taux recalculé. Le préjudice d'image est important ; il peut affecter à la hausse les taux auxquels je pourrai placer dans le futur mes vrais emprunts sur le marché primaire ; il met en danger le fameux AAA.

Et tout ça pourquoi ?

Quels besoins avaient ces banquiers et assureurs français de se défaire de titres d'emprunt français ? Le JDD nous répond :

"En réalité, ces établissements ont vendu des bons du Trésor français pour réaliser une plus-value. Une manière de compenser les pertes enregistrées après s'être délestées de dette italienne. Ces banques "n'expriment pas une défiance vis-à-vis de la dette française" assure un banquier. Certaines auraient même cédé un peu de dette allemande. BNP Paribas et l'assureur Groupama ont participé à ces opérations ces derniers jours. La banque a vendu un milliard d'euros de dette française sur les 14 milliards qu'elle détient, mais elle en a aussitôt racheté, profitant de meilleurs taux d'intérêts."

Donc : nos amis banquiers revendent des bons du Trésor avec plus-value, cela en fait baisser le cours sur le marché secondaire, et ils rachètent ces mêmes bons du Trésor moins cher. Elle est pas belle, la vie de banquier ?

Pendant ce temps, pour sauver ce fameux AAA que nos banquiers mettent en danger, le gouvernement ne sait que nous demander de nous serrer la ceinture.

S'il avait un peu de combativité pour défendre les intérêts de son peuple, il profiterait de la situation pour racheter sa dette moins cher.

En effet, si un banquier A croit malin de vendre 90 un titre qui vaut 100, assumant une moins-value de 10, c'est, pour le client endetté, une excellente occasion de se libérer d'un crédit valant 100 en ne payant que 90. C'est une super-occasion de faire une bonne affaire. Mais encore faut-il avoir l'esprit tourné vers ses intérêts et vers le désir de faire une bonne affaire. Etat d'esprit qui manque totalement à notre gouvernement, qui au contraire, lorsqu'il s'agit des intérêts de son peuple, semble animé d'un esprit de sacrifice sans bornes.



17 réactions


  • Robert GIL ROBERT GIL 15 novembre 2011 10:43

    La seule solution est l’annulation de la dette publique, l’expropriation des
    banques et des sociétés de finance pour constituer un service bancaire
    unique sous contrôle de la population. La dette est illégitime, son
    remboursement aussi !

    Tout le reste est de la poudre aux yeux........


  • Ansheos 15 novembre 2011 10:55

    Racheter sa dette moins cher ? Mais pour racheter sa dette moins cher, il lui faut s’endetter... Allons...
    Avouez, vous pensez à rembourser vos emprunts en faisant un crédit, de temps à autre, non ?


  • Peter 15 novembre 2011 14:43

    Salut,
    Deux solutions pour les banques :
    - On les laisse couler et ensuite on les acquière pour 1 €. Ce n’est pas utopique, c’est ce qui a été fait en Islande et suite à un referendum en plus... Depuis le pays se porte comme un charme.
    - On les rachète maintenant (il y en a pour environ 30 Milliards d’euros pour détenir plus de 50% du capital des 4 banques Françaises (je ne vais pas les renommer) et ensuite nous prenons les dispositions qui vont bien et à commencer par le licenciement pour faute grave des dirigeants actuels...

    Voilà deux solutions qui sont simples à mettre en œuvre, il faut juste de la volonté politique...

    A+ et prenez soin de vous

    Peter


  • Clavdio 15 novembre 2011 17:19

    C’est du trading tout ce qu’il y a de plus académique : vendre plus cher pour acheter moins cher.

    C’est une "revente de crédit« au même titre que l’on peut faire un »rachat de crédit" (immobilier par exemple) avec la subtilité que dans le cas qui nous concerne, c’est la banque détentrice du crédit qui initie l’opération de revente.

    Contrairement aux taux pour les particuliers, les crédits faits aux Etats ne sont pas indexés sur le taux (variable) de la banque centrale, puisque le BCE ne prête pas au préteur (contrairement a un taux pour un particulier ou l’argent est obtenu depuis la BCE).
    Ceci implique que le rachat de crédit dont les particuliers peuvent bénéficier pour leur crédits (a la consommation ou immobilier) n’existe pas pour les Etats.


    L’analyse du gars est fallacieuse et négative (donc typiquement française de ce point de vue) : si ça se vend sur le marché (secondaire), c’est que le produit est considéré fiable par ce marché.
    Ce domaine est réservé aux vrais financiers, qui savent quoi en penser, alors que les particuliers inexpérimentés comme notre auteur financier en herbe pensent avec son coté émotionnel : la banque essaye de se débarrasser des dettes françaises.

    Il dit aussi que le gouvernement devrait racheter sa propre dette. Ça s’appelle un remboursement anticipé, et pour cela il faut avoir l’argent !!!
    De plus, si le gouvernement Français remboursait aujourd’hui, il y perdrait pour avoir payé des intérêts pendant quelques années sans pouvoir bénéficier de l’effet de levier escompté par un crédit a long terme.

    -eric

    • bigglop bigglop 15 novembre 2011 19:03

      Bonsoir,
      Qui s’aventure à faire un cours sur les CDS (credit default swaps) et plus particulièrement sur les dettes souveraines ?
      I have a headache


    • Marc Bruxman 15 novembre 2011 19:59

      il ne faut pas oublier les CDO c’est cela qui file le plus mal au crane. Surtout les CDO synthétiques... Hum... Miam Miam...

      http://fr.wikipedia.org/wiki/Collateralised_debt_obligation

      Et il ne suffirait pas que de faire un cours sur les produits dérivés mais surtout expliquer leur vrai rôle dans l’économie. Et expliquer pourquoi à cause de la mauvaise maîtrise du risque de contrepartie cela n’a pas fonctionné. Parce que si tous les produits dérivés disparaissaient demain, cela créerait une vrai crise de liquidité à l’échelle mondiale.

      Plutôt que d’exiger des banques qu’elles arrétent les dérivés de crédit, il aurait mieux valu leur imposer la mise en place de managers qui les comprennent. Car souvent à part les quants qui ont bossés sur ces produits, les cadres des grandes banques n’en ont pas compris le fonctionnement. Et c’est cela qui conduit à de mauvaises décisions.


  • Ptetmai 15 novembre 2011 17:25

    Tous des banksters et à la BCE encore plus

    Au service du CFR et du Bilderberg et leurs spéculateurs qui savent mieux que nous ce qui est bon pour nous 


  • Marc Bruxman 15 novembre 2011 19:53

    Il faut savoir ce que l’on veut. D’un coté on demande aux banques d’augmenter leur ratio de fonds propre (cf accords de Bale 3) et de se délester des actifs risqués, de l’autre on souhaite qu’elles achétent des titre de dettes certe labellisés AAA mais qui ne sont pas plus sur que les CDO indexés sur les subprimes d’antan.

    En réalité (de mes sources venant de personnes travaillant dans la banque) la banque a qui l’on demande de diminuer ses risques et notamment son exposition à la dette souveraine fait ce qu’elle a à faire et s’en déleste petit à petit. Rien d’étonnant ni de choquant.

    Et sinon effectivement un titre de dette peut se revendre sur un marché secondaire. Les adjudications sont faites sur le marché primaire auquel seul une poignée d’acheteurs participent et après le titre de dette (obligation) est librement cessible. Tant que ces cessions ont lieu c’est bon signe, cela prouve que la dette française a encore de la valeur. Le jour ou ce marché se « bloque » vous hurlerez de joie que l’on ne spécule plus, mais la conséquence la plus directe sera que les prochaines ajudications risquent de ne pas faire « sold out ». Et la conséquence serait dramatique puisque cela signifierait la faillite virtuelle de la France. (Bien sur la BCE déciderait alors de financiariser la dette en achetant des obligations mais cela ne réglerait pas le problème de fond).


  • BA 15 novembre 2011 21:06

    Mardi 15 novembre 2011 :

     

    Le Trésor espagnol a émis mardi pour 3,158 milliards d’euros de bons à 12 et 18 mois, à des taux d’intérêt en très forte hausse par rapport à la dernière opération similaire, souffrant d’un effet de contagion dans un climat de tension élevée en zone euro.

     

    L’Espagne a dû concéder un taux de 5,022 % pour les bons à 12 mois, et 5,159 % pour ceux à 18 mois, contre moins de 4 % dans les deux cas pour la dernière émission, le 18 octobre 2011, a annoncé la Banque d’Espagne.

     

    Le niveau atteint mardi est un record depuis 2000, selon les médias espagnols.

     

    Conclusion :

    Les investisseurs internationaux n’ont plus aucune confiance dans la capacité de l’Espagne à rembourser ses dettes.

    L’Espagne emprunte à des taux d’intérêt de plus en plus exorbitants.

    L’Espagne va bientôt demander l’aide du FMI et de l’Union Européenne.

     

    http://www.romandie.com/news/n/_ALERTE___L_Espagne_emet_3158_mds_EUR_de_bon s_a_12_18_mois_taux_au_dessus_de_5151120111111.asp


  • moebius 15 novembre 2011 22:20

    20 ans, c’st le nombre d’annéesqu’il a fallu pour effacer la dette des pays africain. 20 ans de radinerie, de bétisse grasse,de plan débiles alors que tous savait que ces pays ne pourraient jamais payer. 20 longues années de barbarie de meurtre de misére. Et combien d’année pour remonter cette pente gluante de saloperie et de bon sentiment, de générosité, d’humanité et de compétence technique et qui n’était au final que l’aveuglement de l’ idiot global qui nous gouverne. 0 ans pour se rendre à l’évidence de ce que nous savons nous maintenant et que ces connards traduisent dans ce pays par du défaitisme et du sentiment anti français. 20ans de connerie de débat futile, d’avis d’expert, d’hyppocrisie avant de se rendre à l’évidence.


  • moebius 15 novembre 2011 22:23

     ; Pardon « 20 » ans pour se rendre à l’évidence...


  • ddacoudre ddacoudre 15 novembre 2011 23:35

    bonjour catherine

    tu viens de découvrir, le principe qui a conduit aux subprimes.
    en plus c’est grâce à nos dépôts.
    http://www.agoravox.fr/ecrire/?exec=articles&id_article=104206.
    ddacoudre.over-blog.com .
    cordialement.


    • ddacoudre ddacoudre 16 novembre 2011 10:29

      bonjour lloreen

      on est bien d’accord, dans des articles j’expliques l’impossibilité de rembourser la dette et la nécessité de retourner au pouvoir régalien de la BCE si l’on veut sauver l’euro et l’europe.

      ddacoudre.over-blog.com .
      cordialement.


  • karina 16 novembre 2011 12:01

    Crise Euro dette Incapable de trouver des investisseurs, le FESF achète sa propre dette. 


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