samedi 1er décembre 2012 - par Un partageux

Un éléphant blanc pour le jumelage de NDDL

«  Au début des années 1960, les responsables économiques décident de développer un véritable aéroport, de manière à faciliter les relations d'affaires [...]  » Jusque là tu connais la chanson. Elle a souvent servi.

«  [...] mais il faut attendre le début des années 1970, pour qu'un projet solide voit le jour, alors qu'un tel service existe depuis des années dans les trois autres chefs-lieux de département [...] » Tu connais la chanson. Vous êtes rétrogrades alors que vos voisins sont modernes avec tous leurs zaéroports ! Le chantre oublie de préciser qu'avec dix zaéroports — rien que ça ! — autour et dans le département, pas un seul citoyen n'est à plus d'une grosse demi-heure heure de l'un d'eux ! 

« Cette lenteur a certainement favorisé l'importance de l'opposition à sa réalisation [...]  » Ce n'est pas son inutilité, son coût pharaonique et la destruction de terres agricoles...

«  Les opposants [...] brandissent une argumentation [...] qui ne paraît guère convaincante : l'aérodrome ne bénéficiera qu'à un petit nombre de privilégiés, de patrons, et non à la masse des habitants [...]  » Ben ouais, toi aussi, tu prends l'avion tous les jours pour aller pointer à l'usine, au bureau ou à Pôle-Emploi. 

« [...] il manque une vision réaliste des choses, une compréhension des réalités économiques du monde actuel, de la hiérarchie des urgences économiques.  » Le chantre n'a pas de mots assez durs pour flétrir les opposants à cet aéroport et les braves gens qui n'entonnent pas la chanson du progrès. 

Tiens, je te remets quelques louches de sa touchante compréhension de ceux qui ne pensent pas comme lui : « cette lenteur dans la prise de conscience [...] ce repli frileux sur soi, sur ses habitudes, sur ses intérêts particuliers à courte vue [...] une insuffisance de dynamisme économiquement suicidaire [...] son insuffisance d'ouverture d'esprit à ce qui se passe autour de lui [...] » Les opposants à un nouvel aéroport ne sont pas loin d'être des demi-débiles... 

Tu ne l'as peut-être pas deviné mais il n'est pas question de Notre-Dame des Landes et cela n'a pas été écrit voici peu mais en 1986 à propos de l'aéroport de Brie-Champniers près d'Angoulême en Charente. 

On pourrait continuer à citer ces propos de bistrot juste avant la fermeture vespérale mais il est plus intéressant de savoir ce qu'est devenu l'aéroport de Brie-Champniers.

Des mécréants doutaient fort que l'aéroport allait « accroître les atouts de l'agglomération ». Les Paysans Travailleurs (des ancêtres de la Confédération paysanne), des syndicats ouvriers, la gauche dont le Parti socialiste, ont manifesté, occupé les lieux. En pure perte. 

Ouverture de l'aéroport en 1984. Au début vols réguliers vers Paris et Lyon. Le contribuable paie le déficit d'exploitation de l'aéroport sous-utilisé. Puis la SNCF supprime les passages à niveaux de la ligne Paris-Bordeaux, c'était prévu de longue date, et les vols réguliers vers Paris se font bouffer aussitôt par le train. L'offre ne crée pas la demande... Reste la destination Lyon. Le contribuable paie le déficit d'exploitation. Puis la compagnie aérienne bat de l'aile et cesse son activité à Angoulême. Le contribuable paie le maintien en survie de l'aéroport. 

Après un temps mort on finit par appâter Ryanair, compagnie aérienne à bas coût. Qui demande et obtient un million et demi d'euros de travaux. Financés par le contribuable. Qui demande et obtient huit cent mille euros d'aides marketing pour faire voler ses navions. Payés par le contribuable. Mais c'est pas assez et, après quelque temps d'exploitation, Ryanair demande encore cent cinquante mille euros de plus. Le Conseil général de la Charente trouve que ça commence à faire trèèèèèèèèèèèès beaucoup et refuse. 

Ryanair, fâché, part sans prévenir. Le contribuable, bon enfant, paie à nouveau l'entretien d'un aéroport qui sert aux corbeaux et parfois à quelques planeurs ou avions de tourisme. Les éléphants blancs ne sont pas l'apanage de contrées africaines pillées par Bolloré.

Aujourd'hui on a trouvé Flybe, une compagnie à bas coût, qui devrait ouvrir une ligne en 2013. Pas toute l'année, faut pas rêver, juste durant la saison touristique. Vers l'Angleterre. Ou peut-être l'Irlande. On ne sait pas encore. Mais ce qui est sûr c'est que le contribuable devra encore payer les aides marketing demandées. Et l'entretien de l'aéroport.

Tu me diras que plaie d'argent n'est pas mortelle. Surtout si ça développe l'économie et que ça stimule la croissance. Aie ! Ouille ! Ouh, là aussi docteur, ça fait mal ! L'aéroport a été bâti pour des entreprises pleines d'avenir, porteuses de croissance et pourvoyeuses d'emploi... aujourd'hui toutes défuntes après avoir défrayé la chronique sociale par leurs licenciements massifs. Et, réponse subsidiaire à la question que tu n'as pas posée, elles n'ont pas été remplacées par de prometteuses jeunes pousses. 

Le jour où l'on décidera de fermer Brie-Champniers — et ça viendra car la planète entière se demande bien ce que la France peut foutre de cent cinquante aéroports ! — le contribuable paiera encore parce que le terrassement pour en refaire des terres à blé ne sera pas gratuit. 

 



5 réactions


  • joelim joelim 1er décembre 2012 11:27

    Les gens qui ont acheté près de l’aéroport actuel en pensant qu’ils feraient une grosse plus-value quand le nouvel aéroport ouvrirait (because moins d’avions près de chez eux), sont scandalisés qu’on puisse mettre des bâtons dans les roues de leur projet.

    Va falloir qu’ils s’y fassent : personne ne veut payer pour que des miettes aillent récompenser leur spéculation immobilière.

    Car oui, c’est bien l’argument ultime de ceux qui veulent qu’on paye cet aéroport inutile. Ainsi le Président du Conseil général de Loire-Atlantique ose écrire dans agoravox : 

    « Je ne peux imaginer que les 42 ooo habitants qui subissent les nuisances de l’aéroport actuel les endurent 60 ans encore avec encore plus de mouvements comme le souhaiteraient certains, qui, eux, ne sont pas soumis à une exposition au bruit de cette intensité. »

    Perso j’habite près d’un aéroport et ça ne gêne pas vraiment tant que les mouvements s’arrêtent la nuit. 

    Non, la vraie raison de leur volonté et de leurs violences, c’est la spéculation, le fric que les amis et les soutiens vont se faire grâce à la gabégie qu’ils veulent nous faire financer !

  • mitra 1er décembre 2012 12:26

    Dans la liste des éléphanteaux blancs, on peut aller fouiner aussi l’histoire des aéroports de Metz-Nancy-Lorraine, et Chalon en Champagne (un peu moins flagrant pour Chalon).

    Même phraséologie à l’œuvre.

    Sinon, juste un petit rafraîchissement géographique où l’on peut s’apercevoir que Saint-Nazaire est à 60 km de Nantes...Il y a aussi un aéroport à St Nazaire.


  • alinea Alinea 1er décembre 2012 14:01

    Et chez nos voisins espagnols ? Un aéroport qui n’a jamais servi !
    Les bas coups (! !!) des anglophones easy jet et ryanair est un scandale, et à tous les niveaux ! À quand le kérosène aussi cher que le super++ ? La désobéissance civile pour le paiement des impôts ? Le boycott ?


  • TSS 1er décembre 2012 18:23

    Quand je vois que la France compte 3 fois plus d’aeroports que l’Allemagne et que la

     plupart des aeroports regionaux ,dont les deficits sont payés par les contribuables, devraient

    être fermés faute de trafic,je me demande à quoi peut servir NDDL... !!


  • paul 1er décembre 2012 18:53

    Au BTP : Vinci, Eiffage, Bouygues,... appuyés par les Politiques qu’ils financent .

    La politique de l’offre - au profit des grandes entreprises - est généralement soutenue par la droite, au détriment de la politique de la demande au profit des salariés .
    C’est pourtant ce qu’à fait encore récemment Hollande en déclarant qu’il faut soutenir la politique de l’offre . A la grande satisfaction des libéraux comme Patrick Artus ( banque Natixis ) .
    « C’est la première fois qu’un dirigeant socialiste se présente avec un programme centré sur l’offre . C’est historique ! »


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