lundi 31 mai 2010 - par denis cotte

Projet de loi Lagarde

Où en est-on exactement avant la seconde lecture par le Sénat prévue le 21 juin 2010 ?

Après avoir été adopté en première lecture le 17 juin 2009 par le Sénat et modifié le 27 avril 2010 par l’Assemblée Nationale, le projet de loi Lagarde portant réforme du crédit à la consommation est programmé pour une seconde lecture devant le Sénat le 21 juin 2010.
A ce stade de la discussion parlementaire, nous pouvons effectuer une première analyse des nouveautés de ce texte, qui comprend trois avancées indéniables, deux mesures pour l’instant en trompe l’oeil du fait d’une absence évidente de garde-fous, et un manque cruel concernant la mise en place d’un fichier positif en France.
 
Les trois avancées indéniables :
  • La réforme du mode de fixation des taux d’usure, qui prévoit désormais une détermination de leur niveau en fonction du montant emprunté et non plus en fonction du type de crédit utilisé (prêt personnel amortissable vs crédit revolving) permettra une plus large diffusion des prêts personnels amortissables, qui étaient auparavant très fortement dissuadés par un niveau des taux d’usure deux fois plus faibles pour ces produits que pour les crédits revolving.
  • L’inversion du mode de fonctionnement des carte de fidélité - paiement qui devront désormais obligatoirement avoir une fonctionnalité ’au comptant’ activée par défaut (le paiement ’à crédit’ ne sera possible que sur demande expresse du client) provoquera un ménage salutaire parmi les millions de cartes actuellement en circulation, à l’issue duquel seules les meilleures cartes pourront survivre.
  • La suppression de l’escompte obligatoire devant être accordé aux consommateurs qui ne souhaitent pas bénéficier d’une opération de crédit gratuit proposé par un commerçant (et qui préfèrent donc régler leur achat ’au comptant’) , réduira fortement le coût de ces opérations pour les distributeurs ; grâce à cette mesure, le crédit gratuit va donc pouvoir se développer comme dans les autres pays européens, et il ne sera désormais plus exceptionnel de se voir proposer des crédits gratuits sur des durées pouvant aller jusqu’à 36, voire 48 mois.
Pour plus de détail sur ces avancées contenues dans le projet de loi Lagarde, vous pouvez vous rendre sur le site http://moncreditpropre.com, rubrique ’Avancées - Ce qui est acquis’.
 
Les deux mesures pour l’instant en trompe l’oeil :
  • La durée maximale de remboursement introduite pour les crédits renouvelables (3 ans pour les prêts inférieurs à 3 000 € et 5 ans pour les prêts dépassant cette limite) n’aura qu’un effet limité si cette notion ne s’applique pas à chacune des utilisations des crédits renouvelables : en effet, si elle s’applique au solde du compte, cette mesure ne permettra que de prohiber les barèmes de remboursement à échéances dégressives, dont la durée peut allègrement dépasser 100 mois (Cf. http://moncreditpropre.com, rubrique ’Alerte - Addiction’).
  • La proposition obligatoire d’un prêt personnel alternatif en cas de proposition d’un crédit renouvelable servant à financer l’achat d’un bien de plus de 1 000 € : aujourd’hui, la présentation du coût total des remboursements d’un crédit revolving peut encore trop facilement être flattée par rapport à celle pouvant être faite en prêt personnel. Si cette mesure n’est pas accompagnée des garde-fous indispensables devant préciser très exactement le détail des deux propositions ’concurrentes’, ses conséquences pourraient être l’exact contraire de celles recherchées par le législateur ; en l’état actuel du projet de loi, elle pourrait en effet favoriser le crédit revolving au détriment du prêt personnel amortissable. (Cf. http://moncreditpropre.com, rubrique ’Alerte - Ambiguïtés’.
L’absence de fichier positif en France :
  • Le projet de loi crée un ’comité de préfiguration’ permettant une éventuelle mise en place d’un fichier positif en France dans des délais restant à préciser. Or, le fichier positif est le seul moyen de lutte contre le surendettement actif, dû au comportement boulimique de certains consommateurs. Il permet en outre de lutter plus efficacement contre les fraudes dont sont actuellement victimes les établissements de crédit, en rendant plus difficile le maquillage de l’identité d’un candidat emprunteur. Presque tous les pays européens ont désormais un fichier positif, et quand ce dernier est géré par la Banque Centrale du pays concerné, toutes les garanties de sérieux concernant la constitution, la gestion et l’interrogation de ce fichier sont présentes : il serait donc de salubrité publique que la France adopte également ce moyen de prévention efficace d’une partie du surendettement (dossier spécial ’fichier positif’ à venir prochainement sur le site http://moncreditpropre.com).
 
Le projet de loi Lagarde va dans le bon sens ; il doit toutefois encore être précisé (par la définition de garde-fous permettant que les principes de ’durée maximale de remboursement’ et de ’proposition de prêt personnel alternatif au crédit renouvelable’ aient une portée réelle) ou complété (par la création rapide d’un fichier positif) si les pouvoirs publics souhaitent régler définitivement certaines causes du crédit facile et trompeur, sources de bien des cas de surendettement.
 


6 réactions


  • Daniel Roux Daniel Roux 31 mai 2010 11:27

    Ce que fait Lagarde ne peut pas être positif, pas plus aujourd’hui qu’hier. N’oubliez jamais qu’elle est le ministre des banques et qu’elle agit sous les ordres de Sarkozy Président et Chef du gouvernement.

    Elle ne supprime pas le crédit révolving dont le nom même, inutilement anglo saxon, indique sa nuisance.

    Elle ne fixe pas de taux d’usure mécaniquement proportionnel au taux de base (par exemple 3 fois le taux interbancaire). Nous restons dans un régime arbitraire.

    Le fichier centralisé n’est toujours pas en place. Il rendrait enfin les organismes de crédit directement responsable de mener des gens, faibles ou aux abois, au surendettement ce qui annulerait automatiquement leur droit à remboursement.


  • tmd 31 mai 2010 12:10

    Un fichier positif, c’est absurde. Si je fais un prêt, si je le rembourse correctement, que je paye toutes mes échéances, résultat je suis fiché ! Assez de cette victimisation des personnes qui vivent au dessus de leurs moyens.

    La seule solution pour responsabiliser les organismes prêteurs, c’est la possibilité de faillite personnelle (comme elle existe en Alsace). Les commissions de surendettement, qui proposent les rééchelonnement de dettes ne servent qu’à protéger les prêteurs, pas les emprunteurs. Pour protéger le prêteur, il faut lui laisser l’autorisation de faire faillite. Dans ce cas, plus de rééchelonnement de la dette : les prêteurs perdent définitivement tout l’argent qu’ils ont prêté. Et l’emprunteur repart vraiment de zéro (pas de moins quarante mille). Voilà de quoi rendre les organismes prêteurs responsables de ce qu’ils prêtent, et à qui ils prêtent.


    • xa 31 mai 2010 17:11

      Le fichier positif permet un contrôle a priori des emprunteurs.

      Dans les pays utilisant ce principe, l’interrogation permet d’obtenir un accord d’une autorité supérieure et extérieure à l’organisme de crédit (juste un OK / KO) ou d’obtenir une information de type « xxx crédits en cours », ce qui permet de vérifier avec le client la présence des bonnes informations liées à ces crédits (typiquement, l’oubli du crédit magasin que beaucoup ne considère pas comme un crédit en cours)

      "La seule solution pour responsabiliser les organismes prêteurs, c’est la possibilité de faillite personnelle"

      Cresus travaille beaucoup en Alsace-Moselle. Ce qui démontre que l’existence de la faillite civile ne règle pas ni le problème du surendettement ni des crédits trop faciles à obtenir.

      Pour une raison évidente : la possibilité de faillite civile nécessite la bonne foi du débiteur. Et cette bonne foi n’est pas toujours évidente à défendre.


  • BA 31 mai 2010 21:51

    Combien d’actifs pourris les banques de la zone euro possèdent-elles ?

    Selon la Banque Centrale Européenne, les banques de la zone euro ont dans leurs livres 195 milliards d’euros d’actifs pourris.

    Vous avez bien lu : 195 milliards d’euros d’actifs pourris.

    Ce sont de soi-disant « actifs », mais leur valeur réelle est égale à zéro.

    Quand le patron d’une banque européenne vient frimer devant les caméras de télévision, quand il prétend que sa banque est saine, quand il raconte que sa banque est solide, ne le croyez pas.

    Les patrons des banques de la zone euro sont des menteurs.

    Les banques de la zone euro ne sont plus que des banques zombies.

    Contribuables, préparez-vous à payer.

    http://fr.reuters.com/article/businessNews/idFRPAE64U0Q520100531


    • frugeky 31 mai 2010 23:48

      195 milliards d’actifs pourris au niveau européen ?
      C’est largement sous évalué à mon avis, qui n’est sans doute que fantaisiste, mais j’insiste. Ca ressemble plus au chiffre des actifs pourris des seuls établissement français !


  • BA 1er juin 2010 07:17

    Septembre 2008 : première vague de la crise financière.

    Juin 2010 : deuxième vague de la crise financière.

    Les banques de la zone euro vont maintenant subir la deuxième vague.

    Tsunami ! Tsunami !

    Lisez cet article :

    Les banques n’en ont pas fini avec les dépréciations, dit la Banque Centrale Européenne.

     

    Les banques de la zone euro risquent de devoir inscrire dans leurs comptes 195 milliards d’euros de dépréciations supplémentaires d’ici la fin 2011, ce qui constituerait la deuxième vague des pertes causées par la crise financière et ses répercussions, estime la Banque centrale européenne.

    Dans son rapport semestriel sur la stabilité financière, la BCE ajoute que les finances publiques représentent actuellement le risque le plus important pesant sur la stabilité de la région, les dettes et les déficits continuant de perturber les investisseurs tandis que les émissions massives prévues par les Etats risquent de restreindre l’accès des entreprises et des banques au marché du crédit.

    Tout en constatant que des menaces d’interactions défavorables entre le système financier et les finances publiques sont déjà apparues, la BCE note que les nouvelles mesures adoptées pour combattre la crise ont considérablement réduit les risques de contagion.

    « D’importants déséquilibres budgétaires demeurent et il est de la responsabilité des gouvernements d’affronter et d’accélérer la consolidation budgétaire afin d’assurer la soutenabilité des finances publiques, non seulement pour éviter le risque d’un étouffement de l’investissement privé mais aussi pour instaurer les conditions permettant une croissance économique durable », a déclaré le vice-président de la BCE, Lucas Papademos.

    Evoquant une « deuxième vague » de dépréciations liées à la crise financière, il a précisé que la BCE estimait les besoins de provisions des banques pour couvrir les pertes potentielles à 90 milliards supplémentaires en 2010 et 105 milliards en 2011.

     

    http://fr.reuters.com/article/businessNews/idFRPAE64U0Q520100531


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