mercredi 16 novembre 2011 - par Roland Gérard

C’était les assises chrétiennes de l’écologie

Bientôt ce seront 100% des organisations, quelque soit leur nature qui se pencheront sur la question de l'écologie. On ne peut ressortir que très confiant en constatant comment le monde chétien prend l'affaire en main.

Elle affronte les multinationales, il inspire les faucheurs volontaires, il dénonce l’oligarchie et en appelle au réveil démocratique, Marie-Monique Robin, Jean-Baptiste Libouban, Hervé Kempf… en voilà trois, il y en avait beaucoup d’autres ; des précurseurs comme Jean-Marie Pelt, Pierre Rabhi ou Bernard Durel…, des moins connus de nos cercles mais connus d’autres et tous pleins d’une conviction : c’est l’heure de l’action. Il y avait 1300 participants aux assises chrétiennes de l’écologie à Saint- Etienne les 11, 12 et 13 novembre, on pouvait y vivre un authentique moment d’EEDD.

 « Soit on mange des pommes bio, soit on ne mange pas de pomme »

 La conférence de Marie-Monique Robin et de Claude Aubert a été un des temps forts de ces Assises. « Savoir, c’est pouvoir » c’est ça qui l’anime la journaliste qui vient de publier « Notre poison quotidien ». Nous étions plus de 500 à l’écouter et beaucoup de bras se sont levés quand elle a demandé : « Qui a vu ou lu le monde selon Monsanto ? ». Impressionnant comme son travail a une répercussion dans l’opinion et impressionnante sa conviction, sa précision, sa détermination. Si certains dans le combat ont besoin de trouver une héroïne, ils peuvent regarder de ce côté. Dans sa bouche le politiquement correct n’a pas sa place : « l’industrie chimique a systématiquement caché la toxicité de ses produits », « en sortant d’ici vous devez tous jeter vos sucrettes ! ». Pratiquement tout le monde a levé la main quand elle a demandé qui connaissait une femme ayant eu un cancer du sein. MMR n’hésite pas à nous donner des lignes de conduite : « soit on mange des pommes bio, soit on ne mange pas de pomme ».

 L’irritabilité des enfants

 Ce qu’elle dénonce est tout simplement effarant, études bidons, experts des agences de sécurité alimentaire en plein conflit d’intérêt, tant nombreux sont ceux qui ont des liens avec l’industrie chimique. Elle nous dit des mots que nous devons tous connaître maintenant, c’est une haute exigence : « aspartam », « perturbateurs endocriniens », « effet cocktail »… Quand elle a demandé combien de personnes avait encore du Roundup chez elles, je n’ai vu que deux timides mains se lever, dans l’erreur peut-être, mais courageux les gars ! Claude Aubert en a rajouté une louche avec calme et précision : « d’années en années de plus en plus de fruits et légumes présentent des résidus de pesticides », jusqu'à l’irritabilité des enfants qui est liée à la dose de pesticides qu’ils absorbent ! Il faut savoir qu’aux Etats-Unis la courbe d’espérance de vie est devenue plate. L’espérance de vie en bonne santé est de 63 ans en France, elle n’a pas augmenté depuis plusieurs années et diminue dans plusieurs pays d’Europe.

 « Notre métier c’est de fabriquer des cigarettes et du doute »

 Dans le jeu des questions réponses avec la salle, MMR a dit : « il y a un système qu’on appelle la fabrique du doute ». En effet quand une étude montre quelque chose d’ennuyeux pour le business, l’industrie chimique va financer une autre étude montée de telle sorte, qu’elle va la relativiser ou la contredire. Ce n’est en fait pas très compliqué, il faut juste avoir les moyens financiers. Elle cite un cigarettier américain qui a carrément dit : « notre métier c’est de fabriquer des cigarettes et du doute ». Autre énormité dénoncée, ce grand mensonge présenté comme une vérité, mais qui ne repose sur rien : « Si on n’interdit les pesticides, il y aura 40% de nourriture en moins ». C’est dit partout et c’est faux. MMR va fort, elle dit : « les plats préparés sont des poisons », « les industriels de la chimie sont des criminels ». On se demande comment on peut en arriver là dans une démocratie ? D’ailleurs elle dit : « j’ai des ennemis très puissants qui ne me lâchent pas ». Elle prépare un nouveau film pour voir si on pourrait nourrir tous les humains, sans chimie dans l’agriculture, elle fait une souscription pour ça afin d’être totalement indépendante.

 « Spiritualité » demeure un mot suspect

 L’atelier sur l’éducation à l’environnement animé par Mario Veziant-Rolland des Eclaireurs Unionistes a réuni une dizaine de personnes. Très participatif, nous avons travaillé en petit groupe, sur les objectifs de l’EEDD. Aucun décalage avec le reste du monde de l’EEDD… Créativité, esprit critique, citoyenneté, nature, terrain… sauf sans doute le mot « création » assez présent dans les propos lors de ces assises et là aussi dans cet atelier. Un mot qu’on ne rencontre jamais dans les affaires de l’EEDD et qui surprend un peu. Il serait bon d’en débattre.  La conférence de Jean-Marie Pelt a du réunir quelque chose comme 800 personnes franchement impressionnant de voir ce gymnase de collège archi bondé. Nous ne rapporterons pas là le propos de JMP que nous connaissons bien. Il regrette que « spiritualité » demeure un mot suspect. Il dénonce le règne de l’argent, en appelle au partage. Il dit que nous avons gardé la vieille mentalité coloniale. Il parle aussi de l’affaire de l’incendie de « Charlie hebdo » qu’il juge intolérable, mais dit aussi qu’il faut éviter de froisser.

 La désacralisation de la nature

 On a beaucoup entendu le mot « nature » dans ces assises et bien plus que dans tous les colloques auxquels j’ai participé dernièrement. La nature est là vécue comme respectée et reconnue comme grand moyen de ressourcement. L’atelier de Bernard Durel qui démarrait par l’évocation de la conférence de Stockholm était très intéressant, il permettait de comprendre les sources de la « deep ecology » qui remonte aux travaux d’écosophie d’Arne Naes dans la Vienne des années 30. BD s’appuie sur un article de Lynn White "Les racines historiques de notre crise écologique". L’origine de la crise écologique est trouvée dans l’occident chrétien aux Xème et XIème siècles dans les liens entre l’activité des monastères et les progrès techniques. Pour la première fois dans l’histoire de l’humanité apparaît la désacralisation de la nature. BD dit qu’au siècle dernier on trouvait encore en Allemagne des bûcherons qui faisaient des rites avant d’abattre un arbre. Le constat c’est que la désacralisation de la nature aboutit au monde qui est le nôtre, à méditer. BD dit qu’il faut « réexaminer la religion de l’occident », « trouver une nouvelle religion ou repenser l’ancienne », « nous ré-enraciner dans les peuples de la nature ». Il parle des indiens, des bouddhistes, de Gandhi, des pensées où l’homme n’est pas au centre. Les chrétiens d’orient n’ont pas suivi cette voie et sont restés plus fidèles aux pères de l’église. François d’Assises fait figure d’exception en occident et Bernard Durel invite à s’emparer de cette opportunité pour trouver une nouvelle voie.

Grand respect pour le bouddhisme

Rentrer chez soi et se sentir moins seul dans la lutte pour l’écologie, c’est ce qu’ont du ressentir bon nombre de participants. Nous pourrons retenir que les chrétiens rassemblent et qu’ils ont un réel talent d’organisateur ; frais de participation peu élevés, logement chez l’habitant très efficace et sympa et tout qui commence et qui finit à l’heure, il y a les temps de l’échange entre tribune et salle… très professionnel. Nous pouvons dire qu’ils y vont et ne font pas mine en donnant la parole à des acteurs très engagés, connaissant bien les tribunaux comme Jean-Baptiste Libouban, la dimension de l’engagement est là. Marc Stenger, évêque de Troyes, prend des positions non ambiguës dans le n° de novembre de la revue « Prier », coorganisatrice des assises. Il dit : « nos sociétés doivent impérativement changer de cap ». Il déclare essayer de manger moins de viande, et dit « nous voyons bien que nous devons aller vers plus de frugalité… » . Il propose de : « passer d’une économie de la possession à une économie de l’usage » et dit que la « publicité nous accable ». A noter aussi que règne un grand respect pour le bouddhisme qui a été évoqué à de multiples reprises. Il régnait une très bonne ambiance avec beaucoup de sourires ce qui prédispose bien à l’échange. Nous retiendrons aussi un bon esprit d’ouverture, des dizaines de plaquettes du Réseau Ecole et Nature et du CFEEDD ont été diffusées. A signaler aussi l'intervention d'Elena Lasida économiste qui parle de DD en essayant de trouver des alternatives qui s'appuient  sur la « capacité créatrice de l'humain ».  Son livre : « Le goût de l'autre. La crise, une chance pour réinventer le lien  ».

Mandala

 Ces assises ont rappelé un peu à certains les assises de Caen : documentaire version 2011 de Hubert Reeves, réalisé et commenté par son fils Benoît (en rajoutant le mot écologie dans le titre) ; Claude Aubert était déjà présent, etc. Le colibri aussi… et puis des amis du mouvement scout, une adhérente du réseau...
Ceux qui étaient encore là le dernier jour ont pu récupérer une poignée de graines du mandala de Françoise Robert. Des liens se créent, des portes s’ouvrent, peut-être même que des préjugés tombent. Allez savoir !

 RG



17 réactions


  • Abou Antoun Abou Antoun 16 novembre 2011 19:39

    Par leur anthropocentrisme dément, les religions monothéistes (toutes variantes confondues) sont les principaux responsables du désastre écologique actuel (croissez et multipliez vous...).
    Les incendiaires jouent maintenant aux pompiers ?


    • amipb amipb 16 novembre 2011 21:42

      La religion n’a souvent été qu’un prétexte pour asseoir un pouvoir, les vrais religieux (moines suivant les enseignements ou autres mystiques), eux, sont souvent restés seuls, sans réel sphère d’influence politique et/ou économique.

      C’est bien le pouvoir qui corrompt : regardez la Chine, son idéologie est athée et sa morale très empreinte d’un confucianisme pourtant attentif à l’ordre et au désordre sous le ciel. Mais le pouvoir de l’argent est plus fort et entraîne des désastres dans tous les domaines : écologique, minier, routier, intellectuel, humain.

      J’ajouterai que cherche un responsable n’aide pas forcément à trouver le remède aux problèmes constatés.


    • Abou Antoun Abou Antoun 16 novembre 2011 22:05

      La religion n’a souvent été qu’un prétexte pour asseoir un pouvoir, les vrais religieux (moines suivant les enseignements ou autres mystiques), eux, sont souvent restés seuls, sans réel sphère d’influence politique et/ou économique.
      Enfin, oui et non ...
      Dans le cas de la conquête coloniale, on ne pouvait dire ouvertement que l’on allait asservir des peuples, voler leurs terres, s’emparer de leurs richesses.
      On partait donc les évangéliser, leur apporter la bonne parole, bref pour finir sauver leurs âmes.
      Les différentes églises se sont-elles élevées contre le processus, ont-elles protesté, ont elles apporté un démenti ?
      Les missionnaires étaient dans les mêmes bateaux que les militaires ; c’était bien l’alliance du sabre et du goupillon, qui n’a jamais été démentie même à l’époque post-coloniale.


    • roro46 17 novembre 2011 02:04

      certes, mais aujourd’hui on fait la même chose en étant laïque.


    • Croa Croa 17 novembre 2011 11:08

      Dans l’absolu c’est faux, bien que souvent vrai en pratique. La vérité c’est que des pouvoir politiques de toutes natures ont récupérés les religions, quitte à en détourner le sens. Certains cadres religieux se sont aussi octroyés souvent des pouvoirs, là encore souvent par détournement du sens premier de la religion en question.


    • Croa Croa 17 novembre 2011 11:14

      Ceci dit oui la religion chrétienne est anthropocentrique (les animaux n’ont pas d’âme !) mais elle prêche aussi la sobriété... Tant que tout ça ne vire pas à l’intégrisme elle offre certainement des ouvertures  smiley


  • Roland Gérard Roland Gérard 16 novembre 2011 19:56

    L’incendie est important il va falloir qu’on s’y mette tous. Il me semble que la prise de conscience et la volonté de changement sont là présentes dans les troupes que j’ai côtoyé. Je n’ai senti ni grandes certitudes, ni arrogance, mais une volonté de comprendre et d’agir, même par moment de l’indignation. à suivre.


    • Croa Croa 17 novembre 2011 11:20

      Oui, tout à fait !

       smiley Mais les prières n’y suffiront pas ! smiley

      Je vous invite à rejoindre l’alliance qui regroupe des gens de tous bords puisqu’elle est indépendante, surtout du système politique actuel, mais constitue aussi une ouverture à tous sans sectarisme aucun !


  • amipb amipb 16 novembre 2011 21:37

    Très belle initiative, bravo..

    Votre mouvement m’intéresse.


  • bert bert 17 novembre 2011 01:10

    « l’origine de la crise écologique est trouvée dans l’occident chrétien du X° siècle au XI° siécle »

    .....
    c’est vraiment n’importe quoi !!!! ???
    une thèse pour gogols .... d’un théologien protestant américain........
     


  • yvan deska yvan deska 17 novembre 2011 13:26

    Bonjour à tous et toutes

    C’était les assises chrétiennes donc, normal de parler de Saint François...

    Cette journaliste m’épate...Marie-Monique Robin !!! Je voudrais l’embrasser chaleureusement et lui dire merci . Son boulot est exemplaire. Grâce à elle, je suis heureux d’être français et fier de notre liberté d’expression ; Bravo à elle ! Ca ne doit pas être si facile de tourner des sujets aussi subversifs car dérangeants.

    Merci à Roland Gérard pour nous donner matière à réflexion.
    Ravi de savoir que les Chrétiens aussi sont très sensibilisés, voire engagés pour la protection de la nature. En tout cas en théorie...dans les discours...C’est déjà ça ! Tant mieux ! Toutes les bonnes volontés, soient-elle divines ou profanes, sont nécessaires pour relever le défi : sauver la biodiversité !
    Et les chrétiens qui ont encouragé l’éradication de la loutre ou du loup en France, sont-ils contents que ces créatures de satan reviennent dans le pays ? Se mobilisent-ils pour leur protection ? Si oui, c’est très discrèt..Alors après ces assises, amis chrétiens, levez-vous !

    Pour ceux qui s’intéresse au sujet : La protection de l’environnement dans une perspective chrétienne
    Pour une éthique de la Création : Bible et écologie
    Frédéric BAUDIN
    Directeur de Culture Environnement Médias (CEM)
    http://www.cemfrance.org/bibleecologie.pdf


  • yvan deska yvan deska 17 novembre 2011 14:21

    Bonjour à tous

    Merci à Roland Gérard qui nous éclaire sur le sujet de l’éducation à l’environnement et nous permet d’ouvrir nos horizons...La religion s’empare du sujet : tant mieux !
    Bravo et grand merci à cette journaliste courageuse et efficace dont les reportages sont excellents et...nécessaires : Marie-Monique Robin...Je vous embrasse !
    C’était les assises des Chrétiens...Hommage à St. Saint François..
    Souhaitons que les discours deviennent des actes. et qu’après les assistes, les chrétiens se lèvent ! Pour la protection de la biodiversité...Soyons optimistes !


  • non667 17 novembre 2011 14:38

    des écologistes qui omettent la composante démographique( facteur principal de pollution et de surconsommation /de produits renouvellables ? = du foutage de gueule ! smiley smiley smiley


  • njama njama 20 novembre 2011 17:09

    Les chrétiens pourraient déjà dire aux états-uniens de consommer un peu moins, de gaspiller moins, et d’arrêter des sales capitalistes, ça ferait du bien à toute la planète ...

    A force de trop bouffer, c’est là qu’il y a le plus d’obèses, à force de s’enrichir, ils appauvrissent le monde. Il y a quelques paraboles écologiques dans les évangiles ...


  • Patrick Samba Patrick Samba 21 novembre 2011 09:48

    Bonjour,

    information très intéressante. Apparemment ça veut « bouger » aussi chez les chrétiens.

    J’espère qu’ils suggèreront à Eva Joly de s’indigner au sujet de l’EPR de Flamanville. Qu’ils viendront sur les nombreuses places publiques de France qu’occupent les Indigné(e)s.

    J’aurais apprécié savoir ce que J-M Pelt juge intolérable dans l’affaire de l’incendie de « Charlie hebdo ». Lorsque vous écrivez « mais il dit aussi qu’il faut éviter de froisser », cela sous-entend qu’il a pris son parti, à savoir que les auteurs sont musulmans. Or on n’en sait rien. Mais en tout cas ce dont on est sûr c’est qu’il n’y avait pas de policiers en faction dans la rue. Ce qui est proprement incroyable alors que Charlie Hebdo avait annoncer la teneur de ce n° plusieurs jours à l’avance. Et que le Ministère de l’Intérieur ne pouvait pas ne pas se souvenir de l’affaire des caricatures de Mahomet.....


    • Roland Gérard Roland Gérard 21 novembre 2011 10:31

      Merci ça bouge oui, il y avait de l’intelligence, un grand sens des responsabilités, de l’engagement, j’ai plutôt confiance.

      le « éviter de froisser » je l’ai senti comme une réflexion d’ordre général. La question soulevée me semble être : comment ne pas se censurer mais aussi comment ne pas froisser des sensibilités. Je crois qu’il suggérait juste que c’était contre productif de heurter des sensibilités. Cela suggère tout un débat sur le limites de la liberté...gros chantier !


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