Pourquoi le dollar monte... et le déficit américain baisse ?
Vous aviez peut-être remarqué, en fin d’année dernière, que les Etats-Unis avaient donné des facilités fiscales à leurs entreprises pour rapatrier des fonds de tous les pays du monde, dans lesquels ces entreprises avaient des filiales, vers les Etats-Unis.Le but, louable semble-t-il, était de combler le trou béant de la dette américaine, et donc de faire remonter le dollar. A ce titre, les Européens en étaient satisfaits, puisque la faiblesse du dollar et la force corrélative de l’euro gênaient beaucoup les entreprises européennes -dont françaises- dans leurs exportations. Elles favorisaient également les importations, et en particulier celles de Chine, dont la monnaie était liée au dollar par un taux fixe.
La raison pour laquelle les entreprises américaines conservaient des fonds importants à l’extérieur des Etats-Unis était fiscale, en ce sens que ces entreprises commencent à payer des impôts dans le pays de la filiale au taux de l’impôt sur les sociétés de ce pays, puis en payent une seconde fois, lorsqu’elles rapatrient des fonds aux Etats -Unis dans les comptes de la maison mère, au taux de l’impôt sur les sociétés américain soit 35 pct. Or, dans beaucoup de pays au monde, le taux de l’impôt sur les sociétés est inférieur à 35 pct, et donc les entreprises avaient intérêt à y laisser leurs fonds.
Le fisc américain a ramené exceptionnellement pour un an le taux de l’impôt sur les sommes rapatriées de 35 à 5.25 pct. L’estimation des retours de fonds aux Etats-Unis, provoqués par cette mesure, est d’environ 400 milliards de dollars, une somme énorme, double de celle prévue à l’origine, et qui donc va bien réduire la dette américaine. Cette somme va, d’une part, générer 20 milliards de dollars d’impôt et va, d’autre part, contribuer à la croissance américaine pour 1pct sur deux ans. D’ailleurs, le déficit du budget américain fin septembre vient de baisser spectaculairement de 413 milliards de dollars en 2004 à 317 en 2005 !
A cette occasion, les Etats-Unis se sont aperçus que leur politique fiscale encourageait l’évasion fiscale au profit des pays étrangers et aux dépens des emplois aux Etats-Unis. On estime que les sommes rapatriées pourraient créer 700 000 nouveaux emplois aux US l’an prochain. Le débat politique est donc maintenant de savoir si on ne devrait pas prolonger cette mesure indéfiniment pour favoriser la création d’emplois.
En ce qui concerne l’Europe, les taux d’impôts sur les sociétés dans les pays riches sont semblables à ceux pratiqués aux Etats-Unis, et donc le phénomène de maintien à l’étranger de fonds doit y être similaire. Nous ne sommes donc pas, en principe, touchés par le rapatriement effectué par les entreprises américaines ; par contre, la question du rapatriement des fonds laissés à l’étranger par les sociétés européennes et celle de la création d’emplois potentiels corrélés est tout aussi pertinente.
Ne devrions-nous pas faire de même, puisque ça crée des emplois ? Thierry Breton, un peu de "taxation créative", svp...