vendredi 23 septembre 2011 - par Eric Lombard

Pacitel, un nouveau patch antipub

Cibles de campagnes publicitaires ou de démarchages commerciaux, les consommateurs sont très exposés à des attaques plus ou moins intrusives. Mais c’est à eux que revient la tâche de se protéger. Quelle sera l’efficacité de la nouvelle arme contre le démarchage téléphonique ? Pourquoi les professionnels nous l’offrent-ils ?

L’ouverture au public le 20 septembre 2011 du site pacitel.fr est le résultat des travaux d´un groupe de travail mis en place en 2010 par Hervé Novelli, alors ministre chargé de la consommation. Il est composé des principales fédérations professionnelles du secteur de la prospection et de la vente par téléphone : l´Association française de la relation client (AFRC), la Fédération de la vente directe (FVD), la Fédération de la vente à distance et du e-commerce (FEVAD) et la Fédération française des télécommunications (FFT).

« Opt-out » contre « opt-in »

Le principe est simple : en inscrivant son ou ses numéros de téléphone sur pacitel.fr, chacun d’entre nous peut espérer échapper aux 80% d’entreprises adhérentes au dispositif. La protection ne sera opérationnelle que le 1er décembre 2011, le temps pour les professionnels de mettre en place les moyens d’expurger leurs listes de prospection. En présentant le nouveau dispositif, Frédéric Lefèbvre, secrétaire d’Etat chargé de la consommation, a annoncé que la consultation de cette liste d’opposition par l’ensemble des entreprises françaises sera rendue obligatoire. Un amendement en ce sens (CE 435) a été adopté par la commission des affaires économiques de l’Assemblée nationale lors de l’examen du projet de loi renforçant les droits, la protection et l’information des consommateurs qui devrait être examiné fin septembre 2011.

La constitution d’une telle liste répond au principe dit de l´« opt-out » [*], puisque ce sont les abonnés qui doivent effectuer une démarche pour protéger leurs données personnelles. Il existe déjà aux Etats-Unis sous le nom de do not call registry.

Mais, confrontés à l’exaspération croissante de leurs mandants, plusieurs élus souhaitent aller plus loin et introduire dans la loi le principe de l´« opt-in ». Dans ce schéma, ce sont les opérateurs qui devraient recueillir l’assentiment des abonnés à être contactés par des sociétés de télémarketing. Ainsi, par défaut, tous les consommateurs seraient protégés, et seuls ceux ayant coché une case à la signature de leur contrat (ou plus tard) seraient susceptibles d’être appelés. Deux propositions de loi ont été déposées en ce sens : l’une le 11 mars 2011 par le sénateur RDSE Jacques Mézard, l’autre le 22 juin 2011 par le député UMP Marc Le Fur.

Ceci pourrait expliquer l’empressement des professionnels à faire preuve de bonne volonté face à la menace que les Français disent massivement non au démarchage téléphonique.

Par leur intégration au dispositif Pacitel, les entreprises s’engagent également à suivre des recommandations déontologiques (Recommandations_Pacitel.doc), telles que le respect de certaines heures convenables pour passer les appels (du lundi au vendredi de 8h à 20h30 et le samedi de 9h à 19h), la courtoisie et clarté de présentation, la garantie d’un environnement socialement responsable.

Pacitel en pratique

L’inscription est gratuite, mais n’est valable que 3 ans. On peut inscrire jusqu’à 6 numéros, fixes et portables, en certifiant sur l´honneur être le titulaire des lignes. Le nom de l’abonné n’est pas demandé, il suffit de fournir un email pour que l’inscription puisse être confirmée.

Le site permet également de signaler des « appels non désirés ». A noter que l’inscription à Pacitel n’empêche pas les appels émanant d’entreprises « que vous avez sollicitées ou dont vous êtes déjà client ». Pacitel ne protège pas non plus des spams SMS. Il est plus efficace que la « liste orange », qui ne fait qu’interdire aux opérateurs de téléphone de vendre les coordonnées de ceux qui s’y inscrivent.

[*] "to opt out" signifie "décider de ne pas participer", "to opt in", "décider de participer"

Cet article est également paru sur Ouvertures.net, partenaire d'Agoravox, avec un tableau récapitualtif des moyens de défense contre la pub dans d'autres domaines que le téléphone : courrier, web, affichage...

Crédit photo MIgraciónTOtal



5 réactions


  • jpeg06 23 septembre 2011 11:26

    merci du renseignement


  • joelim joelim 23 septembre 2011 20:09

    Pour s’inscrire il faut donner son numéro.... Qui sera disponible en pratique pour toutes les sociétés de démarchage, pour qu’ils vérifient s’ils peuvent l’appeler ou pas.

    D’ici à ce que certaines s’en servent pour leur démarchage (comme la liste orange) il n’y a qu’un pas.

    Pour s’extirper des marchands de cuisine, une seule solution : abandonner son numéro de france telecom (en allant chez free par exemple, sans garder son numéro, surtout).


  • louviellas louviellas 25 septembre 2011 16:37

    Que des opérateurs télécoms ou des FAI jouent avec nos données personnelles, sous le regard éteint de la CNIL, passe encore.

    Mais lorsque l’État Français, dans un grand élan démocratique, promulgue l’Arrêté du 11 avril 2011 afin de vendre au plus offrant les données figurant sur les cartes grises de nos véhicules, là, j’enrage.

    Le fait de voir la boîte mail de ma voisine envahie de spams depuis qu’elle a changé de voiture confirme que le système fonctionne bien.

    L’habileté de certains d’entre nous à protéger leur navigation sur Internet ne doit pas nous faire oublier que nos soucis de sécurisation sont bien éloignés des pratiques courantes.

    L’intention de créer un site Internet pour contrer le démarchage abusif n’est pas si mauvaise en soi.

    Par contre, je n’écarte pas l’idée que le piratage de la base de données ainsi constituée n’éveille pas des tentations lucratives.

    Qui peut voler un bœuf (cf Wikileaks) peut voler un œuf (morale à 2 €).


    • Eric Lombard Eric Lombard 25 septembre 2011 20:46

      Intéressant, je ne savais pas que l’Etat commercialisait les données des cartes grises. A quand la vente des fichiers des mariages, des impôts sur le revenu... Quand on dépasse les bornes, y a plus de limites !
      Mais dites-moi, votre voisine, elle a dû donner son mail pour sa carte grise ?


    • louviellas louviellas 27 septembre 2011 14:35

      « Mais dites-moi, votre voisine, elle a dû donner son mail pour sa carte grise ? »

      Estimant avoir été à la limite du hors sujet, je ne vous ai pas conté l’histoire par le menu :

      Le concessionnaire a offert la carte grise et en a fait lui-même la demande par Internet.
      Ma voisine n’étant pas de nationalité Française et le commerçant ne parlant pas un mot d’Anglais, certains documents (copie du passeport, etc.) lui ont été envoyés par mel, depuis l’ordinateur de ma voisine, mais également depuis celui de mon épouse, qui n’a pas acheté de voiture depuis une dizaine d’années.

      Or, ce sont les deux boîtes mail qui ont été spammées simultanément par des offres similaires de constructeurs d’automobiles, ce qui m’a fait dire que le système fonctionnait bien, les adresses ayant été forwardées à la Préfecture.

      Compte tenu de l’intérêt que vous portez à un Internet démocratique, voici un lien qui devrait vous intéresser.


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